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OUVRES COMPLÈTES
de Théodore
Agrippa d'Aubigné
ŒUVRES COMPLETES
Agrippa d'Aubigné
PiibUka pooT U picmUn foii
it Notieet Kogre^ûjat, lUiérairt tf KNugra^ii^ue,
it Variante*^ d'an Commtiaain, Smit TabU
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Pir
MM. Eue. RÉAUME & de CAUSSADE
Tome deuxiârae
PARIS
ALPHONSE LEMERRE, ÉDITEUR
Q7H
TRAITTE
SUR
LES GUERRES CIVILES
[Inédit. Publié d'après le manufcrit origiiul de U G>Ueâion Tronchin.
Mss. d'Aubigné. T. VI, f« i.]
TRAITTÉ
LES GUERRES CIVILES
YANT efcrit ce premier Traitté,
|:^ l'obllination de mes amis, qui ef-
ra*ll peroyent contre toute efperance
de la modellie &dela fatiecé aux
ij tigres & aux loups, me le fie
(\^| jecter dans un fond de coffre pour
inendre (comme ils me remonf-
troyent) quelques plus grandes apparences de ce que
je prefageois. Ces efprics doux Ûfoyent avîdemeni
les lettres de la Cour, qui difoyent ainfi : le Roy
cil de bon naturel, il ne demande qu'obeiffancc ;
ce n'eft qu'une opiniaftretê de l'AfTeniblee, il y aura
de raccommodement. Tel & tel, & tel, qui font de
nos Grands refpondent pour le Confeil, qu'il ne vien-
3ra pas aux eztremitez ; on guérira tout. Il y a quatre
corps en France qui ont à contrecœur les voies ex-
Chapitre II.
c^■iXc£.^j^^ BSTS difiinâioD que aotu redou-
J5p/^^7^i\^ rions pour noftre expedidon n'a
plus efté nife que pour ceux qui
veulent eflre trompez, depuis le
'Va\. V 'Wï defannement des villes de Nor-
-^^^^~^^^ ' °'*'"''^i ^^ P'''^^ '^^ Saumur, pris
- — - — *-'/>— — -j' de mauvaifc grâce, eftanc offert
trop gracieufement, Gcrgeau'& Sanccrre, traittees
comme vous avez fçeu ; ces dernières places, parla cor-
rupdon de leurs Gouverneurs, eftoyenc mieux equip-
pees en marchandifc qu'en guerre, & comme nous
difions de long temps, eftoyent places de danger &
non plus places de fcureté. Celles-là & autres ayant
pris leur leçon de Saumur faifoyent de long temps
profellîon de defobeiffance aux AfTemblees & en ces
derniers jours crioyent l'obeilTance abfoluë au Roy; fe
mettants au mauvais abri de la diftinAion , elles ont
eflayé Q on n'en vouloic qu'aux rebelles, elles qui
eltoyent rebelles à l'ordre par lequel les Eglifes le
nuincenoyent. Après elles, voyez le craiccemenc du
PcùAou qui a mis bas [les armes], & puis de quel
prix eft la foy, en commançant à la promelTe de
Fontainebleau, & palTant par cous la traînés des
places jufqucs au dernier ; & les Gouverneurs qui
^ traittA sur lis «verb.es civiles.
en ont fait marchandife fçauront dire dans aa & jour
où ils en fônc.
Il faut dire en paflani que tout ceux qui s'atai-
buent la gloire de noflre ruine, quelques difputes
& jaloufie qu'il y ait encre les Jefuices, Capuchitis
& le Prince de Coudé, il faut qu'ils la cedeai aux
libéralité? ou prodigalités de la Ro^e mère exer-
cées principalement à Saumur. C'ell de là que les
Gouverneurs abandonnant le ferment d'union & les
règlements des AfTemblees, ont eflé i l'efcole du Coih
feil du Royi eux & nos Grands fc font battus à qui
auroit le gré du pernicieux changement. Ce gré,
dangereufe & nouvelle diftion, leur a fait en appa^
rencc avoir quelque gré vers les ennemis, mais en
effeâ leur a fait perdre le gré ft la créance des
peuples qui leur eftoyent commis.
CHAPITRS II. 7
leurt aftûxts, car nous <D voyoni, grecuàDieu, qui
n'ayim point rudement repouifê U recerche oet
rfaoléc [dut douces om efpoufi les amerei, fit Sont
nllicK & fou&nis i h vemieu^ AJlëmblee, & oinfi
pour avoir eflé diSérenn de procédures, donnent
leurs une* à Dieu & leur vie 4 1> publique relô-
luttoa.
Mail ceuzi^ ncfepouiroot rtleverdc UbcwriK
où il* {ê ùmc enfoncez, ni remenie les voila ^>rés
s'eâre ailsblez, ceux U doibvent changer lêurt
&dea ezculés en reco^ioiflàocv de leur pedié, &
donner glcnre à Dieu qui s voulu tffiidir leurs con-
lèila pour l'orgueil de leur maudite prudence, les a
(comme Salomon) de la tepidicé pouJTez i la glace,
& du panchant de l'amour du monde poulTez en un
précipice infernal.
A ce mallieur ont contribué pluûeurs faux Pafteurs
de l'Eglife, qui de mclme main onc diftribué le
pain de vie & reçeu le prix du fang, ou ceux qui
par les efperances onc fait mal plus long temps que
les premiers par la poUëOïon. Ceux là de qui le
nom fera efpargné juJTques à la jufle acienie de la
reûpifceace, doivent prendre leçon fur les fia Nota-
bles qui avouent promis l'inËune prévarication : des-
quels Dieu a nié les deux principaux en un jour, les
deux autres en un an, & les deux autres abandonnez
à l'apollafie, ont elle empefcbez par la mort hon-
ceufe de fâvourer les fruiâs & le îalaire d'iniquité.
Tels efpriis ont appelé modelUe l'adoucifTement
des chofea horribles; par celle modellie aSedee, ils
ont jette une planche fur l'abifine d'entre le riche
& Lazare, au moins en tant qu'ils onipeu, & monllré
peu de différence entre les religions, & partant la
mort de leurs martyrs ne dcvenoic qu'une témérité,
TK.A1TTË SUK LBS CUEEB.BS Cil
qu'ils nommoyent en leurs fermons les PapiAes Cato-
liques, l'Ante-Chrift Evefque de Rotnme, les Idolâ-
tres fimpIeSjS: ainQ eflâyoyent d'enterrer les erreurs
avec honneur, & il parotll qu'ils les ont &ic rebour-
jonner.
Ceux U meCne ont pris en hatne les efprics qui
voyant ces décadences, les reprenoyent de leurs che-
veui frifez, de leur empois, de leurs cooverfations
ridicules, des jarretières pendantes & habits exceC-
(ïfs de leurs femmes & d'eux. Ils appeloyent ces
repreneurs, & qui monftroyent au vif l'ellat où nous
fommes à prefent, du nom d'aigres & violents ; ils
nommoyent encor les fermes, curbulaats &brouilloas :
& ceux qui refufoyent les prefents de leur Prince,
ont efté mis au roole des orgueilleux & des fols,
■ifiLk-lire tncduydc rebellio
Chapitre III.
AissoNs les caufes à pirt pour
voir leurs effeéis. Le Confeil du
Roy cravaille grandement à faire
que les Prefches ne foyent point
mterrompus; on fait efcrire les
I plus fimplcs de la patience ima-
lire où ils font, pour ployer
les cœurs de ceux qui font en péril. Le Marefchal
Lefdiguieres doibr de rente toutes les fepraaines
quelque lettre pour difpofer les efprits du Dauphiné
à ne [prétendre] plus haut qu'a fait l'Anjou; le
PoiiSou, la Xiincongc & le Perigort. On fait par
toute la France figner par les corps & par les par-
ticuliers un ferment oppofé directement & mot à
moi k celuy que toutes les Egtifes de France ont
juré & figné plufieurs fois pour l'obfervation des
règlements. Le but efi d'accouftumer à la perfidie
aujt chofes politiques, celle qu'on leur minute pour
l'an qui vient, en la matière du faluc. On imprime,
on dit à l'oreille que les Princes font defabuzés de
pouvoir violenter les confciences & que les peuples
ont perdu cefte fureur qui les avoit rendus fauvages
aux maflacres paflez; à quoy on joinô doucement
que les Huguenots font devenus plus civils & def-
lO TRAITTl SUS LB8 GUBUaSS CIVILES.
niaifeE, & qu'il ne s'en trouvera plus à preuve du
feu comme au temps pafîË : meûâes quelques ima
d'entre nous cm dit que Dieu nous ayant oiié par
nos péchez le zele de foa nom & la conftance de
mourir pour fa caufe, nous devoit aufli ofter l'efpfr.
rance qu'il vouluft faire miracle pour nous.
Mais en l'une & en l'autre partie de ces fauflës
traditions Dieu nous a fait voir en deux manières
les marques de l'anciene vérité, foit en ce que
la barbarie des perfecuteurs n'eft point elleinie,
foit en ce que l'efprit de cooilance trouve encore
entre les hommes fes tefinoings. Cela eil miraculeui
& commencement de miracle, {comme a efcric qud-
qu'un) :
De tili caurt
Siftrmtt m co/ifiaaetj ou fi dort aux riguairt.
CKAPITK.I III. II
§1 ae perdront que les filt de pçxdidoii. Let Je^g»
d'Achëilles qui en a&e ville & ûlleurt ibnc fêrnûms
[Hiblics fur Lucrèce, fur le Livre Dtt trou la^f-
t^4 & fur celui du Threforier Valee; l'inveonon
diabolique dei Arminient, qui d'une dielê d'elcoU
aroyenc Ait un puù dans celuy des Eflati; lei
Doâeun de ceûe peftlfere lèfle, entretenu* & payez
pour St glilTer parmi nous avec l'ardcle adjouAé
nouvellement à leurconfeflîon, par lequel ils reprou-
vent toute deffence contre les Tyrans, feuil ce pour
la pure caufe de Dieu : coûtes ces chofes ont fait
mennr Satan, & Tes difctplcs s'eAann vantez que
l'ailê & la profonde pali auroyent elleinâ au
foyer des fidèles tout feu de religion, ils ont trouvé
que le repos de Capue, qui delh-uiTit l'armée d'An-
nibal, n'a peu corrompre les foldacs de Chrift. Car
encor en ces aftcs derniers vous trouvez les pre-
mières marques de l'Eglifc en fon enfance, foit à
voir les meimes barbaries qu'on dilbii eflrc elïeintes,
foit i faire mourir en s'esjomffant , foie à redonner
la mort avec foin & ceux que les accidents vouloient
tirer des mains des bourreaux, foit à mutiler les
corps à diverfes fois & à voir les proches exécu-
ter les proches parents, fur qnoy les exécuteurs ont
crié que le temps de gnce n'elloic plus ', foit aulll
d'autre cofté à voir les percs&Ies enfants avec mu-
tuels encouragements fe tenir bonne compagnie à la
mort; une mère follicitee de fauver la vie à l'enfant
qu'elle allaiâoit en faire prefent aux affafllns, &puis
ouvrir fon fein aux poignards & haches qui la déchi-
rèrent en quatre pièces , iniiruiteà fa fermeté parles
leçons d'un fien frère lequel fe voyant lié par les tueurs
l'elcria : Si ne fçaunex vous lier la veriii. Là on a
encor veu des marôrs eflayez par des morts lentes;
13 TS.AITTË SVR LIS GITB&B.BS CIVILES.
quelqu'un mis entre deux morceaux de bois affés
eflognez pour qu'il peut choifir la vie, s'il vouloit,
encre ces deux embrafleinents.
En « petit traitté&au iraictement qui commence
par la France , vous verrez que l'efprii de Dieu a
tousjouTE eu fa force, qu'il la communique k fon
Eglife, & puis qu'il l'honore des triomphes paSet :
il n'eft pas las d'elle, il la tient par û main & la
relèvera au-delTus de fes ennemis.
'tî^îcrv"*
Chapitke IV.
■ ASPA& Baroaec , nepveu du
< Cardinal de meline nom, un
des Confeillers de li Coi^re-
gation eftant (comme grand juriC-
confulce) du nombre des fept qui
I furent empruntez extraordiniire-
ment pour le procès du peiît
Capuchin à Romme, fut tellement ravi des veritez
& de la conftance de ce martyr qu'il quitta tous les
honneurs qu'il pofledoit ou efperoit, & mefmes celuy
d'envoyé pour Efpagne tenir un an le compte des
affaires de Chreftienté. Ce perfonnage ayant en raain
tous les Eflais particuliers de toutes les provinces
qui font en l'Europe occidentale, apporta toutes fes
defpeches, premièrement à Monlieur Defdiguieres,
qui le fit conduire par un Conful Briançon à Paris.
Il y avoit lors l' AlTembîee fecrette qui fe cenoit au
logis de Monfieur de Bouillon; Baronce s'y adrefla,
& pour eftre entendu h Compagnie luy donna Co-
miflaires les Sieurs d'Aubigny & de Feuguere,
M, D. S. E. Il defploya fur table pour chafque en-
droit des pays que nous avons coitez, deux liafles,
l'une portant pour titre Anes pacis , l'autre
Àrits belli. Les ComifTaires ont fait leur rap-
14 TK.itiTTt soi lEf CUI&ftBt CirtHs.
porc, cani en U fudite AfTemblee qu'en autres Pn^
TÎnciales & Générales, qu'ils n'avoyent trouvé pro-
vince, ville, ni perfonnes notables qui ne fuÎTeDE
deTignees en fes mémoires à converfion ou à eveifion.
Et pour ce que i l'ouvercure des paquets, l'Italien
demanda d'où il vouloit fçavoir les nouvelles pre-
mièrement & que les ComilTaires avoyent déliré
commencer par la parde la plus prompiement m^
nacee, ils ouvrirent Arrêt pacis apud Rkatos & puis
Artes Belli, U où eftoit depeinô tout ce qui eft
arrivé depuis; de là on voulut voir la province de
Poiftou pour l'intereft particulier du Poiôevin : li
parue une excellente peinture des places de feurecl,
de leurs Gouverneurs qui edoyent gagpiez & qui
eftoyent à gagner, & eft arrivé fort peu de choies en
, qui n'aye refpondu au projeft.
CHAPITKI IT. i;
Ibui, TOlU voftx encore deux uicres brinehes coi^
reitet l'une de l'uicre à {çaroîr foubs l'eniiiâioii
ftdHEpsooa de l'herefie i l'ivantage du Si^e Ronuin,
la deftruâion de couœa les R^ubliques au profit
det Sotnreraiiu.
En paflànt je coneny on mot qui eft foubi Yat^
dde de Berne, auquel eftant queftion de mettre tine
moitié de cell EIlû ibubi les mains d'un Prince, S
dit que ce Prince ell ami de l'Inquifition & qu'il
•ppitodra par elle au pays qui parie Roman i par-
ler bon Kamin. Quant à ce qui parle AlUnuàdj à
la venté, les mémoires portoyent de le diftribuer
aux cantcms Catholiques, mais il eftoit aifS i juger
en autres chofes que ce n'elloit point pour les Ùilër,
mais feulement pour fe fervir de leurs armes, pour
les partager après à Leopold & au duc de Bavieres.
Cell chofe notable que de voir de ce temps 1^ les
principes de l'Arminianlûne, leur fouveraine efpc-
rance pour venir à bout de la Hollande, & plus
eftrange que tout , de voir les perfonnes qui ailait-
toyeot ceiU fefte en Ton Irerceau. Le dcITein de
ceil efcrit ne peut exprimer en fa brièveté ce qui
lèroit bien requis pour faire taire les langues mer-
cenaires ou les cGEurs infidèles par lafcheté, qui
attribuent ce que nous voyons & l'AiTemblee & à la
ferme obfervation des règlements.
Vous verrez encor la raifon pouiquoy la querellé
des Huguenots devoit commencer par le Beam,
aflTavoir pour oder du voifinage d'Hefpagne des gêna
qui avoient la barre de leur reli^on enct'eua
& ta communiquation des Efpagnols , difficulté que
r^roche des Jefuites oflera. Je ne puis encor laiflër
paâêr l'excellente obfervadon qui eft de donner dés
le commencement, ou au moins defigncr les con&f-
l6 TRAITTS sur les GUERKES CI71LES.
quadons de toutes les bonnes nuifons de France
qui font profeflion de la Religion comme cho{è
utile pour faire armer à bon efcicnc contre les Héré-
tiques; là eft dit pour exemple que/onj telles coa-
Jifquations Ù- les Jûllieitears qui menaçoyeat let
Juges de ce qui eftoit arrivé à la Mercuriale ^ les Juges
dt France condamnoyent au feu avec horreur & fe
portoyent la/chement en la delivraace de l'Eglife.
Voila les termes des cayers.
El certes fi nous fommcs bien advertis des a£faires
de France, on trouvera qu'il n'y a homme qui aie
mille efcus raillant duquel la confifquation, û non
donoee, ne foit defignee pour le moins. Peut-cftre
qu'une raillerie d'un Couriifan en auroit bien ouvert
l'appedt : c'eft que l'Italien, de ceux qu'on appeloii
coyons de mille livres, demandoit à Monglar quel-
CHAPITRE IT. 17
fiûc quelque diftinâiOD en la Religion, pourronc eftre
eichudi, & c'eft une lettre qu'un Jefuîte de l4of^
acit KOvoyoic i un autre Allemand. Elle efi du Ror
■n Pape, aflcs imponanta pour efire in&ree an m
Heu:
« Trf« Saint Père
■ j^iifiju'il n'y a p<Hnt aetlleur commencenent que
cdujr d'une aâion tendanœ i la gloire de Dieu,
Voftre Sainâeté aura pour agréable que ma fnaûet*
■Tf™""'<*i i lôn entrée au GourememenE de l'Eglilc
Stiiue, lioic d'une suvre qui face non mcuns reluire
h pieté paternelle que croiftre les deroti {èntiinena
qu'il plaifi ^ Dieu me donner, Lei premières inftru^
dms que j'ay receuës en la foy & bonnes mœurs
ont etté des Percs Jefuices ; ils ont eu jufques i
prdêni la direAioa de ma confcience, dont je
demeure crés-fatisfait & deCreux de faire refenttr à
tout leur Ordre les eflèâs de ma bienveillance. Sur
quoy oyant que le procès de la canonization du
Bienheureux Ignace, inlUtuteur dudiiOrdre, efloit fait
ft qu'il ne reftoit que le vouloir de Voftre Sainâeté &
parfaire ce bon œuvre, j'ay bien voulu la fupplier,
comme je fay très aSe^iicufemenc, que fon bon plaifir
Ibit le déclarer & le meccre au nombre des Sainfls
que noftre mère Sainfte Eglife révère & honore
pour tels. Les faveurs que j'auray k recevoir, pour
pandes qu'elles foyeni, ne me feront point toutes À
telle confolation comme celle-cy feule qui outre les
benedîAions que j'en efpere, comblera de profperitez
monGouvcmemenc, La Providence divine qui infpire
les cœurs & en retient les mouvements, n'a pas
permis que cefte dévotion emprainie dans mon cœur
dés quelques années aie e(U plullofl manifeftee, refer-
TRAlTTfi sua LES CUBRB.SS CIVILES.
vant àyollre Sunâecf cefle aflion tuic cclebre, & à
moy le bonheur de lui faire une demande qu'elle
trouvera digne du Fils aiûié de l'Eglife. Ce titre non
moins gravé en mon ame que dignement procédé de
mes predeeelTeurs me donne une forte d'émulation L
l'avancement de noflre très Sainte Religion, à l' extir-
pation des Herefîes, me fait a&eflionner davantage
la difle canonizadon fur l'efpoir que j'ay que l'inter-
ceflîon de ce Bienheureux me fera un puiffant fecours
•i faire ce pourquoy Dieu l'a envoyé en ce monde :
à quoy tout ceft Ordre [s'ed] employé tant utile-
ment. Mon Royaume a eu cède benediftion que ce
ferviteur de Dieu fbit venu en ma ville de Paris
apprendre les Sciences, qu'au mefme lieu il aflembla
fes compagnons & commença fa Société i Montmartre.
J'efpere des nouvelles benediftions fi VoAre SainAeté
CRAPITB.K lY.
">
yicdences raiibns, par lefquelles depuis deux ans on
a emporté nos révoltez & mis à l'efpreuTe ceux qui
font demeurez debout : car au lieu qu'au temps
paflë, après les promeflês, on adjouftoit les menaces
légèrement, voici les termes de ces dernières faifons,
comme je les ay ouys eh ezcufe d'un ami que
l'apottafie m'a ofté, comme je les ay encore ouïs de
quelques Grands du Royaume travaillans à me per-
vertir, & comme plufieurs qui liront ceci auront
appris à melmes occafions. Voicy donc leurs propos :
Vous ape^ â perdre honneur^ Eflats^ maifons^familUs^
& les efperances de tout cela; vous voyei vos Grands
vaincus par leur avarice ou ambitions , ^rayei de la fin
de Monfieur l'Admirai & faifons par crainte & pru^
dence leur paix à vos defpens^ mais fur tout pour ce
qv^ils fçavent les menées de tous les Royaumes de
toute la Chreflienté tellement poinéïees à voflre
ruine f qu^ils ne fçavent quelle pièce porter au devant.
Tous vos Gouverneurs^ horfmis fort peu^ ont promis
Vobeiffance aveugle & tireront un beau rideau
d'obeijfance au devant de leur lafcheté^ & adjoufloient
à moy : Ce font chofes que vous fçavej cognoiftre
& prédire : apprenei à vous en fervir.
CHAP1TB.S T. ai
nudroit mieux tuer le fini en U nuifon de fon voifin
qœ de l'attendre en la fienue. Vous tvez tcu
{Aa^tit gcnercu:^ ce qu'ont fiûlli les Jefuitea dus
tous; quand Ut ont manqué en une entreprifis, il*
en relèvent quattre & fe vantent commuellement
qu'Us oni les coeur* de très puiflants Milords, nuia
fuitout des Dames d'Angleterre, pour leiquelles ila
font prières fecrettei, & entre les plus remarquablea
rendent bien le compte des Reformées plus alfé que
de cellet qui ont juré en leurs mains. Vous prencs
confiance en ce grand tblTé qui entoume voftre
héritage , mais l'yvroye dl en voftre champ, il ne
faut qu'un iàux Palleur pour en ouvrir un coin auK
loups de France & d'Efpagne qui, quoy que mon-
Urueux en voftre Ifle, font tous préparez i s'y loger.
Vous avez par voftre AmbalTadeur fait efclatter le
confentement de nos miferes ; vollre bon propos a
efté reçeu avec le defdain que Cadenet a rapporté
d'Angleterre, tnftniit par vos Papiftes qui lui ont
dépeint vollre Roy tout autre qu'il n'eft : & nous
tous enveloppez en mefme condition nous portons
aigrement le mefpris de voftre nation, pour ce que
nous avons efté lelinoins oculaires de voftre incom-
parable valeur.
MeiEeurs des Eftats, au milieu de tant de force
& de vertu qui ont efté bénites de Dieu, argu-
mentent tousjours du pafTé à l'advenir, & pour ne
perdre l'affiftance des François jugent froidement
& avec refpeft l'Affemblee de la Rochelle. Vray eft
que les particuliers ne laiflenc pas de faire leur
devoir, mais qu'ils fe fouvîennent qu'en la caufe qui
eft maintenant arborée, tout fervice de Papifte eft
périlleux, qu'ils regardent biea la dernière claufe
que les Arméniens ont adjouftee à leur ConfelBon, à
M TRAITTÉ SUR LBS GOBKRBS CIVILES.
fçavoir qu'il n'y a nulle deffencc légitime des fubjeCb
contre les Princes fouverûns, ni pour matière de
religion, ni pour ciufe que ce foît.C'eft aujourd'hui
furquoy travaillent principalemeni GrgQîus, Tileous
& leurs compagnons. Et en mefine lempi que celle
vennine fait efclacter leur fentence contre la juftice
de vos armes, en meûne temps voua aurez eflé priez
de France de les vouloir recevoir. Voyez-vous point
que les Jefuices, les Capuchins & telles gens font
touce la France, & en cefte requcfle diâaceurs & pr&-
lèntateurs. Marquez en quelle conlcience peuvent
combattre pour. vous vos Capitaines Papilles, fi ce
n'efl que leurs ConfelTeurs ayants befoln d'eux parmi
vous, leur dlftribuent difpence duPape pour guerroyer
contre l'Egllfe en bonne intention. Et ne trouvez pas
eftrangc que celle marcluiidilt vienne de Rommc?
CHAPITRE y. 23
les ferres donc il eft armé. Force gens de bien
ft sdyifez ont dilcouru ces jours fur Timprudence
qui paroift en Tirnudon d'un Prince qui ne fçauroic
fi peu regarder vers la France, mais la France avec
les avantages que la perfecudon luy donneroic, qu'il
n'y fift une brefche irréparable à jamais. D'ûlleuit
ce grand Q>rps des Eftacs e%al aux plus grands, aux
forces de la terre, & ikns compagnon en celles de
la meryce Corps (di je) qui n'a encor monftré nulle
baflèflè, ni ingradcude envers les Cens, efpoufera
£ms doubte la caufè de fon chef de guerre bien
aymé. Après que nous avons aflez adiniré l'audace
ft l'imprudence de ce fi^e prétendu, il vient une
voix qui dit : Ne trouvêj point cela tant eftrange,
c^eft que les affaires de la Chreflienté font en unpoinâl
qxiainfi comme ainfi^ il faut rompre avec les Eftats*
Dieu vous preferve, Meffieurs, que à cefte rupture
vos Papiftes n'emportent quelque pièce avec eux.
Et rAllemagne eft fi empefchee qu'ils n'auroyent
pas loifir de m'efcouter ; auffi n'ay je rien à dire de
ce codé là, mais ouy bien à la troupe dormante des
Suifies Reformés que [je] ne veux point convier à
courir au mal d'autruy, mais bien à s'efveiller pour
celuy qui les approche, Ils fçavent mieux que moy
ce que leur importe le fait de la Yaltdine, quelle
fureur ils ont veuë à leurs voifins, quelle afflidion
en leurs frères, quelles defloyautez en ceux qui con-
joints par ligue & par nadon font disjoinds par
religion, & par une religion qui met tous les fer-
ments au vent. Ils auront fçeu auiC que le Pape
qui cy-devant a partagé les mers de l'Occident, fait
maintenant le partage entre les Roys de France
ft d'Efpagne, le DucdeSavoye &les Cantons Papilles,
de tout ce qui voifine la France, & que le Pape met
«4 T&AITTK SDK LIS CUBK&BS CIVIIBS.
«q interdiâ. Vous en avez Ici premier* aclvis&T9ui
Kitcx biea coft Ici commcncemenn. J'ay un pegc
CtKiipœ à vouB faire duquel je vous prie me pv—
neicre U privaut^.
Un Jour MonTieur de ViUero^ donnant 4 difiier k
trài ou quatre de fes amis, fur le &uiâ (coBune fi
le bon via euâ efchauSë les privautés) quelqu'un
luy demanda : Monfieur^ il fûul qitë voiu Joyi U
pHu grtmd trompeur du itumd*, puifyu» c'efi vous
qui maniei taiu <f affairas ta h France, & celUe d$
Uut Ut wfiiu. De gractj ditet aout qui efi-ce df
tous noj eftnutgeri que vous trompei avec pimt df
difficulté? hvty apréi avoir monllré par un ris que
la francbife ne luy defplaifoit point, mit en peine la
compi^nie derefpoodre à la queftion. Enfin comme
l'un attribuoit les meilleures cauiionf aux Italiens, un
CHAPIT&B T« ^5
mit les propos de oefie compagnie, fur lelqiièls |e
pms la Jiaidieflè de dire auzSoiflès, que s'ils n'ont
pas obcenndei Roys ce qu'ib ont accouftumé, qu'ils
s^en preneot au dungpBienc de leurs manières
iL fefidudoas, non pas que j'eftime qu'ils ayent etH
YOjré en la Cour, pour y apprendre leors affiûresi
mais on leur a drefTé cefte efcole chez eux par les
dhrers Ambaflàdeiuv, qui ont gagné plus d'autorité
que de couftume, quand ils en devroyenc avoir moins,
agiflaiirt de nutuYaife fby . Les anciens Suifles n'euflênt
point Ibufiert les yiUo^neries qui ont mis en fàng
UValceline ft le pays en defcdadon; il faut que
quelques udlitex pardculierc;|i ayenc £ût fupporter
qu'en malcraittant les Grifons ils ayent demandé
congé de bien faire aux pedcs Cantons. Advifez,
Suiflès autrefois redoutez, où vous mené cefte fer-
vitude & combien vous devez desferer à des gens
qui fe monftrent par leurs deportements plus toft
AmbaiTadeurs du Pape que du Roy; préparez vous
aux diftinâions de la France : ces difÛnâions, fi les
prefents particuliers opèrent, feront auflî bien qu'à
vos voifins des exftindions.
J'ay peu à dire aux Venidens pour ce qu'ils fe
rendent différents en caufe de religion & doivent
eftre les derniers attaquez, mais les querelles des
Republiques porteront fur eux feuls les divers far-
deaux qui nous aiu'ont accablez.
J'achève par les Genevois, qui comme les pre-
miers en rhonneur d'avoir femé l'Evangile chez
leurs voifins, font auifi les premiers en haine & fur
lefquels on doit defployer le plus d'inhumanitez.
Dieu leur a fait prefent de vigilance & de courage
abondamment, mais c'eft à cefte fois qu'en luy de-
mandant leur pain quotidien, ils doivent compren-
»6 TR.AITTÉ SUR LES CVB&RBS CIVILES.
dre en cefte requefie k charité & unioa de leurs
voifîns, leur paix du dedans, de bons chefs, de bons
foldats, prévoyance, pourvoyance, fidélité à foy-
mefme, labeur lans fe lalTer, & celle refoludoD de
mourir de bonne grâce, par laquelle la vie demeure
en fon entier.
oicr donc le temps arrivé, où
les nifes de l'Ante- Chrift fc deC-
ployent en fureurs. Ce lion ru-
giflanc ou pldlofl ce faux loup
nous a fait fauter au colec contre
toute apparence de droit. Cent de
nos places de leureté font prifes,
en partie pour ce que les Gouverneurs les ont ven-
dues, & en partie pour n'avoir pas eu le loifir de
penfer avoir pour etinemis mortels ceux que nous
devions eftîmer percs & frères. Il n'y avoit pas
apparence que l'Eflat confervé par nous deuft s'em-
ployer ^ noftre perdition. On n'obferve peu ou
point de différence entre ceux qui lèvent les mains
au devant des coups ou ceux qui ont le ventre à
terre pour élire battus à la Turquefque. Il n'y «
différence de ruine entre ceux qu'on a fait voler à
l'effort ou ceux que l'on tient en mue, finon que ces
derniers efpereni l'avantage d'Uliffe, qui ell d'eftre
mangez les derniers. Je ne marqueray plus fmon que
l'on s'attache plus rudement i, ceux qui ont edé les
fidèles inftruments d'Henry le Grand ; marquez fuT-
louc que le Bearn, Nerac, Monuuban, Bergerac,
as T&AITTt CUR I,IS OUBaftBS CtVIIli,
Saine Jean d'Angeli & la Rocbelle font Hz villes où
ce grand Prince a mis à couvert fa jeunefle perfeco-
tee : ces villes ne lui ont pas feulement ouvert leurs
portes, mais leur fein pouKl.'efchauffer & garder,
mais leurs bourfes & leur pain abondamment. Ceft
en elles que aux accidents de maladie ou de blefliire,
auxquels ce Roy eflott fubjeft, prenoyent & la minuit
leurs Miniftres, meooyent femmes & enfants dedans
les temples, les faifoyent refonner de cris à Dieu
aux adverfitez de leur Chef bicn-aimé ou d' exulta^
rions en fa prDfpericé. Ce font ces villes defqueUes
{dus violemment on jure, on pratique l'entière
deftruftion. Henry le Grand & fou Pwty en
avoyenc eflevé quelques unes de bourgs en villes
& citez \ de villes on en fait des bourgs ft afin qu'il
t rien de Turquefque oublié, on en chingc les
CHAPtTB.1 TI. 39
or ùàiat qu'il [y] en a de deux lôrtet, l'une i la perfe-
cuDOD des mifeniblet, l'autre au mainden des affll^ :
k U première que vous voyez efcbautEér aujour-
d'huy les Princes, Setgtieurs, Gendlshommes & fol-
dacs qui lous ont efté comp^nons ou dilciplcs de vos
pères vermeux & encor de quelques ims de Toac,leiai
(latliaritei, leurs careffes, leurs cmbrafliidet Ae
fiot plus que pour joiier du poignard. Vous les
rofm braver & baver d'inveâivet, de mefpiit
ft d'aorotions à l'envi, pourchallêr bouk humuiiif
d'coire le* Françmt, ils exaltent leurs violences : les
plus grands les font ibniier i Romme, les autres ea
ù Cour ou en leur pays. Qu'ils r^udent bien la
louange qu'Us pratiquent, car quand ils auroyent
exterminé & chaflï de France le dernier de nous,
ils ne fe peuvent vanter linon que mille ont cité
yiâorieuz fur un. Voila une violence de populace
& du milieu de laquelle un foldat courageux fe red-
reroit avec honte &. horreur, voila cefle violence
que je maintiens ne fentir rien le Chevalier, mais
entièrement le bourreau.
Mais l'efpee du Chevalier efi ceinte pour la def-
Fence des pcrfonnes outragées, du pauvre, de la
vefve & de l'orMiti, pour retirer l'accablé quand là
venu eft offufquee par une foule de poltrons :
ft encore celte vertu de Chevalerie a Ton emptoy
contre les bedes farouches, les monftres effroyablû
ft l'injuliice des tyrans. Voila cefle féconde forte de
violence ï laquelle la bouche de Dieu a promis le
Royaume desCieux; c'ell avec eux que David s'ef-
gaye en les reveillant ainfî :
Oqitt tr quand il Sion fonira
Pour Ifriûlfteourt tBfafouffranet,
30 TB.AITTÉ SUR LES COBRRES CIVILES.
Quand Dieu mtttrafon peuple en délivrance,
Dtjoye eâoiu If nul jouyra,
Je ne veux poini fpecifier les vengeances que
Dieu excecuters par les mains de fes eofints, comme
elles font defpeinâes en cermes exprés auxPfeaumet
53, £8, 109 & 149, & autres. Je les lailTe chancer
aux Jefuites en leurs prières de quarante heure*
& aux infolentes cérémonies de leurs feux de joye.
Nous convions les gendarmes d'Ifrael à en prendre
la modetlie & non l'excès.
L'Ordonnance de Dieu nous appelle à deux fortes
d'armes, premièrement aux fpirituElles. Armez-vous
de toutes pièces comme les defcrit Saint Paul,
[ temporelles que voUre iullice,
CHAPITB.X YI. 31
leur multitude pour s'enorgueillir au bras de la
chair, autant de fois ils ont efté vainquus; mais
suffi ne dites pas comme Elie : // n*y a que moy
qui liayê JUchi h genotûl devant BaaL Dieu com-
mence à vous en monftrer plus de (èpt mille. Vous
{ères aflêz forts s'il fe met à voftre teflbe ou s'il prend
place de bataille en la bande qui le fouftient, mais
Q veut la diligence, il bénit les mains de ceux qui
jouiilènt des commodités de cefte vie uns en abîmer
ft uns s'y plonger, qui boivent au ruifleau courant
uns fe veautrer. Ce fut l'efpreuve des trois cents
de Gedeon, quand Madian fe desfit foy melines,
comme encores il fe desfera, & voftre Chef paffera le
premier au travers du torrent, rompra le fil de l'eau
& des tempeftes pour vous.
De Peau courante à grand hafte il hoira^
Par ce moyen ayant vi&oire plaine j
La tefie haut tout joyzux lèvera.
Ne daignez regarder ni conter les Grands qui
vous abandonnent. Vos Princes & eux, faits efclaves
par les mafTacres, arboroyent les faveurs de leurs
maitreflfes & leurs hontes aux fieges de vos citez. La
multitude des révoltez nous apporte plus de pitié que
d'effroy, mais vous n'avez rien perdu, car ils n ef-
toyent point de nous. Il n eft point nouveau de voir
ceux que Dieu a eflevez par les armes chreftienes
fouler en la boiie Thonneur qu'ils ont gagné,
& avoUer pour brigandages les adions qui les ont
honorez. Si vous cerchez des chefs, vous trouverez
encore des Langorans, des Mombruns & Defdi-
guieres, & au défaut d'eux des Luzeaux, des Vivans,
des Campets, des Merles, des Gremians, Boulliarges,
33 TS.AITTÉ SUS. LSS GVBK&BS CITII.BS.
GéoSres & Vovinjt ft de pliu petits encore, de qni
les mains feroac mex fortes pour relever l'en&igne
d'Israël qiund celle de Dieu les rclcTera. 11 vtms
donne encore des plus grands de k France qui &
preTencent à leur debvotr, & t^ra&i toiimi régime
au Diable & aux o&es des grandeurs, parent l'efto-
niac aiui coups & à une deûr^e mort. Toiuec
chofes vous abonderont, quand vos péchés n'e&o-
gneronc plus la ùce de Celuy qui a les viâuirca ea
fil main,
DU DEBVOIR MUTUEL
DES ROYS
ET DES SUBJECTS
Jjprt.
1. Mm.1
t. VI, f
DU DEBVOIR MUTUEL
DES ROYS
ET DES SUBJECTS
Cha
ITRE I.
eflieurs, VOUS m'avez envoyé quel-
ques thefes qui courent par
'uftre Guyenne, & on nous a fait
voir les meCnes chofes ou appro-
chantes de divers endroifts de la
France. Telles queftions renou-
velées parplufieursfortesd'efprits
meriieroyent d'ellre renvoyées au tens commua & à
la confcience où il s'en crouve, ou bien à pluTieurs
doâes efcrïts fur cefte madère, entre lefquels je
remarque un livre indculé la France Gaule d'Hot-
coman, un autre qui a pour titre Deffence contre
Ut Tyrans que nous avons longtemps attribué au
meljne autheur, & depuis appris d'un Seigneur qua-
lifié entre les Eglifes reformées & recommandable par
^6 CBBTOIK OBS &OT) ET DBS SDBJSCTS.
plufieurs livret de iâ façon, que cefhiy-li eftoit {ord
de fa main. Ilferoit encorei à renvoyer k la Senind*
voloruaire de la Boëûe & plufieurs aucret doâea
&. libres difcours, de ceux qui en France font demourez
françois, que le gaing, la fiacceric, la beftilê ou l'ex-
trême pauvreté n'ont pas rendu marchands & profti-
tueurs de ce que nature leur avoir donné. Or puis-
que le Diable ne fe laffe point de repeter fes
impodures, il ne faut pas qu'il nous trouve haraflez,
mais prefts à le convaincre de menfonge, comme
nous ferons en marchant fur les pas des premiers.
Voicy ce que vous avez mis en queftion :
Si les traitiez, contrats & conventions entre le
Prince & fes fubjefts font obligatoires de la part du
CHAPITRB I.
37
il en faut prendre Tordre ailleurs qu'en elles mêmes,
car elles fe fencenc de la confufion des âmes de leur
autheurs, ft comme à pièces auxquelles en quelque
manière on peut ûitisfaire conjointement & en autre
elgard feparement. Nous ferons la première diftinc-
cion félon trois fortes de perfonnes qui nous obligent
à parler à eux, ayant à payer de diverfes monnoyes
ceux qui propofent ces thezes : conmie adverfaires
& du dehors, ceux qui comme (impies cerchent
inftrudion, ou les hypocrites qui en font femblant.
Chapitrb II.
il ux premiers qui ne peuvent fouf-
' frir noftre repos, eeluy de la
France , ni le leur meûnes, nous
pouvons fermer U bouche ' par
s lefmoins, qui eft félon Ce-
drenus Xafinpà vien, &. de plus
CHAPITRE II.
39
pied par le Prince ne liberoyenc pas de ferment tout
ceux qui en avoyenc envers luy; & là defliis les
Doâeurs ayant efpluché les cérémonies des jurements
faiâs à Blois, déclarèrent la fby publique violée, le
Roy indigne du Royaume, enfuite de la vie & enfin
du fidut. Tel jugement a efté enchéri par le confdl
de Aquaviva & de fes ailiftants avec Fadvis de ce
qu'ils appelent la Gmgr^adon, & de plus, toutes ces
choies confirmées & mifes au G)nfiftoire, les ana-
thèmes, excommunications, fulminations données,
publiées ft rengr^ees contre le violateur de la fioy :
ce que un tel Siège, qui à tout ce que l'on dit ne
peut errer, ne devoit ainfi nommer, s'il n'y avoit
point de foy obligatoire entre le Roy & fes fubjets.
Si l'ezceflif defir de {atisfaire, ou convaincre les
adverfaires, nous faifoit franchir les barrières de
Tamour & refpeét de nos Rois conune ils ont fait,
nous leur monflrerions par le menu conunent la
vengeance de cefte foy violée les a pouffez à remettre
en lumière le livre de la Boëcie touchant la Servitude
volontaire y à cercher les lov^Deprœmiis tirannicidarum^
& qui eft horrible, furcout nous monflrerions com-
ment ils ont recommandé d'apotheofe leurs affailins
canonisés.
C*eft ce que nous pouvons rcfpondre à ceux qui
nous querelenc comme le loup l'aigneau buvant au
deifoubs de luy, n'entreprenant pas d*arrefler le
vain babil par nos raifons & d'elles faouler ceux qui
ne font point de noflre fang.
^^M
w
Chapitre III.
la feconiie îone de gens qui meu- '
vent telles qudiions, bien qu'ils
foyent de rare ftupidité, on doibi
principalement & plus expreiTe-
mcnt refpondre; leur miiere te
requiert & la matière exige trois
CHAPITB.B III. 4^
Hebiieuz & Grecs, le^ meûnes termes font employés
en Tune & Fautre langue au meûne livre ipteam
chapitre), fur la belle juftice que rendoyent les enfants
d'Ely au peuple, nommant leur rapine & non pas
leur droit de SBI^Ç & èuudm^y où il fe voit la jufle
punition de Dieu qui euft efté injufte û c'euft efté
leur droit. Nous fortifions cefte expoûdon par le
chap. 7* d'Ezechiel, verfet a/*, oà il eft dit : Jr iisi
tratêray félon leur train & les jugeray félon qiiûs
auroni dêffervi DQÇI^y DH^QBlf^D?. l latine Vul-
gaite màmCt fecundMim fudida eorum juàicabo [eùs\.
J'ai encor melmes paflages au 5* d'Ez^hiel & au pre-
mier des Rois, qui peuvent corriger les mauvais
traduôeurs quand ils ont pris rinjuile pour le jufle
& mis l'ennemi de juftice en la place du droift. Et
certes ce n'eft point blafphemer de la juilicedeDieu
à demi de l'avoir voulu faire autheur & garant des
violateurs qui raviflent les filles & les femmes au
fein des pères & des maris.
Tant s'en faut que les peuples foyent obligez à
foufirir telles chofes qu'ils le font à les empefcher,
à reprimer les Roys en leur malverfacions ; c'eft de
quoy vous verrez une recerche excellente en noftre
Junius Brunis; nous vous renvoyons à luy pluftoft
que de tranfcrire les diverfes façons par lefquelles
Dieu s'eft pris aux peuples de quoy ils n'avoyent pas
arrefté les fureurs de leurs Princes & Tyrans, les
peuples, di je, punis d'avoir foufiert tels excès. Or
Dieu qui eft jufte n'auroit pas exigé de fon peuple
l'injufte & l'impoflible, ni puni la fouffrance ou
l'obeiflTance qui auroit efté de fon exprés comman-
dement, mais au contraire voyez quelle authorité a
le confentement des peuples fur les Rois.
Quelcun a elcrit que tous les excès portés par
4a DEBVOIX. DKS kOTS KT DSS SDBJ8CTI.
Samiiel, lorfque avec menaces & non promefles il
edabliflbii la Monarchie fur Ifraël, au lieu d'e(fa«
des ezcecracions & marques de fon r^ec, efloyeni
des fermes defcripdons & articles declaratoircs du
droit des Rois, & qu'autrement, au lieu de. Rois, il
les euft appelez Tirans. Ceftuylà ne fçavoti pai que
les Rois entre les Grecs n'avoyent autre nom que
deTiruis, jufquesâ cequerufage& non le vocable
ait mis dillinfhon entre la Tirannie & la Royauté.
Samuel defcrivani foubz le Roy le Tiran a voulu
monftrer combien l'efprii de Dieu avoit à contre-
cœur le deTir d'Ifraël, & à toutes les nations & quelles
marques elles cognuiftront celuy qui règne en l'ire
de Dieu.
Cependant bien prés de l'tnltiiution, nous avons
les exemples du mal & des remèdes; nous trouvons
CHAPITRB III. 43
*
mes mains j fi fay mesfait à celuy qui avait paix
avec moy^ voire fi je iCay délivré celuy qui me mth'
leftoit fans caufe^ que l'ennemi pourfuive mon ame^
foule ma vie en terre & qu'il mette ma gloire à la
poudre^ & puis voyez les autres hardiefles de David
en ce Pfeaume. y.
Ceux qui mettent en queftion s'il n'y a aucun
refuge jufte envers le Prince & aucune deffence jufte
du jufte refus, ceux là font le procès à David qui
après avoir refufè fa vie, couru aux prières & au
fecours qu'il demande à Dieu contre fon ennemi
(car ce font les termes) vient aux fuites, aux cachettes
& aux cavernes, qui plus eft, fe retire au camp
d' Achis , ennemi d'Ifraël , met en befogne les gens
de guerre mal contents, mal vivants, & après les
avoir armez ufe de furprife contre fon Roy, luy
prend les meubles de fa chambre pour monftrer ce
qu'il pouvoit, fe rendant puiffant contre la perfonne
du Prince.
Nous n'avons pas faute de gens qui veulent faire
parler nos Rois de France en IIpacoAi» & Duc de
Mofcovie qui s' appelé maiftre des efclaves. Ceux-
là, après avoir condamné David, n'approuvent point
le refus de Naboth pour fon héritage , mais prenant
les termes de Samiiel foubmettroyent & eux & leurs
enfants aux chofes horribles & vilaines, comme il eft
dit des filles & garçons & dementiroyent l'Efcriture
en la fentence qu'elle prononce contre Achab fur le
fait de Naboth. Si on nous reproche que nous n'avons
pas ufè des patiences de David, nous renvoyons
ceux qui en veulent doubter aux véritables Hiftoires
où ils apprendront comment nous avons emprunté
fa harpe & fes Pfeaumes, cuidants tempérer la démo-
niaque fureur de nos Princes meurtriers (nous les
44 DEBVOIR DBS ROTS ET DBS SUBJBCTS.
pouvons appeler ùnfi) pour ce que le Roy iîUt ce
qu'il n'cmpeicbe pu i fdre, & ne puoiâ pu eftanc
flic, & encor nos Rois (foie dii avec honte) ont gtb-
boyé des feneflres du Louvre fur des corpc demi
morts.
Comme David, nous avons {iii aux Royaumes
eftrangers & melmes ouae les mers : comme luy,
nous avons caché nos vies dans les cavemes & fo-
rells, & U prefeDté nos coeurs & nos requeftes i
Dieu pour luy, & puis pour nous. Si comme luy,
nous avons munt d'armes noftre innocence, comme
luy, nous les avons mifes bas auianc de fois que
le Prince a fait femblant de pofer fi>n courroux :
nous avons baifê la main affligeante de nos Rois au-
tant de fois qu'ils l'ont àree du ganœlet & tendue
en figne de paiit. ft puis aun viftoires que Dieu nous a
CHAriTS.1 III. ^
n'avcMT mil les miiiu aa devant dea coups que fur
le fang de dix mille mardrs & de trente mille mtf-
fitcrcz, ce qui De puoiflbîi pu en la julUce de
David.
Or avant fordr du palais de la conlcieiice, )e levé
U mam i Dieu, que nonobfUni ces chofes , je den
l'eftat de la Royaûé le plus h(»iorabIe ft excellent
de cous, quand elle cft appuyée des correâi& qui
l'empefbhent de tomber en U Tirannie : car le*
melmes accidents peuvent arriver aux autres Gou-
Tememencs, félon que Dieu les bénit ou "■■"^''
Et pourtant tout ce que l'homme manie eAant ful>-
jeâ à dégénérer, nous tenons l'Eftat où chacun ft
trouve pour le plus defirable en pnftiquanc ce que
dit Gutcdardin, qui cil de le rappeler Ibuvent & fa
première inHîtutioa.
Chapitrs IV.
] oiLA quelques mirques de ooUre
jullice en ce que nous difte la
pièce. Il faut voir finoftredroinire
n'eft point encore deifenduë par
les ancienes Toys, & ce qui s'appele
droid efcrit, obfervé par toutes
CHAPITRE IT. 47
dciers, Admirables à leur polterité, qui rrays Princes
OUI eftimé debvoir eftre proteâeurs des loix, aoD
deftruâeurs, & mieux ûmé les doux liens de U
juftice que les ctiaiues d'injuiUce. C'ell de ces âmes
efpurees que font fornes plufieurs ordoniunces qui
panoui onc pris auchorité; cciu-U onc reûllé aui
flaceurs, £iui jurifconiiilies, & ont tenu à dommage
ce que lis vouloyenc établir à leur prqfit. A la ve~
riié il s'en eft trouvé quelques-uns confiderables qui
ont exempté les Roys des loix politiques, comme
te&uogne la loy Pn'iutps & autres femblables , mais
nulles maximes & refôludon des Doâeurs n'ont
exempté nos Princes naturels des loys de nature qui
les avoyent fait Princes : au contraire ils les onc
prononcées y eflre fubjeâz & obligez.
Voila pourquoy l'obfervadon des contrats & con-
ventions citant du droiâ de nature (Z.. i, in prin-
cipio,\i. De ConjJirutùmibus Principum, & à la loy i.
De Paûis),lE& meCnes Dofleurs en viennent là tous
d'un confentemeni que Princeps un'iur in contraitibus
jure communij Ù- confideratur ut privatus , ita al
uneatur objtnartj tjuia obligatur de jure naturaîi
propier confen/um. Baldus fur la loy i, De Confli-
tuiionibus Principam, Se autres Doâeurs expliquent
en ce fens la loy, qui eil en ces termes : Digmi vox
efi majeftale regnann'i, legibus alligatumfe principem
profittri : adeo de auéloritate juris nojlra pendfl
authoritas, & rêvera majits eft imperio fubmiltere legi-
but prindpaium; Zazius au confeil lo, n. 4 [vol. 3J;
Gaillius, [Lib.] u. Objer. lv, 2, 7; Vafquius, doBeur
efp^nol, Lib. I, Quafi. iHuJi., cap. 3, & Jaibn,
Lib. I. Conjil. 3, II. Decius au conTeil 151, die:
Principem adeo obligari ex fuo coniraéia ut nec ple-
aiiudo poteflatii, (que d'aucres appellent pleniiadi-
48 DBBVOia DES ftors BT OIS SUBJBCTS.
Mm tempefiatis) aut alla argeits claufida tum
exirnat; & ainfi il n'y ^ daufe fi exprefle, qui puiflè
exempter le Prince de ce qu'il a conirafÛ. En voici
une raifon bien rude, c'eft que la puilfance du
Prince procède de celle du peuple par lequel il e(t
Prince. Sur quoy dileni les maifb^ : Nom poluit po-
pidus plus juris daiê principi in populiun quant ipji
kabeatj nunquam auitm lieuù populo Jus naturaU
aut gentiuoi violare; jura enim natura funt attnui}
ptrpetua <T immuiabilia. C'cH que le Prince n'ayant
droiA que celuy que le peuple luy a donné, le
peuple n'a peu transférer « qu'il n'avoit pu, k
Içavoir k puiflance de violer le droit des gens, ou
ceux de nature qui font perpétuels, immuables
& qu'ils appelent étemels. Ceux qui ont amené pour
fuite la dLltJnftion de puilïance en abfoluê & ordi-
CHAPITRE IV. 4P
Prince fupplee les défauts & fubcUiiez de droit
& les fonde en équité [Legt Omniuirij ip, Cod. De
Tefiameoris).
Sueione en U vie d'Augufte raporce (cap. 4a),
populo congiariwn repofeenti Augufium refpondifft
f ft bontr Jidei ejfe > . Audi les Ordonnances meftnea
des Empereurs ont bien fceu dire qaeptrfidite neque
perjurii Princept author efl (Cod. Si adverfus ven-
didonem) ; — principali aathoritate cireumfcribi nt—
itmtmoporitt (Lege ijCod. De iiis qui veniam); —
({Lêge] 6, Cod, Unde vi)j toutes loys générales,
ftqui déterminent & bornent la pulflance des Princes
& leur defiendent de ravir à autruy pour gratifier
un autre jufqu'à fiium ex coniradla (vide Gaillium)
«am bénéficia pn'ncipis nemini debeni ejfe captiofa
(Paulus notât £. 8, FI, De prietoriis itipulationibus).
Voire mefmes les Princes en leurs loys authori-
fent en quelque façon la rébellion contre leurs
Edifts, comme quand leurs Ordonnances contienent
quelque ottroy ou difpofiiion contraire au droid
& à î'equité. Sur ce fubjeft plufieurs loys entr' au-
tres la loy Qaotierts refcn'plo (Cod, De precîbus
[Imperatori] offerendis; — Lege ,^, Cod. Si contra jus
vel utilicatem publicam; — Lege ^, Cod. De eman-
cipatLonibus liberorum; — Lege x & uliima, FI, De
naialibus reftituendis ; — Lege Jubemus nuUam,
Cod. De facrofanftis ecclefiis ; — Lege Pradiaj
Cod. De locatione przdiorum civilium), La loy de
Theodoze le Grand eft eJtcellenie, quand pour repa-
rer le carnage de ThelTalonique, il commanda que
dorefnavant on furferroit les exécutions de fcm-
blables commandements l'efpace de trente jours, pour
donner loifir au Prince de changer d'advis & modé-
rer fa paOion ; c'eft la loy {Si\ Vindicari (Cod. De
JO DEBVOIR DES ROYS ET DES SUBJECTS.
P(Enis), mentionnée en THillaire ccclefiaflique. Les
Dofteurs difenc auflï fur la loy dernière (Cod. Si
courra jus & cxt.) Principem jus giurjïtum ptr
ailus Jurii geniiiun lolUre non poffa. A cela les
Grecs difent Bxn)U)ù> m karli BamXiiiï t! ^t^wii
Kfarihwix* veftci.
Ce qui ell die en la lo)" 3 (Cod. De crimine facrt-
legii), Difputare d» principali judicio non opontrt
<T facriUgii infiar effe dubitare an iV dignus Jit gium
eîegeril Princeps, n'a rien de commun avec les ma-
tières générales, car il ne s'agiH là que de l'efta-
bliiïcmcni des OiSciers. Non plus cil à propos la loy
[De] quadrewtii prirfcriptione oà eft dit omttia prin-
cipe effe : eUe s'entend Jîve ex Jua fubfiantia fivt
ex fiUiili fuerii aliquid jUcnmuiii ; de melme ce que
CHAPITRE
les flaieurs des Princes & ceux qui fur toutes loys
ont eHabïi ces paroles : Car tel efi nojlre lion plaijir.
Il y a peu de mois qu'un Ambaffadeur de Saxe ayant •
die i un Secrétaire d'Eltat qui! ne demandoit que
l'equicé, il eut pour refponce : LaîJJbns ce mauvais
mol, on ne mené pas ainji les Roix : ce mot d'équité
n'eft que de pareils à pareils. Il faut parler aux Rois
comme aux Roix, tr pleuft à Dieu que Us Cours de
Parlement n'eurent point appris comme fouveraisies
à ne /attacher plus au terme du droit en jagtani
(comme ils difent) ex xquo & bono. AufE un de nos
Prefideacs s'ell efchuppé jufqucs k dire qu'il fdloii
laidër aux juges de village l'obfervation du Droift
rfcrip,.
ceflc autre fuite de raîfons qui
s'appellent d'ElVat il nous faut
courir entre des lices & barrières
ellroiies pour biftir le repos fans
deftruire en biftiffant, & com-
CHAPITRB V, 5]
de laquelle nous parlons, telle plus expreflëment
obfervee en ce Roy, à caufe qu'il y avoit plus de
concradidions. C'efl que le jour du facre, les Pairs
aflêmblez envoyèrent un héraut qui ayant trouvé le
Roy en h chambre, paré de facin blanc, luy vint
dire : t Duc de Guyenne, les Pairs de Franetjont en
conjtil pour l'eUélion du Ray de France & voiu
appellent pour y porter votre fuffrage > j & demie
heure après les Pairs le vindrent trouver pour luy
Cgnifier qu'il avoir elle cllcu Roy, Se. comme tel le
faluerent, puis firent faire la première acclamation.
Il ell bien véritable que les Grands diSerencs, tant à
caufe de la Religion que pour la tranfmutation de
race, furent obfervez de plus prés les ancienet
formes que peut élire aux autres Roys.
Il y a encore d'autres recerches dignes de correc-
tion qu'on a ouy efdater tant aux guerres de la
Ligue qu'aux derniers mouvements & mefconcente-
ments qui onr paru, de quoy tant s'en faut que
nous voulions nous fervir, qu'au contraire comme
vrais François & amateurs du fplendide Ellat de
Royauté, nous difons contre tout cela une raifon qui
n'a point faute de force en fa brièveté : c'eft que
tous les obdacles des trois poînfls alléguez s'envolent
en fumée par la poiTelTion de tant de Roys, par le
confentemenc des Pairs, par celuy des Cours fouve—
raines, & qui plus et! des Eflats Généraux, lefquels
par cette raifon mefme qu'ilz ont eu une puiflance
d'inftituer & de depofcr, ont aulfi eu celle de con-
firmer, de juger la prefcription & d'arrefter l'Eftat
au poina qu'il eft à prefent.
Donc en nous contentant d'ufer de la jullice fans
abufer de fa rigueur, ne voulans que le droift, fans
courir au paiTedroift, nous voulons examiner fi ces
54
IIR DBS &OIS ET DES SUBJECTS.
Roys, que nous aimons comme Roys, fouffrcnt ou
doibvent fouffrir quelques loys, & fi de ces loys ils
doibvenc eftre protefteurs ou dedrufteurs, s'ils ont
quelques règles ou s'il faut qu'ils fbyeat defreglez,
s'ils doibveni garder quelque loyauté ou dh-e infidèles
& defloyatu; fi félon ropinload'un Duc, les paroles
qui fervent aux autres hommes pour defcouvrir leurs
penfees doivent fervir au Pritice pour les cacher; fi
ces mots : Enfoy <S-paroU de Roy j ne fervent qu'au
dehors & font inutiles au dedans du Royaume; fi
ccluy qui ne fçait pas diflimuler ne fçait pas régner,
ou s'il feroit point mieux dit que celuy qui eft coo-
trainâ de fimuler ceffe de régner; fi pour refcinder
les contrats des Rois, il vaut mieux les faire appeler
mineurs ou ft la majorité n'ell pas mieux feame à la
CHAPITRE T. 55
mourir, & tenu nos Roys pour élire legicimement
Appelez i la Royauté; & mefhies defnuts que les
cérémonies honorables avec lefquelles on les levé fur
le bouclier, n'aSbibliiïënc pas, mais auchorifent le
droit, comme en Ifraël le royaume a tellement cfté
clcftif qu'il n'a pas laiffé d'eftre fucceflif : ainJî
approuvons nous qu'en France, l'eleAton pofant en
cauie la fucceflion l'authorife Se ne l'afibiblît pas.
Ayant dit ces ehofes en faveur de la Royauté, je
£êrois bien marri qu'elles fufTent employées pour !a
Tiraimie &. fon injufte fouftien. Nous devons main-
tenir l'Edat foubs lequel nous fommes nez & refpi-
rons, ennemis de fa décadence & du périlleux
changement. En un mot nous devons tout au Roy
& rien au Tyran. Or pour mieux cognoiftre la
Royauté par roppofirion de fon contraire qui eft
la Tyrannie, il faut fçavoir que ceftc ci n'eft
point feulement aux excès & violences qui diffa-
ment le rcgne, mais en l'injude ufage du fccptre,
quand il veut polfeder ce que le règne ne tient
point fous foy. '
Ainfi que le Roy ne peut fans tyrannie prendre
ce qui n'efl point du Royaume, fur les frontières
duquel on plante des bornes comme arbitres de la
domination , ludî celle domination a fon eftenduë
& fon arreft fur les matières defquelles elle peut
cognoiftre & difpofcrj difpofer (dis je) de ce qu'elle
peut cognoillre, car ce qui cil par de là la cognoif-
fance eft par de là la difpofitîon. Partant ce qui ell
de la confciencc eft foubmis à Dieu feul, qui leul la
pouvant cognoiftre, feul la peut juger, feul la peut
dominer : d'où nous tirons que comme le Seigneur
vaffal & fufcrin commet felonnie &. par la felonnie
eft confifqué, quand par violence il excède fes droifls.
jfi DEBVOIR DES ROTS ÏT DES SUBIECTS.
pour ravager ceux du Roy ou autre fouverain,
& ainfi le Prince commet feloonie & par elle cft
jutlemeni depofé de Dieu, quand U rar^ les con-
fciences qui n'appardemient qu'au Dieu u>uverain.
C'ell pourguoy rereracl Dieu des armées a pris
la verge de fer contre tels excès, a mis en danger
& quelquefois en ruine les Princes qui ont efchappé
entre leurs barrières : tant de pays & de peuples,
aux armées defquels Dieu a pris place de bataille,
ont fecoué le joug qu'ils euITeni bien defiré fupporter
doucement, & en France les fubjefls affligez Ji leur
grand regrec ne pouvant plus, comme David fuyant,
Se deffendre avec les pieds, comme David armé fe
font defTendus avec les mains, & Dieu a fortifié ces
mains armces de fer & d'equlté, ces mains (di je)
qui joinftcs n'ivoyenc peu impecrcr la pitié, def-
CHAPITRE T. 57
crois jours Henry le Grand impudemmeiit & don-
noyent aux fubjefts des libertés pir de là ïoute
raifon, juiques i exalter les Tyranicides, & aprét
avoir rendu leurs chaires puantes d'inveaives contre
la fucceflîon du Royaume, ils fe font enrouez de
crier, t II mus faut un Aod ». Ceux li mefme qui
cenoyent ces langages avant les viAoïres de noflre
grand Roy, ce font ceux là qui ont eTcrii & prefché
ce qui s'en fuit : que traitter de paix avec fbn Roy
elloic un crime qui ne fe debvoit pardonner; que lu
chofes extorquées feroyeni une marque de felonnie
i jamais i que les premiers s'eAoyent contentez de
prefcher en fecret n'ayans aucres armes, quand on
les faifoii mourir, que les prières pour ceux meiines
qui leur donnoycnt la mort ; qu'apprés les premières
guerres, par U paix qu'ils obtindrent ils ne deman-
dèrent que la liberté de prefcher publiquement fans
autre caution que la foy& parole du Roy, & qu'au-
jourd'huy ils demandent plus de deux cents places
de feurté, prés de quatre mille hommes es garnifons,
& puis des Chambres mi parties avec tant de parité
que tout cela fe peut appeler : Faire un Efiat dans
i'Ejlai.
A quoy les Reformez refpondeni ce que nous
tirerons d'une hiftoire de ce temps : à fçavoir que
tout ce que difoyetii leurs advcrfaires en termes
généraux n'eftoit que trop vray ; toutes différences
qui faifoLcnt parti eiioyent ruîneufes en un Eftat;
les termes de guerre, de paix, de traitté, l'envoy
de tambours, de trompettes, de rcprezaillcs & tout
ce qui par !e droit des gens s'obferve entre gens de
diverfes nations; mais que les demandes de pleiges
3. la foy Royalle & les places de feureté & dhoftage
eftoyent vocables ignominieux à la France &. ruineux
58 DEBTOIR DBS KOrS ET DES SUBIECTS.
irËnït,& que partant les autheurs&caufès de telles
horreurs font exfecrables devant Dieu & puniflables
à jamais; que donc il falloit mettre le doigt de
refpreuve fur ceux là pour eitcecuter fur eux la ven-
geance de Dieu devant lequel ils ont à refpondre
de 50,000 morts par le couteau, par le feu, par la
faim, fans diftinâîon de l'enfant, de la femme, du
vieillard & du languifTant. Ça cAé aflez d'ofler les
vies i qui pouvoit mourir : il ell befotn pour la
cognoifTance de ceux là voir fans confuûon & par
ordre des temps & des caufes la naiftance & progrès
dételles confufions. Les archives des Maifonsde Ville
&les greffes des Cours font encor pleins des procès,
arreils & fentenees de dix miUe âmes de tout fexe,
aage & condition, traineï dans le feu, & touKs fortes
CHAPITRE V. 59
Or le Ciel [efmoignera pour jamais que (antqu'on
a fait mourir les Reformez par les formes de la juf-
cice, quelque inique & infupporcable qu'elle fuft,
caur qu'ils fe font veu condamner par le throne de
leurs Roys & foubs leurs auchoricés & formes pu-
bliques, ils ont tendu les gorges & d'ouc point eu
de mains; mais quand l'auchorité publique s'elt
converrie en infolence, &. le magiftrac lalTé des feujt
a jette le coulleau es mains des peuples, & par les
tumultes & grands maflkcres de France a ollé le
vilàge vénérable de la Juftice & a fait mourir au
l'on des trompecies & des tambours le voifm par
foQ voifm, qui a peu deffendre aux miferables d'op-
pofer le bras au bras & le fer au fer, & prendre
d'une fureur fans juftice la contagion d'une jufte
fureur, & voyant fins merci à leur fein les injuftes
pointtes des efpees homicides, avoir defiré d'en faifir
les pommeaux ? Suivant Tertulien : Àdverfus [hoftet]
omnis homo miles eft. Voila comment les armes
receués par force & non cerchees onr elle tirées des
ellomacs oSencez pour les mettre dedans les mains
juftes qui en ont ferré la poignée , non pour donner
mais pour repoulTer la mort, fit pais par degrés on
a fait les pa[iens dcffendeurs, la perfecution guerre,
les agneaux des lions [furor fit lajfa palientia)
comme jugent les plus cdranges nations lefquels
des uns ou des autres ont le crime de la guerre fur
le front.
Mais à cède guerre (dit-on) on pofa les armes au
premier offre de ta paix , vous ne demandalles que
la foy du Roy, & depuis vous avez appris à y
joindre quelques cautions. On refpond que fi celle
foy Royalle n'a point erapefché les defordres que
vous lifcï, non fans horreur, depuis les pre-
6o DBBVOIR DES KOrs BT DES SUBJECTS.
mieres iuTques aux trotJîeroes guerres, qui a inva-
lidé celle foy, qui l'a edreinœ & ofté de Ton excel-
lente vercu, ou ceux qui l'oni avillie pour mer, ou
ceux qui l'euflent voulu entière pour n'eftre pas mis
en morceaux ?
Il a donc fallu joindre la parolle des eftrangers
& la caution de tous les corps de France, & puis
quand tant de féaux ont e&é brififs par les malTâcres
généraux de la Saint Barthélémy, ceux qui ont
repris vie dans les, cendres de Parti ne voyant plus
de foy publique, ont demandé les places de refuge,
d'ollage & de feureté, noms falcheux Se nouveaux,
reprochables pour jamais à ceux qui ont diSamé
& deshonoré û France, mais l!âns fraude à ceux qui
les doibvent à la benediâion de leurs juftes armes
CRAFITKS T. 6l
que pour là haurefle U foy ne peut defcendre
jufques & fon fubjed, quitte Dieu de lè« promeflêt
duquel la hauteur eft eflevee par defltu le Roy
plus que celle du Roy fur le peuple bis, &. tout ce '
propos fut eftouSÎÎ par les infolcntes rebufics Se par
le* élévations de* courdfans. Le Duc ferma le dif-
cours ainû : * U efi vrai qiu h Roy m doibt poôa
la foy à fet fuhfeétsj ni Jamais venir là qua da trait"
ter aree eux en façon qi^il ftàUe payer de ce joyat
frteieux de la foy; il luy tfi bUn mieux feant de
de^ndre bien les loys fondamentales, traitii perpi-
tuel & barrières inviolabUs de la puigânee & de
Pobi^àitee : mail fi le Prince iraitie & payetbjd
foy^ il la doibt dés le jour qu'il l'a promife, aufi
fermement qu'il veut que fon règne fait ferme, fait
que le compromis ait ejlé fait par Jb bonté, par fa
faute ûu par fon malheur ».
Chapitkz VI.
CHAPITRE VI. 63
veni dire & efcrîre en cordanc leurs coofcieitces
& leurs cœurs, s'ils en avoyenc. Voyons qui d'eux
ou de nous s'acquicte mieux de ce debvoir & pourra
mieux en refpondre devant Dieu.
L'un le veut doux, l'autre le veut rude, l'un le
veut aymé & honoré, l'autre le veut hay ou craint,
l'un régnant feurement par la paix, l'autre hafar-
dant fon Edat i la guerre civile, l'un le veut ouïr
louer &. l'autre blâmer, l'un le veut loyal & l'autre
perfide, & enfin l'un le veut Roy & l'autre Tyran.
Tels efpriis ployants à tout voulurent mériter
recompenfe pour contre leur profelllon ployer le
Roy Henry IV à fa déplorable mutation, luy qui
fans eux -maintenoic tousjours la paix de 77 comme
loy fur les Roys & obligatoire ferment i ceux là luy
aidèrent à la miferable refolution qui le fit cracher
contre fon ouvrage, & depuis ne régnant pas fur foy
meûne, régner précairement, affligeant les fiens de
peur d'eftre affligé. En voyant tousjours un bon
bras & les coufteiux de Chiftel & de Ravaillac à fa
gorge, il avoit ployé de peur du coup, mais il
l'avança au lieu de l'efchappcr.
Ceux qui applaudiffênt aux révoltez & les veulent
fuivre, veulent mériter grâce par des inveflives
contre leurs frères affligez, & par des apologies pour
des bourreaux accufent ce qu'ils n'ofent deffendre
&deffendentce qu'ils n'ofent attaquer; ilsdevroyent
s'enquérir du reful[at de Nancy qui eft plus que
jamais en la bouche des Loyolices & de leurs valets
aux pieds nuds : c'ell de diftinguer par vingtaine
d'années les exaftions fur les biens & les ignominies
fur les perfonnes de ceux qui auront abjuré depuis
l'an 1560, & par opprobres & diverfes taxes les
mulâer pour les crimes paflez, car (difent ils) le
64. DBBVOIR DBS KOTS ET DBS SUBJBCTS.
brigand, le faux monoyeur, ni le forcîer ne font pu
quinez de leur oBence pour y renoncer : & les Héré-
tiques pim que tous les autres maliàifteurs doib-
vent-ils pour une parole feinte élire abfbubs de ce
qu'ils ont commis par eSed ? Les uns parlent de les
traiter à la Juifre, les autres comme les Morifques
de Grenade, & quelques uns des derniers ayant pofé
pour maxime que tous les révoltez bien efpiez
ftrecogneus, quelque fi'uit qu'ils y apportent, fantent
plus tod à l'Atheifme qu'^ ta Papauté, ceux U
demandent s'il ne vaudroic pas mieux méfier ce fang
vil & de peu de prix avec celuy de leur compagnons.
Voila le langage du Confeil de confcience eflogné de
l'opinion de Titc qui vouloir mefmes efpïi^er ce
fang vil. C'eft ce vil fang de qui on fe peut cfcricr :
CRAFITK> VI. •$
pieds le debvoir de fils à père, de femme i nurt
& d'uni i uni, quand le Prinfe veut defraciner '
de leurs raurs tes fêmences d'humuiité.
Ceux qui par l'abandoD de leur jufte pard, de
leurs frères ft d'eux meûnes, fe condamneni par
leurs penJêes, aâions & confeflîoiu i. élire vendus,
qi^ de leurs langues iniàmcs advoiient debvoir obéir
aux chofes defhaturees & à trahir leur ame dans cette
obeiflknce abfolue qu'ils deffendent & prefchcot tant,
demandez leur i l'oreille s'ils font de vil fang? Us
l'adroiieronc de contenance, fi ce n'eft de a voix.
Ouy certes, ce terme eft bien k propo* «mplopié
pour les cGcurs vils &. dégénères, îrutfgpw fucc^
feurs de tant de martyrs magnanimes, ou après eux
des héroïques Princes & chefs de guerre qui ont
daos les batailles & combats donné à Dieu, après fon
nom invoqué, leurs aames confolees foubs les cor-
nettes qui portoyenc pour devife : Doux le pen'l,
dûuee la mort pour Chrijl 6r le pays. Louy de
Bourbon qui avec fa jambe en efclais & les os per~
ceam la botte, alla au combat en difant : C'e^ aiBjî
qae ceux de Bourbon entrent en la méfiée, ce Prince
en cède aâion & en la mort mefmes n'eut point de
douleurs pareilles à celles qu'il fentiroic en voyant
le train de fes fuccefleurs , fuccefleurs du nom
&des honneurs, non de l'honneur. Lalches avortons
ou fuppofez à vos pères, vous les vcrez allis au
throne flamboyant où Chrîft, d'aigneau de facrifice
devenu lion de Juda, jugera les nations & ceux qui
ont diffamé fes allures, & là vos pères devenus
juges redoutables, vous liront rendre compte des
cendres de deshonneur que vous avez parfemces
& des gibets que vos ferviles & fates mains ont planté
fur leur vénérable tombeau.
Chapit&b VII.
«ici le corollaire de nos refolu-
tions circes de ce que nous avons
dit : le Prince qui rompt la foy
à fon peupk rompt celle de fon
CHAPITKB TH. 6^
terme & non le piincîpd, n'y ayant au payement en
doubte que deux poinâs, le temps & le moyen.
Pour le temps, deux efgards nous en doibvent
faire demander l'abbr^é, i. fçaToir ce que nous laif-
fons & ce que nous efperons. Noua Uiflbns une
in&me condition d'un faux vivre, qui noua apprend
à mourir toua. les jours : noua avons delToubs nous
les rebellions de ceux qui nous fervent , la trahifbn
qui règne en ce temps, les révoltes de nos foldats
9l i i^u&eurs celles de leurs cnËuis, ou au moins
une dégénère lafcheté qui nous ont Sût {b^>çonner
la fuppdïtion ; nous avcins k nos deux coftés ks en-
vies, les haines, les perfidies, les ingratitudes de
nos plus proches, les aguets de nos ennemis, les
pognards à la gorge, les poifona de nos domelliques,
& pis que tout cela, les bouches blafphemaotes qui
infeâent l'air d'inveâives contre les agneaux & les
martyrs, de loiianges pour les loups & les bour-
reaux qui eflevent en l'air la profperiié des mef-
chanis & leur douce vie en termes Ci vilains que
nous haïflbns la vie & la profpericé.
Au deffus de nos teftes nous avons la pelante
domination de l'Injuftice, nous voyons fur les tri-
bunaux les ennemis de Dieu & les noftres difpenfer
dans une balance inique nos vies & nos biens qu'ils
adjugent & nos ennemis, & qui pis eft, la liberté de
nos confciences ; ils nous plument & nous efcorchent
vife pour revellir ceux là mefmes qui nous aban-
donnent & qui en trahiffant Dieu nous vendent
entre leurs mains : & s'il faut regarder au dernier
degré de ce qui eft fur nous, nous y verrons un
Roy pour lequel nous âefchiïïbns tous les jours les
genoux devant Dieu, & pour la vie duquel nous
ferions jonchée des noftres de bon cœur : nous voyons
6B DEBVOIR DM KOTI IT OIS SDBJICTS.
ce Prince h&iaé par lei empoUbaneurs des aamet,
courant & n^flkni comme ua lion à la mon & i la
ruine de ceux en qoi il trouvoic fidélité. Et encor
pour rendre plui în&{^)artable le Rideau de celle
dominaiioiif noua voy<»it fur les efpaulea & fur la
perruque dis noftre Prince «é SouTerain, les. pied*
in&mea & pumno de l'AnKchrifl qui enfiuige de. la
panTO'iflf les fleura de lye & &it Jbn marchepied du
^tuA^rnr françoii.
Voila ce que ncms perdons, voici ce que nous
avons -gaigné^ c'eft L'union pirfaiâe avec Qirift
& iês ange* ; 1^ la joye, la liberté, la vie ft l'hon-
neur vcrinlile & permanent, ce que nul fêos n'a
ÎBisais fatouré ni compris , que l'miil n'a peu voir,
que l'oreille n'a peu eniendre, ni le cœur defirer.
CHAriTKS TU. 6^
deux pu en arrière , c'ed pour celuy qui donne la
vie heureufe & véritable pour U vaine &. la fauïïe
avec l'excellent gain au change, & au lieu de regrets
DOtu comble de fcEticicez.
Mais li encore le boa Père difpofanE du terme
ft dec moyens noui veut retirer par quelque voye plus
calme & plus propre à difpofer nos efprits pour
l'heureux changement, Il c'eit par la potence, Qirift
l'a cmbr&flëe pour nous & en a ofté le déshonneur
& U malediâion par fbs triomphe de benediAion
&. d'honneur : it a hùiTé les traces i fes ferviieurs,
dreflani l'clchelie que nous redoublons mal i pro-
pos de la terre à l« mort, de U mort au Gel & ainfî
en a fal& l'efchelle bien heureufe de Jacob.
Sont-ce dac efchaffauds, font-ce des bûchers,
premiers efchellonG, premières clevxtions pour quit-
ter la terrée Difons ; Nous fommes membres de
Chrift puis qu'il parCût fes fouffrances en fes mem-
bres & qu'il veut les continuer en nous; foyenc le
Ciel & le Monde fpeftaceurs du fang que nous
efpandons, &. s'il faut périr par les flammes, nous
jettons nos veuës au chemin qu'elles prenent : elles
iront devant ft nous après, & avec elles de l'air dans
les nues; & en perceanc le Ciel, nous volerons où
font desji nos d^irs arrivez, à fçavoir au throne de
l'Eternel, pour là prendre place, r^ner & triom-
pher avec les Anges bienheureux.
LE CADUCEE
LANGE DE PAIX
LE CADUCEE
L'ANGE DE PAIX
ien heureux font cmx qui procu-
rent la paix, car ils feront apelit
Enfaiu de Dieu, dit le Seigneur,
&. pluft à Dieu que les mifereg
des difcords, foit généraux, foii
particuliers, ne nous euiTeni point
enfcigné la veritté d'une tele
(àncan», à nous qui n'ayant peu foub&nettre nos
penlees à l'otoritté d'un li grand Prophète, avons
eu befoin du maytre des fols, qui eft l'euperiance.
Je m'advance k un labeur pliin d'épines & def-
pourveu de fruitz, fi nous n'en devions efperer
qu'en ia terre des vivans. Je n'atends icy pour ma
recompenfe que le iâlaire des bons & juftes arbi-
tres, qui eft la hayne des deux coftcz. Car nous
Ibmmes, & les uns &. les autres, fi plains de oofire
74 l-S CADUCBl pJ3 LANCB DB PAIX,
droit imagiiuire qu'il n'y a plut de l<^it pour U
veriuble equitci. Je veux donc falcher & Ici uns
& les autres pour aider aux deux, ftnt autres recoin-
penfei que de &ire paix moy-ffleime à ma con&ience,
laquelé me piquant de mon devoir & de nu pro-
feÔion, depuis quelque mois m'a tiré du Ut avant
l'aube du jour, pour rourir i la viTtcadoa des diviiéz.
J'ay ouy avec palEance leur impailiaDCC, & les amer-
tumes de leur efpritz avec douceur; je leur ayanoncé
l'ire de Dieu, de laqude il ne fault tclinoignage que
le fchiûne qui coure. Ma fmiplicicië m'a rendu
excufable envers eux. llz ont porté quelque refpeâ
à ma vieillelTc, de laquele je ne voudrois plus que
ce fruit de m'en aller dormir en paix, les ayant laiflèx
en quelque repos. Mon delTeing eft de metcre i parc
I.I CADUCIK OU LANGK DE PAIX. 75
meat&iu)ultice, puis iprés fuii moïens, & puiifuis
fuccés : cw quelle jallice peult il avoir enfraindre k
Paix que nou« avoDt receuë, li curieuTcmeiii con-
knret par le Roy de û heureufe mémoire, Il bon
Prince & fi bon Maiilre, qui aroit tant de paînes
pour rdifter aux imponunités du Pape & du Roy
d'Efpagne. Ce grand Roy qui m'a dit plufieurs fois,
mefinea les larmes aux yeux, qu'il s' doit jetter (quoy
qu'il éuft en horreur la guerre) dedans cette grande
Éntreprize, de laquele fit blioche Tieillelfe ne luy
promettoit pas de veoir la fin, mais qu'il ne pou-
vcHt pas autrement prolonger quelque promefles
extorquées de luy contre nous à Ion tacre & depuis
plus exprefTes à Ton mariage, qu'il- falolt, pour
garanùr ceiie paix, mettre en defordre toute l'Eu-
rope, comme ne pouvans ceux de la Religion eftre
tolérés que dans un tel defordre, n'ed ce pas grand
pitié que la douce mémoire d'un tel Prince n'ayc
point eflé un tableau d'honneur aux yeux des turbu-
lans pour calmer leur impafTiance, & qu'ils ayeni eux
roefînes ozé penfer à rompre un traité fi faintement
promis, fi chèrement confervé par tant de dificulcés,
par des moïeos fi difictles & par un tel Roy.
D'ailleurs que ne leur ont les cheveux drefTé d'ho-
reur en voiant l'image de tant d'Eglifes de delà Loire,
^lifes véritablement reformées foie pour les moeurs,
foit pour les efpreufves de confiance que les nôtres de
deçà [ont fournies], où nous voions tant d'Huguenots
de commodité, irapaiians de leur aize, & qui en
veulent troubler autruy. Nous avons confideré ces
Eglifes, les MiniAres aux feux, les femmes Se. les filles
violées devant les yeux des pères , & en un moi un
déluge de {mg par toute la France. C'eft telle con-
fideration qui noua a &it, non au plus, mais au
7« LB CADUCia ou LANOB DS VAIS.
meiUeiirs, cercber la paix dam le .fein de l'obeil-
iànce, & non en fnretei dana odny de la rebelion,
aymaot mîeui avec ces granda perfonnage* Maré-
chaux de France & lea principaux de ceux qui ou
men^ ooa afiurea, & puia avec l'oraricié Royale
BOUS feparer, qiie d'eftre miTeraUes avec une cahoë
de gens pouflex de paffion, ignorant de l'Eftat
ft mcline de leurs a&irëa, ùm nous amuaer à qud-
3 lies arûdei vaiu, de peu d'importance ft deiEqneU
vaulc mieux £e paâèr que de romprechofè û pre-
deuxe que la paix.
Je ne puia vous celler que rarobiàon de qnclquei
uns de vos comp^nona ne noua ayt efté «iffi tot
depUiJânte, y ayant rccofpm une merveitlenfê a
contre l'otorité dei Graoda, lelquela n
LB CADtrcIS OU LAHGB DE FAIX. fj
J'acbercntyenproieftuicdevMic Dieu & fe> Angea
que je n'&y ceceu uicua âi^ni conont ï Saulmur,
ni pfcmefles en condition de trahir mon parcy,
cbofm que je puis en bonne con&icoce acertener
pour ceux qui ont efté de mefme opinion avec moy.
Que û depuis la Rayne a voulu uar de là benefi-
ceoce envers fêt fiddes lèrviteun dt ftibjeis, je dia
ft ""■""*"■ à qui voudra qu'on peult juâemeni
recevoir des biens de la main de fbn Prince , & qui
pliu eft, que le refus eft marque d'une mauvailê
coolience, un ûgne de ne lé vouloir pa< obliger de
fidélité à qui on l'cft desja par nature, ce que le*
Vax du Royaume nous enfeignent quand elles défen-
dent de recevoir prefeni de la main des Eûriogers :
& puis il fembleroic que codre Religion , comme
celle des Cordeliers, EU vœu de pauvrette.
Avec telz ou femblables propos auquels je ne fis
point de repoafes, tant pour ce qu'ils m'efmeurent
que pour la crainte de me trouver mal inflruit, je
m'en revins après une exhortation de paix & de
douKur à laquele ce Seigneur promit de fe com-
poTer, moïenaiu qu'on reconnuft le bon droit des
pacifiques & qu'on oftaft de la bouche ce ciltre de
trahiftres qu'on leur impofoii. En partant il trouva
boa l'ouverture que je luy fis d'ofter d'une part ces
noms de boutefeux, zélés, comeguerre, rurbulans
ft rebeles, & de l'autre de trahiflres, mercenaires,
perfides & corrompus : mais que chefcun recevant
un terme honorable, comme la charité qui nous fait
penfer que chefcun a voulu faire le bien, demande
queksunss'apellent emrenousfrud«fu&les autres
Deux jours après je viiitay un Gentilhomme de
Xûntonge, lequel depuis vingt ans a tousjours eâé
le C«DUCII OV LANGI Dl PAIX,
emploie aux AiTembleci publiquca, & notemment aiu
premiereg & derniera de Chafteleraud, Vendpfine
& Saumur, lequel s'y e& porté ùaa reproches en
Gentilhomme qui n'a rien à efperer par la guerre,
fi ce n'eft de troubler fi» grandes & exquUês com-
moditez, les pUiûrs de fcs ezelans jardinages. Son
humeur confpire avec les affaires au dcfir du repos,
quoy que ce ibit une amc fîerme & entière en ce
qui eft du fervice de Dteu. Luy ayant cefinoigné
mon defir de communiquer avec luy, il me mené au
fJOTÙr du lit en une maifonneite de plaifîr qui eft
au bout de ton parterre. lA je defpîoie dans ion
fein les raifons cy dclTus alléguées, y adjouflant
quelque chofe du mien comme ne pouvanc nier que
ces premières forces n'enflent pris une.avanctgeufe
LB CADOCBS OU l'aNSB DB H.1X. 79
pirca que U perce des viet & des biens, les grandes
révoltes qui font les vrayes & efficaces ruines de
l'Eglife, Quelques uns font fi fols que de fe cuider
fortiffier par pluGcurs Seigneurs & Gouverneurs
PapiAes qui veulent donner leur ame, leur places au
Party, & moy je ne voy rien qui nous menace de
cani de ruyne que telle conjonâion: [J'entends] encor
que nous pouvons bien par les armes ' veoir des
ino'iens ft pluiicurs de ruiner la France , mais pas
un de la relever. Que ferions doncq par la guerre^
La rendre capable de n'ellre plus ny à nos perfecu-
teurs, ny i nous. J'ay veu en quelque Iteunoftre
condition defpeinte par un navire qui l<^e deux
partis, les uns de la proue, les autres de la poupe
crevani avec les canons qu'ils onc oM des faboris
la partie opofee, ne pouvant le viâorieux fe venter
que de périr un peu après fon ennemy. Voila le
vizage de la guerre civille avec des couleurs vrayes
& plus vives que vous ne me l'avez defpeint. Par
ainfy il demeure conftanc encre nous que quiconque
a pris le chemin d'un ellat fi funefle a voulu tuer la
France fa mère, & eflr parricide pour le moins en
volonté.
Je vous voy l'efprit préoccupé que ceux qui fc
font tenus à leur memoyres, ont fuivy la leçon de
leur Provinces, ayent tendu à une guerre, & que
ceux qui onc dépendu des volontcz de ta Cour ayenc
eu pour but la paix. 11 fauli vérifier ce doubte fans
feinte, fans couleurs, par bonnes & fermes raifons,
lefquelles ont befoin de forces pour rezifter à l'oco-
riccé de laquele nos Pradans fonc couverez.
Il y a trois cezes qui font partout nos difierances :
la première, les uns difenc que nous pouvons main-
tenir nos vies & nos biens en faiiànt pitié ï nos
8o IB CADUCII OU L'aMCI D1 VAIIC.
adreriurcs ; les autrei difeni que noui noiu mtin-
ceooos mutua formidim*. La ^onde lexe eft que
nos adverlkires n'ont plus de volonté de nous extir-
per, les autres dilêni que C. La troifieme que ooftre
ordre ne peult élire june & fubGâer en l'Euat. Nous
difons qu'il eft jufte & qu'il y peult fabfifler.
En traitant de U première queftion, il me Sou-
vient qu'auparavant les Aflcmblees Proviocialet
qui donnèrent forme à la Générale, ce* Mar^
chaux Si grands perfbnnages que vous avez ]4>ecifiez,
& defquels l'otorité vous emporte, nous envoyèrent
par le Sieur de Sainâ Gômain leurs mémoires
qui fervirent de projetz aux noftres fuivis, à dos
provinces voifînes, & meime elles n'y ont dimi-
nuez. Cii gtatiAs hommes ne nous aprenoyenc pa$
L8 CADUCB8 OU LANGB D8 FAIX. Si
quels apffoyeat par les refpedz de Romme&d'Et
pflgne aufly fouvent que par ceux de France, Il nous
dilbit en nous ferrant la main : Il it^tfi auttmt dt
btfoin que vous fiûifflù^ qt^à vous mefmes; &. oftei
les jaloulies & les haynes qu'il concevoii conn% les
Grands de noUre Party, il aîdotc k l'affermilTement
par les raifons qui fuiveni : c'eft que quand du
dedans du Royaume le Clergé alTemblé foubz coït-
leur des Comtes de CaDille, l'envoïa prelTer par les
Cardinaux de Joyeufe & de Sourdis de donner
quelque efperance aux Cacoliques de France fur leur
deûr de noflre extirpation, ce fage Roy s'engardoic
tnen de leur nier la teze, ny mefmes que fa volonté
ne fuH pareille, mais il leur faifoic veoîr nollre
multitude, nos places, noftre opiniâtreté & dexté-
rité à les deffendre, & par là la ruine du Clei^é au
tiers de la France, & payoit de noftre force pour
éviter la guerre.
Quant le Nonce du Pape le preflbit de la part de
fon Maiftre par prières , par raifons & puis par
menaces, à exécuter les prometfes de noftre ruync
que vous avez cottees au couronnement, & plus
exprelTemeni au mariage (l'apcndix de Genebrard
imprimé à Lyon nous en a inftruits), ce Prince n'a
jamais repondu qu'il n'en feroit rien, mais prins un
delay de fa debte, ne pouvant nier le principal, affa-
voir en attendant qu'il nous euft afoibliz par la
révolte de force gens de bonne maifon, Sl par la
fubftraAion des places que nous demandons encor
aujourd'huy. Il fe fervoit donc de la force qui nous
reftoii pour avoir terme.
Quant ayant alegué que le Roy d'Efpagnc endu-
rcît les Mahometans en fon Reaulme, luy qui le
preflbit par la voyc deftoumee de chaflèr des Chref-
8a LE CADVC» ou LANOI SI PAIS.
tiens, ce Roy fii en Ton Royaume une û fanghnte
cure comme il a paru, que noftic Roy privé de U
première deffaiie fiii porté avecd' sucres mouvement
k entreprendre le trouble de l'Europe, duquel voua
avez pu-lé; ft à cela juges :
QuoMa molit trit faiiBam ûtfatàert gautm.
Quant la Raine aufli toft qu'eftablie pour Régente
a efté prefTee par le Nonce & par le Conte Boiy
eftably auprès d'elle pour procurer cet affaire, de
acomplir les promefTcs du Roy Ton mary ft la
fienei, & quant le Duc d'Epernon & autres luy oot
noncré leur grand defleîng communiqué à luy & à
elle k Monceaux (c'eft ce qui s'en peult dire icy)
LS CADOCSB OV L &NCI Dt PAIS. S}
^vKDt Dieu A les hommei du vilain & bagloni
câat det guores ctrilee que nous «vont elcrit.
L> &axide Eeze le prefante, c'eil que aucun ne '
Bont veut plus exnrper, & li defliu on akgue les
oorpt det vÛes Us de U guerre.
Je coofeflë qu'il y a en France plulieurs corp* de
Tttes fages ^ leurs defpuis & |Jus kuz noftrcs,
cooune Paris, Orléans, Roiiin & teles, detqueles
nui Ici principaux font enemis & craintifs du trôuUe,
ce que Paris doibt à mon advis à la fi^ A bonne
pkffioa de leur Coure de Parlemenr, Orléans à U
r^eâioo des Jefuiros, Rouhan i la [«udeoce de leur
premier Prefîdant, & ùnfi plufieura pour différantes
caufesont apris à rejette r les edinceles de leurniyne.
Mais TOUS ne voïez point ces changemens parmy les
médiocres & plus bas peuples, & principalement
aux lieux où les Jefuites inllruifenc & prefchent.
Qui aura obfervé ceux de Toloze, Bourdeaux, Poic-
àera, Lyon, Angers & autres, en fçaura bien que
dire. Les defenterrements qui fe font journellement,
me&nes aux pays où ceux de la Religion font les
plus forts, & des fubjeis fur les Gentilshommes
feroyent de futEzantes preufves de cette haine. Maïs
nous en avons une plus forte que nous ne voudrions
& que j'ay aprife de la bouche de celuy de nos
PrmdtHS qui a aporté beaucoup de branle à notre
divificm, c'eft {comme il dit) que le Roy n'eft point
mon en vain. Les recerches de la Cour de Parle~
ment, les derniers playdoïers de Marteliere ont hxt
veoir fur le plus tûult efchaffault de la Chrellienré
que la hayne n'eft pas morte, & que Henri le Grand
en eft mort.
J'admire la profonde prudence de ceux qui ont
efiouffi les amcles des Provinces qui demandoient
84 !■> CADUCI8 OU LAKOI Dl PAIX.
juftice de celle more. Ils nous ont &it nire , fkns
nous dire cornent, en quoy^ A qui nous oSisnlionili
A qui pouvions nous demander chofe fi jufte qu'à U
Roine qui tient l'Elbu > Pour qui f Pour le peuple
& pour elle. Comment? Par U Cour des Pairs, en
punifTani les calomniateurs de mort, mais publique.
On les accufe. S'il n'i a point de calomnie, quel
père ell fi exécrable duquel meurtre on deffende U
recherche aux enfans? Quand nous demandions l'Edît
de Nantes, on nous fermoîi la bouche par la révé-
rence du Père & Reflaurateur de la patrie. On nous
U ferme quand nous nous efcrlons fur le parricide.
Eft ce par refpeâ ou par crainte qu'on nous deffent
de nous efcrier? Je brîze ]k mon devis, mais les
pierres parleront lî les hommes Te tatfênt. .Or voiils
LB CADUCRB OU l'aHGK DE PAIX. 85
bons, après eux les Cha1>illons & tant d'auirei
Seigneun principaux aux dignicez de la France.
Ceux ]k ont veu brullcr fix mile inocentz avant
s'eCnouvoir, & euflcnt plucofl païè de leurs vies
que de courir aux armes, tï les exelens Palleurs
de ce fiecle là & leur confcîences ne leur euflent
reproché le fang des pafTez & celuy qui ell preft à
vôfer.
Ceux là ont confulté la bouche du Seigneur, les
oracles des livres fain£ts, fans mefprifer les exelanis
Jurifconfulces de leur temps; & Dieu leur ayant
donné des Princes du fang & des Pairs de France
non feulement capables, mais obligez par leur eftat
de s'opofer à la tyranie fur les âmes & à l'em-
brazement de la France, ceux là ont, avec toutes
les formes fpecîfiees par le Droit, formé le Parcy ac-
cepté pour tel par l'Eftat de France, dés lors que les
Roys en leur Confeil ont receu ledit Party à l'obfer-
vation du droit des gens comme des capitulations,
privilèges, des tambours, trompettes & herauiz,
& enfin par la première paix formele traittee & con-
clue en égal nombre dans un pavillon violet fur le
fable d'Orléans, par laquele paix font données au dît
Party & approuvées les rançons, les reprezailles,
jugemens en dernier refTort, exécutions, grâces, con-
feàion de poudre, fonte d'artillerie & ^brique de
monoye, toutes ces marques de Party reconfirmées
autant que les ocafions des guerres l'ont defiré,
& enfin par neuf Paix folemneles.
Ouy, mais on dira que cela ell le malheur de la
France & que toutes ces marques bien eftranges ont
pu élire tolérées à la fumée désarmes, mais eifteintes
par la paix.
Ceux de la Religion n'ont jamais veu les mains du
86 Li CADUC» oir l'anob dk faix.
Prince tendues, quoy que laJIês de fraper, & preftet
i Y retourner après le deflaflemeni, qu'ils n'ayent
couru pour les baifer & les piedt qui fe levoycnt
pour fe mètre fur la gorge, & de plut marris de leur
privilège, marque de ce malheur & de leur necef-
fité. Ilx onc adoucy & les termes & les chofês comme
les paix en edis, & fe font defpouïlkz au com-
mencement de viles & d'armes jufquei au premier
elTay de la fby publique, laquele violée leur aprit i
demander des places de furettë.
Ny les editz de paix, ni les places d'oflages de U
fby, ny te tilcre de proteâeur que le Roy a por^
vingt ans, n'elloyent pièces bien confonantes ii un
eflac jufle & abfolu : & pour en parler ingénument,
nos re^lemens, nos G>nfeili (oftez leur necellicé) ne
Ll C&OVCII OO LANOI DI PAIS. R7
ceux qui la maindeiinenc aujourdbuy en verits,
[{ont} mil en arani & Ibni omis par ceux qui les
Traient maintcnanc oprimcf ■
J'acbereray par ce mot que deux chofcs noua
fèrojrent pliuoft conlènar k la mort qu'i pt^ndre U
vojre de dos Prudâms. C'ell que, comme quelqu'un
d'eux a confeŒi i deux de fes amif , les ner£i que
Tentent donner au Part/ les F*rm*s bmiflènt la
guerre & en oftent Us moyeni. L'eftai mi&rable où
'nos Prvddiu le fflettent appelé la perfecucion & la
guerre arec elle. Les uns ont fuivy les mémoires
qu'ils receuretit de nos Grands & ne peuvent changer
leurs jugemens aux rena de toutes leurs volonié*,
les autres difenc que c'ell louveer fans changer de
navigation; tes uns veulent obferver leurs fennans
& leurs feings confignei en leur AlTemblee oiorifee
de toute la France, les autres difent qu'ils ont des
dozes & equiToques pour explication. Les Ftrm*s
ne peuvent fe départir des ordonnances de tele
Aflëmblee que par les correâions d'une autre de
pareille ocorité; Ici Prudans veulent que par des
CcMumiffaires refnfez, non advoiiez & depefchez k
l'exécution des points difcordez, on face par pièces
accepter k chefcune à part ce qui requière le con-
iêacemeni commun. En fin la rejeâion, les menaces
& les ruynes des uns me font de meilleure odeur
que les promelTet, les ellevadoas & nouveles ri-
chelTct, pour avoir apris que toutes les harangues
qui commencent par . Jt u âomteray, ne forteni
jamais de la bouche des Anges, mais de l'efprii de
perdition.
Telles paroles prononcées avec plus d'emoiion
ft de vehemance que je n'euflc defiré contentèrent
pourtant ma fêgonde oreille [dus que n'avoic eflé la
LB CADVCEI OV L AKGB DS 1
première. Après avoir pris haleine, je r
Geaulhonune [ouc ce que la charicé doibc exiger
d'un vray Chrefticn, combien ell agréable à Dieu
celuy qui quiie de fon droit pour avoir paix, ale-
guani la. fanunce du Sage qui deâîrad mc&ne d'eftre
crop jufle. Luy m'ayanc remercié, aprouvé mon
bon defleing, promit de flaichîr cous les coeurs de
fes amis pour aler au-devani de la réconciliation let
bras avancez, mettre foubz les pieds la mémoire
des offanfes publiques & particulières. Il acheva
par ce terme qu'il feroit tousjours d'avis d'oublier
toutes les iufidelitez palTees, mais non pas celles de
Je luy demande pcrmiflïon de me retirer en ma
chambre avec papier & ancre; c'eftiiît pour rédiger
t OV LAKGS DS FA
(exe , U grandeur & ta probitté repugnoyent à relie
aâion. La reponce fut qu'il n'y avoit potni de fexe
exampi de piifon pour les crimes de leze Majefté,
qu'il n'y avoii poinc de grandeur là où il s'agiflbic
des intérêts de la Rayne, que Madame de Rohan
a'elloif pas PrincelTe, que pour la probité il n'y avoit
rien i dire contre. Il fui répliqué que nul n' avoit
acuzé cette Dame de crime de leze Majefté, mais
qu'cle avoit elle prife en reprezailles, que fes en-
fans avoyent l'honneur d'eftre héritiers de la race
Royale, defcendus des filles de France & en ligne
mafculine des Ducs de Bretagne, fur quoy la qua-
lité de Princes ne leur [a] jamais efté r^ufee. De
ce difcours ils lumbent fur ce pardon ; l'un fe met
k louer la grande bonté de la Rayne de vouloir
fi aizemcnt pardonner à ceux qui avoyent violé les
formalitez de l'Eftac; l'autre refpondit qu'on n'avoir
en rien contrevenu aux règles, veu mefmes que les
lettres de la Raine ordonnoyent aux Députez de
Saumur qu'ils eulTent à porter fa volonté à ceux qui
les avoyent envoies, lefquelz ne pouvoyenc eftre
autre que les Affemblees Provinciales, que ceux qui
avoyent inventé réhabilitation, pour mettre fuptile-
mcnt fur la teile des plus gens de bien de la France
une ignominie, devoyent eflre punis, car cognoîflant
bien que perfonnes fi honorables opozeroyent à teles
infamies leurs courages, par là ils ont voulu les
émouvoir aux remèdes extraordinaires. Tel propos
fut receu avec eflevation & mefpris de tout ce qu'on
pouvoic faire contre le bon plaifir de leur Majellés.
On fe jetta fur la pauvreté, paucité des Ftrmes
abandonnés des deux plus grands Capitaines- de la
France, meûnes de quelque Palleurs. Je cognu bien
aux refponces à teles chofes & à U modeltie de mon
90 Ll CADDCES OD LAHSI Dl PAIX.
hofte, ie conicnnni d'dloigner Ici remèdes des armes,
qu'il oe mecoit pu en a.vuic toutes fes penfees potir
pluCeurs reQ>eâz. Voyant aulli que les efpricz s'al-
icrojrcnt, je les priay de remettre telz pro[lo« en
lieu privé, ce qu'ils firent l'un & l'autre volrâden.
Ellant hors de uble, nous nous en alona nmi
trois au meûne cabinet, où ayant pris nos place*
j'ouvris la lice au dialogue qui s'enfuit, conuneDçont
atnfy :
Le Modtfit. C'eft au nom de Dieu, auquel voua
fervez l'un & l'autre, par fa bonté que je vous
conjure que nos propos foyent fans fiel, ayans la
paix pour but, la vérité pour guiilc, & l'humilité
pour moïen. Laiflbns les matières perfonneles, lef-
queles ne fe peuvent remuer fjns pique, & j
Lt CADDCIB OU L AHGK Dt PAIX. $1
un pauvre fbt niais noroé Geord^, lequel il &ifoit
trop inhiunainemenc faulter de delTus un bufiêt dani
un monceau de chaires & d'efcabeaun, & comme
ce pauvre homme refiifoit en pleurant de s'aler
bleflèr & meum-ir. Ton maiftre n'avoît point de plua
violantes foUcitations pour le poulTer à fa mîfere
que de lui reprocher ta gloire. Certes vos matflres
 vous, vous joiiez atiiii de nos afliâions, nous
reprochant pour orgueil que nous ne voulons pas
périr, & le defir de guerre quand nous voulons
tfléurer la pais & ne nous précipiter pas dans les
maflacres. Notre obeilTance à la Rayne avoit elle
otmcertee par nos Provinces, les moyens d'y obéir
cherchés 8c. prefcripiz par la plupart d'iceles qui
nous avoyen[ donné loy de n'en palTer à la nominacion
qu'après le confencemenc receu : & d'ailleurs nous
n'avons point refuzé abfolument, mais dilayé jurques
i la cognoilTance de nos raifons & au refus ancier
de nos prières : & ce grand perfonnage que vous
aleguez nous avoir envoie parrout les mémoires fur
lelquels on avoîi drelTé noitre leçon, & vous qui nous
menafllez qu'autre eftoic la volonté des Provinces,
vous avez bien fenty qu'elles nous ont advoués en
vous defavouant, la plupart ayant bkfmé leur Dépu-
tés de s'eftre lailTé aler trop Facilement au petit
nombre. Vous eftiez de ceux qui ivoyent drelTé nos
articles : qu'avez vous veu depuis, vous & le Grand
que vous aleguiez, pour vouloir que le droit de
Cœzar eftouSc celuy de Dieu>
Le Prudeai. Nous ne penfions pas, eftans aux Pro-
vinces, que la fermeiié nous deud mener à la guerre
comme elle eft toute apparente. D'ailleurs fur les fer-
mans que quelques uns faifoyent & que nous faizîons
•prés eux, nous croyons que les articles euflënt reT-
Ç2 LB CADUCEB OU LANGE DE PAIX.
pondus aux defîrs des Eglifes. Pour moy, je pro-
tège devant Dieu & fes Anges que je le lenois pour
affuré, & fi vous voulei avouer veritté devanc
Monfieur que voïez qui annonce la veritté, vous
villes bien i ma contenance & ^ celle de plufieuis
autres que nous avions eftés deceuz.
Le Fermt. Il ne fault point de conjuration pour me
foire avotier ce qui ell. Il efl certain que la lefture
des refponces elûnt faîtte, quelques uns des voftres
enfoncèrent le chapeau, les autres fe prirent i rire,
cinq ou fut ii pleurer. Je vous penfe avoir efté du
nombre des derniers, mais qui vous empefclia, i
fraude veuë, de donner les mains k vos frères,
comme firent deux des quatre Miniilres qui avoyeni
fuivy voftre opinion?
LI CADUCBI OU LANGB Dl PAIX. J)J
cftoii plus grand que ces chofês & s'il y a lachené,
où paroift elle plus, à fuivre les Grands ou les foi-
bles^Jecnios que ces faintes promelTes ayeniprint
quelque feau plus précieux que vous ne direz. £c
quanc aux moïens exelans de ces Grands, en avoyent
ils d'auQYs que ceux qu'ils nous ont propo[îis,&c or-
donner & jurer pour la paix > Dictes en confcience (y
on nous en lalrra jouir, divi fez pluioft que bien unis?
LeModtfit. J'eus un peu de paine àempefcher la
quereUe fur ce féau précieux, mais enfin une explt-
cacion les fit fuivre en cette manière.
L* Prudent. Quant l'oeil voit ce qu'il n'avoit pat
vcu,Iec(Eur penfecequ'dn'avoitpaspenfè. Jeledis
tant pour nous que pour le principal d'entre nous.
Pour nous, qui ne fçait que les derniers lellamans
& contratz n'effacent l'oioriHé des premiers? En
cela noftre caufe ell pareille à celuy qui nous con-
duifoic, & pour vous en dire autant qu'il en faulc
pour nous juftifier, quant ce Seigneur eull recognu
(je ne craintlray point de parler ainfy devant Monficur
qui eft remply de modeftie) que les Miniftres vou-
loyent ampiecter l'otoritté, effacer parmi nous les
degrez, & cornoyent la guerre pour ruyner l'Eftat,
nous réduire à La forme des Souifles & Pays Bas,
ayant veu cela pour chofe nouvele, les gens de bonne
roaifon eurent jufte ocafion de s'y opofer & de chan-
ger de moïens à l'ocafion prefante. Au relie je croy
qu'il n'y a nul moïen par lequel vous puîlTiez con-
ferver la paix que par l'humilité à taquele volhe
divifion en vous afoiblilTant vous convie, &. fault que
vous l'apeliez une verge de Dieu pour nos péchez.
Le Ftrme. Je ne fçay ce que vos yeux ont pu veoir
k Saumur & voz oreilles ont ouy fonner, bien fcaî je
que les noltres ont pleurez & que nous euflions
94 Ll CADUCBt Ott LANSl DB PAIX.
voulu élire fourds, qiund nous avons oiiy vos acu-
fiàdons, comme cde de Alcîmus, coacre vos frères.
Il ell vray qu'i la ledure de l'article qui condemnoic
nos Palpeurs ï ligner que leurs Ëglifes cûoytatprmtttt-
duij Réarmées, de vint & ung les dix-neuf s'efcri^
rent : D»s potmees, dts buehtrs pliUofl qn» etU. Le
commencement de cette voix fut par les Hliniflres
de Lyon, Paris, Roiihan, Poittcrt, Angcp, lefquels,
comme ils dirent cuis après, ne pcurent siteodre du
premier jour des armes que de veoir la corde au col
violer leurs femmes & leurs filles devant leura yctu
en leur préparant une cruete mort; & voila leur
guerre. AcufercK vous les neuf Faix impeirees par
tant de fang d'avoir eu pour but i'Ellat <tea Souiflês
par le e on fente ment de trnis Princes de Bourbon
LB CADDCIB OV LANGI SB PAIX. 95
Prince ne les arreftoit pu ea aleguant noflre humi-
lité, nuls bien la dificulté i nollre niyne.
L£ Pmdmt. VoUre difcours de cette fonnerie à 1102
oreillet me piqueroii, fi je ac croyois que voiu le
dites fuu milice. J'ayme mieux venir au principal
&it, auquel je dit que noua avions bien enduré foubt
le feu Roy U qualité de l'Eglife prtttndue Rtffornut.
Noos eft-il bien Iccanifous le r^ne d'une vefve
& d'un orfelin, de qui le père nous a fait tant de
bien, d'cftre plua châflouiileux qu'aux temps paTés,
lorfqu'il fault coucribuer à la co&fervacion de ï'EAat
HOC interetz aufly bien que nos vies } Ec puis, pour-
quoy nous acculez vous de vouloir confentir ce
dltrePN'enfommes nous pas auffydefplaifant comme
nous mefmes Compagnons de [eles ignominies î> S'il
y en a, corne vous dictes, montrez nous que nous
l'ayons defiré ou confency. Pour le point de mettre
le régime des affaires encre les mains des Minières
& des populaires, ne nous aleguez point les guerres
palTees auqueles il y avoii des Princes, car mainte-
nant qu'il n'y en a plus, nous verrions un beau
melh^e & une grande confuflon. Quant à l'humi-
lité que nous vous avons tant recommandée, ce
n'eft pas à dire qu'elle full du tout en Te de&rmant
& defgamifTant des rooiens de fubllller, mais que
vos feuretez ne brident point l'otoritté du Prince,
que les millions aux places vacantes ne dépendent
que du Souverain, lequel fçaura bien y pourveoirde
perfonnes capables mieux que ne feroyent vos Minif-
tres. Pour moy je dételle l'opinion de ceux qui en
ont voulu attribuer la nomination b autre que au
Roy.
Lt Ftruu. Je refpons à trois matières par l'ordre
que vous leur avexdooné. La première a deux chefs,
{)6 LB CADUCBB OU l'aNGI D1 PAIX.
fçavoir que nous avons enduré le dltre de prtttnàus
RtffoTmii, ce qui eft vray par la bouche de nox
adverfaires, faulx par la noflre & nocemenc par les
tefmoignages que nos Miaiftres doibvent f^ner pouf
la profeflîon d'un chefcun. Les tiltrcs odieux que
vos pretlres nous donnent ne vous portent point
d'infamie, finon quant vous les acceptez & les gardez
vous mefmcs comme on a voulu en cette dernière
adion. L'autre branche e(l qu'il (ault vous prouver
que vous y avei confenri, ce que vous avez fait en
opinant tous, qui vous appeliez Pradtau, que nous
avions ocafion de contentement en la refpoiile à nos
articles, defquels cettuy eft le premier en fcandale,
& puis tous vos efcricz notement celuy du Miniftre
Albigeois & le manife(le du Maire de St Jehan,
Ll CADIICBI OU LAMOt Dl VaIX. 97
de Milkiu, aux arcicUt de laquele (bien qu'il n'y eutt
Bucan Prince duu le Put/) il ne parufl rien qui
fiaidft l'abandon de U Monarchie , maîi bien quant
le Roy dernier mon voulut à l'Aflemblee de Mon-
nbin délibérer quelque chofe qui (entoit trop le
mefprii de l'Eftai, ce fiirenc let Miniffaa qui luy
rezifterent en face : encor cette preuf<re, quant luy
mefinc, le Vicomte deTurene & Favaa ft deux autrei
deliberereot &. execueerenc la guerre que l'on nomma
dc« AmoimMXf ce furent lei Condftoirei qui la jugè-
rent inique & bridèrent ta plupan det vÛea contre
le dit Roy de Navarre, leur bifknt reccpvoir la
confirmation de U paix ft lea contraignant de ren-
trer fbubz le Julie joug de la Royauté. Nous avons
bien quelqu' autre exemple de votre grandeur qui
voulant prendre une belle ocalion en fui arreftee
par ceux qu'on acuze d'cflre Souifles : &.Dieu
vueille que l'aigreur qu'il a aujourdhuy contre les
Eglifes & particuliers Fermes ne foit point venue du
trop grand refpeâ au Roy, par lequel feul elles n'ont
pas fecount là fortune quant il s'ed veu un fiege fur
les bras. Les reproches &. tes menaces qui ont fuivy
cet aâion en ont plus dit que moy qui me tairay
fur cette affaire.
Toutesfois & quanies que l'on condeflènc i quel-
qu'un furecéi d'un contrad, c'eft une ptperie que de
le* invalider après tes avoir prins. C'a autrefois efté
un grand crime de doubler de ces mots : Ea foy
& parole de Roy. Cheicun eilolt tenu de fe paier
d'une tele monoye. Sy quelqu'un l'a falcifiee, il n'en
fault pas btafmer ceux qui fur ce g^ ont perdu
trente mile vies en une fépmaine, mais bien ceux
qui le* ont oftees.
C'efl de là que Ibnt venus les noms d'otages
9^ LE CADVCBB ou I.AK6B DB FAIX.
& fureaez. Maudit fou qui en aunenéUneceflitté;
mais quani le Mûftre veult donergage de fa parole
à fon fcrviceur, efl il pas moqueur s'il veulc que cà
gages foyeni dans fon coffre, pareil à quelqu'un qui
ayant offert la cane blanche, difl qu'il entendoit Cuu
figner? Pour moy, je veux penfer que le< demieret
aiïurances de nos Royt nous ont elle doneet, ou
pour le moins prolongées, pour les garendr des Iblï—
citations de Rome contre nous : or c'eft une faul-
ceté que pas un de nous en ait demandé la pure
nomination, mais bien quelque cholè d'aprochant à
la formalité qui fe pratique pour nos Députez géné-
raux : doncq voicy la douleur, c'elt que ceux qui
ont tourné le dos à leur vocadon craignent que fi
les Eglilês ont quelque fuffrage i l'eleâion de leur
mfiaircni pluioft à un PapJHe
I.I CASVCll OU LAHOI SI PAIX. Jljt
cncmies du Chreltien, du vny honeur ft contre les
)ufUs & Icverei loix qui Sont munrenanc en l'Eftat.
Monûeur de N. ne vout a point parlé de fon eltimc,
miû de celé du comioun de loijucle vou< ne doubles
point; mefmes vous avez à TOUS préparer de de£utcet
oonire un extraie qu'on hit courir des connu», pen-
fions, c(Ub, promèllès livreei & fkiees i un che&un,
pu qui, en quel lieu, en quelle roouoye, lins oublier
l'âpc^tcgme d'un inarchuit de Saurour, lequel Ibli-
dié par Ibn hofle de ferrer l'or qu'un Gentilhomme
luf pre&ntott, refuza de le mettre en Coa cofire, le
noomaiu le prix du fuig. Vous ferei bien de refiiier
lelet choKs que notre charité ne permet pu de
croire.
Lt Prudent. Ce n'eft point moy qui pique, mais
mon Coufin jette tousjours quelque trait comme
inprudemmant, qu'il fçait bien eftre des propos que
le vulgaire a en la bouche pour nous diffamer.
Le Ferme. Je n'en ay pas plus dit que vous, & puis
que VOUE avoileE que l'on le dit, donnez nous moyen
de parler pour vous en cette ocafion,
Lt Prudent. Nous ne pouvons, ny nous ne vou-
lons nier que la Rayne n'ait fait du bien à plufieura
perfonnet d'honneur qui l'ont bien mérité par leurs
lêrvicet, à quelques uns par la recomendation de
MonTieur le Duc de B., à d'autres par d'autres voyes,
ccnnme^moy par l'tntervantion de ma parante Ma-
dame laMarquife de Guerchevile, mais je jure devant
Dieu & fct Anges que ce n'a point elle par conveit-
dons que je deulTe dire ou fùrt cela, ce que je
croy le mefme des autres; mais nous fçavons trois
ou quatre de ceux qiû font apelez Permet, lefquels
ont penfion il y a vingt & trente ans, telement que
fi les penfiont lont marques de mal faire, il y a loi%-
lOO LB CADUCIB OU l'aKGB DB FAIX.
temps qu'ils font mal. J'adjoufte à cela que y aiant
lontemps que nous avons mérité, nous aurions à
nous plaindre d'avoir efté fruftrés pluftoft qu'eux
ne doibvent trouver mauvais que nous ayons efté
recognus.
Le Ferme, Mon Coufin, vos avants^ ne me feront
jamais odieux. Je vous veux faire touvenir douce-
ment combien la Dame que vous avés aleguee eft
ennemie de notre Religion, vous a efté contre à
cauiê d'elle : recognoiuez en votre oonfience qui
péult l'avoir apaisée envers vous. S'il fault fê an^
boutonner à la veritté, il n'y en a point de tous
nous autres à qui on n'ay t fait des offires aventageux
avec des conditions en termes doux, mais de rudes
confequances. Satan de ceux qui fe font Sorciers
& Magiciens au commencement ne demande qu'une
goutte de fang ou un bouquet de vos cheveux,
bienheureux qui conoift dés les ongles & cognoift
dés l'exhorde quele eft fa condufion. Je ne veux
point pour ceux de votre condition trouver eftrange
les penfions, fi je n'en voioys les pafiions bien chan-
gées, & vous fouvenez du langage que' vous me tintes
à demie lieuë de Montreul-Belay, conbien différant
à celuy d'a^jourduy.
Le Prudent, C'eft plutoft opiniaftreté que con«
ftance s'endurcir en fes premières opinions, en fer-
mant l'oeil & l'oreille aux inftrudions des chozes
prefantes.
Le Ferme, C'eft cette inftruftion des profanes qui
a aprins une Teologie nouvele, meiîne à quelque
Pafteurs.
Le Prudent. Vous avés ton de vous plaindre d'eux
en vos termes tousjours malicieux, car vous avoués
vous mefmes que fans eux la pluralité des voix
\
Lt CADVOB OU LAKGK DK PAIX. lOI
eftcnt nofire, & d'ailleurs ceux qui ont dépare^ les
bien&cz avoyeni eu le gouft bien perveity d'en
•voir ofiêit i ceux qui les ont defchirez avec des
fangtan» farcafmes julques à leur faire quiter les
Aflêmblees par leur injures redoublées i qui mieux
mieux : & quant ils ont voulu en demander juftice
en une Aflembtee d'EcclefiafUques , on a député
Tcn eux pour les adœonefler qu'ils avoyenc pris les
femontrances des profetces bien indignement inter-
prenees pour attaque en leur particulier. Au lieu de
leur &ire jullice, ils ont receu nouveles bleflures en
interprettani leur amertume à une mauvaise difpofi-
don d'cftomach. EU ce & ceux là qu'on oroic offert
& donné ?
Le Ferme. A ceux là offert auparavant de leles
leçons & depuis pour les changer, mais non donné
à ceux là, à caufe de leur refus. Il eft vrai que on
ne leur prefentoit point de penfion en leur nom,
mais ouy en celuy de leur enfans.
Le Prudent. Voulés vous maintenir qu^il y a
quelque Minières qui ayent reçu penfion^
Le Ftrme. Je le maintiens de deux, & de l'offre
qu'on en a faic à huit. De ces deux là l'un l'a reccuë
& luy efl encor continuée au nom de fon iîlz, & fans
l'exhortation que MonTieur nous a faiite d'efpargner
le< noms des individus, je l'orois desjà nommé : l'autre
qui auparavant le voyage de Paris n'apeloit les Pru-
dant que trahiflres, conire les remontrances que
nous luy faifions pour adoucir le terme, il reçut fa
penfion en contant & en raporta un langage bien
diflierant du premier; depuis ne pouvant fuporter
fa honte obtint fon congé fur une depefche aprouvee
fanlce. Et puis qu'il en fault venir là, où efl ce
meritte de penfions à perfonnes du tout incognuës,
103 LE CADUCBl OU L AN6B DB PAIX.
eatre Lefquelz nous pouvons fpecîfier tel avocat qni
en ft quatre mite livres^
Le Prudent. La Rayne l'en efl confiée i la
dgefle & bonne difpenfaTion du Seigneur que vous
Içavez.
Le Ferme, Ouy, qui en a apoincé Tes domeftiquet
enleuroftant pourtant ce qu'ÎIz tiroyent auparavant:
mais je dcmanderois bien une raifon ponrquoy cetœ
fageflc y a compris quelque Papifles, & par quel
droit itz ont pari aun deniers des Eglifes ?
Le Prudent. El eit pourries vous nommer un de
cette qualité >
Lt Ferme. Ouy, le Seigneur de Re^iac.
Le Prude/Il. Ce Seigneur le nye conlUmment.
Le Ferme. Nous l'avons aprouvé veritablemeni.
LB CADOCII OU LAKGI Dl yAIX. 103
taft entre let maiiu de ceux k qui telz deniers font
donnéi, & non dilbibuez su prix de la deffeâion,
auÛM plaife i Dieu qu'il n'y eidl autres ocafioni de
plaintes.
Lm PradtMt. Aleguez-en quelqu'une lêrieuze
ft Inen choiûe à la charge qu'ele ferve de fin à votre
popos.
L« Ftrme. C'eft l'infideliEé de laquele piaillant
wattt les marques qui nous obligeroyent aux preufves
ft recherches perfonneles, j'en prendray une en
vous demandant : fie ttnei tout pat Pexteutùm dtt
Cpmftili Prmiaeiaux pour mataaift?
Lt PruàtHt. Ouy, ft maindens que tels Confeîli
Provinciaux & l'ochoricté qui leur e(l attribuée par
les reglemens ell incompaiible avec l'Eflat, que nous
devons les rccnncher. J'adjoufte que nul bon Fran-
çi»s&bonferviceurde Roy .ne peulcdirc autrement.
Lt Ferme. Tenés vous pour homme de bien celuy
qui viole Ton fermante
Le Prudent. Non, mais pour infidèle.
Le Ferme Avés vous promis, juré & ligné les
Lt Prudent. Ouy, mais la Rayne ayant depuis
trouvé mauvais, nous nous en départons comc bons
lérviieurs.
Lt Ferme. Fault il pour cllre bon ferviteur violer
&roy>
Lt Prudent. Le Prince peut difpcnfer de la fiïy.
l^ Ferme. Ouy de la foy qu'il a receuë, mais
non de celé que Dieu a flipiUé.
Le Prudent. Il n'y a point de fermant fans quelque
condition.
Lt Ftrme. Lc ferment non conditionel cil violé
quand on te conditione après.
DUCBB OU LANCE DE FA
Le Prudent. L'interprétation efl en la penfee de
celuy qui jure.
Le Ferme. Ouy U faulce, mais la vraye eft aux
paroles fimples.
Le Prudent. Nous avons force traitez qui nous
aprenenc comment il fâui uzer du fens mental.
Le Ferme. Ouy, c'ell le fens menteur & l'equi-
vocque des Jefuites, defquels vous vous en alez
difciples, fi Dieu n'a pitié de vous.
LePrudtat. Maïs voudriez vous maînienir qu'ayant
advifé des remèdes en cas de mefconientemens & de
malcraicemens aux Egliles, on ne puft jamais relaf-
cher les moïens qu'on a efUblis & jurez quant U
necefficé en eft oftec ?
Le Ferme. Non vrayemant, pourveu que par le»
Ll CADCCBI OU LANGB Dl PAIS. IQJ
L* PnuUiu. Ce font de vos foupçmu. Qui peuli
trouver ellringe que la Rayne aie fuivy les advis de
ceux qui eftoyent parmy les affaires^
L» Ftrme, C'cfi à (ùre qu'ils cravailloyesc pour
elle.
Lt Prudent. El pour qui donc^ Ne fommei noot
pas cenuB de travailler pour noire Rojr?
L^ Ftrme. C'eft le fervir que de &îre droit aux
Le Prud^Kt. C'eft mieux le {êrvir que d'empef-
cher les requeftes.
Lt Farau, Ou/, en empeJchant les caulès des
requeftes.
Ll Prudtitt. Vous m'avouerez Q le Roy eull fait
trancher la lefte à l'Amiral ChaJilllon, quant il pre-
fenta la première rcquetle aux Eftats, il n'y eull
jamais eu de Parcy.
Le Ferme. Ce qui ell arrivé depuis a bien montré
qu'un fy grand Party n'eftoic point attaché à un
fueille de papier; mais marquez en pafTani commani
vous elles imbu de maximes pour edouffer le droit
de vos frères. Quelle infpiration vous a inftruita en
une Théologie fi nouvele & difcordente des refolu-
ôons générales du Party, duquel vous vous diœs
tacot}
Le Prudent. Vous le verrez par les refuluu du
Synode de Privas. Nous fommes alTurez que vos opî-
Duftretez feront defavouees & que l'on nous fera
raifon de quelques Alînillres, lefquels à une lettre
de reunion qu'on leur efcrivoit firent refponces -.Notu
dsrimu prudemment nous réconcilier aux EgU/tt :
raut verrej jitc la Rayne yftrafenie tr nous àvoûe-
rtj de ce que voat appelé^ Scki/mt,
Le Ferme. Voâre erperance vient de la longueur
106 LB CADUCXH OV l'aNCB DE PAIX.
du [cmps qu'on a eu pour parler aux Députez, mais
attendez aa cootraire que la veritié y fera maitreflc,
n'ellani point oprimee d'oiorittf .
Le Modifie. MelTieurs, la longueur de vos propos
n' amortie point vos violaoccs & n'afbiblill pas vos
tentions. Qiefcun de vous veult avoir la gloire de la
difpute, mais pour en avoir pour Toy, il en fauli
donner i Dieu. Je vous fcpareray psu' ce mot de
reconciliation aux Eglifes : Voila le chemin. Le
National ne peult prononcer pour les deux opinions,
il fault que l'une foit condemnee. Préparez vos
coEurs à fubir doucement le jugenjent qui en fera Faic.
EmbralTez l'ordonnance de Dieu invoquée par la
bouche de vos pères. J'eflûnc qu'il faudra cela, ou
abandoner le nom de Chredien Refformé. Je veux
LV CADUCBI OV LAH6S DS FAIX. I07
ritté qui mt p»fi tmpefektr d'altr à bras avaiicii am
iUmmi d» ctux qtd m'ont donné de quoy nu plaindro
aafy tofl qi^iU nu feront woir un autrt dtfting. Fû
m» litMt qifà et qiu fay de bien & d'konearijftxpo-
firajr timt pour atoir leur amxtii. Mais de Vhmuur
& du bien du Party, <^efl de quoy jo na trafiqua
peùa. Il y en a parmy eux pluj expêrimentis que
may : jeferay gloire de leur obéir quant ilj touâmu
atoir pour but le bien de l'Eglife. Je répliqué :
Vo^ des paroles, Monfeignearj vrayement Cre^
liâmes, mais ayant remarqué la difftraxce que vous
faites entre les haneursirl'honeur, j'oie vous prier de
Pedaireir. — Les honneurs (dit-il) eefoni Us marquât
ou faidces ou vrayes qufon reçoit du vray honeur.
Mais en cet endroit je ne parle que de notre honeur
uni à celuy de Dieu, ce que j'aptique fpecialemeni à
la foy donnée 6" aux fermaru que nous avons prefiei
devant la face de toute l'Eglife. C'efl aux defpans
de lele foy que je ne puis accepter l'amitiè de per—
fonne: de toutes autres chofes j'enferay litière pour
la réunion. Quoy que j'eufe defleing pour parler
tousjours pour les abfans, comme doic tout Miniflre
de reconciliation, ce que je pus répliquer fut de
prier Dieu qu'un propos tant faine fuft confirmé. Je
ne fus pas plucoll à ma maifon que je trouve un des
frères revenans du National. Par luy je receus une
copie de la déclaration contre l'abolition, pièce qui
me fembla au commencement hardie & depuis necef-
faire. Ayant aufly Icu les aâcs du Synode, veu le
commun lèntimcni de cous, quelques fenfures bien
digérées & quelques repanianccs qui ont donné
gloire 4 Dieu, je levay les yeux au Ciel, lotiani
ce Dieu [oui puîlTanc qui parfait Ibn œuvre en
Infinnitié.
LANGI DX PAIX.
Que touces ces chofes aprennii i ceux qui oat
failly de doner gloire à Dieu, Ji ceux qui font demeu-
rez debout d'en rendre grâces, de s'humilier &. tirer
du gantelet la main de paix en y conviant fon con-
traire meûne. Ne fuçons pat en ferpent le venin de
ces fleurs, mais comme abeilles, le miel de leur
amertumes, & furtoui le dircoura paflii, confôloos-
nous ainfy : jamais l'Eglife de Dieu q'a uzé des via-
lances, des fraudes, des corruptions, des trafaifons,
ny du coffre de Memmon pour deilruire les Herezies,
mais elle a touiours elle acaquee par telz moyens.
Ce n'ed pas parmi les chardons que rEfprit malin
Terne fon yvroye, mais dans le froment du Sei^
gneur, yvroye que le Père a deffendu aux Anges
d'aracher, comme fi l'Eglife militante eftoii mar-
tB CADUCHB OU LANGB DB PAIX. IO9
Il femble que Dieu ayt refpondu du Ciel :
Mtù$ eu pUûrf )à iesjoiati
Par moy feront tojl rtjoàaj.
Viens, Seigneur, les rejoindre ^ U honie des mef-
chans, i la confoladon de ton efpouze, & la gloire de
ce grand nom auquel feul apartienc gloire & triomphe
i jamais.
MEDITATIONS
LES PSEAUMES
l AOTRIUK Air LBCTBOK.
LUSiEURs diverfes occaTions m'ont
excité aux Méditations que ce Li-
»us prefente, lefquelles font
fpecifiee» particulièrement en leur
e ; mais il y en a une géné-
rale qui m'a convié à les faire
paroiflre au jour. C'efl que parmi
les corruptions de ce fiecle les flupides qui en leur
igoorance affeftee n'ont penfees que terreftres, ou
les efprits de vanité qui déclament ouvertement
contre la Parole de Dieu, la defcrient pour eftre
d'un llyle groflier, infeftans d'un mortel defgouH les
oreilles des Grands. Ce langage aullî plein de malice
que d'orgueil ne fe pouvant combattre par difputes
ni remonflrances, pourcc que les profeflëurs de
l'Atheilme n'advouent leur impiété qu'^ leurs dif-
ciples Sl complices, j'ay eflimé étire k. propos de
fiùre voir comment parmi les flyles les plus elabou*
tét, & dans les difcours qui pour le moins fonc
114 FK.BVACI!.
purgez de barbarie, lec pallâges de l'Elcrinire Gnt
non feulement comme un efmul fur l'or, mais oonuBe
les pierreries aiquifes, &■ relèvent le langage le
plus eflevé, confirment par axiomes, preuvenc par
arrell du Ciel, illufirent par exemples, & recréent
les efprits qui aimenc Dieu par ravifTantes lumières
& parfaites beautez. Les efcrivains, prefcheurs
& harangueurs plus renommés de ce temps, n'ont
point efUmé déroger à leur éloquence , quelque
diferte & afieâee qu'elle foii, Iots que dans les
chaires 8l barreaux de Paris, comme aulE dans les
Eftacs Généraux, ils ont allégué les authorinz de
l'Efcrinire, me&nes aux termes de U verûon vul-
gaie, qui eft telle que chacun cognoill : fachans que
roefmes dans la rudefTe de celle-1^ reluit tousjours
h Majcfté de celui qui prononce, & U richefle qui
LAUTHEUR AU LSCTEUR.
"5
adoratioiis par le Toy, plus majeftaeiix que le Vous.
Certes qui prendroit la loi du vulgaire, & les
mignardes flaceries du temps, on fe lairroit en fin
mener à dire en chofes facrees, Je vous baifo Us
aums^ comme on Ta efcrit d'un prefcheur Efpagnol.
J'en dirois d'advantage en un difcours privé : c'eft
aflfés que par cette Epiflre je convie mon Ledeur
à eflever (en iimplicité du langage de Canaan) fes
penfees à Dieu, au fein duquel y a propitiation,
qui fi tieni volontiers fris des cœurs defoU\y qui
n'oublie jamais la clameur de ceux qui le fupplient,
qui ne fou£fre point juftice eftre foulée, & en qui
feul aux temps calamiteux fe trouve confeil & con-
folation.
MEDITATIONS
LES PSEAUMES
OCC&ÎSIOT^ ET c4%GVmEV^.
DE LA MEDITATION
FAICTE SUR LS PSEAUME 1}}.
e Roy Henri IV ayaia dejiré au
Bapiefme du Dauphin tr aulw
ànt^^ en/ajM de France, quelques tttirt-
^Jj C?l prt/ïj de paix, furtout en joufiei,
T^w"^-^ caroufcU, & en combats de piedà
pirftA^ la barrière, avait envoyé quérir
^— -'«"'->— -^ nofire Autheur pour en ordonner;
mais le Conjeil du mefnagt ayant faiH tfpargner
c«tt» de/pence, le S'' iFAubigné lui donna une medi~
tation fur le PJeatane tôt, laquelle il rfa peu tirer
des coffres, comme la futvanle. Il fut adrerti par
l'Abbé d'Elbene, que le Roi ayant faiéi lire celte
pièce à fon coucher, Coiton avoir remarqué que le
fiylefentoil un ejprir tousjours prefi à déclamer contre
Il8 MEDITATIONS SUR LES PSBADUBS.
Us vices j Cr qui ne fe plm/oit paiat amx IdamgUf
tAbbé ayant ea pour refponfe, que le fieele dommil
bien pliu d'argaments pour les premières qiu pomr Us
fécondes^ & tPailleurs qi^il falai avoir efgard à e»
Pfeautnej qui traittoit de chaffer les vices de UfaiiuTU
(y de la Cité : depuis le Roy me/me ayant convié
l'Autheur à monflrer qt^il depofoit bien quelqv^ois
l'humeur cynique, à faire quelque pièce fur les dotH
ceurs de la paix, cnie-ci fut ehoifie , oàû yn des
chofes qui /entent la contrainte, tr quelque dij/êrenct
en l'ujage de ta liberté,
psEauhb 133.
I . Voici f o que <^ejl chofe bonne, fr que t^tft ehofe
plaifante, que frères /entretiennent^mefmes enfemhie,
. C'efl comme cejle kuyU precteufe. efpaadué fur
IfBDITATIOMS SVB. LBS PSBAUMBt. II9
li de qui vient toute bonne donation, qui a touf-
)oursprefent& le pouvoir & le vouloir, a rendu nos
defirs abrégez, nous contente & dit Voici.
Ceft de voir convenir comme frères ceux qui
eogooiflent un meûne père, voir unis par la con-
tatàt ceux qui le font par les lois & par obligation
dénature, par communauté d'héritage, ft par le doux
joug de la patrie, voir habiter enfemble ce que le
Diable avoit ft voudroit encores efpars, les cœurs
qui Ont efié (1 contraires efchauffés de mefmes
defirs, & les efprits qui ont confpiré chofes repu-
géantes unis à pareils deflèins.
n n'eft point ici queftion de feindre un amour
fid)uleux, ni une vaine Deité conciliatrice des accords
difcordans. Vous ne verrez point ici le fils de Pore
ft de Penie employé à rejoindre FAndrogene feparee
par le couteau de rAbfence, en portant à Tune
ft l'autre nature la réunion qui mit le Ciel en jaloufie.
Arrière les fables de no (Ire vérité ; il ne faut plus
cercher d'ombres, puis que nous recevons du Père
de lumière le threfor de clarté : mais bien plus utile-
ment que les poètes & les peintres defcrire & def-
peindre les fruids de la concorde terreftre, arrhe de
l'amour du Ciel, gage de cet eftat parfaid, & du
ibuverain Bien qui nous eft promis en la bienheu»
reufe immortalité.
Qui beaux font les pieds de ceux qui portent la
paix, leur face eft plaifante à voir, le fon de leur
propos eft plein d'harmonie, leurs efprits ne ref-
pirent que des haleines douces, on ne cueille que
fleurs agréables & fruids délicieux en leur fréquen-
tation.
Ceft la paix heureufe de la Chreftienté, car comme
par contagion nous avions efmeu toutes les veines
I30 MEDITATIONS SOR LES PlBAUUtS.
de l'Europe, kufll font elles racoilèes, quand noftre
paroxifme s'eft appaifé. Trés-heureux ce Royaume
où cette paix habite. Depuis oeuf années la France,
comme ellonnee de Ton bien, ne fe peut fouvenir
d'avoir dormi un fi long fonuneil fur fon lia paie
de fleurs de lys. Depuis le fcepire de Pharamond
elle a porté les mefmês douceurs & la Province, k\z
Ville, à la bmiUe & en fin à la perfbnne ptrdculiere
qui ne fent point de guerre entre ces qualités ; en
mefme temps que le fang du Royaume n'eft plut
efcumeuz pour aigrir la pituite, la melancholie ne
ravale point le flegme, l'eftomac de ce grand corps
prenant bonne pari de la chaleur qu'il lui fu& par-
tager, & diftribuer avec juHice fon chyle à toutes les
extrémités : mais fur tout le cerveau non infisâé
n'afiefte les parties balTes de fes intempéries & les
MEDITATIONS SUR LES PSBAUMSS. IJI
trroufoic premieremenc la tefte: par ce que le Roy,
qa^elle reprefente, paruge en fils ailhé de Dieu,
cueille les prémices des douceurs de la paix qui lui
donne, dés le jour de fa naifTance, le fommeil faos
treflaucs, les plaifirs fans frayeurs, les viandes (ans
amertume & fans {bupçon.
Et c'eft bien raifon que celui qui a le premier
liiToaré par prévoyance les angoiflès des guerres,
duquel le foin a devancé le foin de cous les aucreg)
en mefine ordre participe à la mucadon defiree & au
iàlaire des labeurs.
Gxnme aufli après lui les parties plus hautes, qui
ont fenci les orages à mefure de leur élévation,
reçoivent à leur rang le doux air fouhaitté, la pre-
cieuie liqueur, en parfumant la barbe vénérable.
Ce qui s'efpanouit vers les efpaules figure les
offices divers, par les quels cette tefte communique
ces richefles coulantes & non précipitées fur cet
Ephod, dans lui & avec lui fur les douze noms dez
Provinces : les douze pierres precieufes les dénotent,
font comme le threfor amaffé de toutes les tribus, qui
à toutes retournent jufques à la parfaiôe diftribu-
don, tant que le peuple bas en ait fa pordon, ce qui
eft marqué en ces paroles, Jufques au bord du facré
vefiement.
Encore pouvons nous marquer conmient cefte
liqueur paflant fur TEphod fait fouvenir les douze
tribus des beneficences, & entre toutes de la prife de
polfeilion de Canaan. Et la France, imitant les douze
lignées, a voulu eftre feparee en douze Provinces
foubs douze Pairs, doit avoir en Teftomac, en la
place de l'Ephod, la mefme obligation du paffage
de Payen au Chriftianiline qu^ont receu les Hébreux
au traverfer du Jordain. Et on demande : pourquoi
132 MIDITATIONS SUR. LES PSBADMBS.
les douze choiût des lignées, comme douze Pûra,
ont porté les douze pierres, chacun la fienne pour (k
aihn} C'eft en rccognoifliuice Sl hypothèque per<
penieile du bienfait receu. Le Jordain, comme ua'
archive Inviolable, garde ces ditres pour les pro-
duire au grand jour à faire le procès à ceux qui
auront oublié ou mefufé de la délivrance.
Oferbns-nous point approprier aux chofet fuf-
dites le Baptefme en la place du Jordain, où S. Jean
l'exerça, & où Noftre Seigneur le voulut recevoir :
en ce fleuve facré confiderer les douze Apoflrei
comme les douze Pairs de l'Eglife, & meOne leur
voir configner au fond de ce Jordain les douze
pierres & les douze articles de noflre foi, félon ce
iju'il a pieu à quelques bons Pores, comme les douze
pierres precieufes & fondamentales de la bonne
MBDITATIOKS SUR LES PSBAUMBS. 12^
& laîflbns encore pour lui les yeux & le front; le
refte du TÎfi^, la barbe & le col nou3 reprefente
TEcclefiaftique ; les bras & la ceinture, où doit pendre
réfpèe^ feront pour la NoblefTe ; les jambes & les
pîeds nous (ignifient le peuple, par lequel toutes les
autres parties font portées : defirant qu'au prix que
chaque partie prend part à la doiice liqueur des
benediâions, qu'auflî elle contribue à la veritaUe
œnfeâion du bien public.
Ainfi à la tranquillité publique donnent les bons
Rois leurs veilles, leur foin, les premiers mouvemens
des traiâez ; & donnent plus que cela, les ofienfes
receuës, les reproches des moindres, & les blaûnes
▼oire injuftes, recevans du mal par ceux pour le
falut defquels ils s'emploient fidèlement ; ils contri-
buent la viftoire de leur cholere, leurs vengeances,
qui peuvent s'appeler injuftices, l'efloignement de
leurs plaifirs, & abbaiiTent leur grandeur vers terre
en s'eflevant vers le Ciel, avec cette refolution qu'au
peuple & aux enfans il faut faire du bien par force,
& fans efpoir que la charité qui defcend puiffie
remonter en haut.
Ainfi les Rois fatisferont aux loix Divines & hu*
maines, defquelles nous apprenons que celui n'eft
point à fupporter qui afpire aux commodicez, & fe
fouftrait aux charges ; & puis c'eft félon nature,
que les commoditez & incommoditez foyent obligées
Tune à l'autre, que qui fent le fardeau en tire le
commode, & au contraire.
Celle Myrrhe, de laquelle la finguliere propriété
eft d'empefcher les pourritures, de faire mourir les
vers dés leur création, reprefente la prudence des
Rois, qui par le foin de faire exercer la juftice
empefche les amas des humeurs corrompues des
134 MEDITATIONS SUS, LES PSEAUMES.
infeAions populairet, & applicadon ji mauvaifes
mœurs, caufes de la putrefaâion & corruption des
EtlacG.
Par ce moyen comme les Tyrans font devenir les
corps vivans des charognes d'Ellat, les Rois qui
en font pères, d'un Eftat qu'ils trouvent en pièces
& en charognes font refleurir un corps plein de vie,
& un Royaume triomphant.
A ces reftaurateurs, & non aux autres appartient
dédire avec David: Quand j'aurai accepté Paffigaa-
tion, je jugerai droitemeni. Le pays /efeouloitj
tr tous ceux qui habitent en ieelui: mais j'ai affermi
fes piliers; ou bien, Je veux tenir la voye nom «d-
jî&J«, quand tu viendras me rendre Roi paifible^ & ce
qui fuit de ce Cantique excellent.
C'eft après aux Ecclelialîiques, irréprochables & de
MBDITATIOKS SUR LBS PSBAUMBS. 125
doit eftre content de participer en fon ordre à ces
odeurs excellentes ; car bien qu'il porte tout, fi eft-il
le dernier qui contribue au foin du public, & la
partie de deflbus les pieds eft la plus eflognee du péril.
n n'appartient pas aufli aux bords du veftement
& à fi» doublures, de vouloir eftre de mefine eftofie
que la tiare. Bien .peut Textremicé de Thabit le
plaindre s'il y a des plis traverfàns, & des foulures
(qui ùmt les fchiûnes, feâes & divifions) qui empef-
Âent l'eftenduë de la diftillation fidutaire en toutes
les parts où elle eft requife, ou fi les tignes & les vers
les defgaftent. Mais la Myrrhe, comme nous avons
dit, y porte un remède fouverain.
Pour féconde comparaifon d'un Eftat, ou d'une
compagnie heureufe, l'Efprit de Dieu nous donne
une montagne, & ne choific pas un orgueilleux Bafan,
ni ces roches cornues qui pafTent la région moyenne,
pour de leur front endurci rompre & troubler les
exercices des nues, qui deffigurent la rondeur de la
terre, propres feulement à donner donunage fans
profit, & l'efiroi fans plaifir.
Mais au lieu de ces montagnes fteriles, il choifit
les collines de Sion & de Hermon^ par tout vertes,
utiles par tout & agréables : ces monts vont recevoir
doucement les faveurs de la pluye non précipitée. Et
comme le poil de la barbe d*Aaron faifoit découler ^
& non tomber par tuyaux la precieufe liqueur, ainfi
d'herbe en herbe, de branche en branche fe reçoit
rhumeur nourifliere par les terres plus bafles. Le
coupeau, qui eft le Roi de cette montagne, reçoit
le premier coup de ces pluyes, les change en rofees,
& par fa rondeur bien formée les diftribuë efgale-
ment : ce qui eft le propre des bons Rois, de garder
la proportion harmonique, félon laquelle fe départ
126 HlDITATIOm tUM. tBt PIIAOHKI.
plui de nouniture panni lei irbret plu* cftaidiir»
ou qui ornenc de plus grands féuilltges, ou qui ciiri>
chilTent de plus de fruiâs ; & auJli qui ièlon I«
capacité de leura rameaux peuvenilprenore du Soleil
Il venu aicraâive, & de là les radnei plus ^ft^Miiff
foni capables de fuccer & d'attirer.
Mais ceux qui au lieu de iàire dégoutter leim
biensfaiis, les precipiteat fans raifon, fnu d'un ooAA
des fecherelles ft defluget de l'autre, eayvrent let
uns, altèrent les autres. Ceux-là Jbni pareils à cet
roches de Bafan, fterîles en leur haut, cavemeofti
au milieu, ft qui ont les pieds en quelque mareft
puant. Le Ciel careflé ces leftes feiches de grcflei
au lieu de pluye, les embrafé au lien de les elffaaufièr :
leurs fronts fervenc de qulntenes aux orages & cho-
3 de l'air : ce qui elchappe en terre fait non des
MXDITATIOVS SUR LXS PSBAUltfBS. IZJ
efabliffan» & garandiTans les loix du pays, & tea
autres s'oppofans par leur vertu à celles d'un coib-
qiœraiic ennenû.
Nous avons veu la pratique de telles cbofes en ce
Royaume affligé, la prodigalité fous le voile de
libéralité précipiter par orages, non les fleuves,
mais les torrents des bienfaits, lefquels eftouffoyenc
Is trop de terre grafle pouiTee en un (èul Heu;
& mefine paraboniSkncefaifoyent mourir les plantes
trop favorîfees, comme font les arbres enterrés au
defliis de leur nombril, en rendant le refte deihué
ju^uea aux moelles.
Le Ciel au lieu de pluyes primeroges pour enfler
les Ueds, les verfoit à r^ret & à contrefaifon ;
& jullement couroucé du mauvais ufage de ces pre-
(ents, ne prodiguoit que calamités ; les vents & foudres
de diveifes fadions, qui s'encrechoquoyent en cette
montagne, ont mis les plus exquifes beautez de
nature à morceaux & en cendres. Nous pouvons dire
comme ceux qui navigent fous la ligne, que ce qui
comboit du Ciel enlevoit la peau, & caufoit le fcorbut.
C'eft de là que nous avons veu les palais changes
en mafures, les galeries de Fontainebleau en eftables,
les yardtns en pafturages , les fontaines en foiiil de
pourceaux & la Sale du Louvre en gibets.
$i aujourd'hui nous voyons un Eftat mefprifé jadis
pour ia pauvreté, maintenant redouté pour fes thre-
fofa, fi nous voyons nos mafures relevées en palais
admirables, nos deferts changés en paradis terreftres ;
ce que les eftrangers & regnicoles regardoyent avec
hofreur & en fe bouchant la veuë par leurs fourcils
refironcés, maintenant ils le contemplent ravis d'admi-
ration & de volupté, non fans tourner les yeux en
haut : diibns que les Princes n'ont pas feulement
138 MIOITATIONS SUft Lit rSXAUMS).
faiâ la paix cnfemtJe, mais que le Ciel U fait avec
eux, & avec nous, ft ne noue faic jtlua (èndr que
deg rofees, ft ne fera tant que noua auroni paix
âvec Dieu.
De ces rofées (laifTant à part la caufê des auifêi)
l'efficieute efl le Soleilj la madère, l'humidité enclole
en la terre ; la forme, l'attraSion ft difcufllon ; U
fin, la dillribution générale de l'humeur neceflàire k
U generadon par les pardes moyennes ft hautes.
Vous diriez que le Soleil eft un grand Prince fbu-
verain, qui dre fes tributs du peuple bas par ces
voyes ordinaires, & départ Içt ncheflcs (autrement
inutiles en fes cabinets) pour les employer i la nour^
riiure des beautés eflevecs, i la décoration, & meGne
à la defenfe des qualités louables , gardant en tout
ft par tout fa propordon harmonique , i U fpleo-
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMBS. 129
aux enfans, qu'on leur redemande puis après pour
cfprouver leur naturel. Ces chofes, di-je, montées
par attraétion dans le Ciel, font de là renvoyées en
riches bcnediftions pour en arroufer & rendre fer-
tile rheriuge du Souverain. Et comme les richefles
des peuples ne monteroyent point au threfor du
Prince s'il ne les exigeoit par voyes accouftumees,
les penfees. qui fe converdfTent en louanges à Dieu,
croupiroyenc & pourriroyent dans les vallées & ca-
chettes de nos cœurs, fi le Soleil de Juftice ne les
yenoic cercher, efmouvoir & efchauSer. Tel eft le
fom fans foin de TEfprit vivifiant.
Or voila la paix du Ciel avec nous, de nous à lui,
durant laquelle le commerce va librement, la charité
monte & defcend, (ce qui n'arrive pas fur les fables
d'Afrique où il ne pleut point) ou bien cette corref-
pondance difcontinuë entre le Ciel & nous, quand
nous fommes en guerre avec lui : lors les chemins
font fermés à la communication, fors aux armées d'en
haut, qui fe font faire place pour ruiner, deftruire,
& rendre la terre en cendre deffous un Ciel d'airain.
Ayant efié exprimé par deux tableaux quelles font
les benedidions celeftes fur les bénits, nous pouvons
par confequence des contraires, remarquer les male-
didions qui pendent fur la tefte des cœurs rebelles
à Dieu, & fur tout fur les boute-feux & femeurs de
difcorde, foit dans les Royaumes & Provinces, ou
dans les familles, foit en la confcience d'un chacun
particulier, voir ce que prépare le Ciel slux pefli-
feres opprejfeurs^ qui follicitent' les carnages & font
infatiables de fang.
Nous avons à nous efcrier fur eux aux termes
que nous donne noftre première figure de félicité,
qu'au lieu de participer au fain£l baufme & parfum
n. 9
130 MZDITATIOHS SUR LES FSSADHIS.
de bencdiâion, iU n'ont i aqendre d'en tuiuc que k
pluyc de Sodome. On leur appliquera les feuencet
qui s'enfuivent i
lit ont rendu du mal pour U bien. Dtpuis q^^il a
aimé nuiUdiéfàu, qiètll* Ptmak^e; & jMirc» qt^il
n'a point pris plaifir à la bttudiiHoa, qu'anfi tlU
itfioigne de lut. Il 1 aimé le mal-enconcre, qi^il ta
fait vefiu eoituM de fa robbe, ir qièeUe entre daufom
corps comme eau, & comme huile dedans fes 04.
Voila un aucre vdtement, & une ancre liqueur
que celle d' Aaron, pour Ici ennemîi de paix. Toutes
les autres Foudroyantes menaces font de par Dîeu le
falairc des ceuvres de nos adverfaires, qui ont per-
Jeeuti celui que tu avois frappé^ ^font laurt comptât
de la douleur de ceux que tu avots navrés, & qu'ils
MlfBITATIONS SUR LES PSEAUMES. 131
Feront pirometter Us efpics Cr la paUlt.
Ce qm en reftera O^ ievienira du grain,
JJtune hmche ejtrangere ejtouriira la faim.
On ne kur dira pas beaux font les pieds, & ce
qui s'enfuît; mais leurs talons feront plus beaux que
le Tîf^e, leur defpart plus beau que leur rencontre :
on lew dira bon jour à regrec, & Fadieu de bon
cflenr, voire le dernier, & enfin Tofficier de la dif-
corde aura pour fon éloge.
. Ok marche le meurtrier des fient Cr de foi mefme.
Portant fa mort au front, livide, pafte Cr hlefme ?
Il efi, au lieu de fer, armé de trahifon.
De dureté hrutale O^ lafche perfidie.
Sache le, houtefeu, que parmi Fincendie,
Rien r^ efi fi tofi hrujfli que V infâme tifon.
Or foit leur partage en Veflang de feu (r fovf^
fre nf.
Nous revenons à la troupe blanche, & n'avons
plus que la conclufion, qui dit que cette AJfemblee
heureufe Sent du Seigneur la faveur plantureufe. Ce
qui a fait defigner le mot d^ AJfemblee ou d'Eglife,
c'eft cette particule L A, qui fe rapporte à Sion,
& par confequent à la troupe des enfans de Dieu.
Ces benedi£tions fe peuvent bien appliquer à plu-
fieurs fortes de compagnies, mais plus particulière-
ment & véritablement à TEglife, & aux familles de
TEglife : car le Prophète en referrant cette béati-
tude à Sion defignee par L A, en fruftre privative-
ment Moab & Amaleh, &c. Et encorcs font inca-
pables de cette faveur les orgueilleux rochers qui
fe treuveroyent proche de Sion, d'autant qu'ils
eflevent leurs telles trop haut, & ne font fufcep-
MEDITATIONS SUR LES rSBAUMES.
tibles que des injureit qu'ils reçoiveiu par lu mctcores.
Ceux-là mefroes fonc cailloux endurcis, propres à
jeccer du feu & non à recevoir l'humeur favorable
qui pdTe delTus.
Encor pouvons nous remarquer comment en la
confecration & fanâificarion d'Aaron, on lui c^noit
le mol de l'oreille , le pouce de U main droitte,
& l'orteil du pied droîc, du fang qu'avoit rendu le
mouton des confecrations. Cefloic pour fournir à
toutes les parties du partage que nous avons déduit.
A l'oreille qui unit les fondions internes & enernet
du cerveau, celles du Roy & de fon Confeil, eft
befoing que le Ciel benilTc tant pour les intelligences
des myfteres & fecrets de Dieu, que pour celles des
affligions & requeftes du peuple. La mefine &veur
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 133
Mais n*efperei-votts point fin à vofire foufframe?
Point n^ef claire aux Enfers Vauhe de Vefperance^
Tranfis, defefperei, U/^y a plus de mort,
Qui foit en vojtre mer des orales le port.
Tout au contraire, c'ell en quoi fe paiînent en leur
extafe IsS bénits du Ciel, qu'en un aife tant incom-
prehenfible, il n'y ait ni excès, ni manque, ni dimi-
nution, ni altération, ni achèvement.
Heureux donc le troupeau fainô & efleu pour une
celle fucceilion ! Très heureux le lignage Que Dieu
en partage Choifit & retient ! Tous peuples du monde
habitable, W ont pas un traiélement femblable.
Car tous les royaumes de la terre apprennent par
leurs lafUtudes, dommages & mutuelles peines à
former quelque paix, mais fujette aux inexécutions,
aux prompts changements, & bien fouvent à cacher
fous les Oliviers les Orties & les Aconites : n^ ayant
que la paix en r£glifc, de laquelle on puiÂe dire
abfolumcnt : Voire pour Jamais ne mourir.
Baifons donc les pieds qui nous apportent la
tranquillité, la main qui nous prefente Tolive ; bri-
{bns le poing qui nous apporte le flambeau de ruine ;
gardons-nous des diftindions qui font Textindion
des zèles, qui allument les fureurs; ne mefprifons
aucun de nos frères, ni pour fa petiteffe, ni pour
eftre le dernier : ayans fouvenance que Jofeph con-
damné à mort, vendu, emprifonné, chaffé aux pays
des aulx & des oignons, nous peut un jour diitri-
buer le pain, les douceurs du miel & du laid.
Eftimez & attendez, François, d'une tribu, & que
vous avez vcu de la perfonne facree qui règne fur
vous à joie, que la force des Caïns ne vous efchaufife
point fur Abel. Si vos frères ont quelque fonge dif-
134 MBDITATtOHS SUR LES PSBAUHBS.
ferenc des voftres; û Jacob les dîftîngue de quelque
livrée, ne veades pas Jofeph aux Madianitesbazanez :
joinâ que c'eft luy qui de la follê & de l'exil a
redonné la vie à fes frères.
Gardons nos mains & nos penfces d'eafànglanter
fa robbe, car il la faudroii reprelênter au Père tu
jour efpouvanubU de fou dernier jugement.
OCCCÂSIOV^ ET q/i^gv^e:^.
DB LA UtDITATION
FAICTE sua LE PSËaUMX 84.
N grand Seigneur du Royaume
de France j plus ejlevc encùr en
meritei qu'en extrailion, fe com- .
plaignant aigrement & familiere-
"iïV 'C'(lC7y'P "'"" " ''°fi''' auteur, entre plu-
CJi^Z^^jffc^ f'"" liffiéHons, des dtax qui
— ^-^''"r^^ -^ I l'enfuiveni : la première ds la
grande ingratitude que Us Grands, les Républiques
(T les peuples rendent à ceux qui font litière de bien
tr de vies, pour s'employer aux affaires publiques,
<Tpar leuTslabeursfleriles,<D- par leurs périls mefprifés,
/oppofent aux malheurs <T ruines qui menacent leur
parti; l'autre, de ce que nuls ne peuvent sejlever par
fa vertu {quoi que ce foi t par les bonnes voyes) qu'ils
n'encourent les envies, <T la haine de ceux mejmes
fouhs qui (r pour qui ils r'employent, ir ne fayent
tous les jours, au péril du précipice, à mefure de
leur eflevation; ce Pfeaume fut choifi pour confoler
^confeiller ce Seigneur, tr ceux que pareille amer-
tume de caur afflige journellement.
Ij6 MBDITATIOKS SUR LBS PSIAUMIS.
Ctux qui plaifi à Dita Je Liafftr,
Ceax là ne font rien que ptnfer
A Ut ruiner V dejlruire.
FSBAUMB 84.
I. Eternel des armettf combien Jont aînutbUt tts
tabernacles!'
3. Mon ame ne ceffe de emtroùtr grandement ,
& me/me défaut après les parvis de l'Eternel : mon
caur & ina chair treffailUnt de joye après le Dieu
fort Ù- vivant.
3. Le paffereau mefme a bien trouvé fa maifonj
& VaroadclU fon nid, où elle a mis fis petits : us au-
leh. 0 Eternel des armées, mon Roy & n. " '
MEDITATIONS SUR LBS PSBAUMBS. 137
1 1 . Car V Etemel Dieu nous eft 101 SoleU & un bou'
cUer : V Eternel donné grâce tr gloire, & j^ejpargne
aucun bien à ceux qui cheminent en intégrité,
12. Etemel des armées , 0 que bien heureux eft
l'homme qui ^affeure en toi!
MEDITATION
SUR LE PSBAUMS 84.
temel Dieu des armées, c*eft à toy
à qui nous adreflbns nos vœux & nos
plaintes, par ce qu'il y a propiciadon en
ton fein, équité en tes jugements, force
À TÎâoire en ton bras, comme eftant le Dieu très
fort, qui retiens en ta puijfance les ijfues de la mort.
Que beaux font tes tabernacles! que tes exercices
campent defTous de belles tentes, & qu il faid bon
loger deiTous tes pavillons triomphans. Ce font
beautez qui ne fleuriffenc point pour eftre fenees
& fleftries fur le foir. Ce font palais eflevés dans le
Ciel, bien differens de ceux defquels les Princes fe
vantent pour y planter leurs titres orgueilleux. Les
pierres n'en gèlent point à la lune ; le vent & les
glaces ne les peuvent dilTiper ; leur eflevation ne les
menace point de ruine, pour ce que tout y eft fondé
fur le roc.
Telle hautefle n'offenfe pas le Ciel, comme fît
Babel; & les chapiteaux ne defpitent pas les nues,
pour en appeler le foudre à leur deftruétion. Voila
la caufe violente de l'amour fans mefure que nous
portons à tes parvis, o Dieu , & nos âmes pante-
lantes les vont cerchant, conune la biche les eaux :
MEDITATIONS SUR LBS PSIADMIS.
elles de&illeot en cène recerche, & le. paCaent en
leurs defirs enfiammeg, lors mefinement que les
méchants qui n'onc poïnï d'yeux pour le Temple
fpirituel, demandent : où eft la demeure de noure
Dieu?
Certes voici la dure fai{bn oïl les fidèles îm-
fonnenc de foupirs. Et bien qu'ils ayenidequoi fé^
mer la bouche aux impies, lur ce que la demeure
de l'Etemel n'eft pas aux maifons faites de mains
d'hommes, neantmoins ils fe trouvent empefchez en
eux-mefmes, à l'elclat de joie iniblence, & aux cris
de plus en plus monians ji^uea au Gel, aux infulta-
nons des perTecuteurs, lorfqu'ils bruJlent nos iW-
ples, dilllpent nos Aflmblees, raflaûants leurs ^«ux
charnels au renverfement des pierres mortes ; mais
plus i;nciir quand ils s'actaquenc aux vives, brifen:
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 139
«M prefonterai-je devant la face de Dieu! & puis :
£/f-c« à jamais que ton ire eflendras^ & ta fureur
de fils en fils ira? & encore : Souvienne^toi comme
tes ennemis, o Eternel, ta gloire ont abbaifee. En
ramercume de pareilles complaintes, nous cueillons
des' fleurs au Cantique du Prophète Royal que nous
n'avions pas remarquées auparavant. Mais le plus
predeuz temps que nous trouvons à dire, font ces
habitacles privez que rEfprit de Dieu avoit conftruiu
dans le fein de chacun fidèle.
Ces feins qui eftoyent {knâuaires, ces cœurs
cables de la Loi, & fur lefquels elle eftoit efcrite du
doigt de Dieu, ces eftomacs, cabinets des threfors
de confiance, ont fait ouyr mefme dans les feux les
magnifiques paroles du Dieu vivant. Ces premiers
Temples ont elle abbatus par la mort, & en leur hon-
teufe pollerité nous ne voyons que mafures, retraites
de ferpents & de lutins, de vices & d'Lnfcdions.
Ces pourceaux, où les diables fe font jettes, font
corps fans ame & fans vie, puifqu'ils ne fentent pas
la froiffure de Jofeph. Ces cœurs affadis que Dieu a
laifl*é fondre en les abandonnant, pource qu'il en elloit
abandonné : ces feins qui ne font fainds ni Tem-
ples, mais cloaques d'eaux puantes & de lafchetez,
ont changé les violences, par lefquelles leurs pères
ont ravi le Royaume des Cieux, en tiédeurs que Dieu
vomit de fa bouche, en mortelles froideurs, en té-
nèbres Egyptiennes : ténèbres, di-je, par l'abfence
du feu qui fut jadis marque de la prefence de Dieu.
Ifraël eil a£fligé par les Balaams accueillis pour le
maudire, par les Jafons, par les Alcimes : car les
bouches qui mefmes avoycnt efté facrees à la vérité,
'partifanes du Prince du monde, meurtriers & men-
teurs, accufent le peuple de Dieu, telmoignent contre
140 MEDITATIONS SVK. LES PSBAUUBS.
lui, trahilTeai Jerufalem, employent leur éloquence
mercenaire Jt cbancer le meurue pour viâoire, à
avilir le fang racheté par celui de Jcfus Chrift,
vanter les bru roidet des tueurs, coûter pour fange
les morts de Judas, ellever la juftice des Nicanors,
opprimer de blafine les efgorgez, fiùre fleurir les
uns en leur bouche & etcrits par loiianges fèines
& menfongeres, & vomir fur les affligés le jargOB de
Semeï contre David fugitif ; &. ainûfe rendani bour-
reaux de leurs compagnons, ou par la peur qu'ap-
porte l'infidélité, ou par k vilaine & mercenaire efpe- '
rance que le Diable pa}'e en flieilles le plus louvent.
On a efcrit que le peuple allant en la captivité de
Perfe, quelques Prophètes, fuivis de leurs eo&ns,
allèrent cacher les précieux meubles de l'Eglife,
{&. entre autres ce feu facré, tefmoin de l'aflldance
MEDITATIONS SUR LBS PSEAUMBS. I4I
ienritude du Tyran d*eiifer, ont laifl^ mourir dedans
leurs cœurs, jadis eftimés fanâuaires de Dieu, ce
feu puiflknc de luire & de brufler, & ne produifenc
aujourd'hui de leurs bouches que flegmes puans,
& vilains excréments de cette eau graflfe, dans laquelle
les cœurs & les feux fe font noyés^ N^eft ce de
quoi tomber fur nos genoux pour crier vers le Ciel :
Tourne à part, o Soleil de Juftice, le nuage efpais
de nos peïchez, à ce que ces rayons mettent en
feu nos glaces, & fay de nos puits fecs des autels
(umans en bonne odeur; refais en des Temples,
remets y ton Arche, l'Urim & Thumim, & tire
encore dehors facrifices des nephtars & purifications.
0 que bien heureux font ceux qui habitent en ta
maijbnj qui te louent incejfamment ^ & qui faifants
leur profit de leurs défauts, embraffent les petites
colonnes du Temple nouveau, rexercice de tes
louanges qui leur eftoit ennuyeux, prenent un ap-
pétit & une faim falutairc du pain des Anges, au
lieu de leur damnablc fatieté, & logent une loif ar-
dente en la place du mefpris, ayant perdu de veuë
la maifon de Dieu.
Il n'y a plus parmi nous loi ni foi ; & tant de
lafchetés & perfidies, qui ont rendu Ifraël mef-
prifé aux nations voifmes, horrible à foi mefme,
viennent de ce que la vérité, qui ne peut loger ail-
leurs que dans TEglife, a fuivi fon exil. Nous avons
eu honte d'elle, elle de nous : nous lui avons dcfiiié
fon logis accoutumé, elle a eflé bien venue au Ciel :
nous lui avons defrobé nos yeux, elle à nous fa lu-
mière : nous avons fait un veau d'or & adoré les
beftes, & leur joug nous efl demeuré fur le col :
nos Moyfes ont eu les bras appefantis, quelques uns
par les prefents d'iniquité. Ifraël a fuy devant Ama-
I4> MIOITATIOKf tUK LKt PSKAOMIt.
lec, au lieu qu'aucresfois quand il* ont levé les nttint
hautes, IfniS a efté vainqueur.
Quind ferons noui irrités de noftre la&hetéf
pour la convertir en courage & Dieu } Quand lêron^
nous las d'avoir let pieds des vices ft videux fur
nos gorges, ft faire hommage aux portes d'enfer ? Il
faut dire de toutes nos afièâions, Q nout voulons que
ce foit avec efficace, 0 qu» bieit-iuureux ^ Pbuair^
duquel Vamour & la eraintt font m Im'^ & ctux «m
l'efprit defqiuU fimt m ehâmîiu batttu, ft à qui m
donnes d'y cheminer de verni en vertu, de fbree en
force, de benediâion en beoediâion.
Pour reprendre ce bon vonlotr, nous ne fauriont
fi tod dire, Il faut eettfifftr i DUu mffht tnttf^,
qu'auflicon l'Etemel n'ait ofté la peine de nos
pcfchcz : & voila !e dcfcfpoir changé en efpcrance,
e en doarinc. & l'inconflanirc en icrmea':
USBITATIONS SUR LES PSEAUMES. I43
Jacob, & laquelle ne confond point en la tribula-
tîoa melme, maïs porte patience, la patience
refpreuve, & refpreuve Telperance. Ces premiers
gÊgu dé la bonté de Dieu bien receus, bien poflè-
dés, ameinent le relie à la perfeôion, qui ell à faluc,
fuivant ce qui eft dit : A celui qui a, il lui fera encores
damU, Par ce moyen ceux qui ont cheminé de grâce
en grâce font couronnez, comme nous avons dit, de
bexioUâion en benedidion.
Que ii ce chemin ell plein d'efpines, il la voye de
fàlut ell eilroite, il la fecherelTe de Baca & le val
des meuriers fait périr de foif les palTans, cette
Ibif £ût le deilr, & le deiir le courage. Creufons y
des puits, Dieu y fera fourdre les ruiilèaux à
laiét & les fontaines des eaux vivantes, qui eftan-
chent la foif pour jamais, A ce labeur plein d'cfpe-
rance, le Ciel, fe rendant partifan de nos deflTeins,
fe liguera pour eux, les arroufera, les emplira de
fes pluyes, faveurs & bcnedidions : Et tout pour
avoir dit à Dieu^ Tu es ma retraite^ & avoir eftabli
le fouverain pour ton domicile; il rcfpond favorable-
ment en cts termes : Puis qicil m'aime affcêfueufe-
ment y je le colloquerai en une haute retraitte. Je
ferai avec lui en deftrejfe ^ pour ce qu'il cognoifl
mon Nom.
L'Efpritde Dieu nous fait prefent d'une merveil-
leufe confolacion, en ce quil die que palTant la
vallée de miferc & les deferts du monde, les plus
courageux caveront des puits qui fcron; emplis de
la pluye du Ciel. Ceux qui travaillent aux puits
& fontaines n'employent pas leurs peines pour eux
feulement : tels ouvrages ne font point à l'utilité
d'un particulier, mais faits à Tufage des voifms & à
la publique commodité.
144 MEDITATIONI sua LIS PSEA
O VOUS qui gemîHèx pour avoir travaillé aux af-
faires générales, y avoir defpeodu vos biens, voftre '
fang & voftre fueur; qui avez fupporté pour les
peuples les ingradcudes, les blafmes, les foupçoDS,
les mutineries, les révoltes; & enfin ce que louffre
par eux quiconque fe perd pour cuit : Ou vous per-
(bnnes particulières, qui avez violenmient travaillé
pour les parents, domeftiques ou amis ; qui ineûnes
avez penfé relever les premières ingratitudes par les
bienfaits plufieurs fois réitérez, pareils À ceux qui
n'ont pas laifTé de creufer les puits, quand la
[erre ingrate n'y envoie point d'eau ; qui avez par
pcrfeverance elTayé de vaincre les azurs endurcis,
& continué vos travaux dans les arènes feiches & fans
humeur, voicy le portraiâ de vos peines & de
vos fuccez. Le Ciel, qui n'eft jamais ingrat, repare
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. I45
font oftez de la main du Père, qm envoyé & fufcite
DOS envieux comme vilains & infâmes vers, pour
piquer le kikajon, & faire mourir les verdures deli-
deufes, par là nous ofter des mains & de la fré-
quentation des mefchants, fes ennemis, & nous chaf-
&r droit au tabernacle de Sion. Obfervons donc
cette règle, de n'affeâcr que le but de vocation
fupemelle, baifans la main de Dieu qui arrache
des noftres les voluptez, donne amplement le necef-
faire, & ne veut cftre invoqué que pour le pain
quotidien.
Prefle donc, o Etemel, à nos requeftestes oreilles
&vorables; regarde la face de ces oinâs. Ceft nous
que tu as choifis & fanôifiez; tu nous as feparé
pour ton peuple acquis, ta facrificacure royale, ton
héritage bien-aimé. Pour nous faire tiens, tu nous
as rachetez, & payé noftre rançon de fi haut prix,
qu elle a courte le fang du Fils de ta diledion. Con-
ferve & garantis ton héritage contre les cmbufches
du mefchant, qui a couché fon trait fur la corde ;
défends -nous de la main d'oppreiïe & des traits
enflammez de Satan.
Ton Efprit nous apprenne d'eftimer plus les ca-
chettes feures de ton Temple qu'crtre haut montez
es ubernacles d'iniquité, puis qu'un jour chez toi eft
plus précieux que mille au palais des Grands, def-
quels les grades plus eflevez ne font que pièges
& fientes à qui les cognoirt bien, n'approchent ni en
heur ni en honneur la qualité des fidèles portiers
en la maifon du Roi des Rois, n'y ayant point de
comparaifon entre les clefs dorées des cabinets de
vanité & celles du Royaume des Cieux.
Là defTus nous avons à méditer que tous les
plus violents fouhaits & defu's tendent à deux fins
II. 10
146 MBDITATIOKS SUR LB5 PSBAVHES.
bien difTerenies, qui ont contraires effets : afçavoîr,
à la fplendcur & à la feurt^ tout enfeDible. L'une
veut t'eUevatlon, ft l'autre la balfeflê : l'une tend it
ctlre veuë par deSiis les autres, l'autre ï etlre ca-
chée, mefme derrière foi. La première condîiioïi ell
expofee au péril des envies, l'autre & la honte ft au
mefpris; la première craint les précipices, l'autre
d'edre foutee aux pieds ; l'une de s'eftourdir en fon
cflcvacion, l'autre de pourrir en la fange & l'obf-
curité; & toutesfois tout homme de deffein veut de
chofes tant hccerogenees faire un très difficile accord.
Car ainfi qu'il advient aux maladies implicites,
ceux qui fe veulent guérir de l'envie & du mefpris
cnferoble, n'employent aucun médicament falutaire
à l'un de ces deux extrêmes, qui & l'autre nefoit
poifon; pour ce que leparoidre appelle i foi la veuë
& l'envie, & la feurté fuit tous les deux.
MBDITATIOKS SUR LES PSEAUMBS. 147
ft qui en meûne temps & fur mefmes fujeâs mec en
«Tint noftre juftice comme Taube, & puis noftre
preud'honùe comme le midi. C'eft lui qui a reUvé
h ckêitf de la jfouâre^ & le fouffrêteux de la fiente
& lefaiifeoir avec les Principaux^ & qui eft notable,
awc les Principaux de fon peuple,
Auffi dilbns-nous avec David, U me cachera en fa
hgette au mauvais tenu; il me tiendra caché en
U cachette de fon tabernacle : & quand & quand eft
id|oufté, // me haufera deffus un rocher^ ma tefte
s^ejkpera par deffus mes ennemis.
Le mdme qui avoit caché Moyfe dans le cofiret
de joncs quand il fut expofé, defcouvrit fa beauté à
la fille de Pharaon, pour lui communiquer après fes
rayons & fa clarté, jufques à telle fplendeur qu'elle
fut infupporuble aux yeux des Ifraëlites. C'eft lui
qui en noftre nuift nous guide avec un flambeau,
ft au plus grand midi nous couvre & conduit par la
nuée ; c'eft lui qui a protégé fon peuple dans les
abyfmes des eaux, de là dans les deferts, où, après
avoir efté halé & bafanné, il Ta fait luire
... Comme fer oit
Voile d^un pigeon qui fer oit
De fin argent hrunicy
Dont U pennage efiincelant
Fait femhler Voile en Voir volant
Du plus fin or jaunie :
Faifant de ce peuple tout fauvage des triom-
phants, qui firent leur glorieufe entrée dans les
conqueftes de Canaan. Le mefme qui ii voit caché
David entre les brebis, le fit triompher glorieux à la
tefte de fon armée, quand il fut temps; & pour un
temps l'ayant déprimé en la caverne d'OdoIIan,
148 MBOITATIOKS SUB. LES FSEAUMBS.
le combla de Ipleodeur fur le dirofhe dlfnSl,
Me Ibit permis de choîHr ennv loiu lei exemples
de noUre ficde celui de la Roine Elifabtihf de
laquelle on a e&ric :
Ia main qui U ravit de la gtoU en M /aUj
Qià thangta la felUttt en la thairt rayait j
Et U /util de la mort en un degrt Ji haa,
Qai fit un tribunal d'un etltfie efÂ^^aut :
L'ail gui vid Ut defirt a/pirani à laJUmwu,
Quand tu gardai ton ame en voidant ftrdrt Famef
Cet mI vid Ui danger», fa main porta Ufax,
Te fit hturtmje tn guo'rt V ftrwt dam lapaix.
Diroos-nout que mefioe en la peribnne de fbn
bien aimi FÛt, il a uCf comme il lui a pieu des
ténèbres, de U crèche, de ia fuite en Eg)'pte, du
MSDITATIOKS SUR LES PSEAVM2S. I49
par Noë, les Patriarches, Moyfe, David bien aimé,
Salomon le fage, les Prophètes, Apoftres, ft grands
fenriteurs de Dieu. Il a falu que ces excellents
TÎfiiges ayent efté marquez de quelques poreaux,
ftrSglife eft demeurée obligée à fembler fon chef
aux divers temps de gloire &d'aneantiflement, & en
ces tems calamiteux la gloire de TEtemel paroift
oblcurcie, comme le peut eftre le foleil, & la bien
aimée du Seigneur fouflBre comme la lune, non à
relgard de ces corps précieux, mais du noftre,
edipfe & defeâion.
Telle eftant la condition du chef, de Tefpoufe, ftde
lêsenfSuis plusiàvoris, qui fera celui des membres de
l'E^e à qui telles marques feront en horreur,
puifque mefmement toutes ces viciflîtudes tournent
en triomphe aux efleus, & qu'après toutes les
eztremitez que nous confiderons, la dernière nous
pafle aux extrêmes félicitez ; la cachette la plus
noire, la folTe la plus profonde, & la plus infime
de nos conditions eft le fepulchre ; la cheute dans
la fofTe eft le bond de la plus haute eflevation ; les
ténèbres les plus obfcures de toutes, qui nous don-
nent la dernière nuift, font celles qui font vaincues
par l'aube de l'Efperance, & defquelles nous fortons
pour poffeder le luftre de la plus vive fplendeur,
qui eft la gloire des Cieux.
D'où viennent ces effefts ii contraires & fi excel-
lents, hors la penfee & le pouvoir de l'homme, qui
ne peut produire, ni fuffifamment coignoiftre la con-
ciliation de telles extremitcz ? c'eft de Dieu ; & com-
ment? pour ce que Noflre Seigneur Dieu très doux
êft foUil & bouclier pour nous^ qui feul peut donner
gloire & gr<^<^^} fi^efpargnant aucun bien fait à ceux
qui cheminent en intégrité. C'cft le treffeur bou-
i;0 MSDITATIOKl SUB. LU PSBAUMSS.
elier, & U gloûv efprouree qui nous retire quand
il fuie, & puu ea tempi opponun notu fait aller
haut la tefie levée; comme aulli les boudien dea
anciens qui lèrvoyeni à les couvrir dea coups, Her-
voyencauflî ji créer les Empereurs, en les enlevaiu
fur des boucliers à la veuë des peuples en marque
d'eleâion.
11 eft tout enfémble nofire lumière, nofire yîc-
toire, & quant & quant noftre lëurté ; fes m^ftw^^
rayons qui donnent la fplendeur, portent auffi U
proteâion, car ils aveuglent les Sodomîtet pour
îauver Lat : & comme les anciens guerriers fùfc^rent
luire leur pavois & boucliers, ce bouclier de grâce
eft rayonneuz, puiflant de parer aux coups, & d'ef-
bbuyr les yeux des ennemis. Qaî le regardera, j'en
irourem loul efddirê ; l'avez vous coocctnplii, vous
MEDITATIONS SUR L KS PSEAUMBS. 151
fêncons efclairés de rEfprîc de lumière, quand du
profond de nos ennuis le cœur s'efleve aux Cieux,
pour dire là dedans : A coi je foupire, à toi je tends
les mains, o Sire. C'eft pourquoi rÉfpric defpeint
les deux propriétés, de ce Soleil & de ce bouclier^
fous gloire & grâce; gloire au Soleil qui produit
nos preud^homies eh plein midi, grâce au bouclier
qui nous couvre des ennemis, & nos pefchez de la
tace de TEcernel.
Mais voulez-vous voir dans le profond du péril mor-
tel un portrait notable de ce que peut ce grand Soleil
âê Juftice^ & ce bouclier qui ^e tombe pas, comme
les ai»ciles du temps pàflTé, pour une fabuleufe fuper-
ftition, mais pour un vrai fecours; voulez -vous
voir la fplendeur celefte bien mariée avec la feurté ;
voyez flamboyer cette grande fournaife ardente de
Nebucadnetfar, & le grand Ange du Ciel, qui la
vient rendre plus fplcndidc qu'elle n'eftoit, y porte
le bouclier d'en haut, la rend feure aux condamnés,
& pernicicufe à leurs bourreaux : il vient rendre cou-
ronnés & couverts, honorés & afTeurés les trois
frères qu'il fait de fa compagnie, & honteux & trem-
blants les ennemis de la vérité. Difcourez, philo-
fophes vains, comme il vous plaira fur le fouverain
Bien; prophanes mondains logés dans les volupccz,
aux honneurs & aux richefTes, nous avons trouvé à
quoi attacher nos defirs : c'eft au pavois de rEtcmcl,
où nous trouvons la cachette fans honte & l'eflc-
vation fans péril.
C'eft de là, o Tout Puiffant, d'où la fplendeur
de ton confeil de feu m'a vifité en mes prifons tene-
breufes ; c'cft de là qu'a coulé le baufme celefte dans
mes playes. C'eft de ton faind mont, que j'ay ouï
la fentence de ma gloire & de ma grâce, quand les
15a MEDITATIONS SUR LJtS PSBAUICBS.
mefchans ont prononcé celle d'opprobre & de mort :
c'eft là où je vu. ployer met voilet ufees de tem-
peftes, je ne voi point ailleurs de port ni d'afyle
pour mon exil. Dieu (èul eft ma fortereffe, ma mah'
fom bien munie qui mê gardera dg dgftrejê^ nf^mni"
romura de chants de triomphe : mon amefe tiendra
coye envers lui, fous cette haute retraite je ne ferai
point esbranlé ; là où eft ma délivrance, ma gloire,
le rocher de ma force, & corne de ma fameté. Ce
font les termes du Prophète, & pour finir comme
lui au Pfeaume prefent,
Bref Dieu tris fort, heureux fe eroi
L'homme qui i'appuyt fur toi.
k
OCC(rfS/a>C ET OfKGV^E^T.
DK LA IISDITATIOK
FAICTl SVK Ll PIBAUME 73.
VBi.Q,VMS SeigneursdtCafcogne,
après de grands femices faits au
Roy Henri IVj Je voyans ap-
pauvris ir privés des honneurs
qu'ils efiimûyent (non à tort avoir
ejié mérités par les vertus ; entre
ceux-là le Vifcom(e de Gourdcn,
qut l'hijioire nous fait cognoijlrej ayant pris un re-
gret, qui lui dora Jufques à la morij de ne pouvoir
eftre honoré d'un collier^ noftre auiheur fit prefent à
fes a/nu de celte pieee^ qu'il ejliraa propre à leur
eonfotation.
PSEAUMB d'aSAPH.
I. Quoi que ce fait, Dieu efi bon à Ifraëlj afçavolr
â ceux qui font nets de caur.
».0r quant à mai , mes pieds m'ont prefquefaillifù- ne
j'en a comme ritnfalu que mes pas i/ayent gliffé.
3. Car j'ai porté envie aux infenfeij voyant la
profperité des mefchans.
154 MEDITATIONS SUR LIS "PSIAUMBI.
4. D'autant qi^il liy a point éCefireintês en la
mort dUceux : ains Uur force efl en fon entier,
5. Us n'ahannent' point comme les autres hommes,
& ne font point battus avec les autres hommes.
6. Pour cette caufe, orgueil les environne comme
un carquan, & accoufirement de violence les couvre,
7. Les yeux leur fortent dehors de force de graiffe:
ils furpaffent les deffeins de leur cœur.
8. Ils font pernicieux, & parlent malicieufement
d'opprimer, & parlent comme haut montei.
9. Ils mettent leur bouche aux Cieux, & leur
langue trotte par terre,
10. Et pourtant fon peuple en revient là, quand on
leur fait fuccer Veau à plein verre.
11. Et difent, comment le Dieu fort auroit'-U eo-
gnoiffance, & y auroit-d cognoiffance au Souverain f
12. Voila, ceux-ci font mefchans, & ff^^W.. à leur
aife en ce monde, ils acquièrent de plus en plus des
richejfes, ,
13. Quoi que ce f oit y c?efi en vain que j'ai nettoyé
mon cœur, & que j'ay lavé mes mains en innocence,
14. Car fai efté battu journellement , & mon
chafliment revenoit tous les matins,
I ç. Mais, quand j'ay dit, j'en parlerai ainfi, voila,
j'ai efté defloyal à la génération de tes enfans»
16. Toutesfois fai tafché à cognoiftre cela, mais
il m'a femblé fort fafcheux,
17. Jufques à ce que je fois entré aux fanàluaires du
Dieu fort, & que j'aye confderé la fin de telles gens,
18. Quoi que ce foit, tu les as mis en lieux gUf"
fans, tu les fais tomber en précipices,
19. Comment ont^'ls efté deftruits ainfi en un mo^
ment, font^ils défaillis, ont ils éfté confumés d^ef"
pouvantements?
^
MEDITATIONS SUR LES PSSAUMBS. 155
ao. Ils font comme un fonge quand on s^eft ref^
têillé* Seigneur^ tu mettras en mefpris leur reffêm'-
blance quand tu te refieûleras.
ai. Or, quand mon cmur s'en aigriffbitj & que
Je me tmtrmentois en mes reins;
aa. Lorsfeftois abruti^ & nfavois aucune cognoif-
fonce : fefiois'une groffe befte en ton endroit.
23. Je ferai donc tous jours avec toi; tu rtCas pris
par la main droite.
24. Tu me conduiras par ton confeU^ & puis me
recevras en gloire,
25. Quel autre af-y> au Ciel? Or n ai-je pris plat"
fr en la terre en rien autre qv^en toi,
26. Ma chair & mon cœur efioyent défaillis^ mais
Dieu ell le rocher de mon caur^ (r mon partage à
tousjours,
37. Car voiioj ceux qui s'efloignent de toi périront:
tu retrancheras tous ceux quife desbauchent de toi,
98. Mais quant à moi, d'approcher de Dieu c'ejl
mon bien :faiajis ma retraite fur le Seigneur Eter~
nelj afin que Je raconte tous tes ouvrages.
MEDITATION
SUR L£ PSEAUMB 73.
Si eft-ce que Dieu eft, Ire.
UAND nous mefurons à rœil de la pru-
dence humaine l'eftac des enfans de Dieu,
& à Toppofice celui de fes ennemis, ne
voyans rien dans les conflernadons & mi-
Icres de TEglife de quoi efperer; & de l'autre
156 MEDITATION'! SUR LBS PSBAUMBS.
col^é rien à craindre dans les iriomphei & pro-
fperitez, l'ire de Dieu paroifîant comme attachée
fur les bons, 8c fur les autres l'apparence faveur
du Ciel, il faut un grand foudien & fecours de
l'efpric de Dieu pour pouvoir dire de la penfee,
comme de la bouche, Quoi que et foitj Dieu *fi bon
à Ifrailj â ceux qui font MU (U caur. C'cfl U oà
il faut dire en foi-mcGne, & i bon efcient, J«
prendrai garde à mes voyes, que je nt pecke par
ma langue, iT garderai ma bouche avec une mufe-
liere, tant que It mef chant fera devant moi. J'ai efii
muet fans dire moi, je me fuis teu du bien; mais
ma douleur s'ejl rengregee; mon caur ^efi efeha^ff'i
dedans moi, &* le feu ^efl embrafi en ma meditit-
tion dont j'ai parlé de ma langue. Adjouftons :
Eltrnel, m«ts garde à ma bouchf; garde le guichet
MEDITATIONS SUR LES PSEAUM£S. 157
encore celui qu'il exerce cous les jours) nous fommes
infiniits d'en laiflèr le temps ft les circonftances en
k main du Tout Puiflanc, qui en ayant refervé la
cognoiflance à lui feul, s'en eft aufli gardé la dif-
poficion.
Ce qui rend la more defirable aux affligez, eft,
qttil iy a point d^êftreintes en celle des mefchans,
& leur force demeure en fon entier, c'eft-à-dire,
n eftanc point cette mort defiree, à caufe des langueurs,
au lieu que nous lifons dans le miroir de la patience
ces langages, le fepulchre /en va efire ma maifon,
foi dreffé mon liée es ténèbres , J'ai crié à la foffe,
tu es numpere, & aux vers, vous efles ma mère & ma
fmur : & où eft-^ce que fera mon attente f voire qui
efl^e qui verra mes attentes? elles def pendront en bas
avec les barrières du fepulchre : Si nous y fommes
enfemble, le repos fera fur lapouffiere.
Au contraire voici ce que die le Prophète des
mefchancs ; qu'ils n'ahannent point avec les autres
hommes, & ne font point battus avec les autres.
Mais encor n'eft-il point eftrange que Dieu fup-
portc la profpericé des ennemis, comme Torgucil
qui vient de profperité, & les blafphemes qui vien-
nent de l'orgueil : car il les environne d^un carquan,
& accouftrement de violence les couvre. Vous diriez
que par cet accouftrement l'Efprit de Dieu veut
defigner les carquans que plufieurs ont obtenus à la
perîecution de l'Eglife, la plus part fans mérites
militaires, mais les ayant rcccus pour couronnes de
leur graiffe & de leur orgueil ; carquants que les
Payens ont donné à ceux qui ont mis les villes en
villages, à ceux qui avoyent fauve les citoyens,
maintenant ottroyez à leurs dcilru^curs : mérités
par ceux qui ont fauve l'honneur du pays, pofTedés
158 MBDITATIOHS SOft LIS MIAOMXI.
par ceux qui l'cnc dahonoré; deut uu lâaveun
des peuples, & ottroya à ceux pir qui les uns & Ict
autres «ne efté nùnés.
C'en cet accoufiremeoc de 'nolence qtû fîït dire
aux fois malins, B j^y a pemt dm Dimt : ou bien.
Nous avons le dtffus par nos laitgtut : &, Qtd tfi
Seigneur far Menu? Et le Seigneur foulant ces
chofes, permet qu'ils profpercDi, m^Mu qut les
yeux leur forleHt dehors A fore» Sm gr^ff», & q^Ut
farpafent les àeffdiu de Uur emw. Vtdla un beau
portratâ de ce que nous to}WU tous les }ours,
que les plus marauds, le* plus i^ioranta, ftuptdes,
& donnons fur le chevet de leur félicité toat portés
aux Eftais, qu'ils n'ont peu defîrer fans cc^ioïâknce,
pourfuirre ni eTpercr fans defir. Cela nous eft
defpeini en quelque difcours tragique par l'inlblcDce
aiTiJe au tribunal des Rois, de laquelle !1 efl dit :
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 159
nais à la hauteur où ils fe trouvent, fe font enfans
de Jupiter, & lors ils mettent leurs bouches aux
Cintx & leur langue par toute la terre^ qu elle bat
& court pour di(pofer de tout ; ils ne cognoiflfent
{dus ni parents ni amis, mal, heureux Tinnocent
devant de tels juges, & le fouffreteux aux pieds de
ces infolens.
Voila le breuvage amer que Dieu prefente. Et
pourtant /on peuple en revient tàj quand on leur
fait fucer cette liqueur à plein verre. Les humains
enyvrés de fi fumeufe & amere poifon, abreuvés
de vîna^re, & faifans de fiente leurs repas rafiafiés
de fiel, veulent entrer en conte avec Dieu, & dire
avec Job, A la mienne volonté que je fçeujfe oà eft
l'Eternel^ où Je le treuverois; f entrerois jufques à
fon fiege; là déduirais je mon droit par ordre devant
lui & remplirois ma bouche d'arguments : & ailleurs :
T'efl il bien feant que tu me faces tort^ que tu dej-
daignes le labeur de tes mains? C'eft cette amertume
qui produit tant de hardiefle en fes ferviteurs & que
Dieu a pardonné en fa juftice; mais il ne par-
donnera point à l'inique triomphant, qui dit en fon
infolence. Comment le Dieu Fort auroit-il cognoij-
fance de ce que nous faifons? Où prendroit-il cette
cognoiffance ? comme ne pouvant comprendre que
de fi loin, que de fi haut^ Dieu puifTe juger & méfier
fon authorité dans les hommes de terre. U Eternel
ne le verra point ^ le Dieu de Jacob n'en entendra rien.
Mais Dieu aura pitié des affligés pour fon
Nom, il excufera chacun fidèle difant avec angoifle.
Voila ^ ceux-ci font mefchans ^ à leur aife en ce
monde^ ils acquièrent de plus en plus des richejffeSj
maintenus & augmentés tous les jours par leur Dieu
Mammon auquel ils fervent & facrifient; il exauce
l6o MSDITATIOHS SOR LI) PtKAOHIS.
leur prière', & leur fitic îou}t de leuii t(bux, ft ceux
qui fervent le Souvcrun ont fum l loi pour netiit.
Ha païïenE outre a'elcrUnc, quoi qu» n foitj
t^efi m vaim qam fm tutnyi mou cmnr & ^m* fat
lavé mtj nuuiu tm ùaioetnetj & puit empliflënc
leurs bouches, & prennent ces paroleisu tiblewi de
la patience, Dint j^a-t-il pdj nu mai trmf t^t^
i-il pat compté UMtêi mât dâfmarehtif jE J'ai eA«-
miiié em faujité & Ji mou pttd ^afi ktfié à iromptr,
qiioH me p*J* t» det balaMems jujUt^ tT Dit»
cûgnoifira ma» inngriréf ji mat emur a fiâwi mtt
ytux, fi j'ai fait défaillir Ut ytux A la v^/Wj fi
l'ûrpktlin i^a point mangé tntc moij fi j'ai 9au a*
homme ptrir à foKtt ftfirt vaflu, fi lot rmu tu
n^ont point b*mt, ir /il n'a poùit tfié tfAai^é d*
1,1 lame de mes aigneaux , Ji ma main a baifé
MEDITATIONS SUR LSS PSSAUMES. l6l
6* Sots ont paffé fur moi. Enfin il a falu efdaccer
plus avant : car Satan, qtd ne perd aucune occaflon
de nuire, nous diâe de plus furieufes leçons, & ap-
prend ces textes à l'affligé : Perifft le jour auquel
je nafquis, & la mdél en laquelle fui ditj Un mafle
eft né; ce Jour là ne foii que ténèbres^ que Dieu ne
le recerche point d^en haut & que la lumière ne Vef^
claire point. Ténèbres & ombre de mort le rendent
poUu^ muées demeurent fur lui; qi^il foit rendu ter*
nhU comme le jour de ceux à qui la vie eft amere.
Obfcunté faifffe cette nuiàl lâj qu^elle ne s'esjouife
poimt Sefire entre les jours de Van^ & qi^eOe ne
tiene point en conte parmi les mois. Voila^ que cette
nuiâl là foit folitaire^ qu^on ne iefgaye point en
ellcj que ceux-là qui font eflat de maudire les jours j
la maudijfentj /appreflans à remettre fus leur dueil.
Les eftoiles de fon ferain foyent obfcurcies^ qu'elle
attende la lumière^ mais qu'Ur^y en ait point ^ & qu'elle
ne voye point les rayons de Vaube du jour^ de ce
qu^elle n'a pas clos les portes du ventre qui m'a porté ^
& n'a point caché le tourment arrière de mes yeux.
Que ne fuis^je mort dés la matrice? Que ne fuis~je
expiré fi toft que je fuis forti du ventre de ma mère?
Pourquoi m^ont prévenu les genoux ^ pourquoi aujji les
mamelles^ afin que je les fucçaffe? car maintenant je
feroye glfant^ & me repoferoye^ je dormiroye^ & dés
lors y euft eu repos pour moi.
A tel excez de douleur, il eft bien befoin que Tef-
prit confervateur s'oppofe en deftruifanc, & difte
aux efleus nouvelles pcnfees, & un chant de repen-
tance, avec une palinodie qui prenne le contre-ongle
du paffé comme : Ouy, je porte des peines infuppor-
tables; mais quand j* ai parlé ainfi (r ainfiy voila ^ j'ai
efté defioyal à la génération de tes enfansy o Dieu,
n. II
i6i
MEDITATIONS SUR LSï PSEAUM
- j'ai efté eoiànt baftard de la promefle, j'ai degencré
à cette race légitime & fainfle, qui reçoit les verges
de mefme main & doucement comme le pain,
& baife cette main affligeante en tefinoignage d'amour.
Cette bonne pen{ce a efté coqibattue par la chair,
le fang & le fens humain ; tomes fois J'ai tafehé à
cogitoijire cela, maù il nia jtmbîi fort fajehtax; fi
bien que n'y ayant rien de la prudence humaine,
pour accorder ce différent, j'ai invoqua la &gellè
éternelle au fecours de mes perplexités, & à mon
aide au bon combat, jufques à ce qut /« fois entré
au fanéluaire du Dieu Fort, oà j'ai eonfideri la fin de
telles gens. C'etï cette fin qui porte jugement, décide
le procès, monftre feurement où eft l'heur, où le
malheur, où le faux, où le véritable, car les abomi-
nables & condamnés, aufquels je porte envie, h'ont
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 163
à la recognoifTance de leur falut, quand ils cerchenc
rinftrudion ou confoladon du Confeiller fidèle,
quand ils demandent les paroles de xie^ & comme à
Saint Jean, qui eftoic FAnge envoyé de Dieu :
Maiftre, que ferons-nous ^
Les enfims de Dieu, eftantsàFhuys du Sain£l des
Saînâs, Yoyent arriver ime femme, bien que claire
brune de fon Soleil qui la regarde de tous codés,
d'une parfaite beauté, qui avoit fes veftemens def-
cfairés, fes cheveux brunis, couverts d^un fac & par—
ftimés de cendre; fes deux yeux noyoyênt fon
lôfage de larmes, toute en fang & en feu de dou-
leurs : quelque defolee qu'elle fuft, & tormentee
en fon courage, elle n'avoit rien diminué de fa ma-
jeftueufe gravité, le refpeft de laquelle empefche la
troupe de paflTer le foeil; & elle feule l'ayant
franchi prononça la harangue qui s'enfuit, de laquelle
elle fit les virgules de (oufpirs, & les points de
fanglots redoublés :
Eft-ce le douaire d'un mariage fi haut } Sont-ce
les habits fi richement brodés, dcfqucls je devois
eftre fi precieufemcnt atournee ? Où eft cett' union
profpere, pour laquelle je devoye laifler de fi bon
cœur père & mcre? Où eft l'or d'Ophir, & les
riches prefens de Tyr? Où font ces beaux & nobles
enfans qui devoyent eftre Rois triomphans fur la
terre?
Mon ame a tout fon faoul de maux, & ma vie
eft parvenue au tombeau; je fuis fequcftree parmi
les morts comme les navrés gifants au fepulchre,
& defquels il ne te fouvient plus, ains qui font
retranchés de ta main : tu m'as mife en une foftc des
plus baftl!s, es lieux plus ténébreux & profonds.
Les nations font entrées en ton héritage ^ ont poilu
■64 MEDITATIONS SUS. LES PSBaUMIS.
It temple de ta Saùiâefé. Bt ont doniid Ui corpt
mont d* tes fervùeurs pour liande aux oyfeaux du
deux, lu chair de têt bitH ainUs aux btfitt dé la
terre. Ils ont efpandu leur fang eomms eau, & i^y
avoit perfonna qui les enfeielifl. Tu u rejette l'ti-
liance de ton Ifnël, rompu toutes fes doifims; lu
as mis fes forterefei en rmu ; tu as fwhauffi la
dexire dtfes adverfaires, & resjouy tous fes eaiumit :
tu as rebouché la pointe de fôn efpee, & ne Fa point
redreffee en la bataille : lu as litre en eapiiwité fa
force, & fon peuple à la merci de la fanglanie efpee :
le feu a eonfumé leurs gens tfefliie; leurs vierges
n'ont point eu de dot de mariage; les Sacrificateurs
font tombés par Fefpee; les vefves i^onrpas eu congé
de pleurer : celles gui allaittoyent ait efli efvm
MBOITATIOKS SUR LBS PSBAUMB^. 165
qui reprefentoic mon chef a efté troublé par refprit
d'efiourdiflêmenc : mon Confeil a failli, mes Lévites
corrompus, & ceux par lefquels j'interroguois la
bouche du Seigneur devenus frénétiques, mes
Hfllflamtt fe font accueillis à maudire Ilraël; le mal
eft venu du Prophète, & mes autels ont porté le
facrîfice des Baalims.
Tu as fût fondre mon cœur, quand les Princes
2ui reprefentoyent cette place ont baifé la pantoufle
e TAnte-Chrift, & fur les pieds impurs lefché le
par {âng de leurs frères, & puis en (ont devenus
les bourreaux. Mes enfans, qui elloyent en mes
bras, ont efté affoiblis : & ceux qui les devoyent
isenir hauts pour la gloire dlfraël les ont £ùt choir
en bas en la faveur d'Amalec, ou bien ont tourné la
poignée de leur efpee vers leurs ennemis, & la pointe
k leur eftomac. Les enfans d'Ephraïm armés, d'entre
les archers, ont tourné le dos au jour de la bataille.
Les parties baffes aâbiblies parce quieftoit dcifus
elles, & comme frappées de catarrhes mortels, ont
refufé de me porter, & m'ont laiifé choir fur l'op-
probre du fumier. Ma peau entière eft devenue
infenfible, la tendre humeur de la charité eft aife-
chee, toute chaleur de zèle efteinte dedans moi. Ce
qui a caufé tant de rognes qui tombent de ma peau,
fe donnent à Tapoftafie en quittant mon corps affligé,
& ce qui angoiffe mon ame. après les douleurs du
corps, c'eft que je fuis environnée de froids & fols
amis. Ce qui dort dans mon fein me tormence;
les plus privés de moi font vis à vis de ma playe
fans la fentir : l'ami de ma table levé fon talon
contre moi; ceux qui devoyent eftre compagnons de
mon afflidion en font les juges, & par une pru-
dence maudite defchirent ma droiture, lèvent au nez
l66 MEDIT AT lOS'S SUR LES P18AUHES.
mon efperance, &par leur fagelTe mondaine rendent
criminelle mon équité.
Jafquet à quand m^oublitrat-tu coniiaudtemMtf
Jufques d quand cacheras-tu la face de nuit Jufjutt
à quand confulierai-je mon cttur de Jour T Jufques
à quand s'efievera mai ennemi conire mai? Etemel
mon DieUj regarde^ exauce moi, illumine nut yeaXj
de peur que je ne dorme le fomme de la mon, de peur
que mon ennemi ne dû. J'en ay eu le deffiu, b- qan
mes adverfaires ne ^efgayeni fi je venais à tomber.
Jufques à quandj o Dieu, fouffriras-tu qu4 tes
adverfaires te blafmeniT Ton ennemi defpiiera-û
ton nom d Jamais impunemeniT Pourquoi retiens-tu
ta main en ion fein T Aye fow/enanee que l'ennemi
a diffamé l'Eterntlj 6* qi/un peuple infenfi a desfii
ta puiffance. Ne livre point ion humble tourierellt
M«DtTATIOKS SUR LSS VSEAUMSS. 167
g^randeur, la fplendeur & la durée de fes grâces
étemelles, qui doivent rendre toutes douleurs de
corps & d'efprit douces, &doux le fueil de la mort;
toutes trifteffes deviennent joyes, les abaiflements
ft eflevations, à la comparaifon de l'un &de l'autre;
rombre du fepulchre eft Tentree d'une indicible
darté, la terre n'eft qu'im point à qui peut com-
prendre l'eftenduë du firmament : ainfi il n'y a tien
au monde qui fe puiflTe juftement appeler malheur,
qui foit à craindre, à plaindre & qu'on doive
abhorrer, à qui peut avoir les fentiments des féli-
cités à venir, que ce qui peut nous priver d'elles ou
nous en efloigner. Au contraire, les profperités qu'où
envie aux mefchants font les entrées de leur défaftre,
fumées feiches, & nuées fans eau; de fl petit mo-
ment au prix de l' Eternité, que ceux qui les jugent
de bons yeux, s'esbayffem comment ils ont eflé def-
truits ainfi en un moment ^ comment ils font défaillis
isr ont efié confumés d'ef pouvant ement. Certaine-
ment Vhomme fe promeine parmi ce qui n'a qu^ap-
parencej & fe tempefle pour néant : fes jours font
cofnmefoin^ il Jleurit comme un champ. Car le vent
eftant paffé par defTus fa beauté, elle n'eft plus;
& fon lieu ne la cognoift plus ; fes ans font comme
un fonge quand on s*eft refveillé, & le Seigneur
mettra en mefpris leur refTemblance, quand il fe
refveillera : les playes des ennemis de Dieu font
fans guerifon, & celle de fes enfans à falut; le
fang de ceux-là affoiblit cettui-ci, purge & retran-
che ce qui nuit. Et c'eft pourquoi quand l'ordon-
nance de Dieu ira devant, je prendrai moi mefme
& de bon cœur le caillou trenchant pour la cir-
concifion , comriie fit la Sephora de Moyfe , mais il
ne m' adviendra point comme à elle de me pren-
lOS MEDITATIONS SDK LU PIIADHII.
drc à mon Seignear, ft fappder m«ri à* tmg-
Je Toi parmi toui le laboureur, des mûu duqud
on arrache le pain qu'il avoii tiré de la terre pour
fe nourrir, & pour autrui ; & l'homme du travail
duquel les fueurt erpuifees degenereu ea iàng. Je
voi le marchant rançonnéj ^ipauvri, & te» iMtr-
laires eurichîs de fit Julie fubfhnce injuftfmciit. Je
voi les fidèles pafteurt elbe bunei aux outn^es
des puiflants infolents, dïrai-je auffi de loir* tnnw
peaux efchappés & dû bouges blafphemanies ? Je
voi les vaillants d'Intel & vrais Chevaliers qui ont
&ic cheoir les murs de Jerico, deffeadu ceu de
Jerufalem, délivré lesciioyens, franchi les traticbees
ennemies, garanti les Royaumes & les Rois, Ikuvé les
couronnes & les te&es qui les devoyeot porter, r^arder
de coflées glorieux carquonts, oncrâfoîi couronnes
diftinguees de telles honorables & profitables aflions.
mOITATIOKS SUR LÉS PSBAUIIIS. 169
VOUS ne les ayés pas, que fi on demandoit pourquoi
on TOUS en a honorés. Quittez joyeux ce qui lênc
la boue & la terre; quittez {ans regarder à regrec
Sodome bruflante, car il vous hut alpirer, & bien
toft panrenir à la couronne cdefte qui fleurit à
1 Eternité.
Voila les enfeignemens de la fille du Ciel, des
orades du {aaé lieu, qu'il vaut mieux recevoir par
les mains de l'Eglife que par les contes que nous
fiûlbos de nos doigts. Doârine qui eft de dure
digeftîim, & pourtant bien heureux les petia enfims,
pour qui cette douce mère convertit en laiâ des
viandes fiicrees recuites dans les mammeUes & dans
le finn qui a part à nos douleurs.
Nous confefTons donc, o Dieu, que nous t'avons
ofienfé en nos penfees, quand nous avons mefuré
tes jugemens à noftre aulne, eftimé tes verges à
defiaveur, & la profperité mondaine à felidcé.
Nous avouons avoir efté lors abrutis^ r^ ayons aucune
cognoiffance & avons efté beftes en ion endroit. Car
pour néant nous as tu eflevé le vifage en haut & vers
le Cid, fi nous prenons les reigles de nofire juge-
ment ailleurs que d'en haut ; juilement ployeras tu
la £ice vers la terre (comme aux beftes brutes) à
ceux qui prenenc loi des chofes bafies, & les con-
templent comme bue principal.
Voici donc la refolucîon que chacun fidèle prend,
& protefte fuivre après les leçons de la Sapience,
& ce qui s'apprend au fanduaire du Fort. Il doit
dire à fon Dieu, Je ferai donc tousjours avec foij
puifque tu m'as pris par la main ébroiéle. N'aban-
donne point cette conduite, o Père de lumière,
& km eftroitement la main que tu as prife, afin
que je ne me defvoye en me fouftrayant.
170
MEDITATIONS STJR EBS PSBAUMBS.
Renforce cette main droite que tu as prife pour
le bon combat de ton parti, ft tu l'alTeureras de la
vidotre, en lui difant : 3t fuis U délivrance; inf-
trui mon foible efprit que les fagefTes des hommes
font folies, leur force foiblefTe, leurs richefles pau-
vretés, & qu'en foulant aux pieds l'efperance de ces
chofes, lu me conduirtu par ton confeilj & puis me
recevras en gloire. Les guides du monde font aveugles,
les propos des habîtans de la terre incertains : car
toi feul difpofes, m c'abailTes pour regarder es Cieuic
& en terre, Se n'y a que toi de qui on puifTe dire,
l'Eierntl gardera Ion iffui tr ton entrée dit maim-
lenant & à tûusjeurs. Pourquoi itai-jt cercker m et
bas monde quelque féconde diviniléf Et qui eft tfgal
es nuis à l'Eieraelt Qui lui efi femblable entre Ut
fils des forts? Quel autre ai-je au Ciel? or je ^ài
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 171
tr fuù tu te trouves en perfonne en la bande qui
ms foujlient. Doux le labeur, doux le péril que Ton
fubic pour & avec rEcemel, le Dieu Très fort, qui
retient les iffuis de la mort en fa puijfance.
Je ne porterai donc point d'envie & ne me def--
piterai point â caufe des gens mefchans. Je ne ferai
pmmt jaloux de ceux qui s^adonnent â perverfité.
Courent les condamnez à leurs &ue Dieux & à
leurs vaines efperances; Quant à moi, é^ approcher
mom Dieu, c^efl mon bien : fai ma retraite fur le
Seigneur, cjin que je raconte fes ouvrages. Il mettra
en avant ma juftice comme la clarté de Paube & ma
preuifhomie comme le midi : encor un peu de
temps, & le mefchanc ne fera plus. Je Vai veu ter-
rible (t Jloriffant comme le verd laurier^ mais il eft
pafféy & voila il n'eft plus; je Vai cerché, & ne l'ai
point trouvé,
Encores avons nous une remarque notable. C'eft
qu'entre les angoifTes les plus piquantes des bons
affligés, fe fait fentir la comparaifon de leurs miferes
aux inifolentes profperités des mefchans. Et n'eft
pas que le Lazare eftant fubjeft aux pallions hu-
maines, ne trouvait fes haillons encore plus vils, à
refgard de Tefcarlate du riche, & le pain moifi
qu'on lui avoit jette plus fec, en voyant pafTer les
morceaux délicieux defquels on alloit fervir le prof-
perant. Et ainii fe peut dire de toutes les autres
partiel, qui font différer la richefTe d'avec la pau-
vreté. Or Dieu feul parfait en juftice obferve en
elle les analogies des péchez aux punitions. Et les
comparaifons qui ont affligé les enfans de Dieu
en ce (iede en chofes pareilles, s'obferveront juri-
diquement en l'autre. Car le riche en fes deftreffes
fait comparaifon de fon malheureux eftat à la félicité
17s MEDITATION! ICB. LU PlIADIflS.
de {on meTprift. Nou* lilbii* en quelque efirit de ce
tempi une peioCture de l'eftu de> daninex, euquel
eil apponé cette con^inïlbn en ce* tennes :
Orita iar tjbt U "foinS pUu tnfiaac,
C'ejl ff avoir aux Btifin et fme Fan fait tMX Ciopc,
Où U camp triampluM gomfk Paifi indU^t,
CognûipaU dix mtfAaiu, » mm fa* aettffiik:
Oh l'aeeori trit forfait àtt iOMta taàfota
A VUnivtri tntitr aecorie fu ehanfaiu :
Où tant i'efpritt ravii tfdattau it Itiaagttf
La voix its SaîntU uùi aiite ttlU dti Angt*,
Let orhtt dtt ntuf Citax, itt tromptita U hrmit,
Ti4nruiu tout Uur partie â Phymiu fû i?tnfiàt.
Venez, affllâîoni; elles me font douceun pour
Chrift, qui m'eft gain i vivre & à mourir : les pertes
deshiemmefontrichefTes. quand ils fnn
MBOITATIONS SUR LBS PSSAlTMBS. 173
& tels objeâs ne font que de la mefure des fens,
puis qu'ils tombent fous eux.
Mais les chofes à efperer, font celles qu'oeil n'a
yeuës, qu'oreille n'a ouyes, qu'aucun efprit n'a efté
fuffiiknc de comprendre, nul n'a peu defirer.
EmbrafTe donc les afflidions les yeux au Ciel, en
difimc : Quand tu me meurtrirois, fi te benîroye ;
embrafle la mort, defireux de dire de cœur & de
bouche en fentant ces amertumes,
Si ejl ce que Dieu efi très doux.
OCCcâSKXNi ET C*2^GXMM£Ï^Gr
DE lA MEDITATION
FAtCTB SITR LS PSBAUKS 5 1.
MiP^Ti^TIONS SUR LBS PSSAUMXS. 175
6. J^ai péché contre toi, contre toi proprement :
& ay /où ce qui eft defplaifant devant tes y eux y
ajm que tu fois cognu jufte quand tu parles j 6* trouvé
pur quand tu juges.
7. Voila, y ai efté formé en iniquité, & ma mère
nâa ef chauffé en pejché,
8. Voâa, tu aimes vérité au dedans, & tu m^as
emfeignéfapience dedans lefecret de mon cœur,
p. Purge moi du péché avec hyffope, (t je ferai
met : lave moy, & je ferai plus blanc que neige.
10. Foi moi entendre joye & lieffe, & que les os
que tu as brifeife resjouyffent.
1 1 . Deftourne ta face arrière de mes pejçhei fr
efface toutes mes iniquitei*
12. O Dieu y crée en moi un cœur net, & renou"
velle au dedans de moi un efprit bien remis.
13. JVif me rejette point de devant ta face^ Cr ne
m'ofte point V efprit de ta Sainéleté.
14. Ren moi la lieffe de ton falut, & que l' ef-
prit franc me foujiienne,
15. J'enfeignerai tes voyes aux tranfgreffeurs ,
& les pefcheursfe convertiront à toi.
16. O Dieu, Dieu de mon falut, delivre-moi de tant
de fang : ma langue chantera hautement ta juftice.
17. Seigneur, ouvre mes lèvres. & ma bouche
annoncera ta louange.
18. Car tu ne prens point plaifir aux facrifices,
autrement j^en bailleroy : Vholocaufie ne tefl point
agréable.
19. Les facrifices de Dieu font V efprit froifft :
o DieUy tu ne mefprifes point le caurfroiffé & brifé.
20. Foi bien félon ta bienveillance à Sion, & édifie
les murs de Jerufalem.
2 1 . Adonc tu prendras plaifir aux facrifices jujle*
Ij6 HISITATIOKI fUI. Ll> MlADMll.
mattftttts, àl'keloeùMfit ^ fiaifleû qui f§ mtftUMU
tniitremtnt par fm : «dnw <0irthim iiêi bomMtMX
fur tojt auitl.
MEDITATION
tUR Ll PflADXI 51.
itiRicoRDi, o Dîen, mi&riconle à moi
qui tremble &u nom de n jullice. J'ai
befbin à ce coup que tu defplojres toutes
tes graiules conmùlèntiom :
:dic fenible devoir efpuifer l'immenfe de tapuïé.
MSDITATION8 SUR. LES P8SAUMB8. 177
me vient tu ronge, grondent à mes oreilles, la nuiâ
ûfBent comme ferpens , fe prefentent fans ceflfe à
mes yeux comme un fpedrc effiroyable, & avec lui la
laide image de la mort : le pis efl que ce font pas
vames fumées de fonge, mais vifs tableaux des adions.
L'ingénieux Daemon (qui fe fait tenir poiu* Dieu,
& fe fait peindre en enfant chez les Payens)
m'ayant defguifé le nom de mon forfait, Tadultere
en amour, l'homicide en hardi, & le traiftre en
habile, m'a conduit de degré en degré à l'extrémité
de toutes mefchancetés. Il m'a enflammé de trop
d'amour d'autrui, & de celui de moi me(me,.me
£ûlant mériter par tel moyen la haine de tous
& celle de moi mefme.
Le fubtil fait le meflier de peindre quand il veut :
fon pinceau m'a fait voir les beautez, douceur
& un paradis de délices, qui demeurent quand il a
changé de région, horreurs, amertumes & un enfer
de torments. Le meûne qui avoit efpié les heures
inquiètes de la nuid ou les oifeufes du jour, pour
me meiner aux précipices, m'affroncer à tous mes
refveils de la nuid & toutes mes paufes du jour,
un portrait effroyable, un vilain bouc, puant de
paillardife, un efpouvantable crocodile, qui pleure
pour trahir, un loup qui a les dents fanglantes d'ur
aigneau domeftique ou du petit chien fidèle qui
gardoit la maifon; & puis fans portraid me fait
dans fon miroir voir ces mefmes chofes en m'y
voyant; lui aufli ne fe prefente plus comme un
enfant, mais comme un vieux ferpent.
Ainfi les yeux qui m'attirent m'effrayent, & qui
furent organes de péché font devenus inftruments
de punition : defloyal peintre, qui a nos efprits pour
papier, & pour tablettes nos cœurs.
n. la
1/8 MEDITATIONS SVR. LSS PSBAUMIS,
Je rericni i mon crime, qui ne t'elUnt pu con-
tenté d'ofienfer les hommes, adefployé ma témérité
contre Dieu. Ouy, je me Tuis pris à toi, o Etemel:
moi qui fuis un ver, & non point un homme, op-
probre des hommes & le mefpris du peuple, dè£~
guiferai-je mon forfait devant celui qui cognoit
& fonde, voire iuTques au dernier point, les plus
fins cœurs de tout le mondePQue ferai-je? Cer^
cherai-je des objefts contre le fidèle teûnoin, duqud
feul la parole eft vérité? Ou bien coiromprai-je le
feul & jufte juge, duquel j'ai prcfché la droiture,
fans qu'il y oit en lui aucune forfaiâure? El puis
de quoi ferai~je mes prefens i celui auquel appaiw
tiemienc le donneur & les donsP Lt Dieu Fort ràm-
vtrJttoit-U lt initj & h Tout-Fusant la JuJHctf
Vhomme mortel Je juftijiera-t-il envers U Dieu
MSDITATIONS SUR LES PSEAUMES. 179
êjckappêrai^je, o Dieu? Tu me tiens ferré devant
& derrière f tu as mis fur moi ta main y fi je vai arrière
de tmt êfprity ou hors de ta face : fi je monte aux
CÙMXy tu y es; fi je me trouve dans les abyfmes, t'y
miU} fi je f rends les ailes de Paube du jour j & me
hge demere la mer, là aujfi me conduira ta main,
& iM dextre ni y empoignera. Si fay dit: Au moins
ke teiêebres me couvriront, voua la nuiû qui tefervira
4e lumière autotv de moi, les ténèbres ne m'oferont
cueher arrière de toi.
Mais n'y t-c-il point quelque partie en moi que
je œ puifle montrer pour nette } Helas noni Tu dis
rma mère m'a conceu en péché, & que le germe
na rie fut e(chauffé dans la bourbe de l'iniquité.
Ai-je point quelques bonnes œuvres pour couvrir
les autres en traittant de reprefailles avec l'Eternel }
Je n'apporterois que péchez fur péchez, car les meil-
leures aétions de l'homme font ordes & puantes comme
le flux de la femme. Que te monftrerai-je ? Que t'ofiri-
rai*je ? Tu veux la pureté au dedans & l'innocence.
Emprunterai-je de l'ignorance fes ailes de crefpe
noir, moi que tu as comme ton enfant & dés le ber-
ceau inftruit de tes volontez? O Dieu, tu m'as
emfeigné dés ma jeunejfe, & jufques ici j* ai annoncé
ma condamnation.
Et ainfi toutes les voyes que je tiens me con-
traignent à venir cercher ta droite, & recourir à ton
fein déboutonné à nos requeftes, auquel feul y a
propitiation. Tu es feul Souverain Sacrificateur;
pren en main Thyfope teinte au codé de ton Fils ;
lave comme de rofee au lieu de grefle ; employé cet
hyfope, qui rend les âmes noircies plus blanches
que la neige : neige que je paiTerai en blancheur
par l'efficace de ton afperfion.
l8o MEDITATIONS SDB. LBS PSBAUHtS.
Fai-moi ouyr k nouvelle de nu deUTnnce par le
cefinoignage intérieur de tonEfpric, (jul me prononce
ma gnicCi ^n interinement fur U felette de mon
humUicé, afin que ces et & moiîllet fenduëi devant
le feu de ton courroux fofent refticueet en la ret-
tauration du mourant ft reftabliflëment du perdu.
Qu'ell-ce que tu liena Q long temps les yeux fidiéa
fur mes for&itsj Cache n htx d'eux, mais non pu
de moi. Quereux-tu faire de cette balance à peler?
en laquelle fi ni me mets d'un, collé, & un rieo de
l'autre, ce rien pefera encores plus que mol. Que
veus-tu faire de ce glaive trenchant de deux coQ»,
puiflant, & la difllpation, de manier des barres & dea
foudres? Mets ces choies à part pour les ennemis
de ta gloire, pour les loups & lions qui diflipent ton
" " " . & frapi
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMES. l8l
me r^arder ; & lors, moi miferable (qui par mon
exemple ai monilré aux autres le chemin de per-
dition) & de voix & de cœur deviendrai un dodeur
de repentance, un miroir de ta grâce, un efchan-
âllon de ton pouvoir, en me donnant un efprit nou-
veau, & non content de me Tavoir donné, le main-
tenant en moi renouvelle.
Tu t'en ferviras à convertir ce que j'aurai perverti ;
de la meûne main qui m^a tiré du parc au palais,
qui de berger m'a fait Roi, qui m'a eflevé de la boue
pour me coUoquer aux honneurs, qui de la conduite
des brebis m'a promeu à celle des peuples, voire
d'Uiraël, de cette main tu me fais pefcheur pref^
cheur & pefcheur d'hommes. Mutation plus mira-
culeufe que la première, puis que tu me prends aux
cachots des criminels de mort, & comme dans la
foffe de l'Enfer, pour m'employer au myftere de vie
& aux threfors du Royaume des Cieux.
Ce font les effeéts de ta puifTance & de ta bonté.
Qui euft dit que ces pieds du perfecuteur, auquel
les lapideurs du premier couronné avoyent baillé
leurs veftements en garde, peuffent jamais devenir
beaux ? Or ils ont efté beaux & bien venus, pourcc
que beaux font les pieds de ceux qui annoncent la
paix : & ils ont porté celui qui a annoncé la paix
aux Gentils.
Où fuis-je? En difant ct% chofes je penfe voir
encor fur mes mains & fur mes habits quelque tache
du fang innocent que j'ai refpandu : cette apprehen-
fion me fait rougir comme le fang mcfme de honte,
couvre ma face de confufion, ne pouvant penfer
comment ma bouche, qui a prononcé blafphemes,
pourroit devenir organe de tes loiianges & mes
fcandales degré d'édification. Ode de moi ce fang
iBi MEDtTATIOHS SUS. LES PSBA.0MBJ.
qui m'eiloiine, & me rend un fpedre i moi ffleûne.
Ouvre mei lèvres fermées de mon fpafine, def-
ferre mes dent* que je feos grincer d'effroi, & lors
ma bouche efcUten le chant de ces boncés, & lors
je dtclartrai tofi nom à nui fnres, ft U lotUrti au
milieu de la congregaiioa, & dirai,
Voui qui craigiuj PEuroâl, loùéi-lt : tout» U réea
de Jacob, glorifiifU; & toula la raeédIfrail,rêiou-
lej-le, car il tia point mt^rifi tu étfdaigai la mi/en
de l'affigi, tr ri a poinl caché fa faei arriéra di lui,
oins quaad il a erié vert lui, il Pa exavci.
Ma louange coauntueera da par toi : M la granéa
congregatioa je rendrai mts vaux M la prefeaea d$
ceux qui te craignent : Je parlerai da tas lefmm^
gnagef devoMi les Rois, & na rougirai foùu da
MSOITATIOHS SUR. LES PSBAUMSS. 183
ibpe que j'ai demandé les a emportées bien loin, fi
que je me prefence nettoyé de ta main.
Ceft cette main qui &it tant de merveilles fans
peine, qui abbat du throfne les orgueilleux & tire
de la boue le pauvre gifant fur terre, pour le col-
loquer aux honneurs, voire aux honneurs du peuple
de Dieu, & de mefme tire im Jofeph de la prifon
pour lui donner en main les refnes d'un Royaume,
les libériez de ceux qui le tenoyent captif, & let
vies de ceux qui difpofoyent de la fienne. A quoi
nous attacherons les exemples de Henri quatrieûne
en France, & en Angleterre d'Elizabeth. Et de
plus, la mefme force (comme nous avons di^ qui
opère ainû aux opprefllons & exalutions, le fais
auffi aux mutations des efprits : tefmoin Paul le
prefcheur excellent & confiant martyr, qui lavé du
fang efpandu efl fait d'un loup raviitant une brebis
de buiffon. Ceft elle encore qui reconcilie pouces
chofes à foi, ayant fait la paix par le fang de la
croix : & ceux qui eftoyenc eftrangers de Chrift
& eftoyent fes ennemis en leur entendement, prefts
à toute mauvaife œuvre, ceux-là reconciliés au
corps de fa chair ont efté rendus faines, fans tache,
& irrreprehenfibles devant Dieu.
Defploye, Seigneur, cette main à me relever de
mon odieufe boue : tu vois la haine que je me porte
à caufe de mes péchez ; c'eft toi feul qui tires du
fueil derEnfermonefperanceprofternee. Et comme
les penfees que tu me donnes font arres & avant-
coureurs d'un plus grand octroi, meine mon efprit
où ma foi & mes regards font desjà volés, afçavoir
au fein de u grâce, & au giron de tes douceurs.
Desjà je fens le courage d'un exaucé, pour après
t'avoir invoqué pour moi melme, t*ofer prier pour
184 MKDITATIOVS SOR. US PSSaUKKS.
ta Sion. Le confeil que tu m'avois ordonné m'avoîi
tousjours guidé fidcUemem; & bien que quelques
affautt gut J'aye fiitij J'ai tousjoart tenu ton parti,
& le jele de ta maijon (quoi que tut infirme) m'a
mangé. J'ofe donc, linfi bniflé de ce zèle, m'efcrier :
Vueillts rebafitr les murs de ta Jeru/alem. Pour nos
démérites m les demaatelles, me&nes par les bras
qui les avoient gardés. Tu nous as donné de quoi
dire avec deux de tes grands Prophètes : Tu at rtjeité
l'alliance de ton Eglife, tu as fouillé fa couromu,
la jet tant par terrt .' tu at rompu touus fes cloifans,
tu as mis fas fortereffes en ruiné; tous ceux qui
paffoyeni par U chemin l'ont pillée { elle a iflé mifa
en opprobre à fas voijins. Tu as furhaujfé la daxtre
de fes adverfairasj tu as rasjouy tous fes ennemis,
tu as ai{ffi rebouché la pointe de l'efpee de fes rail—
MBDITATIOKS SUR LES PSBAUMES. 185
c€ffs affamt{y isr ont marché tUflitués de forcé devant
la pourfuivant.
Tous les pajfants ont frappé des mains fur elle,
ils ont fiJLé & hoché leurs teftes contre la fille de
Jerufalem^ dijansy Eft~ce ici la ville qtion nommoit
la parfaite en beauté?
Le Seigneur a eflé comme un ennemi : il a abyfmé
If rail f il a diffipé les palais & toutes fes fortereffes.
Et a pourpenfé de deflruire la muraille qui cou-^
wroit la fille de Sion^ il a eftendu le cordeau^ & if a
point retenu fa main qu'il ne Fait abyfmee^ & a
defolé la muraille & l'avant-mur. Ses portes font
ejrfbndrees en terre; il a détruit & briféfes barres.
Muraille de la fille de Sion^ Jette larmes jour & nuiél
comme un torrent; ne te donne point de repos ^
que la prunelle de tes yeux ne cejfe point. Le jeune
enfant & Vancien ont eflé gifans en terre par mes
rués : mes pucelles & mes gens d^eflite font tombés
par l'efpecj comme s'ils euffenc efté pareils; O
Dieu^ tu as tué au Jour de ta choierez tu as maf-
facréy tu itas point efpargné, Oeft pour les pefchei
de nos Prophètes^ les iniquitej de nos facrificateurs,
qui ont efpandu le fang des Jufles au milieu de
Jerufalem. Aufli les Prophètes n'avoyent prcveu que
chofes vaines. Adjouftez-encores, lesferfs ont dominé
fur nousj & perfonne ne nous a receus de leurs
mains.
Les principaux ont eflé pendus par la main dUceuXy
(t v^a-on porté aucune révérence à la face des
Anciens.
Nous apprenons de David à dire :
Les nations font entrées en ton héritage; ils ont
polu le temple de ta Sainéleté^ ils ont mis Jerufalem
en monceaux de pierres. Us ont donné les corps
l8lS MEDITATIOKS SVK LIS PSEAUMBS.
morts de U-t f§niutirt pour viande aux oyféomx
dfs CUux, ir la chair d* tts bien aimit aux Infiet
de la ferre : ûs ont efpaitdu It fojig d'ictax eonune
eau à VentouT dt JêrufaUm, fr ^y avw perjomu
pouf les en/eveiir.
O Dieu, qui as uraché mes hayea par con coup-
roux, redrefle les autour de la troupe funâe,
& rends encore Jerufalem ceinte de monis de [outeé
parcs ainfi que de rempars : ren foa mur eflev£
plus hauc que refchelle & que refperan» de fcs
ennemis, quelques haucaiot qu'ill fo^enc
Ode nous la confiance que nous aviooi aux ^ait-
deurs, aux forces humaines, & en la fidelUté des viel-
lards qui fe font endormis ; rempare noiu des mon-
tagnes de Prophètes, d'un mur de pierres rives, qui
font celles defquelles m fais des ensuis i Abraham.
• londemeni. & mets a
UBDITATIOHS SUR LBS PSBAUMIS. 187
fdgiieurie par tout, qui fe fait obeyr (ans peine en
«mt^ fin Seigneuries, ait voulu choifir de tanc de
Royaumes un Royaume, de cane de Provinces
Cauian, de tant de moncaignes Sion, de tant de
peufdes un peuple acquis, fainâ 9^ (eparé, duquel
il eft dit : Tous peuphs du mandé habituhh n^imt
foê m trtMtmmu femblabU^ car fis ordomÊoitcas
faerMS il m Imtr a pas déclarées / ft puis d^ffrailj
^J^j f4¥F €xpr4s. Peuple qui lui ioucka de prés,
que ce troupeau bienheureux ibit feul par qui U
yeut eftre loiîé.
If aïs voici une féconde charité qui furpaflê la
première, quç U nadon efleuë ayant renoncé ou
crucifié le Sauveur Sç Dieu de Gloire, il a mis la
main fur nous, & fans occafion de choix, en ce qui
eftoit du noftre, nous a cirés d'encre les idolacres
courans après les bois & la pierre, pour nous adopcer
en la place & au rang des enfans d'Abraham : Q
bien que nous puiflions dire de nous, que c*efl en
(a très fainde cicé qu'il a choifi fa demeure, & que
c'eft de nous qu'il veuc fes loiianges; en nous,
di-je, eft accomplie la prophecie de David, difant :
Dieu pour fonder fon tabernacle aime Us portes de
Sion, plufloft que tous les tabernacles de Jacob,
Ce qui fe dit de toi, cité de Dieu, ce font chofes
hoMorables, Selahl
Je ferai mention de Rahab 6* de Babylon, entre
ceux qui me cognoijfent : voici PaUftine & Tyr, avec
Cus : Cettui'^i eft né là.
Et de Sionfera dit : Cettuy-ci & cettuy-Jâ eft né
en icelle : & le Souverain mefme P eft ab lira.
Quand PEternel enregiftrera les peuples, il les
mettra par conte, & dira : Cettui~cy eft né là,
Selah !
MEDITATION
ES PSBAUMSS.
EAant auihorifé de titre lî advantageiu, rcfpoufe
du Ciel, qui pleure fon Fils perdu au jour de fes
nopccs, ofe plaider fon droiâ contre Ibn Seigneur
& dire : Puis que tu m'a> appelée à un 0 haut héri-
tage, ne me lailTe point en triche &. en mafures. Je
dois devenir une cité, qu'elle ne demeure point
démolie, ren la digne de ton habitation. Te faut-il
foliciter de baftir ta maifon? Tu as jené dans les
fondements douze pierres Q precieufes : mes douze
portes doivent eftre de perles. Sois mon temple,
mon Soleil, & moi ta Lune; qu'il n'entre point en
moi d'abomination, mais y conferve l'arbre de vie,
qui porte au milieu de moi fruiAs délicieux. O
Eternel^ deftournt ta matediéiiott aux Royaumts qui
n'ont ta cognoiffanee, & defqueU il eft dit, Ltors
cris/ont inuiiUi : mefine les addreflant i toi, fai
MBI>ITATIONS SUR LES PSEAUMBS. 189
Tu as voulu que nous te facrifions louanges,
& pour holocaufles les vœux it nos cœurs ardents ;
c'eft ce que nous cflevons vers le Ciel, c'eft ce que
nous defployons devant ta face.
Et quand il te plaira nous faire dignes d'effaré
nous melmes immolés, pour le tefmoignage de ta
vérité & de ton nom, nettoye-nous , Seigneur,
des taches qui nous rendent impropres à tes offertes.
Ren-nous par cett'hyfope nettoyante viôimçs
blanches. Nous ferons bien heureux, quand il te
plaira prendre nos efprits & nos vies, pour en facri-
fice de bon odeur faire fumer ton temple & ton
autel.
OCCcÂSIOtXi ET oO-JtfiVmET^.
DE LA MEDITATION
FAICTE SUR LE FSEAUME I
MEDITATIOKS SUR LSS PSEAUMES. I9I
^. On nia mis au rang de ceux qui defcendent en
la foffe : je fuis devenu comme Vhomme qui ri a plus
de vigueur,
6. Sequeflré parmi les morts ^ comme les navrés à
mort gifiuis au fepulchre^ de/quels il ne te fouvient
plus, ains qui font retranchés de ta main,
7. Tu m* as mis en une foffe des plus baffes^ es
lieux ténébreux^ es lieux profonds,
8. Ta fureur s^efi jettee fur moi, (r tu nias ààtû^
blé de tous tes Jlots : Selah.
9. Tu as efloigné de moi ceux defquels ^efit^e
cognu, tu nias mis en extrême abomination envers
eux. Je fuis reclus tellement que je ne puis fortir.
10. Mon ail languit tPaffiiàHon : Eternel^ je te
reclame tout le jour^ j'ejien mes mains vers toi,
11. Feras~tu miracle envers les morts? ou fi. les
trefpaffés fe relèveront pour te célébrer? Selah.
12. Racontera-^n ta gratuité au fepulchre & ta
fidélité au tombeau?
13. Cognoijîra-on tes merveilles es ténèbres & ta
jufiice au pays d'oubliance ?
14. Or quant à moi y 0 Etemel ^ je crie à toi & ma
requefte te prévient dés le matin.
15. Eternel^ pourquoi rejettes-tu mon ame & ca-
ches-tu ta face de moi?
16. Je fuis affligé & comme rendant Vefprit dés
ma jeuneffe : j'ai fouffert tes effrois & ne fay où
j'en fuis.
17. Les ardeurs de ta cholere font paffees fur moi,
& tes eflonnemens m'ont retranché.
18. Ils m'ont tout le jour environné comme eaux ,
Us m'ont entouré tous enfemble.
19. Tu as efloigné de moi Vami, voire V intime
ami & ceux defquels je fuis cognu me font ténèbres.
Ip2 MEDITATIONS SUR LES fSBAUMES.
MEDITATION
SUR LE PSEAVHE 88.
O DIca Eternel mon SuiTEnr, bc.
TBRNBL, Dieu de ma délivrance, ou
, de mes délivrances, qui m'u
tant de fois tiré du bas combeau de la
more, & nocammenc quand j'ai dit à pro-
pos & avec fon efficace :
Lorfqu'en moi de douleur efpris s'enveloppent
tous mes efprics, Tu fçais l'endroit par où je dois
forrir du lieu où je me
MEDITATIONS SUR LBS PSIAUMBS. IJ^
femee pour le jufte, & la lieflè pour ceux qui font
droits de cœur?
Le Soleil qui fait fa carrière comme un efpouz
ibrtanc de fon lid nupdal, veu de cous, & voyant
coût, peu&-il defployer à mes yeux les beautez de
nature pour m'en deftituer. Je ne fuis plus de ceux
à qui les verdures portent quelque efperance, & fi
je voi des fleurs, je fçai que les fruits en font pour
les hommes de terre. Les moiflbns & les grappes
font pour les ennemis de Dieu, dont le jour ne
m'apporte que le defir de la nuiâ pour me cacher,
et die m'eft une aimee pour m'enfuyr & me fauver
de moi.
Ceft en elle que tu m'as revifité. Tu as fondé
mon cœur, tu l'as examiné : tu n'as point trouvé
que ma penfee ait violé ma parole, ni que ma
bouche ait deûnenci mon cœur ; & nonobftant il n'y
a point d'accord en mes membres. Je cerche le
repos au lid fans le trouver. Le bœuf quitte le joug
à la feree, le cheval la felle ou le collier ; mais
l'ahan & les fueurs de mon ame travaillée me fai-
fiflent dés le crepufcule du foir, fans me quitter à
celui du matin.
Les Anciens ont inventé que leurs Erynnes, ou
Furies, elloyent filles du Soleil & de la Nuid : vou-
lant cette dodrine à leur mode figurer, que les
affaires pefants de la journée tormencoyent les
affligés dans le nid des penfees, & au loifir de la
nuiét. C'eft fous elle que la mémoire me géhenne,
ma couverture eft de plomb & mon chevet d'efpines,
pour lefquelles je puis dire : J'ai ahanné en mon
gemiffement, je baigne ma couche toutes les nuiéts,
je trempe mon lid en mes larmes.
Voila de quoi crier jour & nuiét, quand Tun
II. 13
194- MEDITATIONS SOR LIS FStAVMBS.
& l'aucre m'affligent : je fuU concraint d'eftic im-
porcun fans intervalle, puifquc mon mal ne m'en
donne pas. Tu c'es lailTé vaincre 4 l'imporcunité de
la vefve, fupporte la mienne : & afin qu'elle n'em—
pefche point que ma requelle ne vienne en u pr^
fence, encline ton oreille à mon cri.
Je fçai que mes péchés ont &tt un gn» & louche
nuage entre coi & moi : perce & diflipe, Seigneur,
par les rayons de ton foleil de gnce cet anus
vicieux : abaifle ton oreille, qui eft en û huit lieu,
pour recevoir ma fupplication venant des lieux pro-
fonds, & du fond de mes ameres penfees : abaiflb-
toi, ou avance ta dextre; car mon affliâion, qui eS
fi forte pour m'accabler, eft trop foible pour (fuis
ton fecours) monter jufqu'au throlite de ta majefté.
Ces lirmes nuift & jour avalées ont empli mon
MBDITATIONS SUR L£S PSBAUMBS. lf$
Ainfi, 6 toi, qui es le Soleil & le bouclier, pour
ion œil deltiflanc d'allumer ma vie, je ne fuis qu^un
ôlbn fumant fequeftré de ta veuë, je fuis parmi les
mores comme les navrés mortellement, gifans parmi
le meurtre, defquels il ne te fouvient plus, & qui
font retranchés de ta main.
David £e plaignoit d'eftre hors de la fouvenance
de fes amis, d'eifare mis en oubli du coeur des
hommes comme un mort, & d'eftre eftimé autant
Jtt'un vaiflêau de nul u£ige : mais c'eft bien pis,
'eftre comme mis en oubli de fon Dieu, & retran-
dié d'entre les vaiflfeauz à honneur, pour eftre jette
hors le camp, ou bien trainé aux immondices de
la Cité.
Tu m*as mis en une fofle des plus bafles es lieux
ténébreux & profonds. Les prifonniers pour debtes
ou caufes légères, ont les bafTes-cours des concier-
geries, & les préaux pour bornes de leur liberté :
mais combien deviennent tranfis ceux qu'on dévale
dans les bafles fofTes, pour après l'obfcurité, la
puanteur, & les horreurs des cachots longuement
fupportés, n'avoir délivrance que la fentence de
mort?
Ainfi fuis-je accablé de tous tes flots : ta fureur
s'eft jettee fur moi : un abyfine appelle l'autre
abyûne ; au bruit de tes canaux toutes tes vagues
& flots ont repaffé fur ma tefte, empli ma nef û
baflTe & fi fragile, qu'elle ne peut refifter aux plus
pedtes ondes de tes tempelles : & tout fans efpoir
de fecours.
Pour ce que tu as efloigné de moi ceux defquels
j'eftois cogneu, tu m'as mis en extrême abomination
envers eux ; tousjours tellement reclus, que je ne puis
fortir ni avoir communication avec les humains.
15)6 MBDITATIOKS SUB. LBS PSSAUMSS.
£( puis quand je [crois environné & armé d'une
l^ion d'amis, pourroyenc-tls forcer le* priions du
Touc-Puiflant, qui fonc la mort meûne & les portes
d'£nfer> Il n'y a que toi lêul qui puillcs ddivrer
ce que m as renfermé, ni rendre la liberté à qui tu
l'as ofice : il n'y a que toi, de qui l'on puiHe dire, //
les a tirés dês tentbrts & de Fombrt dm mort tn dtf~
rompant leurs îitns, pour et qi^û a brifi Ut porttr
d'airaifij & caffi Ut barreaux deftr.
Tes Anges ont délivré les prifonniers des hommes,
mais les hommes n'ont jamais affranchi les tiens.
Nos confciences font nos plus eflroiies prifom. Le
mefchant une fois arrellé en cet eftroit cachot, en-
cor qu'il euft à fon commandement la campaigoe,
porce 11 geôle avec foi, Se les ceps de fa coulpable
pcnfee gàlopeat avec lui.
IIKDITATIOKS SUR LES PSBAUlfBf* 197
lêul lèin de qui fe trouve propiciation, repouflèras-
m les mains que ce tend Tabbacu^ pourroic-il en-
trer en ton courage de m'achever à terre de fang
froid, toi qui es pitoyable, mifericordieux, tardif
à colère, & abondant en grâce, pourrois-tu (kuter
{bs à l'sÂigé, ayant maudit tous les lafches cœurs
qui le font.
Fay voir encores que toute forte de mort des
bien aimés eft precieuîe devant tes yeux, fois donc
libéral de la vie, toi qui en es le foui donneur,
& qui en &is tes prefons par l'univers fans en dimi-
nuer le threfor ; car fource de vie en toi gift, par ta
clarté nous voyons clair.
Feras-tu miracle envers les morts, ou fi les tref>
pain^ fe relèveront pour te célébrer è Tu as tiré du
tombeau le Lazare desja puant : je confefle eftre
tout infeét, & que l'odeur de mes péchez eft infup-
portable à moi-mefme. Tu me vois couché dans le
fepulchre ; e(l-il point meilleur que celui de qui
rôdeur eft tant foliefve ne defcendc point en ces
unières d'infeftions ; & que pluftoft tu détournes la
mort des teftes qui t'honorent, que de la pourfoivre
dans l'horreur de fes cachettes ; & que pluftoft tu
faces merveilles entre les vivans, que les defployer
entre les morts, veu que ceux-là ne fe peuvent
relever ponr recognoiftre la délivrance, & aufli peu
pour la célébrer en tes faintes aftemblees }
Racontera-on ta grâce au fepulchre, & ta fidélité
au tombeau? Cette grâce fera-elle gouftee par les
condamnés & en l'Enfer, où n'y ayant aucune ré-
demption, ton Efprit ne peut aimer fa demeurance,
pour exciter les cœurs à faire refonner tes bien-faits >
car l'efperance eftant bannie, auffi eft toute voix
d'exultation.
■p8 MBDITATIOHS S0S LIS PSEAITHIS.
Pourront reluire tes merreillu tux ténèbres, & tt
judice en la terre d'oubli&nce? Si tes miracles ton^
beni dans les efpelTes obfcurités des bat lieux, qui
pourra les voir, & n'eftans point veus, qui les
célébrerai A quoi aller cercher des deferts perdus
& fans voye pour etemifer les faits de ton équité,
qui eft haut chantée & annoncée en la terre des
vivans } Qui pourra dans la foUë Se vi profond
pui[s de condamnation eflcrcr fa voix de louanges
dans le ciel? ks cxleAct clartés pourront-ellei
dorer les Enfers, & y contaminer leurs précieux
rayons }
N'e<l-ce plus au ciel & aux lieux illummés par
lui que tes hauts &ids triompheront? ne veux-tu
autels que les fepulchres infefts? l'Enfer fera-il
choifi & ouvert pour tm temple ? & les feux de la
;ehenne vaincront-ils ceux des holncaulles ? a
MBDITATIONS SUR LBS PSBAUMBS. I99
prononcer, ft les maint, que )e penfe joindre, n'tflêmr-
Uenc plus que des os ; û bien qu^il ne faut plus
d'autres ombres que la mienne pour e£Erayer par fii
Teuë, & par l'efclat de mes cris faire cranftr les
âmes defolees qui m'approcheront. Etemel, pour-
quoi rqettes-cu mon ame } Pourquoi cacfaes-cu ta
fiice de moi^ M'as-tu rendu li exécrable que ma
Teuë te face horreur? Tu m'as plongé ft réduit
dans le ventre obfcur des malheurs, deflitué de tout,
ft fur tout du jour de u face ft de la contempladon
de ton Soleil : & non pas feulement de ce gracieux
flambeau, mais aufii de l'aube, qui me reprefenioit
l'efperance de fon retour vers moi.
Je fuis affligé, & comme rendant Fefprit de ma
jeunefle : j'ai fouffert tes efforts, & ne (çai où j'en
fuis. Tu fçais, Seigneur, quels orages ont paflTé sur
ma tefte dés mon enfance, où j'ai efté comme mort
parmi les vivans, où j'ai vefcu comme tranfi parmi
les morts, ayant apris de ton Prophète à dire : Au
fortir du berceau les laboureurs ont labouré fur
mon dos, ils ont tiré tout au long leurs feillons :
mais, o Dieu, tu m'as fait durer pour tousjours plus
endurer. Ma vie a efté condamnée en mes tendres
ans, & quand j'ai efté fur le fueil de la geôle pour
marcher au bufcher, tu as reciré mon ame du feu
des hommes pour l'embrafer du tien. Tu l'as for-
tifiée contre toute forte d'accidents, tu Tas retirée
des naufrages, du précipice, de l'horreur des ba-
cdlles, & quelquefois d'entre les corps eftendus,
ft puis voici ce que tu lui as fiiit fencir.
Les ardeurs de ta cholere qui font paifees fur
moi, tes eftonnements m'ayans retranché, ouy cette
cholere, quoi que jufte, a paifé fur ma tefte fans la
foudroyer : elle y a laifTé fes efpouvantements, & les
300 MSDITATIOKS SOR LIS PSXAUltlt.
cerreurs qui m'ont fidt dire : SuU-je rejette ft am-
chc d'encre les bons? Pardonne, Seigneur, puis que
la mefme cholere attribuée & defployee fur l'agneau
fans péché, quelque pur, juile & puîlTanï qu'il fiift,
lui a fait dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'u-
m abandonna, t'efloignanc de ma délivrance & des
paroles de mon gemillement ? Mon Dieu, je crie de
jour &. de nuift, & n'ai point de celTe. Si le Fili de
ta dileSion, infeparablc de fa divinité, a tremblé ft
jenë grumeaux de fang; 0 le Prince de vie a veu
avec effroi le vif^ ridé de la mort, à quel
poinft pourra demeurer le cour^ Se l'e^terance
d'un miferable pefcheur comme je fuis, qui a de
quoi s'efcrier :
Meijouri pajent e<
Qui l'tn va dbjeurt tT fombre.
MBDITATIOVS SUR LBS PSSAUMIS. MOI
Que fi encofes toutes ces chofes fe prefencoyenc
pour me deftruire en divers temps, & Tun après
Paiitre, il y auroit moyen de prendre haleine, quel-
que efpérance de ramaffer mes efprits pour eflayer
à me guarantir, non par acmes, mais larmes & par
rinrocation de ton fccours;
Mais tout cela èontjt trenibU
Totu amour éU moi t^afemhU.
Il faut adjonfter que les violences qui me def-
truifent ne font feulement autour de moi, mais au
dedans pour la guçrre que fe font mes diverfès
penfees, & mes divers defirs s'entrechoquants em-
pliiTent mon fein d'angoifTes & perplexités, la chair
& refpric Q(lans chefs de deux partis logés en moi.
Et ainfi les royaumes & cités imprenables à un
ennemi feul & de dehors, ne le font pas à plufieurs,
moins quand les fadions les defchirent par dedans :
ainft le corps, qui vigoureux a refifté aux maladies
feules réglées & extérieures eft abbatu par un
concours de plufieurs maladies internes & impli-
cites, quand ce qui remédie à Tun eil à Fautre un
venin mortel.
Enfin, o Eternel, tu m*avois desja feparé de mes
amis & voifins, & rendu exécrable vers eux. Tu as
porté mon habitation hors le doux air de ma naif-
îance. Tu m'avois ofté des lieux, aux commoditez
& plaifirs defquels le labeur de ma jeunefTe s'eftoit
employé; tu m'avois fevré du laid & des mamelles
de ma chère patrie, tu m'avois fait quitter mes
parens & cognoiffances privées pour te fuivre,
& porter ma croix après toi, quand tu as defcoché
aoa MEDITATIONS SOR LIS FSlAtTMlt.
fur moi de les punidoiu la plus deflruifuite & irré-
parable à jamais.
Tu ne m'u point bleiïé aux extrémités ft loein^
bres qui recrauchés laifTent te refte traioer quel-
que miferable vie, mais ,tu m'as fcié par la moitié
de moi-mefme; tu as fendu mon coeur en deux ,
& dilTipé mes entrailles en arrachant de mon fein
ma (idele trés-aimee &. très chère moitié, laqoelle
comme génie de mou ame, me tenoit Ëdele compa-
gnie à tes louanges, m'exhortoit au bien, me reii-
roit du mal, aircftoit mes violences, confoloit mes
affligions, tenoit la bride à mes penfees defreglees,
& donnoit refperon aux deTirs de m'employer k la
caufe de la vérité.
Nous allions unis k ta maifon, & de la npllre,
voire de la chambre Si du lia faiÂons un temple k
MBDITATIOirt SUR LBS PSBAUMXS. 20^
Je n'ay plus de paroles puiflances, ni aflez vio-
lentes à Fexpreflion de mes miferes. Seigneur, tu
les cognois, puis qu'elles font de ta main. Je de-
meure extatique en mes angoifles, les genoux k
terre, mes foufpirs en Tair, mes yeux au Ciel, mon
cœur à toi ; releve*le, Seigneur, en l'efperance de
ton falut.
OCCcéSIOP^ ET O^GV&iEÎ?>(T.
SE LA MSDITATION
FAICTE SUR IB PSBAUMI l6.
MBDITATIOKS SUR LES PSBAUMBS. 90^
fiùtis de fang, & hur nom ne paffera point par ma
bouché,
5. U Etemel efl la part de mon héritage & de
mon breuvage : tu mamtiens mon ht,
60 Les cordeaux me font efcheu en Ueux plai-
fonSj voire un tris bel héritage wlefi advenu.
7. Je bénirai PEtemel, lequel me donne confeUj
mefmement es nui^s, efqueUes nus reins n/enjeir'
gnent.
8. Je me fuis tousjours propojé l'Etemel devanf
moi} puifqi^il efl à ma dextre. Je ne ferai point
efbranlé,
9. Partant, mon cœur /efl esjouy, & ma gloire
/efl efgayee .* auffi, ma chair habitera en affeurance.
10. Car tu T^abartdonneras point mon ame au
fepulchre^ & ne permettras point que ton bien-aùné
fente corruption,
11. Tu me feras cognoiflre le chemin de vie : ta
face efl un rajfafiement de joye : il y a plaifance en
ta dextre pour Jamais,
MEDITATION
SUR LE PSEAUME 1 6.
Sois moi Seigneur, ftc.
OU S les accidents aufquek rhomme eil
fujeô, lui font fentir fa foiblefle, par
elle la crainte, qui le meine à la recerche
du fecours : les hommes du monde y
cmployent les hommes, lefquels, jufques aux Princes
terriens, ne peuvent rien au befoin : les enfans de
ao6 MIDITATIONS SOU LBS PSIAUMIS.
Dieu n'y vont poinc à faute, oerchent le vouloir,
le pouvoir, & la vra/e af&flance, dans le fein de
leur père, où elle eft. Ils ne s'adreflTenc poinc à ce
refuge, doutans de la volcmcé de celui qui a donné
ion fils à la mort pour nous; ni du pouvoir de celui
qui a tout fiût; fe fouvenans que ces deiix parties
nous ont fidt dire plufieurs fois : Je n'ai jamais eu
mal ni deftrefle que je ne t'aye expérimenté Dieu
envers moi plein de bonté. £t la bonté, qui fait
cette volonté , eft telle que nous prenons plaifir à
faire raifonner nos petits en&nts avec nous. Dieu
ne fouffre pas feulement, mais prend plaifir que
nous traittions avec lui comme de noftre droit, &ne
nous renvoyé pas à fon auchorité abfolué, comme
font les maiilres leurs mercenaires & les Rois leurs
fujets.
Nous avons un familier exemple de cela au rai-
fonnement de David avec fon Dieu, qui argumente
ainfi avec lui en plufieurs de fes Cantiques : J'ai mis
mon efperance en toi, garde moi donc, Seigneur, ou
bien : Je fuis à toi, mecs moi à fauvecé.
Mais fur couc le Pfeaume i6, s'accache à cecce
preuve dés le commencemenc jufques à la fin, am-
plifianc les grâces vrayemenc gracuices, que Dieu ne
confère poinc aux fiens, fi non les ayanc crés chers ;
& ces grâces de tanc plus parfaites, qu'il leur donne
avec elles l'efpric de les fentir bien & de les co-
gnoiftre : qui ne fonc poinc apprenciffages de la chair
& du fang, non plus que l'efperance que nous
logeons en lui. Ec quand ces grâces fonc accompa*
gnees d'efpoir & de foi, lors elles font couronnées
de leur accompliflemenc, elles s'encrefuivent l'une
Pautre jufques à la perfeétion defcrite par noftre
grand Prophète de TÈfprit de Dieu.
MEDITATIONS SUR LBS PSBAVMBS. 207
Voila en gênerai & en gros ce qu^avec plaifir in-
dicible les enfants de Dieu doivent efplucher en
toutes leurs angoifles, avec cette refolution : Tu es
mon aide & mon libérateur; mon Dieu, ne carde
point. Mais on vient plus exprefTement à cette preuve
au poinâ de la mort, lors que le lia du malade efl le
champ d'un périlleux combat entre le fidde & l'en*
nemi de noilre falut, plein de rufes & habile à
prendre fes heures avantageufes, pour oppofer aux
grâces que Dieu nous confère nos péchez, aux
forces qu'il donne nos infirmités^ à fes mifericordes
fa juiUce, & enfin les calomnies defquelles il efiBraye
aux vérités de TAnge confolaceur.
Qui es-tu (die le mefchant) que Dieu foit tenu à
ta confervation , lui qui eil fi grand & fi haut? Et
puis, quelles font tes œuvres } Et c^eft fur ce poind
qu'il les met devant nos yeux , au plus mauvais
luftre qu'il peut, pour les faire voir en grand
nombre, indignes de pitié, & coulpables d'éternelle
mort. En ce befoin le fidèle levé les yeux , les
mains, le cœur, & toutes les vigueurs de fon ame
vers fon Dieu pour foufpirer ainfi: Garde-moi, o
Dieu Fort, car je me fuis retiré vers toi. C'eft bien
contre les difcours humains que de dire : Tu m'as
fait du bien, il eft donc raifonnable que tu m'en
faflTes davantage. Le trafic du monde conclud bien
autrement, & dit : Je t'ai fait du bien, tu ne m'en as
point rembourfé, il eft donc raifonnable que je cefTe
de t'en faire, jufques à ce que j'aye tiré de toi
quelque utilité; mais voici une autre procédure,
qui dft de l'efcole de la Foi.
Un chef de guerre ayant pouffé fes coureurs
devant lui, doit fçavoir ce qu'ils deviennent, & leur
dit communément : Allez, donnez, je vous ferai fuivre,
ao8 HBDITATIOHt SCK L» FflAOHII,
& rendrai bon cpnce deTOoi. Les Plrincet mefinet
en leurs vanitei umeu ceux qui oot receu lenn
bien-faits, lelqueU ili ftmt fubrre ptr d'autre*, ft let
redoubleu jufquet à Upir&ite gnndour de aux
qu'ils ont aimé. Or rdpennce colloquee en Dieu
n'eftinc point de nc^re nuure, mais du teûwHgnege
& don pur de fit gnce, fut laquelle, & uni let
dons de l'eTprit, nous courion» au moyen de la
chair, & cerchioni aupréi de nom en la terre ce
qui fémble fi efloigoé dani le* Cieuz; c'eft donc
une main celeûe qui y attire nos cTperancea ft les
dcftouroe de s'attacher à la terreflre ranité.
Voila la première croiqw det pacet du Dieudet
armées, qui màlleur capitaine que tout lea autres,
les fera fuivre de fia ffoa pour ne lea perdre point.
Voila les premiers arrêt pour ellever bien huit &•
MIDITATIOKS SUR LES PSBAUMIS. 209
quoi payer fes debces, le trompeur, en riant, leur
prefte des fueilles defquelles il a couftume de payer
fes ouvriers ; & ces fueilles font les bonnes œuvres,
ou les indulgences achetées bien chèrement.
Les fidelles voyent bien auiS leurs péchez, qui fe
prefentent inceifamment noirs & hideux devant leur
fiice; & de tant plus laids que les bons les hayflènt,
& qu'ils ont pour champ la repentance & la blanche
fÂeté, & d'ailleurs les pefchez font diverfemenc
regardés par ceux qui ne les hayffent qu'à caufe de
la peine, ou par ceux qui les hayflènt en l'amour
de leur Dieu. Ces derniers, au lieu de courir au
conte des mérites, empoignent les grâces (ans mé-
rite : & c'eft lors que Dieu fait fuivre fes grâces,
& par icelles confirme les fiens de plus en plus en
l'afleurance du falut.
Or tout ainii que le recours à Dieu n*e(l pas un
prefent de nature, en voici encor'un autre qui
vient de meûne lieu; c*e(l Famour du bien, & la
haine du mal : nous employons nos amitiés & af-
fections, non pour ailUler aux pervers, mais aux
fainds qui font en la terre, & aux gens notables
d'icelles, aufquels je prens tout mon plaifir.
Les penfees terreftres nous inclineroyent au con-
traire, & la prudence des enfants du fiecle, plus
fubtile que de ceux du Royaume, nous feroit diligens
à la recerche des mefchans & des profperans : mais
les inclinations celeftes nous font foldats & partifans
du Dieu des armées qui nous fortifie au bon combat,
en la compagnie des bons & des affligés. Là parmi
nos imperfedions & foiblefles nous ofons dire :
Quelque affaut qu^ayefenti
JTai toujours tenu ton parti.
310 MBDITATIONS tUM. LIS PStAOMtS.
Et puis,
0 Stigaeur qui ^tf contrairt
Nt l'M-ft ptu ftuf aiytrfiùrtf
Dieu a'a que fiin de noua pour fit milke^
Jefu£-Chrift a les millions d'Ange* i £}n fecoura s'il
lui plÙE. Pourquoi nous dûçici*-il donques tx^
roHer, & remplir fes rangs & fi fcnblet nroot ou
bUbgnei que nous fômmesî Ceft que fim pJiifir cft
de [ûrfaire fon ttuvre en l'infirmUé^ qu'U t taat
les tabernacles de Jacob , & veut (Are viâorieuz
fur les Geana & G<^tlu par les frondes des peda
bergers.
£t pour cela il ne nous donne pas feulement les
armes parfaites que defcrit S. Paul, mais il naos
environne de force & de hardielTe : & de plus nous
MtDITATIONS SUk LBS PSBÀUlkfBS. SU
Nous apprêtions à prononcer avec le Prophète
cette fentence de condainnacion : Les oHgoifès ai
ceux qui courent après un autre Dieu feront multt'
pliees : je ne feray point leur afperfiort de fang, &
leur Èom ne paffera point par ma bouche.
Apf es k grâce de Dieu qui nous a dotmé Paflëu-
fismce, & nous a fait dire^ Noftre pefè qui es es
deux; après la féconde qui nous a fidc fuivre, Tm
nom fait JenStifié^ ton règne advienne, ft puis Té
votemté fait faite; voici la troifiéme grâce, qui éft
du pain quotidien. Elle monfire comment notii
feÉdHîes enfans de la maifon : & quand le diaMé
& fei filppots nous jettent hors des noftres, ntnis
font abandonner nos familles & nos biens pôùf
futvre la croix du Chrift , nous voyons nos terres
pôflTedees par nos ennemis, on nous prive des efbats
& des honneurs pour y coUoquer des perfonnès
indignes ; bannis aux païs eftrangers, où nous fommes
quelques fois choqués, au lieu d'eftrc fecourus, on
nous y appelle malfaiteurs, rebelles & forbanis;
certes, il femble que les enfants de Dieu foyent
lors très mal partagés, & toutefois (qui eft un
myftere incomprehenfible à l'homme animal) c'eft
là où nous difons : L'Eternel efl la part de mon
héritage & de mon breuvage; tu maintiens mort lût.
Que les profperans du fiecle fe lèvent du baiic
des moqueurs pour nous demander où eft le pain
de nos enfants & de nous } où trouverons-nous des
terres & des maifons comme nous en laiflbns ? où
font les benediétions temporelles de Dieu^ En fin il
le fait bon fervir, & où il fe plaid. Certes lors nous
nous moquons des moqueurs, & mefprifons les mef-
prifans, qui ne fçauroyent comprendre comment
l'homme ne vit point du pain feulement, mais de
Xia UIDITATtOKt SOI. LBt niADHBt.
toute parole proceduite de U booche de Dieu.
Nous deiefbmt rûniHvntt det hotunei abnuii, qui
ne peuvent cognoinreftn'eateiidcBCrieo à ceci :c^efi
qu'il n'y a point de meilleur fonda, que quand
Dieu {ë fait nofbc héritage, que quand nàe .fcniee
font aJEgneet fur liU, quand H notii p^ À quand il
fe rend noftre be^er, foot kqud noue n'avooi &ttie
de rien ; loua cette houlette nous pcflèdons la
^ïilTe & les plaïûn de la terre : ue&ne noua
avons par & gracé à te remercier, de tpâ Û enri-
chit de nrres neceflàires nos taUes aux yaa de
nos ennemis, jusqu'aux parfiims ft délices ^edfiéa
par Qoftre poète facré, dans le£]uelles, comme il
dît aiKeura, nous fommes raiTafiés de mfffUrt ft de
fmndifes. Que s'a now &u paflér k de&rc, là fl
nous repiift du man & du pain des Anges, ft en toàt
MEDITATIONS SUR LES PSEAUMBS. 213
la pitié d'autnii leur ait donné le fuaire pour le
dernier prefènt; verifians par leur fuccez ces pa-
roles de rEfprit de Dieu :
Le lÀon affamé
Bien fouvent ne trouvera riens y
Mais ceux-là font remplis de biens ^
Qui ont Dieu reclamé,
C'eft ce qui nous ravit en exultation vers le
Seigneur^ quand fi mal partagés au monde, nous le
fommes heureufement au Ciel, & chantons avec le
Prophète,
Que de honte fouveraine
Sa main droite efi toute pleine.
Et faifans allufion aux cordeaux des arpenteurs
qui eftoyent appelles aux partages, nous difons,
Les cordeaux me font efcheus en lieu plaifant, çoire
un tris bel héritage m'eft advenu.
L'enfant desbauché demanda partage à fon père
en chofes mobilières, légères & aifees à perdre
& diiïïper, defireux d'efloigner la maifon & la face
vénérable de laquelle il fuyoit les reprehenfions
& les bons confeils, efchapper la main à craindre
pour les chaftimens, mais à baifer pour les bien-faics :
ainfi font ceux qui fuyent TEglife de Dieu pour le
vain & menteur vocable de la liberté. Mais cepen-
dant que ces Efaiis courent à leur plaifir, les Jacobs
pofledent avec la maifon & héritage la paternelle
benedidion avec moins d'efclat que les prodigues,
mais en douceur & en feurté. Dieu nous conduit
par fon Efprit & grâce à Tamour du pain de fa
maifon, à ce' que nos infolences ne nous ameinent
314 MBDITATIOHS SUR LES PSBAUIfSE.
pas à l'cDYte du reftc des mcrceiuùret, ni k l'uigc
des porceaus. .
Or voici U quacrieime marque, pour renvoyer les
objeftions de Saon par un teGnotgnage bien aÂeuré :
C'efl que ce n'eft point par no^ efpee que nous
avons cène terre occupée.
Nous confeflbnc injuSemenc, qu'il ne faut pts
facrifier à nos filets, ni à nos adrefles pour avoir
pris un fi bon lot, & partagé avantageufemeni :
mais nous donnons ainû ^ire à l'Efprit qui nous
a conduits.
Je beniraTrEtemcl, lequel me donne confeil,
mefmement les nuiâs efquiElles mes reins m'enfei-
gnent.
Les jours coulent trop toll, & les nuiâs nous
doivent élire trop courtes pour les aftiona de grâce
MEDITATIONS SUR LBS PSSAUMBS. 215
Les mdflies différences paroiffent en la percej^ôn
qu^en la donation : car les Geans & robuftes veneurs
ucrifienc à leurs bras velus pour la proye qu'ils
ont conquife; les autres à leur bien-faiteur : les uns
en jouyflènt fans joayr, gourmandent cette proye
& ne la favourent pas; les autres fuccent les dou-
ceurs de leurs fttiiàs en perpemelle recôgnoiffance
au donneur.
TeUes diflferences paroiflènc entre les bdies ravit-
fantes qui vivent de projre & de fang, & les dducis
& innocentes, defquelles la vie n'dleint point d*auire
vie, & les bojraux n'avallent point les entrailht
d'aucun gibier* Les premiers animaux dévorent viUl-
nement, jettans les yeux à gauche & à droite au
foupçon des tripailles, menacent & grondent pour
eftre e£Broyables, tout en peur, tout en fureur; &
mefmes les loups mordent leau au lieu de Tavaller
doucement : d'autre codé les petits poulets, les
colombes & autres oyfelets, ayans faucé le bec en
Feau, lèvent la tefte & les yeux en haut; & regar-
dez leurs paupières, elles font contenance d'adion
de grâces vers le Ciel.
C'eft à propos de dire les caufes parfaites, pour-
quoi les biens que nous avons receu d^enhaut ont
efté accompagnés de lieiTe : & quand les mefchans
grinçoyent les dencs en leurs profperités, ils nous
ont veu pleins de joye en nos affliâions. Dirai-je,
qu'au point de la mort, en laquelle ils hurlent, nous
apprenons à pfalmodier à nofîre Dieu, & jetcer des
cris d'allegrefle au lieu de leur grincement de
dents? Car les tranfis, aufquels leur loi défend
d'eflre affeurés de leur falut, n'ont que difette
parmi leur abondance, que vergôignes en leurs
honneurs, & que terreurs en ce qui leur eft plus
2X6 MBDITATIOHS SDK LIS FSSADMXI.
afleuré : ils a'ofbro/ent dire à Dieu en foi comme Dont,
VueiiU fout Pomirt ix tan aile
Me garder Uen O* fmrtm^Uf
El tour aufft thereme/a
Qu'on tient ie fon ml la pranelle.
OÙ font les en&ns du flede qui olênt dire en le
croyant, que tes Anges ayenc un cunp planté alen-
tour d'emt, qu'ils fervent de rideaux à leur lia, &.
qu'ils ayent pour chevet le gjron de Dieu? Pren-
dront-ils pour eux ces propos excellents ? Je les dois
fecourir, car ils adorenc mon Nom. Et void en
noltre Pfeauine, que Dieu ell à la dextre du fidèle
pour fa garde. Il y a bien de quoi s'efcrier : Voy^
quelle chanté U Ptrt nous a àonaaéj non (êulement
pour eflre fi heureufement & precieufement gardas ;
MIOITATIOHS SVK LIS PSIAUMKS. aij
Ls langue plus légère s'e^aye, & dit en lé mo-
quant des oigueilleuz,
Le Toia-puiffiau ie itar façon dt/pUt^
Se moquera : tar d'tux il nt lai thàia.
Et puis,
DUu ft rit du mtf chant, ^uani de fe* ytux ouveru
H voit vtiùr U jour de fa raint.
Et là defliu,
Ce qui nous eft permis contre les faulTes langues,
defqueÛes il eft die,
De tes mal-keurt Ui fe riront,
Et voila qu'ils diront :
C'efi celai qui n'a voulu prendre
L'Eternel pour fon foujUtn,
Et ce qui s'enfuii.
En meûne temps le Seigneur fe rira de leurs
vanieries, fe moquera, de tous ces glorieux, ayant
auparavant menacé, Au jour de vofire angoiffe je mt
rirai de vofire calamité ; voila les termes auxquels il
e(l dit que la langue fe rit. Ainfi du contentement
du coeur, & des exultations de la langue la malTe
prefenie du corps apprend à s'afleurer; cette chair
mefme qui trembloii de la mort en mefprife les
menaces, fur tout quand les affliftions de la vie la
tenaillent, lui font voir avec longue &. fafcheufe
leçon qu'un mieux l'attend qu'elle doit ardemment
3l8 MSDITATIOMS SV% LIS PSKAHMIS.
dcfirer ; & ptdi elle fiit fon efpertnce de cet defin .
E[ c'e(i ce que dit le Pfalmifte, Pomrtmt mm cvbt
j'^y? es/ouy, (t ma gloire j^ajl *SS'^y> ^"'fi "*"
rAair habitera m affeuraxce.
Il D'y a que Dieu très bon ft tr£t lige qui fkche
envoyer le mal pour tourner fon ufage en bien, &
d'un arfenal d'afflîâions faire un cabinet de délices ;
il a une referve d'infimùcét, bleflures, hainet, qo^
relies, maladies, pauvreiez, asgotllèt, prifont, g^
hennés & mutilations de membres pour deffdofer
fur nous, defquelles il tire fur nous toute fermeté,
guerifon, amitiez, concordes, fanté, abondance,
joye, liberté, plailîr & endere peifeâion : & ces
choies fe tournent en bien quand par fes eAranges
moyens le corps efl apprivoifé à fuivre fon >me
franchement; tout s'accorde ; Vame féconde en pieté,
, les cncraillcs en charité. '"
MIDITATIOMS SUS. LIS rSKADMII. atf
quand le Prophète nous & moo&ré Cbrift relevé du
tombeau, ft nous a fait voir qu'ayant part i Su
f^tcet par le droit d'adopdon, fa relurreâioQ c& le
gage de la noftre : aînlî die fajnf»uee aux Cieux, oit
ïï a pria place pour fea coheritiera. AulE eft^il dit
p»ur noua, fous lut, ft avec lui, Car tu i^abandat^
Htrat point nuin amt au ftpidchTe, ir mê ptrmêttnt
qut ton Santal fente corruption.
La pourriture du corps eft de peu de moment,
pource que nulle partie, tant petite foii-elle, ne
s'en perdra, puis que la terre & la mer rendront
conte de leurs morts, pour les reprefenter : ft
cette chair, ayant elle confite en la mort, renaiftra
purgée de toutes fes împerfeâions ; non feulement
fans playes, mais aulli fans cicatrices & diflbr-
Lcs animaux irraifonnables font de toute autre
condition, eflans nés pour ne renaiftre point : ft
nature qni le pui^e d'eux par leur extinâion, fe
glorifie en la confervation des corps humains, comme
fes précieux inltrumens de la gloire celelle : & le
fecret de cela eA, que ce qui ell fainâ ne verra
point corruption.
Les philofophes Ethniques ont bien fçeu dire,
que la dernière mutadon ne nous change qu'en
nous mefines, ft non point en un autre : & ce mou-
vement tend à fou information, ou à fon achève-
ment & perfeftion, qui n'eft qu'au fécond & der-
nier repos, fin du defir ft du mouvement. Quand
la mon difibut le corps de Thomme, le feparant
pour le purifier, elle ne fait point périr le germe
immortel qui refîinie le tout ; la dilTolution apporte
non la dedniâion, ni l'extinâion, mais le renou-
vellement : elle n'a pas pour office de réduire i. rien
OM SUK I.BS PSIAVKIS.
ce qui eft, mais que le caduc fe relevé, que le def-
crepii fe rajeumJIe, que le mortel renaiflëpour def-
poulller la mortalité. Si cela par la cognoiÂTance des
Payens s'elt peu dire de tous corps humains, i caulë
que l'homme eH le plu« précieux animant de ce grand
immortel animant du monde. Empereur fur les
autres animaux.
L'homme dt qui Vefprit À ptnftr ejt parti
Deffus Us Ciaix dtt CUux vtri ta. diviniU
A ffvir, adorer f refaruur, O" cognoiftrt.
Juger pour le pUa haut te qai ejt au hu efire^
Efi exempt de la Loi qui fou* ta mort le readj
Et de ce privilège a le Ciel pour garant.
Si, di-je, on a jt^ la durée de l'homme fur ces
mArtjLics, que peui-on dire du Chreftien, duquel 1'
MEDITATIONS SUR LES PSBAUMBS. 2tl
Dieu des armées, le grand Roi de tous les Rois,
daigne bien nous prendre par la main, fe faire noftre
guide pour nous conduire par un pedc fender droit,
mais efpineuz, à la porte eftroice, & de là à la cou-
ronne de gloire & en fon paradis. Ce fut avec grand
murmure que le peuple d'Ifraël entra dans ce che-
min. Les murmures, les eaux changées en fang,
toutes les playes d'Egypte ne les pouvoyent animer
à prendre ce deflein, û la main de Dieu, par le mi-
niftere de Moyfe, ne les euft conduits, tirés, traî-
nés : le labeur des pots, les tafches rengregees, le
meurtre des enfants mafles, & en tout le dur joug
de Pharaon fervit de lieu commun aux fuafions die
Moyfe, comme les duretez de cette vie donnent
commencement à Feftime & au defir de l'autre. Les
deferts de quarante ans rendiient doux le nom de
Canaan, & l'effiroyable regard, ou fouvenir de
l'Egypte, corrigeoit le regret des aulx & des oignons :
car c'eft de la nature humaine, de vouloir toujours
tourner le pied arrière : quand nous fommes dans
ce fender, qui nous conduit à vie plus heureufe,
peu de Calebs & de Jofuez continuent fans mur-
mure la haine & le mcfpris de la vie, & fervitude
d'Egypte, pour aimer dignement & eftimer la féli-
cité de Canaan.
Que s'il a pieu à Dieu nous faire naiflre de fes
débonnaires, & non pas de ces belles qu'il faille
dompter par maux fans nombre & par douleurs
. extrêmes; & qu'auffi il nous traitte en fes douceurs
& benedidions de cette vie, nous faifant la grâce
d'eilre ravis en fon amour par ce traittement, il ne
faut pourtant pas changer le defTein du Ciel, quel-
ques ravis que nous foyons ici aux contempladons
celefles : ou bien il nous fera dit comme à Pierre.
333 MEDITATIONS SUS LIS PtKAVHBS.
qui vouloit en k cransfiguration de Cbrift (qui leur
monftra un rayon de fa gloire) dreflcr iroi» nber-
nacles : il faut monter plus haut, & qu'un ruîflêau
plaifant du deferi ne retarde point l'enftfeprife de It
terre fainâe & fon achenûnement.
Les pauvres Payeos nous om mefrae donné quel-
ques leçons pour monftrer que la dernière «Tpe-
rance doit engloutir toutes les autres paffions; ils
nous ont, poètes ou hiftoriens, dépeint un Eoee
chaffé de fon pays naturel par une outrageufé
guerre, les deflinees lui ayant promis le Ladum, ft
là une aife parfaite ; fon chemin eft trtverl* de deux
fortes d'accidens; U première, d'un pefant fardeau
de père, mère & enfant, qu'il lui h\it porter & me-
nerj de lempedes maritiitaes, de la mort de fes plus
chers compagnons, tfu péril de l'ifle enchanierefle.
lilDITATIOWS SUR LIS PSBAUMSS. 22}
comparés avec Us dominations efdaves de Satan; ft
oà tant s'en faut qu'il y ait repos, que les vafte^
grandeurs les font efgarer, les richeifi^s leur donnent
bguerre ; leurs eflevations, tant plus elles font hautes,
nm plus trouvent elles d'envie ft de vents, & plus
dangereux en cft le précipice.
Le but de noftre efperance eft au vrai ft feul
paradis, & la couronne de gl(Hre : le chemin en eft
fude & noncueux, comme celui qu'on attribue à la
verta. 11 y % plus, la fin en eft tousjours par la
cheote de la vie. Certes les uns font cette cheute
par précipice, les autres s's^enouiUent & coudient
doucement : mais en elle (pour tirer encore qud-^
ques fleurs de nos Ediniques) il faut contrefaire ce
glorieux Empereur, qui tombant à Tentree de fa
conquefte, baifa la terre, & dit (ce que nous pou-
vons mieux dire que lui), Je prends pojfeffion de toi,
o Canaan celefte, je te Jaluë, héritage que le Ciel
me devait»
Tous les defirs hiunains, voire les plus violens,
(ont trompeurs, ou par le manquement, ou par la
(atieté : les defirs du Ciel font infaillibles, ft de
}uftes defirs deviennent véritables plaiflrs : les joyes
de ce monde eftoyent feu de paille, bien toft ch»--
grins ; autre eft la joye éternelle : les amitiés des
homme^en peu de temps fe trouvent faufTes, & les
amours du Ciel font éternels extafes, & raviflemens
par-defTus noflre imagination : nous a£feâons de
gpufler le bon & contempler le beau; Dieu fetil eft
le bon & le beau, nous goufterons d^iceluy ft cok
gnoiilrons fa grande douceur.
Ce paflâge qui a un nom û rude, a un effeâ fl
doux : il y a des douleurs pareilles à celles des
mères qui accouchent, ft des en&nts mefmes qui
234 MZDITAT10H8 SVR. LKS PSKAUlflS.
ont à fortir d'une tenebreulê prifbn pour venir
jouyr de la lumière : qui refiiferoit cette mon pour
pafTer à la vie, tirés & conduits par la main de
celui qui nous a aim^i avant que nous fiiflioni pour
nous faire elh'e } & quand il nous tend les mains
pour nous donner l'efbe de perfcâion, avancerons-
nous point nos mains au devant des Hennés, ferons-
nous pas la moitié du chemin vers lui }
Comme ceux qui au travers de la fumée & des
armes ennemies vont au devant de leurs fecours,
quand nollre batteau brifé des tempeftes arrive ,
faucons à terre dans le pon, & ne delcendons point
à regret.
Or voici le comble de joye & de lieflè ; c'eft que
cette félicité efUnt départie en diverfes maoûons,
mplira chacun félon fa mefure, afin que chacun
MEDITATIONS SUS. LIS RSSAVMIS. MZ^
pour finir, c'eft là où nous attend cette béatitude,
qui n'a peu eilre dépeinte dignement, ni par la Ma-
jefté de Sina, ni par le fplendide palais qu'Ezechiel
nous a reprefenté, ni par le glorieux eftat de la
Transfiguration, non plus par le portraiâ de celui
qui parut à Sainâ Jean entre les chandeliers, ni par
Teftat excellent de la triomphante Jeruiklem : c^eft
ce que nul œil n'a peu voir, nulle oreille n'a peu
ouyr, nul efprit n'a peu comprendre, & que nul
cœur n'a peu deûrer dignement.
II.
LHEliCVLE CH%ESTrE:r^.
L HBRCULB CKRBSTIBK. %2rj
Ce chemin nouveau que je vous veux donner
& ordonner, c'eft que vou« portiez plus de pidé que
d'envie à ces belles refvcries, defquelles on peut drer
plufieurs dodrines pour la Philoibphie naturelle,
ft plus encores pour TEthique : m*accommodanc en
cela à la foie curioûté de ceux qui aiment mieux
UgêTê aurum ex Emni ftêrcorej q\it de prendre For
d'Ophir tout pur de la parole de Dieu, où il vous
en prefente fans efcume & fans imperfeâion.
Je vai donc vous donner un exemple pour tirer des
fabuleufes feintes les véritables enfeignements, pre-
nant pour eflai les labeurs d'Hercule, choififTant de
trente quatre qui lui font attribués une douzaine de
ceux qui plus à propos fe rencontreront.
Les meilleurs des Anciens lui en attribuent douze,
& Macrobe (qui fur le nom d'Hçrcule veut qu'il
n'ait efté autre chofe que le Soleil) lui donne les
douze fignes du Zodiaque, lefquels il paffe tous les
jours : pour ces douze labeurs qu'on allègue, je
le prends autrement, & veux que T Hercule Chref-
den obtienne les victoires figurées par ces monfires
abbatus.
I. Commençant dés le berceau, comme dés lors
fanâifié à Dieu par une generofité naturelle, à
efteindre les malices, les choleres, defpits & mau-
vaiûiez de la première jeunefFe, figurées par ces
deux ferpens qui fe couloyent dans le maillot
d'Hercules, & dés lors rendent quelque preuve
que les enfans de Dieu font fandifiés dés le ventre
de la mère.
a. Eftant advancé à la première jeunefle, & trou-
vant les péchez qui ne s'avancent plus contre nous
un à un, mais fept, & fept fois fept à la fois,
noftre jeunefle d'Hercule doit apporter feu bruflant
338 L'HBS.CVL> CBKKSTIBN.
& lumineux, & le trenchani du gliîve de la parole
à U deftniAioa des crimes renaiflàns, qui attaquent
(urieufement & par venin les mœurs de la jeuneiTe,
comme Hercule fe fervii du fer & du feu i la def-
cruAion des tefles renaiflantes de fan Hydra.
3, Les volupœz légères, foit & pourfuivre, foit à
fuyr, fbyent reprefentees par la biche aux cornes
d'or, auflï plaifanie i voir que dangereufe à efprou-
ver ; c'etl là où la viileflê d'Hercule eft à prati-
quer, Toit à la fuyr, foit à la pourfuirre pour l'at-
teindre.
4. Mais au prix que nous devenons forts fe
prefentenc aulTi des ennemis plus dangereux ft des
vices plus furieux. Cela eft defpeint par le Lion
Nemean, figure de l'orgueil qui nous fùfit en ado-
iefcencc, & qui nous rend beftes furieufes, qui 1
l'rb&culb ch&istiik. laç
vaincre en nous-meûnes U nature porcine, qui nous
fiûc gafter les beaucez que nature nous concedoit,
nous rend porceauz en pareflè, en gourmandife & en
i^peds fauvages, & nous fait tousjoiu^ retourner
en la boue & au fouil de nos ordures. Cet;e là eft
la viâoire la plus necéflaire à l'Hercule Chreftien.
7. De meûne nous donner garde de (ânâifier
& fâcrifier à Dieu noftre jeuneflie, refervant ce qui
eft plus fpecieuz & plus beau à nos plaifirs, & em-
ployant cette beauté conlacree aux voluptez : car
Dieu punit ce mauvais choix par la fureur de Tef*
prit, à laquelle il abandonne noftre jeuneiTe, la laifle
abujèr de la force & reflembler un uureau efchappé
en fa fureur. Si nous en venons là, il faut abbatre
& porter par terre, dompter à bon efcient nos vi-
gueurs naturelles, qui rendent forts & vigoureux
nos péchez.
8. Anthee nous fera ce grand vice pefant de
r amour de la terre, qui nous fepare des defîrs ce-
leftes, nous attache à foi, bannit nos efprits, par la
contagion du corps, des contemplations fpirituelles
& celeftes amours. Tant que Hercule le combatit fur
le champ de fa naifTance, il n*en peut venir au bout,
mais Teflevant hors de fon élément, il le fait petit,
preflfé par la vertu. Ainfi eflevant nos defirs de la
terre vers le Ciel, nous nous vainquons nous mefines
& eux avec nous, & nos âmes triomphantes amei-
nent le corps à leur domination.
9. De là nous venons à la viâoire obtenue fur
Cacus, le mefchant larron $ meurtrier, fils de Vul-
cain vilain & contrefait : Vulcain, qui forge par le
feu les foudres puniiïeurs de nos démérites & de
meline feu efchaufie en nous les defirs d'ambition
& d'avarice, les fouhaits du bien d' autrui, & de là
330
L HBRCULI <
nous fait brigand» & ravilTeun par diTerfei voye*.
Ces defirs engendrent & jettent le fèu dans U
tanière de nos cccurs, rare vidoire de l'Hercule
Chreftien, & pour laquelle il faut eftre doiié de
celefte vertu.
10. Par ce vice nous devenons demi hommes
& demi beftes ; & ce font les Cenuures enfants des
Nues, à la nailTance defquels le Soleil eft empefché
de contribuer par les fumces de nos vices. Bienheu-
reux ceux-là qui defpouilleront les beliialités pour
fe rendre hommes païfaiis & régénérés en naiflance
à Dieu!
11. Tel doit eflre celui qui travaillera i la
délivrance de la pauvre Hefione, & la fera d'efdave
triomphante, & de captive maidreite de fon cœur,
c'efl à dire, qui travaillera à la libené de l'Eglife
L HBS.CULB CHS.BSTIBN.
231
tinfi noftre Hercule au lieu det cheveux, qui mar-
quent les délices, ft qui ne font qu'excréments que
nous retranchons tous les jours, pone dés fon
enfance les lauriers, marques de fa viâoire, ft les
olires, fymbdes de fa paix.
CONFESSION CATHOLIQUE
DU SIBVR
DE SANCY.
[Pabliée pour U première fois d'après le mAnufcrit de U CoUeAion
Troschin. Mu. d'Anbignè, T. IV, a* partie, • i.]
CONFESSION CATHOLIQUE
DU SIEUR DE SANCY
Et Déclaration des caaret, tant d'Eftxt que de Religion,
qui l'ont meu à fe remettre au ^ron de
l'Eglife Romaine.
LIV%E V1{EfMIE1{,
A Monfieur le Beverendiflîme EVESQUE D'EVREUX
deffence de leurs tc\
d'autres cho/es à défendre, les
YANT délibéré de mettre en
lumière ma Coiifeffion {nuvre que
je pais vanter n'efire pas pa-
blici faporis) Je n'ay pas voulu
faire comme ces ignorant, lefyuels
ayant quelque auvre doubteux à
mettre au vent, cerckent pour la
le Roy, qui a tant
très quelque Prinet
»l6 CONFESSION DC SIBCK. SB SAKCT.
noa mefdifaitt, eomau loi âMt traduSturs du Tasto,
qui a chùifi pour fou apologu» U Prinet dt Conty;
les autres y tmploytnt let CoiaenuarSf plus fa^
gneux des refcriptioiu que d» rymas, on Us Fimûx-
eiers occupe^ à l'exercice de Uur fidélité. Ei^n la
folie des dedications eji venue Jufquet au Capitaine
d'Argoulets & couppejarets. Le fteours de telles
gens fer! auffï peu à la deffenee de ces mauvais petits
livres, que fi on peignait des baflions aux coings des
pages, ou fi l'onfaifoit la couverture à la preuve du
pijiolei. Ces cautions ne d^endeni point une mau-
vaife caufe des cenfures; mais c'ejl en vofire fein
capable de toutes chofes, Monfieur mon Converti£'eur,
que yay voulu /etter ce petit avorton^ vous ayant
oûy (par manière de paffetemps) dépendre VAlcoran
de Mahomet (T le Talmud des Juifs j avec telle dex~
A MONSIBUR l'BVBSQUB d'BVRJIUX. ZJ/ '
comftrvaiions ayants touché les anus en perplexité,
vous a rendus force difciplesj preparei & acquis U
nom de Grand Converdfleur. Pour ces raifonsje vous
ay dédié mon livre , joint qii ayant refolu de quitter
cette voie e/pineufe. Je fis eleéfion de vous pour le
Sacrement de ma converfion. Je vous dis Sacrement,
pour ce que vous m^ave^ promis de la faire conter
dorefnavant pour le hui&iefme & le mettre au
devant de la Confirmation. Ces fignes feront une
charge de livres; la chofe figniflee, <^efl Vefperance
de parvenir. De toutes ces chofes Je veux faire une
ample & publique déclaration : dequoy Je faifois
une grande difficulté, n'appartenant qv?à perfonnes
publiques de mettre au vent des efcrits manifeftes;
mais feu Monfieur de Sponde m'a appris à vaincre
cette difficulté, encore qu'il rteufl rien de public que
fa femme. Or pour ce que ces derniers efcrits ont
fervy de prétextes à la converfion de force honneftes
gens, & ont donné quelque couverture à la mienne,
Je reproche (comme enpaffant)^ à ceux quiluy avoyent
fait de fi hautes promeffes^ qitils debvoient pour le
moins retenir ce fainél perfonnage par une honnefte
prifon en l'Abbaye de Sainél Martin, comme autres-^
fois Poflel^ tr maintenant Cayer, doéles tr fols, ou
pluftoft au Fort VEvefque, comme Maiftre Pierre,
que de les laiffer^ ayant encore Vefprit troublé^ aller
par defpit machiner la prife de Bayonne, & faire
rompre fur la roue fes compagnons, Encor le mal
eflant fait^ y avoit il bien moyen de payer la grof'^
feffe de la fille de M, de Guerres^ fon hofte, fans le
laiffer courir à la cruelle refolution qt£il luyfalut
prendre de Vefpoufer, avec difpenfe de fa Sainéleté
& un décret du Confeil de confcience, que Père
Alexandre eut favorablement defpefché; il pouvait
3)8 CONFSSSION DU HBHR DS SAKCr.
commoderrunt eitipoifomur fa ftmmê pour fa cadia-
lique <T urttverftfU Ivxurt txtrett tu Brottag». Mais
encore, pour quoy n» pumt-on pas la boittuft Roltttt
de la Rochelle, qui fit deux grandes mefehaiietiejf
l'tme de s'offrir au paKvre de Spoiute, pour ea^i-
foniur fu Maiftreffèj de laquelû elle lui conta Ut
peckej les plus defeomertSj ftàtaiU ta eo*fpiraiio»
faite par elles deux de Brotagef l'autre malice fut
de changer de potage & lui domur le contretemps
de poijon. Je dis ces cko^ en pafani contra Papi-
nion des Huguenots, qui le eroytnt enoir efié empoi-
sonné par Monfeur Raimondj pour avoir efii rtconu
en ce nouveau convert quelque trouble de eonfcienee,
tr fa volonté d'aller faire fa repentanet à la RoelulU,
Voila pour l'apologie de fa mort & de la lurdiafe
r Je preni en faifajU ma déclaration puhliqm»)
Chapitk.1 pR.tMiia.
Dé FaultiarM dm PEgUfê &défim ek^.
K n'a que trop «lebtnu en ce
lempt C l'Eflat dl en l'Edifê,
ou û l'EgUft ell en l'Edu.Cciu
qui veulent que l'Elfe foii en
elle, les uns difent qu'elle ne
feroic pu univerfelle, fi elle
eftoit circumfcriie de i'Eftat,
qui n'eil pas univcrfet; In autres prenant mclinet
chofci pour exemple : Voyez-voui pas, difénc-îls,
comme l'Eftat fe foubfmei k l'Eglife, que ce brave
Roy, après tant d'armées desfaites, tant de ûcges
heureux, tant de grandi Princes, fes ennemis, abba-
tus i fes pieds, il a fallu que lui, fe profiernant aux
pieds du Pape, ait receu les gaulades en la per-
fonne de MonTieur le ConveroCeur & du Cardinal
d'Oflat , lefquels deux furent couchez de ventre 4
bechencx, conune une paire de maquereaux fur la
grille, depuis Miftrtre jufqu'à viiidos, Encor dit on
qu'il a falu depuis joiier i meûne jeu entre la per-
Ibtine de & Majefté & Monfieur le I^gat, toutes
fois c'a cfté doucement & foubs la cuftode. Ceux
qui veulent aoichiler l'authorïté du Sainâ Siège,
all^juau la hardiefle de la Cour, laquelle fugi-
340 CONFB5SION OU tIBVR DE SANCT.
live à Tours, ofa faire brufler les Bulles de Sa
Sainteté par un bourreau. Ils allouent aorés cela
une féconde hardielTe de la Cour unie enlemble au
banniffemenc des Jefuilles de France, qui eft un
grand mefpris du Sainft Siège. Mais je refpons
contre cela qu'on n'eft pas il s'en rependr : celmoin
la bonne Cacholique de Tournon, & i fon initadon
les Parlements de Thoulouze & de Bouidcaux, qui
replantent, maugré tout le monde, ïous cei grand*
deffenfeurs de l'Eglife Catholique. Voila des preuves
d'une part, Se. d'autre parles effeâs .'Maintenant j'en
veux cercher par les caufes ; & que nul ne treuve
etlrangc cène façon de procéder. Il y a des)à long-
temps que nous conlîderoiu en France les affaire*
par la confequence, & non pas par les ralfbnt. Ei
i i'advefcis le Lefteuf que j'iurois plus (oft fait
CHAPITRE 1. 241
pour abréger, j'ay leu la diflindion & Canon pro^
pofmtj (de Con, prœ. 19. Cap.) Si Romanorum^ où il
eft notamment dit du Pape que fecundum phnitu^
din&m poteflatis potêjl de jure fupra jus dijpenfarê.
Et 5 (Tranflfubft. cap. 5 in gloff.) il eft dit en expli-
quant, qu'il peut ex injujiitia juftitiam facere. Mon-
fieur le C>nyertii{èur, ne vous eftonnez pas de ces
derniers paiTages, les renforçant d'un troifjefme, où
U eft dit que le Pape peut facere infeéia fa&a
irfa&a iirfeéla. Par une feule hiftoire, dit il, je vous
prouvera/ que le Pape peut difpofer du droi£t
contre tout droiét, faire de injuflice juftice, & que
les chofes faiétes ne le foyent point. Ce grand Pon«
tife Sixte Cinquieûne qui fit trancher en fa vie
quatre mille tcftes, & portoit envie à la Reine d'An-
gleterfe, d'avoir goufté le plaifir [de faire] /û/wr* una
tefla Coronata^ celui mefmes qui ofla les bourdeaux
des femmes & des garçons faute d'avoir veu le livre
de Monfieur Cayer, (car ceux-ci les remettent,
& par confequent odante mille ducats de rente à
l'Eglife) celui qui difoit, no fi chiava in quefla reli"
gione, no durera, & que le Roy appcloit Maiftre
Sixte, qui fut fait Pape pour avoir perdu un pour-
ceau, ce grand perfonnage eftant donc par mal-
heur entré en paft avec le Diable, & ayant leu
comment Alexandre fixiefme qu'ils appelloyent en
fon temps Alex, papa (pour ce qu'il avoit pris la
chaire par force) fut trompé fur les douze ans & fix ;
ceftui ci fit fon marché à régner fept ans, & fon
contrad fut fort fimple, pour fe garder de l'^* car-
iera d'un tel Notaire. Après qu'il eut régné cinq ans
fort redouté, il tombe malade le dernier jour du
cinquiefme an, & à la veuë de fon Camerier Mag-
giore^ vint à fon lid un Romipete, avec lequel le
n. 16
243 CONFESSION DU StlDI. Dl SAHCT.
Pape entra ea des grandes alnradoni. Lu aflif-
tam entendireor cooune le Pap« ippelloÎE l'autre
perfide, l'inEern^uaot s'il n'avott pas pranis fept
ans abibliu, & l'il y en avait ^a« de cinq p«lï«.
L' AmbalTadeur d'Enfer refpond à dure voix : Il 4I
vrai qu9 je ^ay pnmù ftpt auSj & i^tm *t r^mi
qut cinq, & Ji pour etU jt m fiât pomi ptrfiiÊ.
Souvitn lor fM Pmî ptfi rmlâÊÊt fai'n mourir i*
fih dt pour mmr la /i^fitM r# rmoif
Iront qu'tlU Mt /* ptaveù foin mourir pv Ut Icit
avant fei^e ans, tf qi^H r^tn avoir quo qaalorjo, in
/( fil poiatfuu iHourù, (> rtjpondis qu€ tu lui om
dannois d*ux d*t tiotts. Or cinq & deux font fept, il
s'en faut venir, & s'en alla avec une façon eftnnge,
comme je l'ay Iceu par MtOoTieur de Vîc, qui lors
du fiege de Paris Gouverneur de Sainâ Daus, me
CHAFITaS t.
«43
Meflè, où le Roy fut facré, avec ceux qui y aflif-
coyenc, n'avoic pas trop de tort de dire qu'une
Aflèmblee, qui fe fit d'Ecdefiaftiques, eftoic pour
eflire im Dieu. Le Chancelier le reprenant : Par U
corps Dûuj Monfieur, dit U rufire, vous nfaàvù&s^
r9\ quê Dùu êftoù à cêfié Mêfft là. Le Œancelier
ne Tofant nier, l'autre demande s'il y avoit là quel-
que hérétique qui vouluft borner la puiflànce de ùl
Sainâeté ; chacun haulTa les efpaules, aimant mieux
concéder l'excommunication du Dieu du Ciel que
de borner la puillance du Dieu en terre.
Chapit&b II.
Dêt traiitioiu. .
N faia bien fafcliÈf les Hugue-
nois, quand on leur r
l'authorité de l'EgUfe & les tra-
CHAPITRB II. 245
temps nous avons veu à la Cour, & avons encor
Siuelques Doâeurs, qui pour contrefaire les con-
denneux font les demi Huguenots & les appoin-
teurs de Religion. Ce debvroit eftre imbel exemple
à Monfieur Benoift & fes compagnons; Berenger
ft Chauveau en font morts de mdancholie ou de
poison. Ces galands vouloyent perfuader la fup-
preffion d'un livre nommé Indêx êxpurgatorius.
Ceft un refultat du Concile de Trente, félon lequel
efioit commandé à tous Imprimeurs de corriger les
plus rudes palTages, par lefquels les Sainâs Pères
ont barbouillé la croyance de PEglife, avec un cata-
logue des Sentences qu'il eft bon d'eftoufier ou
reftituer, afin que les Hérétiques ne s'en fervent.
Ces fages mondains, fe penfans plus fages que le
Saind Concile, ont voulu fupprimer cet Indice
êxpurgatoi're j pour cacher (comme ils difoyent)
la honte de PEglife qui ne debvoit plaidoyer fur
des titres falfifiez. Mais ils en ont defcouvert la
honte en la penfant cacher; car ce livre tomba, il
y a dix huid ou vingt ans, (je dis une copie fignee
du Concile) entre les mains de la Maifon de Ville
d'Anvers, & eft aujourd'hui gardé foigneufement
aux Archives de l'Eledeur Palatin. Qui pis eft,
quelques Do£teurs, entr' autres Baronius, qui furent
dioifis pour cette reformation, fe font reformés
eux melmes, & ont confeflë par efcrics imprimez
que l'un d'eux en avoit changé pour fa part fix
cents & tant de pafTages. Ainfy le deflein du Con-
cile eftant defcouvert, en voulant fupprimer ce livre
on fupprimeroit Tauthorité de l'Eglife, & on feroit
doubter s*il eft permis de changer les glozes des
Doâeurs & quelque peu de texte des Anciens. Il
faut maintenir que ouy, & que l'Eglife doit chan-
34$ CONPISSIOH DU SIIUB. 08 SANCT.
ger le vieil & nouveau Teftament, fuit s'uauièr
non plut i la craduâîon du Septuice qu'à celle det
Quinze vingu, fi on veiu que les priocipet foyeot
tous de no&re codé. Let Primaci de Boui^et & de
Lyon ont aufll voulu ofler du rang det tradidont
les Coafor/m'iej de Sùnâ Françott, le Doétrùial d»
Sapienctj le Jardin dtt ÀmêideJoUts, le Mariai, let
Sermons de Menoc^ le Manipidus Curaiorum, Stella
CUrîcoram, Lavaerwn eonJeUiuiaf Suauita pteeato~
rum, dédié ji la Vierge Marie, la Ltgtndê dort,
le Livre des m«j,& la Vita Ckrifii. Un Prêcheur,
nommé Chrifii, prefchoit à Nantes ce ces lemet
aux Dames : i lAtJdanus Us offeutSj^jt nous noutt
entre Us ittaitu un* BibU ou tut »om»au Têfia-
mentj je vous bailleriti d* mon fouet : mais ajtj
u poingt le bon \ica Chnfti qui Jii Vefpa-
CHAVITRB II. 247
ft pour celle qui paroic en fa pofterité. Qaând il
ptefche ûux Poijfonsj c^eft que quand fa pofterité
prefche, elle aurait befoin d^auditeurs muets. Quand
il leur conte pour miracle que Dieu les empelcha
d'eftre noyés au déluge, c'eft que les miracles de
r^lile Romaine, félon Richeome, doivent eftre des
chc^ naturelles. Quand il appelle Us loypi fês
frêru & les fait toucher à la main, c'eft en pre-
difant que les Cordeliers feroient pattes peluës,
ft tafchans de furprendre les innocentes brebis. Il
appelle Us hiramUlUs fu fmurs, parce que leurs
frères, comme elles, fe nichent en temps des mef-
tives chez les villageois. Quand en priant, l'Ange
dit à Saind François, que de fon orân dewiit
naiftre VAmechrift^ c'eiloit afin qu'on ne desdaignaft
point de faire des Cordeliers Papes. Et quand il mit
fa chemife à part pour s'arborer devant les Dames
tout nud en la place du Crucifix, c'eiloit pour monf-
trer les beautez de nature, comme n'ayant point
mangé du fruiét de Parbre de Science, & reprendre,
fi non la fcience, à tout le moins la nudité du Père
Adam. Quand Saind Germain reflufcite un afne,
pourquoy par charité fraternelle & onopan'e ne peut
il, eilant en vie, donner la vie aux afnes qui la re-
cevoyent de lui mort en tant de lieux, comme à
Sainét Germain des Prez & de l'Auxerrois? Blaize
d'Anjou, qui menaçoic fon fils d'excommunication^
s'il fçavoit qu'il leufl une ligne de la Sainde Efcri-
ture, notamment des Commandemens : enfin par l'in-
terceflion de l'Aubraye, bon Catholique, il lui fut
permis de lire les Machabees. Frère Jacopon porta
deux ans un bail d'afne, la croupière à la bouche,
ne pouvant chevaucher fans croupière & en afne
debailé. Quand j'ellois Huguenot, je ne trouvois rien
348 CONPBSSIOK DU SISCK. D£ SANCT.
qui me fift tuit rire que U legeode de ce bon Sainâ.
Il y en a encore un livre chez noiu, où j'ay fût de
belles annotations. G)mine fur ce qu'il faifoit coo-
felTer à un fien irere fes péchez par lignes, Madame
de Villeroy s'enqueroit comment il confelToii (t.
paillardife : de mefme curiofit^ elle t'enqueroit
comment s'appelleroit en Grec cette huile légère,
que Sainft Dominique' fema entre les cuiflea d'une
Nonnain, l'appelant huyie d'amour. Ces chofes fera>
bleni abfurdes, mais elles font ce bien au peuple,
qu'après elles il ne CTOuve abfurde aucune abfiir-
di[é. Et c'eft pourquoi Sainâ Paul appelle la prédi-
cation de telles chofes la folie de la prédication : de
quoi Monfieur Cayier trouve ce brave Syllogiûne.
// a pieu à Dieu /amer let eroyans par la folie
de lii predicution : la prédication de la légende efi
foliC du /j predicution : ~ ~ ■
cHAPiTRi II. a49
en fon ame defolee qu'elle ne iè puifle pafler d'une
grande, catholique & univerfelle luxure, n'a elle ((as
pour fe conibler comme Sainéte Marie fgypdenœ,
qui depuis douze ans jufques à Taage^ du mefprit,
ne refufa homme ^ Et n'avons nous pas l'exemple de
Sainâe Tha)r8, tant célébrée par les Comicques an*
ciens } Les Poètes de la légende nous ont depiûs
enfeigné comment elle fit par allechements que force
gens de bonne maifon vendirent leur bien pour ellie,
plufieurs courageux fe coupperent la gorge pour
les jaloufies de fon amour, & puis elle ne fut pas
fi toft lafle que la voila canonizce. Si quelque pauvre
Preftre ne le peut garder en chafteté, & ne fe peut
fervir du Canon, Ji quis prtsbyter concubinam nom
hûbuerit, qu'il foit auifi honteux que l'Abbé Efifrem,
qui vouloit (aufli Diogene) planter un homme en
plein marché, s'authorifa du chapitre inter opéra cha^
ritatis^ où il eil dit que qui fe couple avec une
Magdelaine, muhum profuit in remiffionem pecca^
torum. Si quelque Evefque ou Cardinal devient
amoureux de fon page, qu'il fe confole à l'imitation
deSainâ François, qui appelle fes amours avec
F rater Maceus facrees. Et de fait ils tefinoignent
leur fureur jufques l'autel. Quand ce dit le livre,
qufe Saint François demeuroit tout en feu regar-
dant Frère Macé, & s*efcrioit fouvcnt; mefme
un jour comme il tenoit le calice & l'autre les
canettes, il s'efcria tranfporté de fureur : t Prœbê
mihi teipfum, i Je dirois en paffant que ce fut là où
fe fonda Monfieur le ConvertifTeur, quand il nomma
les amours de Caylus & de fon Maiftre facrees &
depuis ce tiltre a demeuré. Un jour que je le enquis,
il me monflra ce pafTage dans THiftoire Ethiopique
rrst irav^x|itov 'Àçpo^ttikv irpoçirrtxbv àn|MJiC<( V^^C lequel
350 CONFESSION DO SIKOK DB SAHCT.
ceux defquels j'ty wiisoft ptrlé ont fbn «min ei-
ttrper : maii! le S&iaâ Siège ne le permetiroit juotii.
De Spoode fut le premier qui le demandft, habemifam
Roma pudorem, tjufmoiU morês toîi mviÀo projh-
tuere dtfiaai. C'eft le Livra d»sjax9S, où un bon
Catholique voit les pechet i bon marché, ft fçtït en
un mot, pour combien il en doit eftre quitte. Celui
qui aura défloré une vierge doitfix gro». Quiconque
aura connu charnellement, ftiontesfois de gré àgré,
fa propre mère, fa lîcur, fa couTme germaine ou
fa commère de baptefme, il en eft quitte pour cinq
gros. Toutesfbiij fî cela eft commis en l'Egltfe, il en
faut fix. Pour avoir tué fon père ou fa mère il faut
im ducat &. cinq carlins. Je vous en defcrirois bien
d'avantage, mats j'aime mieux vous dire que ces
cliofes font efcrîtes au chapitre des difpertfes perpe-
CHAPITRE II.
351
geoi encaches de œ pêcctdigUo, lefquek encttret
qu'ils ne fbyent bien afleures qu'il y aie un Ptradie
& un Enfer, ils en ont pourtant peur, .& voudrofcac
bien, comme difent les Decretaliftes, uii abfoliidùm
adeautdam. S'ils vont demander à un MinHbre, ptf
quels moyens un pécheur exécrable peut eftre fauTé^
le Mimftre refpond qu'il faut embrafler la mort de
Chrift avec la fby, prier d'un cœur contrit & d'une
ame pénitente, s'afleurer en la miferîcorde de Dieu,
ft puis, avec le regret du paiTé, avoir defir & refbla-
tion de vivre mieux. Voila pour tout potage ce que
vous dira un Miniftre, & le malheur eft que les
bonneftes gens de ce fiede ne fburniffent pas aifi^-
mentni de cette fby, ni de cette pénitence. LeSainft
Siège compofé de gens de bonne maifon, qui ont
intereft à Taffaire, ayant jugé que tels remèdes n'ef-
toyent pas viande à gallands hommes, & ne voulans
pas qu'un beliftre aille braver un Prince ou autres
Grands en l'autre monde, avec fes vertus Théolo-
gales, comme ce pauvre Lazare, qui morgoit un
homme de bonne maifon : les Pères, dis-je, y ont
remédié bravement, car un Jefuifte, interrogé fur
la perplexité d'un Sodomite, vous accommodera
bien mieux que le Miniftre. Il vous cnvoyera au
Cardinal de Sourdls, qui par fa Bulle feule pourroit
remettre la fodomie & Tincefte. Il vous mettra
dans le col un chappelet des derniers impetrez par
Meilire Jacques David, Evefque d'Evreux. Si vous
eftes François, il vous baillera des grains qui font
cottes au dix neufviefme article, & vous fera dire
les paroles qui font portées par le feptiefme, comme
Domine Jêfu fufcipe^ & autres telles paroles, qui
font imprimées à Paris par Et cette
application, comme il eft porté par là, vous donne
2^2 COKFBSSIOH DO StlCR DE SAHCT.
indulgence pleniere ft remiiSon de tous rot pécher,
lanc de la coulpe que de la peine : ce qui t cotté
exprez par M. le CouvemlTeur pour chofe nou-
velle. En quoy il faut advouiÉr que l'Antiquité ne
fut pas afTez hardie. Trouvez vous donc eftrange
fi la religion des Huguenots, de laquelle par &ute
de telles drogues, je veux dire ce que difoit du
Chrillianiûne ce fçavant Empereur Juïian, afçavolr
que c'e(t la religion des gueux & des beliftres :
trouvez vous, dis-je, eftrange fi les Princes, les
Grands, les Financiers, qui aiment leurs voluptez,
haïfTeni de bon cœur la HuguenotKrie & les Hu-
guenots, & embraflent une religion favorable, par
les préceptes de laquelle ils ont la graine de Para-
dis à leur bourfe; une religion, dis-je, où ils trou-
vent remèdes à leur maladies naturelles & defna-
Cbapitki III.
Dt tinUre^tm 4ft Sàin&t & SainSts.
V AU TB d'orgumeiu, nos Doâeun
prouvenc la plut parc des poinâs
qui font ea concroverfe par gail-
lardes rimiltnides & comparât-
fous, & voici comment nous prou-
vons l'intercelTion des Sainâs
& des Sainâes : Toutes per-
fonnes ne vonc pas indifféremment prefenter leurs
requeftes au Ro)', mais par médiateurs, comme
Princes, PrincefTes, Confeillers d'Eflat & Mailtres
des Requeflcs : Ergo il faut que les Saînâs &
Sainftes faifent leurs affaires du Ciel, comme
nous faifons cem de la Cour. J'entreprendrois bien
de prouver par mefme comparaifon que Dieu se fe
méfie gueres des affaires du Monde, pour ce que
nous faifons paffer au Ro/ toutes les affaires comme
il nous plaiA : la plus parc il n'en feiit que le veut.
Il efl vray que cet hérétique de Rofny lui veut
faire prendre un autre chemin, & veut faire du
Financier & de l'homme de bien enfemble, contre les
préceptes que deux chofes contraires ne peuvent
fubfiller en un mefme fubjeâ. J'efpere que l'un d'eux
fuccombera par l'aide de ma converfion & de l'in-
X54 COMMISSION DU SIIOI. PI SaNCT.
cercelllon des Sùnds, Qui doutera de la vertu de
leur intercelTion > Confiderés que nuls crimes B'ont
elle fi grands defpuis quinze ans, que la coulpe
& la peine n'ayenc efté abolis par leurs prières. Nids
fervices n'onc eflé fi recommandables, que ceux qui
ont cuidé les faire recompenfer fans l'iacerceflion
de ces perfonnes facrees. C'eft ce qu'a écrit Horto-
man en fon livre Dt rtgao vulvarum. Je n'aura/ guère
des peine à perfuader ce poiciâ i ceox qui ont eu
affaire en Cour defpuis mon règne. Le General de
la Ligue n'ayant plus que deux places de fon parti
efchappé, ne fc pouvoit reconcilier avec ce Prince,
comme il fit avec l'autre pour fe le faire îrnuncr.
On gagne plus jt ceftui ct qu'à fe faire enrhumer
aux trenchees. La Sainâe qui règne lui a donné k
pardon gênera! & !'a mis au plus haut du Paradis
CMAPITaS III.
«55
ni Hebrieu, mais qu'ils apprennent les Sciences de
MeiTeigneurs de Lignerac, la Varenne, Cachât & la
Baftide,. qu'ils apprennent à dire de bonne grâce
leur Ora pro nobis; qu'ils fçachent bien leurs heures
à Tufage de Chartres : dire ouy, & puis demander
que c'eft, & pour feindre la befte^ Peilre à bon
efcient. S'ils voyent des ordures à la Cour, je veux
qu'ils foyent pimis pour ne les fentir point. Qu'ils
apprennent comme Monfieur d'Efpernon à porter au
col les petits images de la Cour, & aider à leur
torcher le derrière, trefTaillir de joye quand ils fe
&nt ùH» de bonne matière, offrir en un befoing fa
langue, quand le linge demeure trop à venir. Par
ttUe voye ila gagneront une înterceflion, cette inter-
ccffion fert de fuffi&nce. Lignerac ne fçait rien que
rire, celui qui eft F Amalgame des maifons d'Eftree
& de Lortaine. Cachât ne fçait pas feulement parler
François : c'eft lui qui a fait la paix de Provence.
La Varenne n'a commancé que cet hyver à apprendre
à lire, & à mefme temps a fait la paix d'Efpagne.
Par ainû les intercédons donnent le mériter auffi
bien que la recompenfe. Et c'eft pourquoy il y a
dans nos Heures : da nobis ut mergamur Jtgri partie
cipmsj &c. Et les Huguenots, qui fe font mocquez
de cette façon de parler, ne l'entendent pas.
m&1^€Wrf^*^0É'J£:
Chapitkb IV.
Da Purgatoire.
VU que nous avons conflitué le
Paradis des gaknds hommes à la
Cour, fi faut il trouver quelque
lieu où nous confcflîons que foit
le Purgatoire, fans l'aller cercher
CHAPITRE lY. 257
toute la Sorbonne où il eil : )e demande aufC où
eft le Tiers Parti duquel on a tant parlé en France,
& la crainte duquel a frappé un plus grand coup à
la converfion du Roy que celle du Purgatoire ? Or
je maintiens que j'ay trouvé le Tiers Parti & le Tiers
Lieu logez eniemble à Nojan. Quelques uns Pavoient
voulu mettre en Auvergne, & y confiner le Comte
d'Auvergne : mais il eil defpetré de fon Purgatoire
déambulatoire, en cette heureufe faifon où les beaux
iieges de Paradis de la Cour font tapiflez pour les
fils de putains. Il n'a fait que rire de fon Chartier
verfé, & eft après à reftablir en ce facré lieu les
amours, dont il fut inftruit dés fon enfance. Il y a
en France quelques autres petits Purgatoires, mais
ils ne font pas grand fumée, parce que les pardons y
font à trop bon marché. Le grand Purgatoire eft donc
à Nojan, où le Comte de SoilTons fe purge au feu
de fa Veftalle avec fon train, qui eft le Tiers Party,
là où il oit parler des joyes du Paradis de la Cour,
& en rid à la mode de Sainft Medard. Quelques
Anges, conune La Varenne, le vont vifiter en palTant,
& dit on qu'il ira dire adieu à Madame, pour s'en
retourner parachever fes peines ; les complices ima-
ginaires du Tiers Parti errent par là, comme eftant
âmes vagabondes, par faute de terre & de baftions
pour s'enterrer. On dit pourtant que Nojan eft fort
propre à joiier des couteaux, & que ce Tiers Parti,
qui contraignit le Roy à fa converfion, le contrain-
dra ces jours à la perfecution des Huguenots, ou à
faire fon eftat alternatif. Le Comte du Lude m'ayant
lolié^il y a quelque temps fon chef, me demanda
fi je ne trOuvois pas fa fortune bonne. Quand vous
courei la pofte^ lui dis-je, prenei-vous plaijir à
vous embarquer fur un cheval qui a les genoux
n. 17
258 CONFBSSION DU SIB0R DB SAKCT.
efcorche^f II merefpond que non. Je réplique: Con-
fiderei donc que quand ce grand Capitaine quitta le
feu Roy, pour aller faire le Huguenot, Us Hugue-
nots parce qu'ils lui avaient veu tourner le cul d la
mangeoire â Coidras, quand il r'eft muliné d toutes
les apparences de bataille, d toutes Us venues du
Duc de Parme, quand il ravit Madame invijible-
ment, d tous ces accidents il y a remédié pour avoir
mis fept fois les genoux à terre. JUonfeur le Comte
mon ami, voudriej-vous mettre vofire couffinet fur
an hère qi/on' a chevauché à dos & qui a les ge-
noiif/ouje/aircAej?Par tels propos j'aydesbauch^le
Conneftable du Tiers Parci du Purgacolre de Noîan.
Lavirdin y voulut mettre le nez, mais on lui de-
manda la palTade; il me dit à fon retour qu'il tvoil
s telle police à la première armée du Tiers Parti,
CHAPITRE IV. 3JP
dit à Bellozane (celui pour lequel on difoic que
dift femme efloit Mie aux afnes) c^eft à dire que
moti frère n'a aucune place qui tienne pour nous.
Muftre Guillaume s'y oppofe, & dit qu'ils avoyent
^ucre places pour le Tiers Parti, places fortes, def-
fenduës d'un grand Mars & du feu du Ciel^ Sodome,
Gomorrhe, Adma & Seboïm. L'autheur des Vifions
dndit Maiflre Guillaume craitte cette matière fort
amplement. Je conclura/ ce chapitre par une re^
montrance aux autheurs du Tiers Parti & habitans
du Tiers Lieu : t Sçachez, zelez Catholiques, que ce
parti n'a efté condamné ni abfous, pour n'avoir fait
ni bien ni mal, & pourtant réduit feulement au Pur-
gatoire ; voftre malheur eft de n'eftre pas authorifez
de gens de guerre, mais de ceux qui appelloyent la
poltronnerie patience. Le Pape n'a pas eftabli le
Purgatoire par paroles. Voftre party n'avoit que
faire tant de difcours fur le àroidt des Princes du
fuig. Le Pape a mis le Purgatoire par fulminacions :
il faloit à voftre deffein une armée fulminante : l'un
fait montre des clefs de Saint Pierre; il falloit à
l'autre Tefpee de Sainft Paul. Les canons des Decre-
tales ont eftabli le Tiers Lieu : il falloit à coups de
canons eftablir le Tiers Parti, & quand les Luthériens
ont voulu difputer, on a prouvé le feu du Purgatoire
en bruflant ceux qui le mefcroyoyent. Quand les
Huguenots ont attaqué les canons fpirituels, on s'eft
fervi des temporels : ainfi par occafion j'ay comparé
le Tiers Parti au Purgatoire, lequel a efté feulement
in potentia. L'autre ne fut jamais in aéiu^ & de fai£t
la question n'eft pas de petite importance, tefmoing
qui à l'âge de foixante ans
efpoufa une fille de vingt, dont il devint jaloux
comme un tygre ou deux, & de jaloux catholique-
l6o CONFESSION DV SIKCR DE SANCT.
mène cocu, à quoy il apporta touces les recepies de
Hans Carvel. Ses amis im jour lui demandoiew
comment il avoit fait cette folie : après s'd\re frotté
les oreilles, eiïuyé le front, foufpiré profondément,
il dit en fe grattant l'occiput, & frottant les couilles:
Ce font par la vertu bieu les Huguenots qui JoMi
caujes de et malheur. Car au temps paffï, mu pères
avoyent une repeuê de quelque Jèjour pour aller en
Paradis ; mamtenant que ces paillards ont dg/moMelé
le Purgatoire, il faut y aller d'une irai&t : irefi
pourquoy J'avois pris cette haquenee.
Dt la JufiificatioH des auvres <>• auvres
de fupererogatioti .
uiVANT cette sainfle méthode
de craiccer les poinâs Theologaujt
par fimilitudes, il n'eft pas befoin
que tous les Chreftîens le fient
aux intercelïïons des Sainéts &
Sainfles : il y a des gens de bien
& des honncftes gens qui ont
gagné place au Paradis de la France par braves &
bonnes osuvres, comme par la prinfe d'un Roan,
pour s'eftre faits chefs de Thoulouîe, de Narbonne
& de CarcalTonne & pais adjacens; un autre, d'Or-
léans, de Bourges, & des dépendances : un autre, de
Poiâiers & quelques menus fuffrages; un autre de
trois frontières de Bretagne ; ce font œuvres de
par Dieu, lefquelles ont efté juftifiees ; & fans dire
Da aobù ut mereamur, elles Ont mérité, ou pour le
moins acquis grâce & pardon gênerai. Les opera-
teurs ont chailré les finances du Roy, & ont efté
juftifiez par icclles. Que les Hérétiques avec leur
Sainft Pau! prefchent la grâce, la foy & la fidélité
z6a CONFESSION DU IIBUK DE SAHCT.
tant qu'ils voudront, ceux ci arec leurSainft Jacques,
full ce Sainfl Jacques d'Efpagne, ont prouvé la foy
par leurs ceuvres. C'eft ici, Huguenots, qu'il faut
advoiicr nulle juftification d'oeuvre eftrc difficile après
telles œuvres eftre juftifiees. Ceux ci ont obtenu une
loy, & cette loy leur a elle loy de grâce, & quand
ce fera à vous k obtenir une loy, vous l'aurei fi
pauvre & avec tant de peines, que vous m'advouërez
qu'il la faloli împetrer par ceuvres, non par foy &
fidélité. \'ous ne croyez pas aux indulgences du
Pape : voyez quelles font les indulgences du Roy
qui n'cft pas Pape; nous trouverons bien plus, que
ces bonnes œuvres que vous tenez difSciles à jufti-
ficr font devenues méritoires, & ont mérité ou pour
le moins gagné au pauvre VÎUars une Adroirauté &
beau Gouvernement, aux aucret MarefchauiTeet de
CHAPITRE V. 263
fa foy. Ceux là ont fait œuvres dignes de repentance,
& non pas bonnes œuvres, & ont fort bien fenti que
la fby fans les œuvres eft morte ; aufli meurent ils
de faim, & font par la baffe cour du Louvre Capi-
taines defchirez, Maiilres de Camp morfondus,
Chevaux légers eftropiez, Canonniers jambes de bois,
Petardiers defvifagez, Efpions pieds nus, tout cela
eft à menées par les degrez en la falle des Suiflfes,
après avoir difcouru, in génère petùono &fuaforwj
à déclamer contre Madame l'Ingratitude, les Capi-
taines portans la hotte, & les pauvres foldats l'oifeau,
exalter leur fidélité, montrer leurs playes, conter
leurs combats, leurs eftats perdus, faire de mauvais
pafquins, crier contre moy & les autres Financiers,
difcourir fur un ordre nouveau, menacer de fe faire
Croquans, & s'enquérir qui n'a pas encore difné.
Mais quelqu'un dira : Tous ces pauvres diables que
vous nommez, n'ont>ils pas tant travaillé ? Pour-
quoy ne contez-vous pas leurs œuvres pour œuvres ?
Je refponds que c'eftoyent œuvres d'iniquité, pour
ce qu il eft inique de fervir les ingrats, & de plus La
Limaille un jour reprochant au Roy la longueur de
fes fervices, fa patience, & qu'il s'eftoit rendu irré-
conciliable à fes voifins, pour avoir exécuté fidelle-
ment les conunandements de Sa Majeflé, la cheute
du difcours fut, qu'il n'avoit pas dequoy difner.
Ventre Sainél Gris^ dit le Roy, qui lors ne juroit
pas en Catholique, il y a tant abonnées que mon
Royaume eft en pillage^ pourquoy n'avei-vous rien
fait? Ce rien monftre que les œuvres de telle nature
ne font pas œuvres, par confequent indignes de
juftification. Le pauvre homme continua jufqu'à la
mort, emporta pour fa condition la plufpan de
l'honneur du fiege d'Amyens, & mourut dans les
264 CONFESSION dO sieur de savcv.
mines dufofrc, & cela s'appelle en rienfci/ani. Qui
veut voir difpurcr cette matière dofteraent, qu'il life
X Apologie du Roy, compofee par M. Cahyer, eftani
lors Winiftre de Madame. Le Roy me la montra
comme llyle de Madame de Rohan ; c'eft une Apo-
logie en prévarication, laqueUe Rocquelaure oyant
lire s'cfcria : O mon bien ! que ceux qui ont ejcril
cela fçavi-ni de vos nouvelles. Quelques uns en
acculent La RufEe, pource qu'après avoir difcouru
de l'humeur du Roy_, qui eft de punir les fervices
& recompenfcr les offenfes, il dit à ceux qui le plai-
gnent de Ta Majefté : Vous devej vous plaindre de
vous, non de luy; car ayant connea fou naturel, Ji
vnus voulic'i des recompenfes , il les fallait mériter
par auvrcs dignes, comme il a efié dit ci dejfus. De
là il pirle à ceux qui ont cet honneur d'eftre parents
CHAPITRE y. 365
bien qn'il fut fort Catholique, fervit le Roy dés fa
fuitte de Paris jufques au fiege, vendit de fuitte fept
chevaux qu'il avoic de fon train, remontrant tous
les jours au Roy fa diminution. Enfin la honte le
chafla de la G)ur du Roy ; mais le defir de mourir
à fon fervice le retint dans Tarmee & il en vint donc
là quUl fe rendit foldat d'une compagnie des gardes,
commandée par fon jeune frère. Il advint que quand
on eut ruiné à coups de canons les boutiques qui
Ibnt fous la porte S. Honnoré, ceftui-ci avoit demandé
d*eftre mis en fentineile perdue dedans fes ruines.
Le Roy vifitant la nuiét fes gardes & fes approches,
le Capitaine lui montra du coin d^une maiîbn avan-
cée fon frère aifné, en lieu duquel on avoit desjà
retiré deux fentinelles par les pieds ; le Roy voyant
fes reproches, fans parler s ofte de là. Le Gentilhomme
après quelques jours, & ayant de nouveau tafté le
cœur de fon Prince par le moyen de fes amis, enfin
vaincu de paflion d'efprit & de fatigue du corps,
mourut, & en mourant, quoy qu il fiift homme fans
lettres, voulut dider fon teftament, par lequel il
demandoit premièrement pardon à Dieu, & puis au
Roy fon Maiftre, d'avoir fervy aux infâmes amours
de ce Prince avec Catherine du Luc d'Agen, qui
depuis mourut de faim, elle & Tenfant qu'elle avoit
eu du Roy ; de la Damoifelle de Montagu, que le
Chevalier Montluc avoit livré entre les mains de ce
Prince par les menées du dit Salbœuf, à quoy il eut
beaucoup de peines : Tune, qu'elle aimoit le Cheva-
lier jufques à ce point qu'elle avoit couru à Rome
après lui, & auflî pour le mefpris qu'elle avait conceu
de ce Prince, pour lors plein de morpions, gaignez
à coucher avec Arnaudine, garce du Veneur la
Brofle. Ces poux Efpagnols, las de poifeder les
366 CONPBSSIOK DV tlIVR DE SAVCT.
par[ies baflcs, ouellanu crop prdTes de logis, avouent
pris un domicile évident dans les ufles & le rond
des cheveux, fiegc de k G>uronne. Il alleguoit en-
core» pour preuve une chaudepilTe qu'il lui fit pren-
dre dans l'c^able de Tignouville à Agen, lui udanc
à furprendre la putain du Pslfrenier. Il avoit auJG
aidé aux amours de la petite Tignouville, qui fiit
imprenable avant eflre mariée. Il l'avoic accompa-
gné à aller voir de nuift la garce de Goliath,
& mefme lui avoit fauve un coup de volant, que le
goujat lui lira du lift, en fortant du lift avec elle.
Puis fc fit l'entreprife fur Rebours, ^ laquelle il ne
fit rien que de perdre pour ferviteur l'Admirai d'An-
ville, qui l'aimoit plus honnefteraent. Il avoit encor
affilié aux amours de Dayel, FauSeufe, Fleurette,
fille du Jardinier de Nerac, de Martine, femme d'un
CHAPITRE y. 367
paye mal & qu'on fe moque mefme des maquereaux.
Après ces contes le ceftaceur eflevoic (on fiyle, laif-
fant pour dernier prefenc une remonftrance pour
faire leur profit de fa pêne, les faifanc fouveiûi' des
mores miferables, pareilles à lui, comme du Sieur
de Gerdreft, Gentilhomme de Beam^ fore vaillant
homme , qui fe confomme tout de mefme que lui ;
du Capitaine Belle Hache, va'dlant & doâe, pour
lequel les Chirurgiens lui remontrèrent qu'ils le
traiteroyent de deux arquebuzades (qu'il avoit eu en
un aflaut) pour Thonneur de Dieu : mais qu'ils ne
le pouvoyent plus nourrir. Ceftui là guérit des ar-
quebusades, mais il mourut de fàùm dans le lid du
Capitaine Laporce, exempt des gardes, qui ayant
fauve la vie & rhonneur à fon Maiilre, & à la
trouppe de recraitte, par un coup valeureux qui eil
defcrit en YHiftoire au livre 4 du a* tome, chapi-
tre 8®, fut depuis pris en haine, cafTé, mort de mi-
fere à Paris. Il eft vray qu'on le pouvoir excufer fur
ce qu'il s'eftoit fait Huguenot. Après tels exemples,
il contoit les resjouiffances qu'il avoit veuës à ce
Prince, quand il voyoit mourir quelqu'un des fiens
qui avoit bon équipage : combien il eiloit habile à
fucceder pour en payer, comme il difoit, fes debtes :
les brufques refponfes qu'il faifoit aux vefves
& orphelins, qui demandoyent les manteaux de leurs
maris & pères ; le teftaceur n'oublioit les noms des
paniculiers, comme de Arbilly, Saind Gilles, & au-
tres morts à la Rochelle. Mon frère m'a dit que
là il fit tenir un confeil, pour fe délivrer de telles
importunitez, & fit débattre fi les Capitaines n'ef-
toyent pas héritiers de l'equippage de leurs foldats.
Ces Huguenots rudes & fafcheux déclarèrent cène loy
inique, & n'avoir jamais eilé pratiquée que par les
268 CONFESSION DV SIEUR DE SANCT.
Albanois, qui etlo^nt fans fucccfTeurs. Mais pour
revenir au teftament, ce pauvre le finiffoit par inju-
res, qui ne feroyent pas belles i dire, envoya fês
recommandations particulièrement à un de fes com-
pagnons, lequel trouvant un jour par les rues un
vieux chien, nommé Citron, qui avoit accouftumé de
coucher fur le lift du Roy, il fàifoii fouvenir ce lien
compagnon d'un fonnet qui fut trouvé attaché fur
le col de cette pauve befte, au poinâ que le Roy
arrivoit à Agen ; fi bien qu'il fe prefenia lui & fon
fonnet que vous verrez ailleurs. Il fit fouvenir l'au-
theur, qu'après avoir commandé long temps un régi-
ment de dix huit compagnies, gagné un Gouverne-
ment avec grands & hazardeux combats, il lui arriva
d'eftre porté par terre, & prins en une ambulcade,
dlanl cnirL' Ic-s mains de les ennemis. U Ro^
CHAPIT&B y.
26c
ftyle plas eflevé & de mefine argument que celui de
Salbœuf : mais les valets du teftateur violèrent fa
do-niere volonté, & rendirent Toriginal, lequel (à ce
qu'on dit) juftifioit mon opinion fur la jufiification
deâ œuvres.
V
ChaVIT&S SiXlESMB.
Des Miracles & Voyages.
EU Monfieur k Cardinal, de
bonne mémoire ""t' ilnjj!' par ex-
cellence, c'ell à dire de Lorraine,
ayant fçeii que Fervacque
bonne mémoire aufli, avoïc def-
CHAPIT&B VI. 271
ferme les yeux à leurs Bibles pour les ouvrir à celles
inventions. Vray eft que je voudrois admonefter les
bons Pères, qui conduifenc ces chofes, de couvrir un
peu mieux le jeu/ Celui qui inftruifoit le Démoniaque
de Laon, fie bien le foc de lui apprendre à dire qu'il
fidloic excirper les Huguenots ; car comme remarque
Poftel, cela fonneroit que le Diable fut foigneux de
noftre bien. Quand donc les Prelacs voyent de telles
inventions, qui ne font pas aifez bien compofees &
colorées, ils les doivent racoutrer, polir, & faire
valoir, non pas s^ oppofer, comme fie TEvefque
d'Angers, quand deux jeunes Religieux pleins de xele
& d^invention, lui amenerenc une Damoiièlle ins«
trvàête en Demonologie, & qui joiioic (ce dit on)
auffi bien que maiftre François Villon à la Diablerie
de Saint Maixanc. L'£vefque fe fit amener la Dé-
moniaque, fur laquelle il fit une trop curieufe inqui-
fition; il demande à quels fignes plus violens on
avoit conje^uré quelle fut farcie de Diables. Un des
Protecoles lui refpond qu'à deux chofes on conoif-
foit la véhémence de fes tourmens : Tune quand on
lui touchoit la peau de quelque croix, où il y eut
du bois de la vraye croix : l'autre preuve fe voyoit
clairement à fes treffauts & mugiflemens qu'elle ren-
doit, quand on lui lifoit quelque texte de l'Evangile.
L'Evefque avoit dans le col une de ces croix dont
nous parlons au chapitre des reliques ; car fon perc,
duquel j^ay fçeu les plus fecrets articles de la vie du
feu Roy, avoit reçeu mefmes joyaux que les autres,
& les guerifToit habilement de leurs chancres, cela
foit dit en palfant. Le conducteur de la Damoyfelle
qui voyoit cette croix au col de TEvefque, trouffa la
gallande, (qui eiloit couchée à terre) jufques au jar-
ret, & fit figne au Prélat qu'il la touchait de la croix
Ija CONFESSION DU SIEOK DI SANCT.
Tabcilement : maïs ce maurus homme arracha bien
h croix de fou col, maïs avec l'autre main il tira
bien I ubcilemenc une clef de fa pochene, & la bonne
Dame ne fencii pas plulloft la froidure de la clef à
h cuilTe, qu'elle effraya l'aiUflance de fes gambades.
U filluc pour féconde preuve lire l'Evangile devant
cUe. L'Evefque rire de fa poche un Petronius Arbi~
ter, qu'il portoît au lieu de bréviaire, & commença
à lire : Matrona quadam Epkefi tant nota &c. & la
Damoifelle d'efcumer, & faire miracles, & quand ce
fut à: Placitoneenampugaabùamoriflorscàctoaib^
cfvanoiiie. Ce Prélat (à demi Luthérien) dit qu'il ne
peu[ fomenter fes fouiïetez : mais il n'a pas bien leu
un Doâeur ancien, qui di[ qu'il vaut mieux laillèr
les fuperllidons pour n'oHer les dévotions. On lui
en a fait de bonnes reprimendes : fi bien qu'il ne
s'ed pas roonftré tant contraire à la féconde Démo-
CHAPITRl VI.
•73
cholere qui die, que s'il vouloit, il refpondroit auffi
bien au Grec comme au Latin. Le Capuchin, pour lui
fournir d'excufes lui die : Beliebuth mon and^ il y a
ici des Hérétiques^ cUfl pour quoy vous ne voule^ pas
parler. On fe mie à laciner avec Aftarot, qui 8*ex-
cufa fur fa jeuneiTe : Belzebuch 8*excufa, qu^il
eftoic pauvre Diable. Là il y eut grande difpute
entre ceux de la Juilice, fi les Diables eftoient tenus
d'aller à Tefcole ; les Jurifconfultes maintendrent
que c'eftoit le proprium quarto modo des Démonia-
ques de parler toutes langues, comipe celui de Cani-
gny en Savoye, qui fut éprouvée en feize langues :
aux enfeignes que les miniftresde Genève n'oferent
eflayer de Texorcifer ; ceux d'Angers furent plus
hardis, entr'autres qui commença en cette façon :
Commando tibi ut exeas^ Beliebuth & Aftarot^ aut
ego augmentabo veftras panas ^ tr vobis dabo acriores,
A la féconde fois il redoubla : Jubeo exeatis fuper
pœnam excommunicationis majoris & minoris. Enfin
tout en colère, il adjouftariVi^ vos exeatis^ vos relego
& conjino in Infernum centum annos magis quam
Deus ordinavit. Les Confeillers en voulurent rire
& defcouvrir la mefche ; mais le peuple fe mutina,
ftTEvefque pour faire fa paix allégua qu'il avoit em-
pefché un imprimeur Catholique par excommunica-
tion, qui vouloit imprimer un livre de Pleffis, & que
s'ilvouloit, ilexcommunieroitHautindela Rochelle.
Ce qui me fafcheleplus de ces diableries mal joiiees,
c'eft que l'affront en eft àNotre Dame des Ardilliers,
car il falloit que fon Curé jettaft hors les Démons,
par la puiffance & au nom de la bonne Dame, ayans
refufé de fortir au nom de Dieu : cela euft fon
accreu la dévotion & le nombre des Pèlerins; quel-
ques uns difoyent que ce miracle fe gardoit à frère
II. i8
274 COKFESStOK DV SIfiCR DS SAKcr.
Ange par prcference. Lugoly, Lieutenant du grand
Prevoft, eftoic fort contraire k ces inventions, & me
dit il un jour, Par la mort, tes faifrars de fables
nous feront tout davenir hérétiques , (T f yt^ott
creu, on en peadroii ; & comme je !ui dis qu'il ne
falloic pa.s parler ainCi, il rcpli()ua. qu'il y avoit Afax
mille âmes *u Ciel, & autant en la terre qui rcfpon-
droyent pour lui qu'il n'eftoit point Huguenot, &
que U Saind Barthelcmi en pourroit parler. On fe
mocqua de lui, & n'a on pas laitTé de faire enrager
)csHiiguenot§,voyaiis arriver aux Ardilliers de toutes
les parts de la France boiteux, aveugles, fourds,
ladres d'efprits & de corps, voir cette levée, pleine
d'allans & retoumans de mefmes, lefqueU s'ils ne
guerilTcnt, c'efl pour certain faute de foy, conune
difoii le Preftre de Beloiiet à fes Pèlerins. H ne fe
CHAPITRE VI. 275
bonne Dame, qui s'eft efprouvee jufques à la refur-
redion par rhiftoire notable qui s'enfuie. Madame
de la Chaftre eftant devenue fort jaloufc de fon mari
& de Tune de fes filles, fe racommoda avec le Sei-
gneur de Montigny, contre lequel elle avoit exercé
de grandes inimitiez devant ces guerres : il ne fallut
pas de grand femonce pour rappeller cet homme,
par ce qu'il eiloit fort amoureux de la MarcoufTy. Le
premier office de reconciliation fut de tuer la Bar-
thelemie, meflagere des amours du père & de la
fille. Ce meurtre eut de l'apparence, pource qu^en
ce faifant elle s'eftoit bandée contre Montigny. Après,
le cœur content de cède exécution, vint à elle fur un
cheval de pofte, jambe deçà, jambe delà, Madame
Avoye de Saind Laurent des eaux, laquelle com-
mança par un figne de croix la harangue de Nathan
à David. Ces deux belles Dames, après s'eftre con-
feflees, refolurent d'aller faire pénitence aux Ardil-
liers. Madame Avoye fit préparer [un] habillement,
un batteau, prend les habillemens de Madame de la
Chaftre, elle ceux de Madame Avoye. La Maiftrefle
fe nomma Mademoifelle de Sainét Laurens, la Sous-
dame prit le nom de Celelline. Arrivées aux Ardil-
liers, le Curé du lieu oiiit fa confelTion du meurtre
avec fanglots & foupirs ; premièrement de la part
du Curé, & puis de Celeftine; fi fut d'avis le Père
Confeffeur que noftre Dame prift pluftoft la peine de
réparer ce malheur par une refurredion, que par
une intercefïion : dont avint que la pauvre alchaiiete,
qu'on penfoit avoir non enterrée, mais emmerdée
dans un retrait, fe trouva refufcitee par le mérite
du Curé. Ce fut une belle vifion, quand après la
neufvaine. Madame Celeftine eftant profternee en
terre devant F autel, fa Maillreffe la Damoyfelle de
iy6 CONFESSION DU StBUR DB iJANCY.
Sa'mft Laurenï tenant la queue du Curé, pour mon-
ftrcr i'hoUie (car il n'y vouloit pas plus de tcûnmaK)
forrit la grofle Barthelemic derricre l'iucel, laquelle
ayant jette fon fuaire par terre, vint pardonner de
fa part k fa Maiftreffe, lors habillée en Sous-darac,
laquelle s'agenoiîilla proraptement devant cette ame
nue. (qu'elle prenoît au commineement pour un fan-
tofme); mais elle leur monftra toutes les pièces qu'il
faut au corps d'une femme. Madame Avoye la court
embralTer, Madcmoifelle la Chartre va la baifer, elles
s'entrebaifent l'une à l'autre, & le Curé tes baife
tomes trois, La peine fut de couvrir la nudité de la
refufcitee; car desjk i! yavoit des Pèlerins laffez de
voir fi long-temps la chapelle fermée. Madame de la
Challre & Madame Avoye lai partagèrent leurs
veftements : Madcmoifelle de Sainft Laurenx lui
CHAPITRE VI.
vrj
lefCuré des Ardilliers fut payé en chair, que la Barche-
lemie avoic fait la neufVaine avec lui, qu'il trouva
Mademoyfelle de Sainft Laurent &Celeftine fi vieilles
& fi maigres, qu il n^en voulut qu^une fois. Je vous
conterois tout cela, les prifons rompues, les batailles
entre les gardes du Marefchal de la Chailre, les
valets & Damoifelles de la Dame, les préparatifs de
MarcouiTy pour empoizonner fa femme ; mais le
Secrétaire du Melier de Poitou en fait un Traiéïé,
pour célébrer le miracle, & puis je me fuis advifé
que cela paffoit un peu les bornes de Théologie. Si
ne me fçauroy je empefcher de finir ce chapitre paf
le tombeau de la pauvre Sainde Bartheleoi^, ^!^*
pofé aux Ardillieres par Madame Avoye en ftyle de
Saind Innocent :
Cy gift & ne gifi pas icy^
(Un mouton y fut mis pour elU)j
Lu BurtheUmi maqucrelU
De la femme de MiZrcouJfy :
Montigni ne le tua pas^
Et le Cur^ des Ardillieres
La refufcitd fans prières^
Quinze mois avant f on trefpas.
Si vous trouvez ce tombeau ailleurs, le Traiéîé des
miracles le demande ici.
Chapitre Septiësme,
Des Rdiques & dévotion du feu Roy.
NE des chofcs qui m'efmeut le
plus à deWaigncr TEglife, fut la
leftiire de quelques livres, qui
font, Dieu mcrri, comme abolie
aujourd'hui, à Içivoir le Livre
CHAPITRE VII.
^9
fen trouvay à mon voyage, & la ledure de tels
cfcrits, m'apprindrent à mefpnfer les reliques des
Sainéts, voyant quinze ou feize telles à Sainà Pierre,
dix huit à Saind Paul, fept ou huid corps à chacun^
dix mille martyrs enterrez en la grandeur d'uncoffire,
les traces des pieds de noftre Seigneur & des Anges,
la marque des feffes de Saind Fiacre en Brie fur une
pierre, à JoiTe en Auvergne, dans le Catalogne &
aux reliques trouvées, du linge ialle de la Vierge
ayant fes fleurs, des plumes de FAnge Gabriel, les
pierres de la feneftre par où il entra, du laiét de la
Vierge, à Maillezais, in unaparva bwrfa fatini rubii^
les rongneures de fes ongles & un eftemuëmenc
du Saind Efprit. Comme hérétique je me mocquois
de telles chofes, & trouvois eftrange cette diflîpacion
des membres des martyrs, veu que nous reprochons
aux Huguenots qu'ils les ont ofté de leur repos.
J'ay encor à demander pardon à Monfieur le Con-
vertifTeur, (car je me veux confelTer à bon efcient
en ce chapitre) de m'eftre mocqué de fes Grains bénits ,
qu il fit imprimer l'an paffé à Paris pour les raifons
que le lefteur amaffera de ce qui s'enfuit. J'ay des
contes un peu eftranges à faire, pour preuver la
vertu des reliques. Je protefte que j'aymerois mieux
voir les Huguenots fe mocquer de la vertu des
Sainéls Joyaux , que de mettre telles hiftoires au
vent, fi elles n'elloyent communes aux pages &
laquais ; car nous devons cacher les vices de nos
Princes, mais puis qu'ils font defcouverts, il en faut
authorifer les ftatuts du Sainft Siège. Sain£^ Luc fut
le premier qui defcouvrit le pot aux rozes ; car il
s'enfuit en Broûage quand la Sarbatane & l'Ange,
qu'il avoit contrefait, pour donner frayeur à fon
maiftre & trefve à fa perfonne, furent defcouverts
a8o COMFBSSIOW DV sieur de i.ASC
par fon compagnon le Duc de Joyeufe. RochepM
eui cort de faire l'anagranime de Saind Luc, Cait
in cal. Ce pauvre garçon avoit en horreur cecte vile-
nie, & Tut forcé k première fois, le Roy lui faiTant
prendre un livre dans un coffre, duquel le grand
Prieur 8c Camille lui refferent \t couvercle fur les
reins, & cela s'appelbit parmy eux, prendre le lievrt
au collet. Tant y a que cet honnefte homme fut mis
par force au meftier, & donna 11 grande frayeur i
fon Maiftre, qu'il fe fuft repenti ou mort fans le
Duc de Joyeufc, qui dcfcouvric rcntreprife pour n^
ruiner pas fa fortune. Je ne fuis point coa\
de defcouvrir le conte du tipifiier ; car le Roy
voyant au haut de ces deus efchelles, pour
les chandeliers de h falle, en devint fi amoi
qu'il fe mit à pleurer avant qu'en fortir,
au'onleluiamen^ MoDlîciirLêGrajid i luirai
CHAPITRE VU. a8l
qu'il ne s'expliqua pas bien, )e n'en dirai pas d'avan-
tage : mais Loignac s'en alla criant & pleurant juf-
qoes à Poiâiers, où eftant viûté par les principaux
de la ville, qui le croyoyent encores en Êiveur, il
leur fit fes plaintes de fon honneur perdu, d'eftre
abandonné & non payé, prefque en meûnes temps.
On vit depuis ceUes de la femme de Salette, en ime
lettre prife au bagage de Monfieur de Joyeufe à
Oiutras. Sainâ Severin depuis, pour cet aâe nommé
k poulain farouche, s'eftant fauve du cabinet du Roy
par le renverfement de Duhalde & de Soupitre, qui
^gftfdoyent les portes des deux hautes chambres, s'en^
fait parmi les gardes c59nter auMarefchald'Auraont,
que le Roy Tavoit envoyé quérir par Montigny, que
lui bien glorieux d'eftre admis au cabinet, après que
le Roy lui eut demandé, qui efloit cette Maiflreffc
pour l'amour de laquelle on ne pou voie jouir de lui :
lequel ayant refpondu en demi françois per Diou,
Sire y you non avejfe ny goût de patrona^ ny voy fervir
ëltro ché voflra Majefta, Le Roy lui répliqua : Je voy
bien que vous eftes trop galant homme^ eflant du
pais d'où, vous efles^ pour faire compte des femmes ^ je
voy que vous rrefles pas ignorant de V amour philo^
fopfuque & facree, — ^oy^ dit Sainét Severino, aggo
fou foldat & non migou Phiîofophe, Ce fut affez
difputé, car en mefme temps le Maiftre lui porte la
main à la braguette, Montigni au collet & Nlonfieur
d'O aux efguilletces : or, ils coururent après rire
dans la falle pour appaifer les gardes fcandalifés du
chappeau & du manteau. Le pis fut que ce vieux
François, Marefchal d'Aumont, faillit à tuer ce pauvre
homme, quand il lui conta ces chofes ; Mee Dieu^
dit il,7« voudrois eftre mort fi cela efloit vray; il vous
faut faire mettre en prifon. Cette prifon fervit pour
232 CONFESSION DU SISUR DS SANCT.
achever la tragédie, il fiit lui moia enfermé, &, dit on,
pis : la vérité eft qu'il fe rendit après eftre entre lea
mains du Duc de Mayenne. Les Seize de Paria ne
pouvans croire cette htlloire le prindrent pour un
Zopire, & pourtant lui baillèrent à garder SainA
Germain des Prex, & fut tué avec deux ou trois
cens hommes, quelques trois mois après, voulant
regagner la ville . Telles chofes & autres comme le
courrier du Duc de LongueviUe, à qui le Roy de-
manda l'autre paquet auparavant voir celui du
papier, fut forcé lui & fon poftillon, & puis s'en
recourut rapporter en polie en Picardie leurs aâions.
Le courrier du Conneftable fit les mefmes plaintes
i ufques au Languedoc, fe plaignant fur tout du Comte
de Maulevrier qui l'avoit produit : maïs fon Maiflre
jyantTeproché qu'il s'cftonnoit de peu, le ren-
CHAPITRE TH. aS}
les r^les de Tamour facree. Cela le fit chaflèr à
coups de pied, comme le Duc de Longueville, pour
t¥oir demandé au Roy fes couleurs en une lettre de
papier enluminé. 8i je contois les efpou£ûlles de
Giylus, l'autre contrat figné du fang du Roy, & du
fimg de d'O pour tefînoin, par lequel il efpoufoit
Monfieur Le Grand; de plus fi je redifois les paroles
de ce Prince, adveillé fur Maugiron mort, ayant la
bouche collée entre les deus parties honteufes, je ferois
defplaifir au Comte de Camavas, qui leur ayant prefté
fa chambre, les efpia par un trou du cabinet. Si je
defcouvrois encores la porte que le Conheftable fit
fidre à Folambray pour aller coucher avec Le Grand,
en contant ces chofes qui font encore quelque peu
fecrettes, on blafmeroit mon humeur fatyrique ; îi
je defcouvrois ce que m'a conté Le Pont, comment
il fut pris au collet, par impatience d'attendre Mon-
fieur Le Grand, lequel n ofoit paffer, pour ce que le
Duc d'Efpernon fe pourmenoit dans le chemin, le
chappeau enfoncé & Tefpee hors des pendants.
Les jeunes Députez des Etats de Bois, comme Mire-
poix, le Baron de Cofes, Monac & le jeune Miron,
ne fe font pas plaints aux Provinces qui les avoyent
envoyez, de ce que l'on rompit leur chafleté & leur
corps, pour corrompre leur fidélité & leurs voix.
Mais pour tirer profit de ces chofes divulguées, je
dis, & le fçay, car mes fervices me donnoyent accez
à ces chofes, que le Roy ayant pris une merveil-
leufe frayeur de fes péchez dez le temps de fa far-
batane, devint enfin û paoureux, qu'il trembloit
& pleuroit à la veuë du moindre efclair, & à l'oiiir
du moindre tonnerre. Monfieur Roze lui ofta la plus
part de cette frayeur par un Àgnus Dei, bénit de la
main de fa Sain^teté : mais depuis, lorfque il chan-
MFBSSION DU StEUK. DE SANCT.
gca fa faniazîe d'agent en celle de patient, U devise
(] timide qu'il craîgnoii inerroe les vents, & lors le
bon Prince eut befoin de remèdes plus violens, & par
le confeil de frère Ange, qui fe repentii & lui re-
munira qu'il avoit commis incefte maTculiue, parce
qu'il ciloit frère du Duc de Joyeufe, ils firent par
gr^indu dévotion les fondations des Capuchins, Jero-
rolimiics & Feiiillans, où vous avez veu le Duc de
Jo)'cufe d'aujourd'huy eu fon lullre, & li où l'on
dit qu'il retournera quelque jour, quand il fera
faoul du plaifir de ce monde. Pour toutes ces cliofet
ce devotieux Prince n'ayant perdu la peur, fureni
dreffecs les Confrairies des Peoltens, & autres qu'on
j vcu par la France. La frayeur croiSbii avec les
artifices exquis des voluptez, quand MonTieur le Con-
vtTiilït.'ur y mil la main avec des amuktLes plus
CHAPITRE VII. 285
ment le feu du Ciel embraza, il y a environ vingt
ans, les Cordeliers de Paris ; mais on n'a pas .def-
coiiven, que le Roy oyanc conter qu'ils fe méfloyent
de cet amour facree, fut averti que les reliques de
Stind François & de frère Maffé leur fervoient de
Itorier contre les foudres. Le Roy fit le gardien fon
Prédicateur, à la charge de deiirober ces reliques,
lelquelles ne furent pas longtemps au Cabinet du Roy
que le feu du Ciel fe mit aux Cordeliers, juxta illud
(lib. j Cerem. Pontifie, titulo j)^ fulgura de fur'"
fian depellit^ &c. Le mefme gardien lui apprit aufli
que ce péché n'eftoit point péché fous Thabit d'un
Cordelier, & en bonne intention de fe rendre con-
forme à Sain£t François & à frère MafTé, fon mi-
gnon ; & c'eft pourquoy ceux qui ont hérité des
Heures du feu Roi, ont montré à leurs familiers
tous ceux qui font nommés en ce chapitre, peints
& enluminez en Cordeliers, aux cnfeignes qu'à la
fin defdites Heures, font auflTi peints ceux fur lefquels
il n'a pu exécuter fon entreprinfe, comme Chaftillon
& Chambaret : le premier avec fes manches trouf-
fees pour montrer ces bras gras & blancs, & un
efcriteau nonper amor, maper vendeta. Celaeft encor
un peu fecret, mais qui n'a point fçeu le coup de
tonnerre (qui en temps très ferain), parmi cinq cens
Gentilshommes & autant de SuifTes, à une heure
après midi donna, fans redoubler, en la chambre
bafle du Comte de Soiffons, où lui & Monfieur Le
Grand prenoyent leurs exercices accouftumez fur un
lift, deux autres fur un lift, le cinquiefme eftoit à
la feneftre ? Le foudre les partagea, car il en tua
deux & lai (Ta le troifiefme à demi mort ; à tous trois
le coup entroit par le trou de la verge & fortoit
par celui du derrière. Or voici de quoy faire dref-
1er les cheveux à la lelle li'uii Reformé, car les deux
qui n'eurent poLnc de mil avoyeni chicun un chap-
pdec; il n'en fut point trouvé fur les morts. Je
prefuppofe que I,a Pafle (qui ne fut que demi mon
deux mois), avoit perdu la moitié du fien. Voila
pour auiliorifer les reliques, & y prenez garde, vous
verrez agnus, croix, ou ehappeleis aux bras de tous
les frères de la Sacrée Société. A propos de reliques,
ce mefclianc Comce de La Rochefoucaut dilhoic un
jour avec les filles de la Roine, qui le piccotoieni,
& lui demandoyent de fes belles reliques qu'il avoit
pillées i Tours aux premières guerres; il leur
accorda, à la cliarge qu'elles le viendroyent toutes
baifer, & qu'il leur donncroit des braflieres de
Sainfle Catherine, qui leur feroit à toutes venir les
tetins aufli durs que quand elles eftoient pucelles.
C'ell pour achever ces horreurs en riant (car on fait
ainfi à la Cour}, Pour moy fi je ne fay pas tel cas
des reliques, & feulement je fais femblant de les
adorer, excufez moy ; car citant allé un foir à Bo-
gny, à deux lieues d'Orléans, qui eft le fiege des
Grands Mailhcs de Sainfl Lazare, je fus tout ebabi,
en me levant au matin, d'oiiir force clochettes à
l'entour de U maifon, voir entrer la bannière & la
; & force Chanoines de Sainft Aignan d'Or-
CHAPITRA VU.
287
qui print le R. avec le poinft pour le père de
Sainôe Catherine : là deiïus fuft defiendu d'y cou-
cher, & fon Maiftre & lui allèrent trouver TEvef-
que d'Orléans. Les Doreurs, & entr' autres Picard,
appeliez en confultation, refolurent que cette boite
fe devoit ouvrir par les mains facrees de TEvefque,
affilié des proceifions voifines. Le voila donc arrivé
au matin, & après une meflfe du Saint Efpric, on
lui lava les doigts d'eau bénite : il fait trois pas à
genoux vers le coffre, ouvre la boite, qui fe trouva
une boite de bon Cotignac d'Orléans, & ainfi conune
les Prophéties ne fe cognoiflent qu'après leur effeâ,
fe trouva que le R. fignifioit Refte, & de Coty de
G)cignac.
MTRE IIUICTIESMB.
AisTRS Pierre Ponfet. GeitdK «
hcmme Prelcheur, celui & qiû
Monfieur d'Efpernon rcproriioic
i^u'il fjîlbit rife \c& gens, & qui
rcfpondic au dit Duc que lui le*
liifoii allez pleurer : ce bcB -
CKAPtTRB TItl, ■ 389
difant que ces auAericez de vceux &. de vies eHoîenc
plulloft marques d'une fauffe Religion que d'une
vraye : tefmoin, diloit il, que les facri&ces des
humains eftoient défendus aux Ifraiélices, oblervez
parmi los Gendis, comme leur ell reproché au
Pfeaume 105, [efmoin qu'il n'y en a aucime infliiu-
lîon par les Apoftres^ & puis U alla coiicer qu'il
avoic veu en Turquie leurs enragez de Caloyers,
n'a/ans toute l'année pour couverture qu'un reth,
mais ea la main droite un grand rafbir duquel il fe
font faire une playe nouvelle quand la précédente
■cheve de guérir ; &. quand à leurs jeunes & abfli-
iteaces, celle du vin qui ell eajointe à toutes per-
foaDes eil plus dure que toute autre. Quand ils
jeufnent, ils ne boivent ni mangent. Quand aux pèle-
rinages, où trouvez-vous une fi violente dévotion
que celte des Pèlerins de Ii Meque, defquels plu-
fleurs, après les incommodiiez du voyage & la veuè
du fepulchre de Mahomet, fe font crever les yeux,
pour après chofe tant facrec^ n'en voir jamais une
profane? Après il allégua l'ellrange zfele des Calî-
gnois, & comment on trouva au grand temple de
Hechico les parois frottées du fang des enfans im-
molez au Diable par leurs percs, & ce fang par
tout de l'efpaillcur de deux doigts; à la vérité j'ay
ouy confirmer cela par le gardien des Cordelierg de
Mechico, & par deux autres, fes compagnons. Renar-
dière concluoic par là que telles inventions eftoient
de fanatiques, ou des Diables mefmes qui fe font
communément fervir ainfi. Là delTus ce maiUre fol
fe mit fur les antiquitez, & je ne fçay où Diable il
en avoit tant appris : ■ Sçavez-vous pas, difoit il, que
les Chombes blefmes, les Druydes françois, les
Anglois aSfli, facrlfiolenci certains jours, & cenoieni
290
N'FESSION DU SIEUK. 1
les facrifices les plus fainfts, quand ils falfoyeni
mourir les hommes le plus cruellement? Ceux de
Canhage prenoyent les enfans des meilleures mai-
funs, les habilloient k ta Royale, & n'eftoit permis
aux parens d'en arracher un; fi bien qu'eflans vain-
cus par Agatocles, fur l'opinion qu'ils eurent que
leurs Dieux eftoyent courroucez par la difcontinua-
[ion de tels facrifices, ils aflbmmerent tout d'un coup
fur leurs autels deux cents jeunes Gentilshommes.
Ceux de Rhodes & de Crêtes faifoyent enyvrer leurs
hoftics avant les offrir à Saturne. En Chio & Sata-
mine ils defchiroieni les hommes pour les immoler
à Diomedes. Les Arcadiens au temple de Denis/
foucHoyent les pucelles jufques à ce qu'elles fuflënt
mortes. Ceux de Sparte en faifoient autant des en-
■ k l'amel de Mercure & de Diane On.
CHAPITRE VIII. 291
que nous paiflioas faire eil à Saind Mathurin, car je
▼ous alTeure que le plus fage d'encre nous eft tenu
pour un fol. £t pour ce que tout le monde n'a pas
conneu Renardière, c'eftoic un difeur de veritez au
feu Roy, qui defiranc eflre desfrayé parmi Tes Ma-
reichaux de camp, leur dit un jour, qu'il faifoic plus
que Dieu qui dit. Du labeur que fçais faire tu
whras commodément : & lui faifoit fes Marefchaux
de camp vivre très commodément du labeur où ils
n'entendoient rien. A la fin Ponfet fe mit en colère,
ft lui répliqua que c'eftoit des difcours d'un Hugue-
noc : l'autre pourfuit en foufriant, & commença à
caufer fur les Pythagoriciens des Chartreux & Bons
Hommes, entre lefquels on ne laifle pas de voir bien
fouvent vifcere vifcera candi. Il nous conta comment
Monfieur du Bouchage eftant las d'eftre ït^é par le
Roy, & mis en prifon entre quatre efcrans, fe con-
fcffa à un des compagnons de Picquepuce, lequel
ayant ouy les vilenies du Cabinet, lui enjoignit de
(brtir du monde, & lui révéla que s*il vouloit faire
quelque temps la vie des Capucins, il le verroit un
jour Pape : ce que l'enchanteur Raoul lui a con-
firmé, & vous verrez (dit Renardière), que d'icy à
quelque temps il y retournera, & difoitque les fols
prophetifoient. Nous nous mocquafines de lui, Ponfet
ft moy, & le bonhomme en colère commença à dire :
Vous eftes quafi aulli mefchans que le Marefchal de
Biron, qui fe mocqua du pauvre frère Ange, quand
il alla joiier la paflion devant le Roy à Chartres, fe
faifant foiiettcr, & portoit une croix qui pefoit
comme tous les Diables. Là eftoit Monfieur de Mont-
penfier, s'enquerant quel eftoit le myftere de la mo-
ralité. Ce n'eftoit pas celui qui fit coupper le douzil
de fon vin de Gafcongne, ayant ouy de Babelot
25)2
qu'il eftoic digne tic faire le fariR de ChriiL Cellnii
celui qui pour faire une bonne boucatlc vouloic oijir
vefpres aux Auguftina, Ce Msfclchil donc tinni i
pan le Duc lui dit ; Par le corpt Dieu, Aionlleuf,
ccfai en a bùn d.ir,s h- eul,fi d'atcmure iVVya
pnini de Paradis, Le Duc lui refpcjnd : Par SaioU
Picatit, raon Maifire^ voici qui »ji cneor a£ij bïta
Jolie j hormis que la mufique en tfi un pru at'grg,
C'cdoic un cornet de terre qu'ils avuient pris lu four
de Polezcaux en pafTant, fans oublier le fournief
pour en fonner. Telles gens que \oiis furent ca
beaux Evefques de Lionnois, qui alTcmblcrent un Sy-
Ncidc pour reformer la couftumc de Samâ Andioine
de ce pais là : les Religieux du lieu s'appellent Pour-
ceaux de Siiiné} Anloinc par humQïté ; par elle cncor
ils fout obligei k faire huifl repas, comme mon-
CHAPITRE VIII. ap3
femme du Sire le marché fait par le Comte de
Mauleçrier açec la galande ^ il ne reftoit que de
pratiquer Vabfence du mary^fi jaloux qu'il refufa un
M ambaffade honnorable^ une commiffion fur le fel
de Pecays profitable. Le Comte macquereau ne fa-^
dkmt plus quelle pièce y coudre^ pratiqua un Cor--
délier, Confeffeur du jaloux^ lui remontrant que les
phu apparens de Lyon avoyent l'œil fur ce pauvre
homme ^ (r le foupçonnoient d'herefie, par ce qi/il
déficit pas confrère des Penitens. Le CordelLer
refpoad : A d' autres ^ Monfieur ; je fuis trop map-
tais pour vous foupçonner de dévotion, Parlei moy
Smnâ François^ & vous trouvère^ que les Cordeliers
fams bons compagnons, — Par la vertu Dieu, dit le
Comte, c*ejl que nous voulons chevaucher fa femme,
& il y a trente efcus pour toy. Le Cordelier réplique,
Àllei vous en, Monfieur, & m'en laijfei f^^^^- ^^ 1^
4 fix jours (qui fut un jeudi), voila le pauvre fire au
rcveftiaire, qui fe prépare à porter la croix, comme
dernier novice. Le Roy, le Comte & Clermont
d'Antragues vont joiier leur jeu, & peu de temps
après virent par les vitres de la chambre venir la
procefTion & le Porte croix, lequel dentro del facro
fè mit à refver & à fantailiquer en fon cerveau ce
qui en eftoit, fi bien qu'à la porte de fon logis il lui
prit une pafmoifon. La procelïîon ^y arrefte pour
changer de Porte croix. Il falloit ouvrir la porte,
cacher les trois compagnons dans un comptoir, où
ils efloyent en grand danger, fans le Cordelier & un
confrère, qui vinrent perfuader au fire, que c' eftoit
fon debvoir de rapporter Thabit lui mefme au re-
veftiaire. Qui a plus crié que moy contre le feu
Roy, qui portoit fes Mignons en fes heures, enlumi-
(comme il eft dit ailleurs), en Cordeliers? N'ay-
39-!- COtiTT.S^lOV DV SIEVR DE SAVcr. ■
je pïs fait coooilire à Sainft Euftaclte lu Duchcfle
de Guyfe & celle de Ne vers, qui porioii-m Rocque-
raaurct & le Baron de Fiimel peints en crucifix en
leurs hejres & cabinccs, &. eux leurs msillrclics tout
de mefmes en Noilres Damcs^ Mais vous autres
Hérétiques, vous avez lort de bialiner rEglife pour
ce!*. Je rompis ie propos de Moniteur Poncet,
difjnt ; L'invention des habits & des heures n'cfl pu
cuulpable du mauvais ufa^. Maii; pour vous rcm-
bourfer tous deux de vos vieux contes, je vous ea
veux donner un tout nouveau. Qui penfer-vous qui
ait féiit quitter le monde au Comte de la Chappclle f
C'cft. dit Renardière, le Carditial de Florence, qui
lui lie je ne fçai quoy, & lui promit qu'il devien-
droit Pape, Je me pris à fccoticr la iclle. Pour-
quoy non (dicPonfei), aulTÎ bien que le Pape.,., qui
CHAPITRE VIII.
ap5
fcffa des péchez que j*ai honte dédire, pour lefquels
M fit croire qu'il n'y avoit aucune digne expiation
que de quitter le monde & fe voUer à TEglife. Je fçai
Wcn (dit Renardière), ce que vous n'avez ofé dire.
Poiiis à la feneftre de Tefcurie à Sainâ Denis, un
page qui importunoit fon compagnon de lui dire il
le 0)mte de la Chappelle devoit venir; la refponfe
fut : Je ne fçaurois non plus dire ceîa^ que deviner
qui a eu fon pucelage ^ le pere^ la mère y Voncle ou
la faur. Mais à ce propos, ce vœu eitoit aufli rude
pour expiation de fes forfaits, comme celui que
delcrit TAretin en la perfonne de Mejfer Marca
Santffe. Sa pauvre mère penfant mourir en douleur
d'enfantement, le voiia à eftre Cardinal par humi-
lité. C'eft de lui que le Pafquin prononça : Cha
fatto il Cardinale, ha lajjiato il fuo Eleemofinario
all'hofpitallef Enfin M. Ponfet fe fafcha de ce dif-
cours, & nous dit : Si vous autres Huguenots ne
fuilîez venus à la traverfe, on euft bien appris au feu
Roy des veftemens, des tonfures & des vœux fecrets.
Car on Teuft mis à la grande CharcroufTe, bien for-
dfiée de baftions au lieu de raifons. On Teut habillé
comme Teftoient fes bardaches en fes heures. On eut
changé fa Couronne en couronne de poil, & pour
vous dire adieu, & finir vos difcours, on eut payé
fa devife, manet ultima cala, de ce diftique qui fut
trouvé affiché fur l'orologe du Palais :
Qui dédit ante duos, unam ahftulity altéra nu tut :
Tertia tonforis nunc facienda manu.
Celui qui devant en a donné deux, en ofte Tune,
l'autre branfle, la troifiefme fe fera maintenant par
la main d'un barbier. Et adieu, Meffieurs, je fuis
iç6 COVPRSSIOM DU SIBVR OS SaKCT.
marri de voir fi mal ufer des œuvres pici. Renar-
dière luï'voulm fiirc un diicLiurs fur ce mot d'œu™
vres pies, mais Ponlci pafTi U porte, & Renardière
m'acheva fon conte. C'cll, dit il, tjue l'Evelque de
Xainftes cil un des meilleurs compagnons cjui fe
pïiilTe trouver. Il y a auflï une AbbelFe aux faux-
bourgs, de laquelle le convenc e(l plutoft une Cour
qu'un Monafterc; car n'en deCplaifc à MaubuifTou,
où durant le (iege de Pontoife il y demeura huifl
Rcligicufes, que la verolle retenoil, n'en defpUife ï
Lonchamp m a Montmartre, qu'on appeloit les nii-
gazins des engins de l'armée j n'en defplaife aulfi ï
la Trinité de Poidiers, à Vielmur d'Albigeois, lU
Lis, vray ferainaire des Enfants rouges, au Saincc
Efprit, à... où Surefnc mena ces jours Fervacque*,
dit à l'Abeflë qui eft fj fille, qu'elle fît l'honneur de
CHAPITRE V114%
^7
ttn jour defcouverts, efcrivit à M. de Potonville ce
que c'eftoic en ces termes :
VEvefque CT VAbbeffe de XainÛes',
Pour faire œuvres pies O* fainSles^
Vont au filence fort fouvent,
La plus finette du Convent
Y fait un trou^ CT les efpie^
Puis voyant prejferjlanc à flanc y
Le roquet noir y le furcot hUnc^
Vit bien que c'eftoit œuvre pie.
Il conclud par la refponfe de Venrille fur cane de
baftimens, pour la réception des Cordeliert, Capu-
chiens & tels, à fçavoir pour empefcher que les
fols ne nous crèvent les yeux, ou bien par ce petit
Epigramme :
Huguenots fafcheux & aufieres.
Qui hlafme^ tant les monafieres^
A la pareille dites nous
Oit l'on pour r oit loger les fous?
TRE NeUFVIESMK.
De diverjes manières de pefcker Ut hommet.
A NafTelle de Sainfl Pierre &:fcs
ruccefTeurs ont main tenant changé
de manière de pefcher. Car tant
tjue les tcncbrcs ont duré, l'Eglife
romaine a pcfché au feu & n'y i
rien qui deftruilc tant les rivières.
Le bois n'y a pas elle efpargné,
par lequel un a confommé les corps de ceux qui
appreliendoyeni par trop le feu des âmes. LesCon-
vercifTeurs de ce temps là ne fiilloient point ou de
convenir l'ame parla terreur du feu, ou faire eon-
verfion du corps en cendres. La lumière eftant venue,
& le feu n'ayant plus de vogue, il falut pefcher en
" I fe Ht durant les troubles, i
CHAPITRE IX. 2^9
dernier plus vigoureux fe fencanc pris, rompit les
mailles & (e fauva. Quelques poifTons fe perdent
en la fuitte des Dauphins, comme font les chiens,
les barbarins, les maquereaux, & tout le menu des
fuivans de la Cour, qui entrent à la fuitte de leurs
maiftres dans cette grande & profonde balaine de
TEglife Romaine. Le menu peuple eft deceu au
travail, où on le fait fortir de fes cachettes à force
de fouler. Pour cela il n'y a petite paroifle aujour-
d'huy en France, où par bonne & fainde intelli-
gence, les Huguenots, plus foulez que les autres, ne
foyent contraints d'entrer aux filets de S. Pierre,
de mefme que les gelées font courir le poiflbn mor-
fondu aux fontaines. Les hyvers d^afflidions en
font courir plufieurs aux grandes fources d'honneurs
& de biens, comme eft la Cour de Rome, celle de
TEmpereur, celle des Rois de France & d'Efpagne.
Ceft à ce jeu que nous avons pris en ces dernières
faifons plufieurs efprits relevez, impatiens de petî-
tcffe & de pauvreté, & entre ceux là Morlas, qui
ne pouvant mettre d'accord la bafTeffe de fa naif-
fance & l'élévation de fon cfprit, s'accourut aux
fources alléguées, lors que les Huguenots edoient
plus bas. Et mefme pour tirer chaleur des autres,
il voulut amener une mouee, ce qu'il fit par un arti-
fice nouveau : tenant en cela quelque chofe du Dau-
phin, horfmis rifTuë, Il amenoit fon gibier de dif-
pute contre M. le Convertiiïeur , les advertiffoit
premièrement de fe donner garde de lui, comme
d'un impofleur dangereux, les exhortoit à tenir bon,
& puis fe laifFoit prendre avec eux. Je lui vids un
jour amener au bord de la naffe le petit Baron de
Courtomcr, auquel il donnoit de la main par le codé,
au milieu de la difpute, lui difant : Courage^ mon
JOO
petit Baron; tr louiesfm'j ilfaiil conjïdertr ce qut du
M. du Perron. Là ilefTus avec une artificicufc &
facree prévarication il Pc hifTuU vaincre d'une vio-
lence bien fimulee. Ce petit Baron fe fauvj : auHÏ
eft tl du pays de l'apience. -le me fuis deffieftré plu-
iîeiirs fois de melmc filet. M. 'de Chaftillon fin
adverti par les vieux l'ervîccurs de fon père, que
l'entreprinfc eftoit pouf l'amener au Cabinet, & au-
tant fur fon corps que lur fa confcience; mais il en
eft p.irlé aillciirs, M. le Convertiffeur, undes grandi
peltheurs qui ait eftif en TEglifc, a plus heureuf»*;
ment que les autres efpté en ces faifons les manii
res de pefcher à la ligne, foit fage en cela par
roefrae, qui fiift appift^ d'une bonne Evefchî; mafit
il eft de l'humeur de ceux qui tirent l'eichcllc apria
eux ; car il a trouvé învcncion de mettre les appafis
arnla
CH~AFITR]Q IX.
301
de Guerres ; c'ell qu'il efpie ceux de qui la maifon
s'en ell allée par les fencdrcs, comme quand Teftang
fort par la bonde, & Ibnc demeurez à fec, comme
eftoic le Baron de Salîgnac, quand fa femme le con-
vertit. Les autres font prins par la prévoyance de
tels accidents, comme moy. Pour pefcher encor fur
les eaux dormantes, Monfieurle Convertifleur a pris
la peine de venir prefcher & pefcher à St Merry, à
la bourbe du peuple, là où il prend les grenoUilles en
dormant. Là il prefche à Diacre & Soufdiacre ; fon
firere & quelques autres de fes apoftres ont une ban-
que devant la chaire chargée de beaux livres. Ils les
ouvrent à la citation des pafFages, ils les ferment le
plus fort qu'ils peuvent, pour refveiller rafliftance :
mais tant eil douce la polulogie de ce perfonnage,
que la plus part y dorment trois heures, & comme
à la pefcherie, y gaigncnt force rheumes ; en quoy
la Faculté de Theoli)gic apporte des commoditez
nouvelles à la Faculté de Mcdccine.
D« !„ Tranfubfi.
ous ne pouvons pss ilirc beau-
coup fur le poinfl de la Tran-
fublianiiatioa; car elle cil plus
maliifee à prouver qui pronon-
cer. Mais, comme dit Monlîeur le
1
CHAPITRE X. jOJ
rable laboureur le cranfTubfbniie en la grailTe d'un
profperant threforier; la mouëlle des doigts d'un
▼igneron de Gafcogne resjduic les boyaux & le ven-
tre de Parifiere ; les pleurs d'une vefve ruïnee en
Bretagne font avoir du 6rd à la femme de Santeny;
le fàng d'un foldat perdu ^ chafTer Efpernon de Pro-
vence, fe change en hypocras pour l'hotle de la
Roze de Blois, aujourd'huy cranfubllantié à Mon-
ficur de BufTy Guibert. Les impofts de la France ont
iranfubllantié aujourd'huy les champs de labeur
en pafturages, les vignes en friche, les laboureurs
en mendians, les foldats en voleurs, les vilains en
Gendlhommes, les valccs en maillres, les maillres
_en valets, les Sieurs en Haubereaux, & les Princes
en Carrabins. Quelle altération a foufFert le
domaine du Roy? Qui eft ce qui nes'efcrieenpaf-
fant, 0 domui antiqua, quant difpari domino donti-
itan's f Les puiiins des Princes font tranlTubllan-
dees en femmes & les femmes en putains. Les
maquerauxs'en vont Princes. La Varennc a iranlTub-
Ibtniié fes pocages de cuifinc en potages d'Ellat,fcs
poulets de chairs en poulets de papier. Pardonnez
à Morlas s'il a fait femblant de croire la traniïubs-
tanciation, lui qui s'cll veu, dés le berceau, changé
de ballard de Sallettes en fils d'un couturier ; de là
nourri par les aumofncs des Eglifes de Pau, puis
efcoUer aux defpcns de la Roine, d'efcolier devenu
Mioiftre, de Miniilre cfpion des Huguenots à Paris,
d'cfpion gendarme, de gendarme difciple de du Per-
ron; de là Courtizan; de Courtizin traiflre, & enfin
General des vivres. Qui pourroit.dire les changemens
notables de Lanfac, de Lavardin, du Marquis de Belle-
Ifle adeProtafius? Le feu Evefque de Valence, qui
nç croyoU point la Tranfubftantiation, qu'euft-il dit
Î04
FBSSIOK au ;
de voir fon Gis de Ch&mpis Capitaine; de Capitaïae
Prince fouveraîn ; de Prince poltron j de polcri>n
baun)'; de banni Marcfchal, de Marefchal cocu, &
Marefchal aufli cocu que le Marefchal Vulcao ? Mais
ce q\il m'a confirmé davanrage en la créance de la
Tranfubftantiation, c'a elle le pûli oiau;*., connoi loi
mejme. en voyant combien j'ay changé & augmenté
nés fubllances. Je me fuis veu d'efcolierConfeiller;
lie Confdller Ambaffadeur ; d'Ambaffadeur faSirj-
nier; de faSVanier mactois; de mactols financier ; de
financier Colonel, Capitaine & Chaflclain du petit
Chilon, C'cnft eilÉ eocore un bel argument de»
eliranges tranfliibftantiations, fi le Comte Maurice
euft eftii auffi prompl à contribuer les quatre ceni
mille cfcus que furent ceux de Berne, & Genève les'
cents mille efcus, fur les ga^es de ma [roifiefme cun-
verfion. A proiios te ne cquic ooint mes Quatre cam>
CHAPITRE X.
305
proverbe des Efpagaols, le mefpris de la France, la
honce de Lorraine, le defdain de la Bretagne. Il n'eft
ni Duc, ny Tyran, ni Gouverneur, & lui qui avoit
gagné des batailles, a laiilé ruiner cette belle grande
fortune, fans tirer pas un coup, horûnis (après la paix
£ûte), im pauvre pet qu^il fit l'autre jour de fang
firoid, en la prefence du Roy.
II.
20
LIV<R^E SECOCfQ'D.
APITRB PHEMIER.
Dialogue <U Mathuriae & du jeune du Perron.
N m'a donné une pièce nouvelle
de Théologie moderne, digne, à
mon advis, de tenir place en cette
marqueterie. C'eft une honnefte
conférence entre les conférences
que cefiecleaconferees:& vous
verrez par là combien la bonne
mefnagere Sainîte Eglife Romaine employé de gens
à ramener le mondcjà la grand voye. "(Ma di urine for-
coti de faire une leçon à Vignolles, chez Madame
ds Moncluc : du Perron alloit ^ire k Tienne, qui
changea de couleur à la veuë de Madiurine, palTa
la main fur foit front chauve, puis commença. Per-
rm. Et à vous, belle Dame : on m'a dit que vous
OH DU SIEUR
VOUS vancei pir rout que vous avex converti S^dig
Marie du Mont. Maihur. El qui feroic ce donc, mon
bel amy ? Perron. Pir ma foy i] y auroit bien de
l'apparence, vous elles une belle Théologienne. vU>i-
thur. Oiiy, comme s'il falloic convertir les gea!
Troufogie. C'eftoit du vieux temps, qiwnd on fii-
Ibit à U pareille. Hé ! pauvre Job, lelouvîen-iu pas <
qu'il me le promît la nuiâ & que j'en allai dozmef
la bonne nouvelle à ion frère, fi malin que je trou-
vai li de La Coun, qui fortoit de fa chunbre ? Perron.
Tout beau, Madame la galande, paricz-vous atoC
d'un tel Prélat ? Miithar. O mon ami, cela n'em-
pefche point la converfion, lefmoin Chefniye, qui
pour cllre venu trop matin, vit un chapperon dans les
lacrees befongoesdc ton frère. Perron, Ce qui faillit ,
le rebuter au chapperon. Laifibns ces fottifcs ; car je ,
me fafcherois, & continuant propos ; Je ne dis pat
CHAPITRE I. 309
iîuiûlieres de Ciceron, pour ce rendre familier, foie
quelque chofc de bien ferial> )^ay ouy dire à la
Brofle, que quand il eftoic Regenc de la Troifiefme
en Bourgongne, il euft foiietcé fes grîmaux, s'ils
n'euflent mieux fait. Perron. Penfes-tu que je ne
lui aye rien appris que cela } Il edoic coût brutal &
barbare, je lui ay appris à parler des Pères, fans les
aroir leus; des Conciles de mefmes, & lui ai fait
parc, non feulement de la Matheologie^ mais à par-
ler de FEdat, à admirer ce grand corps d'Efpagne,
à reiglef tout au Confeil de Rome, & m'a falu lui
montrer jufques aux termes : au lieu de dire le Pape,
je lui ai appris à dire Sa Sainteté ; au lieu du Roy,
fa Majefté ; il difoit le petit La Roche, Zamet, La
Varenne, comme s'ils eftoient encore nains, valets
de garderobe &cuifinicrs; je lui appris à dire^ Mon-
fieur de La Varenne^ Vr bien fonnee; ainfides autres.
Il fe prit à rire, quand je lui dis que parler autre-
ment eftoit une efpece de leze Majefté. Mais je lui
fis voir que ce crime avoit bien plus de poids au temps
paffé, & que honorer à demi les créatures de Sa Ma-
jefté eftoit manque de refpeft au créateur. Je lui ap-
pris encores à dire fouvent, maxime dFEftat^ maladie
^Eflatjperiode£ affaires^ intereffer^ prendre la garan-
tie ^ faire for tune j courir rifque^ fymbolifer^ jalouier^
ambitionner^ un efprit poli, & mille termes en cette
façon, à quoy on conoift aujourd'huy une belle
ame. Afathur. Bel afne, mon ami, je ne lui ai point
appris toutes ces pédanteries, mais bien fes conte-
nances : il marchait droiét comme Gaillart, faifoit
les révérences pardevant, il ne rioit point s'il n'y
avoit de quoy rire. Je lui donnay de la tablature de
M. Le Grand. Je lui appris à tourner les talons en
dedans, à cheminer en oye, & de pareille gravité, à
3'
elcrimcr diis deux bras, à s'i^mmunecltr le Vi;n[rc,
à reculer la celle, à 1> dodetiner de bonne grâce, i
faire les reverencea en quarts & en reven, & rire
du coing des dents ou comme un chien i qui an
prefente de l'ail, à parler de h gorge, à peigner fes
cheveux, au moins aux paufes des difcours, à dire
ma foay, au lieu de dire ma foy. Il a bien appris à
dire toutes les admirations comme, Jefus, le plut
du monde, oh, oh, oh, il y a de fexce';, c'eji pour
en mourir. Quand il rencontre un des fardes de la
Cour : Oh! que roui elles bien aujpurtfhuy tjpo-
twUy comme une foje, & là dclTus parler des cou-
leurs félon la nouveauté, & comme elles font dé-
duites dans ce mefchani Fanejle. Je lui appris à
mettre des rozes par tous leî coings, où le AÎarquis
de Quatre Sols les porte, à relever fa ceinture à la
folTe de l'eftomach, comme le petit Auger, barbier de
Paris, à fjire accrouppîr le chappeau & les perru-
ques. Quoi ! il portoit fon rabbat fans cmpoiï,
comme du temps des haulTecoU, je lui en ay donrni
fix, qui viennent à la moitié de S'efchine, & des man-
chettes jufques aux coudes. Perron, \'raycment, il
t'ell bien obligi*. 11 eftoic allé difner ehei le Marquis
de Beuvr<3n ; comme ils lavoient, le Marquis d'Arcy,
qui tournoit la tefte à fes vîfiona, prit une de fes
CHAPITRE I. 711
Commardn, doôesen jurifpnidence moderne, &qul
fçayenc bien faire un procez à la mode, fe treuver à
leur difner, & fe faire carefler chez M. le Chance-
lier pour fa reduâion. Mathur. Et n'appelles-tu
rien le branlement de la main, à faire enfler les plis
de fon collet, à la mode de Graciane, & enfin tout le
pedt didiônaire de la mode, favoir contrefaire
toutes les douces mines de Fecan, fi bien que le Ma-
relchal d'Ancre l'a nommé le bel égyptien, & le
conte entre les beaux, quelque noir qu'il foit. Enfin
je lui donnay une entrée, de laquelle il fe fent
tant mon obligé, que c'eft pour l'amour de moy
qu'il porte cette corne de cheveux. Perron. Allez,
morbieu, vous efles une maquerelle pour tout po-
tage, & qu'on die à Rome que c'eft vous qui avez
converti les Huguenots. Ils diroyent bien que pour
amener les paillards à la grand putain de Rome,
que les maquerelles feroyent nos Dofteurs. Ma-
thur, Et depuis quand, frère, dis-tu mal du meftier^
A quoy as- tu gagné chauflès & pourpoinft, avant
2ue ton frère fut Evefque, qu'à produire à TUniver-
té la Controlcufe, la LibrairefTe, la femme du Chan-
delier? Je t'en nommeray vingt qui t'ont contenté
du miferable quart d'efcu. Mais quand ton frère
t'cuft donné ce manteau doublé de mizane, tu pris
crédit aux Confcillercs, & depuis aux Prefidentes,
& tu fus lors le macquereau de la Cour de Parle-
ment, & puis de la Cour. Tu ne devoir point venir
ofter les pratiques à la pauvre Mademoifelle du
Tillet, & à moy. Elle ne produit que pour avoir
crédit & moy, qui fuis pauvre fille, j'ay befoin de
toutes mes pièces. Efcoutte; fi la du Tillet te peut
faire bailler fur les jarrets, il y paroiftra. Et puis
la Roine a desjà dit à la Marquife de Guercheville :
}I2 COÎIFBESIOM du SIRUS. SB SAH'CT.
lo mie/o che quejlo Perro fi diUtta de la n{ffia~
neria. Perron. Par Dieu, tu es une mefchance lan-
gue. Je ne crains ni la du Tillet, ni l'effroyable
TignonviUe, & pour loy, comment ofes-cu parler,
qui couches avec les pages, laquais & Suiffës ? Tu
as donné un chancre au Pont de Courlay, & à En-
goulevent, & la veroie enfin au Baron de Vignolle*,
en traictanc lie vos converfions. Le pis cil que m
es bougreffe, car tu as gagné le cheval blanc & u
rubbe de velours verd figuré, en payement du pucft-
lage de ton petit .... à Moniteur Le Grand, fans
rien nommer. Tu es laide comme un diable : la
telle molle comme feu Sybllloi, tondue, puante par
les aiflelles & par les pieds. Va au Diable, tu me
feras rendre ma gorge. /î/j Mur. Telle pelée, refte de
Sainft innocent, bougre agent, bougre patient an
temps paffé, me feras-tu dire que ton frère te vcn—
CHAPIT&B I.
313
Efpric. Ec quant à la fucceiEon perfonnelle, il dit
que nous ferions tous fils de putains, puis que les.
Preftres ne font pas mariez. Mais je Tellonnai, moi
qui avois couché deux ou trois nuids à Saind Mar-
dn, pour apprendre les argumens de Cahier : je lui
appris comment Caïn avoit chanté la Meflè, & com-
mis le {âcrifice de l'autel, en la perfonne de fon frère
Abd. Perron. Voila un fot argument. Cahier ne
ptye-il point (on hofteffe de meilleure marchandife>
Avez-vous point fait le petit homme } Mathur. Ha !
ma foy nenny, il faut qu'il fuë encore une fois.
Pmrron. O I pour cettui là, pour des poix tu ren-
drois des febves : ce n^eft pas ce que je veux dire.
As-tu point aidé à fouffler le feu lent fous la coque
d^œuf où ell le germe, la foye cramoyfie, & cela
dequoi les Maniciens faifoient leurs Pafques avec la
pedte mandragore, &c. Mathur, Il m'a 'bien montré
dans un cabinet ce qu'ils appellent Toeuvre de créa-
tion ; mais de veroUe, attends que les cheveux te
foient revenus, & puis nous en parlerons. Perron, On
m'avificé, efprouvé chez la Princeffe, tu ne me fçau-
rois nuire par ta mefdifance. Pour ton argument,
s'il eftoit ainfi. Judas, les Juifs & les bourreaux
feroient les precurfeurs de nos Preftres : mais je
l'arreftai tout court, par un fophifme bien mieux
trouflé. Croyez-vous, lui dis-je, que le Pape eft
TAntechrift? Oiiy, di^ il, il n'ell pas Chreftien qui
ne le croit. Je réplique : ores cet Antechrift doit
s'aflèoir au temple de Dieu, qui eft à dire TEglife ;
le lieu donc où eft le Pape eft TEglife fans faillir.
Mathur. Je fçai bien que tu lui dis cela, & qu'il ne
refpondit rien : mais il me die au foir, que cela lui
avoit fait peur, qu'il n'y eut point moyen de prou-
ver TEglife de Chrift que par le régime de TAnte-
ÎH
chrill. Là liclUis je k relevai d'un autre irgumcn;
de l'invention de Bonniere, ou du moins de Gue-
dron, & du Conroy, tjui l'onr converiy. Perron. Ha !
de ceituy là je l'advoue, car il a mieus aimtf chm-
[er la palinodie, que de prendre la furinrendancc
des chanteurs. JHaihur. LaifTe moy achever. Vous
dites, Melfieurs les Huguenots, que ceus qui au-
jourdhuy tiennent les grands rangs en l'Eglife de
Rome font brigands & voleurs, qui pillent le bien
des pauvres; or i! eft dit : Ma moijhn efl maifan
iForaifon^ mais iU en ont fait une caverne de bri-
gands ; ores donc puis que nos gens d'Eglife font
brigands, nortre Eglife, qui lui ferc de caverne, eft
par necefllié maifoti d'oraifon. Perron. Par le corps
bieu! Il faut que j'advoiie que tu es une bonne
vilaine. Ce tr.aic eft bon & délicat. Et tout de tnefrocs
fur ce.^ mots : El federunt Scrihn & Pharijai fuper
Cathedram Jllojis, Nous maintiendrons que tenons
la chaire de Moyfe, qu'il faut faire tout ce que nos
Evefques difetit ; car il ne faut pas fuivre leurs
œuvres, lefqiielles, auffi bien que leur doftrine, les
monftreni en tout & par tour Scribes & Pharifiens.
Mais pour te rembourcer, je l'en apprends u
que je garde pour Vignoles ; quand il faut prouver
CHAPITRE I. 315
uns des apoftres de ton frère, comme j'ay fait de
{et trompettes la BrofTe & Beaulieu. Je leur chan-
gera de tant de viandes, qu'ils parleront de mescon-
Terfions, comme ils ont commancé chez la Connef-
taUe à un difner, où ils dirent que j'avois plus
porté à la converfion de Sainde Marie que ton frère
le Convertiffcur. Vois tu, ils font las d'attendre.
Ton frère parvint par les loUanges de TAbbé de
Tyron; perfonne ne s'advance par celles de ton
frère. Ils m'ont fort bien dit qu'ils ne loUeroient
plus. Pourquoy ne les a il contentez, puis qu'ils
eftoient louez pour loiier ? Perron. Quant à Duret,
on conoit fa langue. Il fut bien fi impudent à TAr-
fenac, de dire devant moy qu'il ne venoit point
difiier, quand mon frère & l'Abbé de Tyron y
feroyent, fi on ne marquoit leurs verres, & que l'un
cftoit pourri de vérole, & Tautre de lèpre. Si ces
emifTatres cherche-difnez fc veulent efgaler à mon
firere, on leur refpondra ce que fit le Comte de Ton-
nerre à Beaulieu, lequel parlant d'une mafquarade,
difoit à tout propos, les Comtes de Soiffonsy d'Au^
vergnes & moy. Tonner rCL lui fit fou venir de la
fable des eftrons, etiam nos poma natamus. Mon
firere n'eft plus de leurs amis, & ne leur aidera pas
à defmefler cette fufee. Ores ils ne nageront plus
enfemble, pour ce que Monfieur le Comte a com-
mandé au Capitaine de fes gardes de lui coupper les
mains, & le jetter en la rivière, & là defTus alla
demander grâce au Roy à genoux pour ce meur-
tre, qui devoit eftre datte du jour du commande-
ment. Eft-ce pas une grande impudence, d'avoir
ofé dire & efcrire en afTez mauvaifes rimes, que
le Roy & M . de Rhofny, pour Tefpargne (à laquelle
ils eftoient fi attachez) dévoient congédier les Come-
j
316 COMFESSION DU SIBlfK. DB SAXCT.
diens ; encor que le Roy, par une prudence à hlî
particulière, ayanc defpendu l' autre h y ver fept
[ellons & demi (il eft vrai qu'ils eftoient roîgnez,
car il les ayoit cirez au jeu.) & encore trois lelloM
& demi i oiiir les cometlîes, a trouvé une belle
invention : c'eft qu'il a menacé les Comédiens de le*
interdire, s'ils ne vouloicnc recevoir fa perlonne,
fans payer, & depuis encore a eu le mefmc privi-
lège pour Madame la Martjuizc, & fi on dit qu'il
avcjit tous les mois quelque comédie au foir, qui ne
lui couftoit rien. Tout cela n'a point empelché que
ce Duret, (je ne fçay s'il penfc devenir ihreforier de
l'Efpargne) ne lui ait confcillé de clwfler les Comé-
diens, alléguant qu'il avoii en fa Cour la comedk
toute complette, qu'il avoic pour Capitaine Efpeai
Viiry, qui eft devenu SbiiTe, le Comte de Soiffbi
oui ioiJe le Dodetir en la Cour, auaod avecf^
CHAPITRE I.
317
plus jeune & le plus nouveau ait appris du plus
vieil, & foie Ton imitateur, par tout dxoid de na-
ture, Mathur. Garde toy bien d'eftablir cette maxime^
& en donne advis à ton frère : car les Huguenots
en feroyent trop leur profit. Sçais-tu pas bien que
nmtes les cérémonies des Catholiques de Calicut^
defquels TEglife adore le Diable vifiblement^ font
toutes femblables aux cérémonies de TEglife Ro-
lùaine^ en diverfitez de Moynes & Moineffes, de
jeofnes^ confelfions auriculaires, & tout (comme il
eft dit plus au long ailleurs), jufques au nom de leur
fottverain Pontife, qui s*appelle Pape, & a la tiarre
du Pape, qui n'a pas un clou moins que celle du
Sainâ Père } Les Jefulftes difent là delfus que c'eft
le Diable^ qui eft finge du bon Dieu en terre^
& les Huguenots au contraire maintiennent que ce
font les Papes^ qui ont elle en tout & par tout les
finges du Diable^ par la mefme raifon que tu as
dite, c*eft que le Diable eft le plus vieux. Ores re-
garde par où tu te lairras empafter par Tambicion
que tu as contre moy. Perron, Parle bas, le Diable
la folle; Voila le Baron de Salignac qui paffe.
Mathur. C'eft tout un : c'eft un de mes porcs d'eflite.
Perron, Tu veux dire Profelites, faufle vefle que tu
es ! Attend, le voila pafTé. Voy tu ! il a des heures
qu'il maugrée de s'eftre converti, des autres qu*il
n'y penfe pas. Je ne voudrois pas pour beaucoup
qu'il nous euft efcouté, ou quelque autre, qui ne
fiift bien refolu. Tu m'as appelé maquereau, je t'ay
appelé paillarde, qui t*eft encor plus honorable. Qui
croiroit que tels gens font propres à retirer de l'he-
refie, & à fauver les âmes qui font en danger?
Mathur, Pour toy, maquereau major, cela eft fans
exemple, mais non pas pour moy, qui fuis pauvte
Jl8 COKFESSION DU SIXUR DE S&NCT.
patlhrde, comme eftoii Rahab. Sçais-tu pas bien
(juc Knhab paillarde redra & fauva les efpies d'If-
raci, & ainfi moy, & force autres paillardes k U
Cour avons reciré Sainâe Marie, qui n'elloic pu
el'pic pour Ifraêl, mais il fervoicd'efpie au Roi parmi
les Ifraëlices Huguenou. Perron, Touche \k. Je Aùi
lun fcTviceur, 8c H j'oy plus dire que tu ayes donné
Il vcrole à Sainfte Marie, je dirai bien que noiij
& que tu l'as encores par devers coy. JUathur. Dis que
lo as trouvé ta maitrelTe. Bon jour. Je m'en v(ms
conœr noilre difpute à Guedron.
Chafitks Second.
Dt la reuMoa dtt religionj.
STANT chofe très malftifee de
(kdruire l'opinion des Hugue-
nocs par difputes, ni par perfe-
eudona , nous avions très bien
defleigné d'y procéder par réu-
nion des Religions, par les ouver-
tures & intelligences de nos Mi-
niflres gagnez : mais de fix qu'ils eftoicnc, il y en a
cinq morts & l'autre chafTé. Pour certain il n'y
■voit point de danger de leur quitter force peinas
Théologaux, pourveu que l'auihoriié de l'Eglife
& du Pape demeuraflenc entiers. La raifon en ell
prompte, que eux s'eftant fouCmis à l'auihoricé,
cuITent après facilement perdu les raifons par elle.
£t quand nos Jefuiftes fe font oppofez i. plufieurs
articles, qu'on leur vo.uloit concéder, ils ignoroyent
le deflëin, & quelques uns avoyent pour bue la
guerre civile, plus loll que la' paix de confcience.
Or voici ce que nous autres honneftes gens voulions
que l'Eglife Romaine laiiïaft aller ; premièrement
que le fervice fuft en François, pourveu qu'on oftaft
quelques drolleries, qui euiïent fait rire les gens,
comme de commencer la mcfle par un Et, &. autres
abfurdiiez, qui font proprement & fubtilemalt
efcrites par Bernardo Ochino, au Traiflé délia Suji-
t'iia delta Mifa. Quant aux ornemena, en ofter le
pluii ridicule, & pour le reftc, rel'poudre ce qje dii
ledit Ochino; c'eft U Cene defgaifee, & ijui s'eft
faite religieule , fer parer pion Saitéia. Qu'il fut
permis aux preflres de fe marier, & quîlicr Icure
femmes, quand elles feroyent fafcbeufes : en tout
cas, ufer du SainiS Dccrec, & de fes libertez, tomme
ilell porté au Canon, qui commance, ii qui non babtt
[uxorem], loco illiui, fltc. U eft dit notamment rà
rubrica decteti^ qaod tjui non babei uxortntj loco il-
lius débet concubinam habtre. lia n^at Epijcopum
crejrij niji Jaliem unius concubintr doininum. Dit»
tina. î4. hyper, de Var. Stud. Theolog. vol. IJbr
cap. 5, Villavincent, ibid. cap. 4, Si ces privil^es
loient bien efiablis , iih de putain qui ne feroit d'
]
CHAPITRE II. jai
celles de l'iucre. Noua leur eufEons baillé par le
marché le vendredi & famedî, le Carefme & les
Vigiles, fi non que la police en eu(l auitremenc or-
dooné, comme en Angleterre, & par ce moyen nous
enflïoiu Fait pais avec SainS Paul, au 4 de la pre-
mière i Timochee. C'eft encor une oubltance à l'in-
dice. Il fidloic ofter ces marques des révoltez de la
toy, des abufeurs, des DoAeurs de menfonge, d'hy-
pocrifie & de dodrine des Diables. Calvin n'euft pas
£^ dire pis. Que nul Catholique llfe Sainâ Paul
jufqu'aprés l'accord fait. En mefmc temps l'autre
EgUlè devoit reprendre les pompes, la mulique, les
dances, force kttes, les beaux & grands revenus
d'Eglife. Les Miniftres euffenc efté en charoffe, force
chiens & oyfeaux à leur Tuiite. Nous euiTions eftabli
le franc arbitre : fur tout ehaffé cette fafcheufe dif-
cipline, qui leur a fait perdre tant d'honneftes gens.
Nous n'eufTions point tenu entre les péchez la fimple
fornication^ ni l'adultère par amour, fuivani le ca-
hier de Cahyer en fon dofte livre Du rgtabliffement
du bourdeaux, &, fa doâe difputc fur le fepiiefme
Commandement. Je di le feptiefmc, parce que
nous avons remis le fécond, que le Concile de Trente
a voulu oller : mais il n'y a pas moyen de couvrir
^cene honte. Ce feptiefme Commandement, qui eft,
' Non macbaberù, tu ne paillarderas pas, défend feule-
ment le péché des enfans d'Onan, car pisixiM» dérive
félon cette Théologie moderne àiti tcS (uix™ * x''"i
quod efi humidum fundere, C'euft cflé une brave reli-
gion, qui euft rejette les incommoditez des deux, &
euft eflabU ce qui eft plaufible en l'une & l'autre. Cha-
cun y euft efté receu & content, nul dechaffé. Je fçay
■que des Ariftarches controlleront mon bon defir,
mais je dis contr'eux : Premièrement que la Sainâe
î"
r SIEUR SE
Eglife doit avoir les bras c
propos nous les renvoyons
prouve bien cecK matière,
vera en fon lieu, &
.. i toute force de
gens. Or ce n'cft pas les recevoir, que de chaCTer
leurs vices ou incommodiiez. Ce font les Huguenot!,
qui difeni que l'EgUrc n'ell que des elleus. Et à ce
i„ j^i ^ y^ ibnaet, qui'J
me Icrablc. Il fe troo^l
Huguenot!,
royti iju,iu douxji'in de PEgU/tf S
Secondement, je demande à ces (ourciUeux , s'ilt
veulent eflre plu.s fages que les Apoftres, qui votH
lurent enterrer le Judailme avec honneur. Vout
voyez en l'Epiflre aux Galates, comment Monlieur
Saind Pierre s'accoro.modoi[ en galand homme aiu
humeurs & n\ix iiUàrmicez des Juifs. Sainâ Paul
IVn rpnr-'rv! ■ oiiiï ivurim^ Hil^r fwo> i;iU*i il t
CHAPITRE II. 323
|k] retenons en nos proceffions, notamment à Poic-
ders, où on fait proceffion, pour demander de l'eau
aux Naïades. If ous avons encor de la gentille Anti-
qmoé l'eau luftrale, & le pain & le vin qu'on apporte
anjourd'huy fur la fofTe des morts, dequoy il ef-
chappa un jour au bon homme Benoift de dire, ifta
pagamjmum fapiunt, Mefmement les inftituteurs de
nos cérémonies n'ont pas eu honte des plus an-
ctennes pièces de l'Antiquité, puis que l'on adore le
Dieu des jardins en tant d'endroits de la France :
fefinoin Saind Foutin de Varailles en Provence, au*
qodondefdie des parties honceufes de l'un & l'autre
lèse formées en cire. Le plancher de la chappelle en
cft fort garni, & quand le vent les fait entrebattre,
cela desbauche un peu les dévotions en l'honneur de
ce Saind. Quand j'y paflay, je fus fort fcandalifé
d'oiiir force hommes qui avoyent nom Foucin ; la
fille de mon hofteffe avoit pour fa marraine une
Damoifelle nommée Mademoifelle Foutine. Quand
les Huguenots prindrent Ambrun, ils trouvèrent
entre les reliques de la principale Eglife un Priapc
de bois à l'antique, qui avoit le bout rougi à force
d'eilre lavé de vin. Les femmes en faif oient le Sainft
Vinaigre, pour appliquer à un eftî'ange ufage. Quand
ceux d'Orange ruinèrent le temple de Saint Eu-
tropy^ on trouva une mefme pièce, mais plus groffe,
enrichie de peau & de bourre. Il fut bruflé publi-
quement en la place par les Hérétiques, qui cuyderent
tous crever de la puanteur. Il y a un autre Saind
Foutin à la ville d'Auxerre & un autre en un bourg
nommé Vuedre, aux marches de Bourbonnois. Il y
a un autre Saind Foutin au bas Languedoc, diocefe
de Viviers, appelle Sainét Foutin de Cruas. Voila
comme nos Doi^teurs ont appointé le Paganifme avec
NFESSIOt: DO StKUR CE S
5
î^+
nous. Il iàlloii de par Dieu ou de par l'auu'c, dcT-
coudre, & ne defchirer pas, comme ont lait c«
Minillres fafcheux, qui ont voulu l'efrir Dieti avec
trop de pureté. Je trouve la Rivière, premier méde-
cin, de meilleur' humeur que ces gens là. H ell bon
Galenille, & très bon Paracellïfte. Il dit que U
dortrine de Gallien efl honorable, & non mepri-
lable pour la Pathologie, profitable pour les bott^
tiques. L'autre, pourveu que ce Ibit des vrais pi
cepies de Paracellê, eft bonne k fuivre pour
vérité, pour la fubtiliré, pour l'efpargne, en fomnc'
pour la Thérapeutique. Partant il fait de fon anie
comme de (on corps : il eft Papifte pour la repun-
lion, il ei\ Huguenot pour la gucrifon de fou ante,
Maiftre Gervais, Philofophe de Magné, le prend
plus haut, car l'ans paradoxe il maintient que toutci
pn-
Ï25
bûUer pliu, qu'ils n'euflent dévalé par utte fenellre
leur accord bien écrit & figné. Le Curé des Ef-
chniez difoit pourtant que ce feroit Tupercherie,
pource que les MmîUrcs ont accoudumé de vivre
peneement. Quant à lui, pour ne tomber point en
CCS peines, il mit les Religions d'accord en fi Pa-
roifle, & quand on lui apportoit un enfant à bapti-
ser, il demandoit de quelle religion elloient les père
& mère. S'ils difoienc : Nouf fommes de la rtli-
gùm de nos ftres, lors il couroit à l'aube & à
l'eftole , & detni vellu commençoit , Adjutorium
nofirum in nomine Domini. S'ils difoient qu'ils
avoient la cognoiffance de Dieu par fa grâce, il
toumoii une chaire devant derrière, &. mettant les
mains fur le haut, il commançoit après l'interroga-
don : Noftre Seigneur nous monflre en quelle pau- .
vreti nous naiffons tous en nous difant, ire. Si c'eftoit
un mariage, après pareilles queltions, il fe menoil
fur Adjutorium^ ou Noflre aide foii, &c. Puis, DUu ■
jtofiTt Père apris avoir formé, ire. Voila un habile
homme cettui là, & non pas ce pallîonné /r«r« 3an
Bonhomme, qui peta fcnfiblemeni de colère en la
chaire, en criant fur la converfion du Roy : Coa-
ragi, mes Paroijfiens, courage, Ut Hérétiques font
bien tfionnei; ils n'ojem plus nous appeler Papiftes,
ni manger chair en Carejme devant les gens, ils
chomment les fejies, quelques Miniftres s'y accor-
dent, ils font devenus mois comme couilles de Lor-
raine, ir les Catholiques fe roidiffent comme beaux
vits tPa-^es de Myrebalais, Or voila en difcourant
de l'accord des Religions une defcription de la
Chapitre Troisiesme.
aufei qui me pouffèrent à maftcondt refor-
naiion, qui fui la troijiefmc convtrfion.
ANiSL, comme dit fon livre,
prefchoit à feneftres ouvert»,
ayant la face tournée vers l'O-
0 que je vis un jour-
JI ^^^ M triompher M. le Conveniflcur
vJ ^^>tA fur ce texte. C'eft un merveil-
leux homme, quand il trouve un
poinS de Atûtkeoiogie propre pour fcs allégories.
C'eft, difoit il, que comme Diniel, pour faire fcs
prières, tournoît fa face vers le Soleil levant, il fiut
g adrelTe cousioars fca
CHAPITRE III. 3J7
lie, où j'avois appris qu'à Rome les difpuces publi*
ques avoienc pour chefes ordinaires la comparaifon
du Roi d'Efpagne & de lui. Les devineurs de là
trouvoyent par figure de Geomance, par oracles,
par le nom fatal de Bourbon, que ce prince doit
oonverdr les hiérarchies à FEmpire, la chaire en
throlhe, & les clefs en efpees, qu'il doit mourir Em-
pereur des Chreftiens. Les Vénitiens adoroient ce
Soleil levant avec telle dévotion, que quand il paf-
Ibic par leur ville un Gentilhomme François, ils
couroient à lui de même ferveur que les Papimanes
de Rabelais, crians : L'avej vous veuf fur l'adveu du
Gentilhomme, les magnifiées de leurs peintres con-
crefaifoient fon portraict, & fi toft qu'il fe treu-
voit un tableau reconneu pour femblable au Roy,
le paflant eftoit traitté publiquement. Et après que
les Pantalons avoient demeuré demie heure bouche
béante de quatre doigts (comme ravis en admira-
don,) le peintre, outre le prix ordinaire, en rece-
voit un prefent & honneur public, & le tableau
eftoit logé en lieu facré. A la Cour de l'Empereur
& en Pologne, on oyait vœux publics, pour mettre
l'Empire en fes hcureufes mains, avec difputes
pour la reunion des Religions, ou la tolérance de
toutes, force difcours d'amener l'Italie à cette
raifon, & de rendre les tiltres d'Empereur de Rome
e£Bcatieux, & non point tiltres vains, pour la
réduction du Pape à fon Evefché. Le Duc de Saxe
faifoit faire en fa prefence des homélies fur les fimi-
litudes de David & de ce Prince, honoroit & guer-
donnoit ceux qui trouvoient plus de grâces au der-
nier qu'au premier , envoya jufques Zurich une
chaîne d'or de recompenfe à l'autheur du livre,
intitulé Carolus Magnus redivivus. Ce grand luftre
jaS COMPESSION DIT SIÏUR DB SAVtï.
de réputation, fccondé de tant d'exploits de giicrr*»""
que prometioU-il de ce Prince, fe fervsnt des dîvï-
vifions desjà créées encre les Mofcovîtes, Polonoi»
& Suédois, le Traofilvain & l'Empereur, & aucrcs
allaires de Septentrion, cottoilTaot le» infîrmicez da
Roy d'EcoITe, les ddTdns divers fur la vicillclTc de
la Roine Eliiibeth, les révoltes de ilrlapde, U
vieilklTe & mort certaine du Roy d'Efpagne, l'aïa-
bition & fubtîlité de fa fille, h pauvre repuutioa
pour lors de foa fils, les machinations des Princes
d'Italie, pour parvenir à leur liberté fur la déca-
dence des ans & affaires de leur Tyran, la bovirlê
du Grand Duc ouverte au Roy, Don Cefarc de
Ferrare cerchant appuy en France pour la lucccf-
fion qu'il voyoic branler, le Duc de Savoye co
difpute pour l'accompliflemenc des poinds de Ton
raariiKe, la BrelTe perdue, le reftc bien enfoncd par
CHAPITRE III.
3^
Jugez, Meffieurs, fi cette mutation n'eftoit pas fous-
tenaUe. A la vérité je ne connoiflfois pas aflez la
caballe du monde, les infirmicez des Princes, & en-
cores moins }es grands interefts des Confeillers de
l'Eftac à maintenir la Diane des Ephefens,
Chapitre Quatriesme,
Apologétique pour ma longue demeure
entre Us hereiiquet.
!Z amples font les conTider
lions, par lefquellcs je fus m"
ché à une religion desjà autrei
fois gouftee & fiiivîe, de laqw"
CHAPITRE IV. 331
gions, qu'il fallut rendre moindre, pour puis après
Tannuller. Nous couchafmes à la première de ces dif-
ferences, lors que les Huguenots fe virent le cœur en
)oye, lors que mal à propos ils concluoient, qu'ayans
un Roy & un Prote^eur en une perfonne, ces deux
qualités eiloyent infeparables, fans perte de la chofe,
abfque rei interitu. Sur ce point, nous defpefchames
ce maifire Aliborum du Fay, inftrument trompeur
& trompé, comme il a paru par fon teftament, auquel
il a confeiTé avoir trahi le pard de Dieu, pour &ire
fa fortune ; mais il y a deffence de parler de ce tefta*
ment. Ceftuici ayant quelque caquet à la bouche,
ft au front afleS d'impudence, mit en un mois la
Meflê où il voulut, caflTa toutes leurs Qiambres de
juftice, leur fit quitter toutes leurs finances, apprit
à leurs gens de guerre à parler d'Eftat, ne con-
noiftre que le Roy, lequel ayant gaigné ce poinft, mit
toft après le Protefteur derrière : & puis quand ce
nom de Proceôcur lui peza fur les efpaules, il l'enfe-
velit auprès des Rois à la porte du temple Saind
Denis. Pour faire toutes ces belles préparations, à
tous ceux qui dcmandoient au Fay fa commiflion
particulière, le Fay leur montroic la clef des poulets
de Madame Martine, qu'il difoit eflre la clef des
féaux de Navarre. Quelques Huguenots malitieux
voulurent s'oppofer à cette menée : les autres Hu-
guenots, ou fimples ou gaignez, les appellent Conje-
guerres, les accufent vers le Roy ; fi bien que voila
tout au pouvoir d'un feul : omnia pênes unum.
Leurs juAices & leurs finances tombent entre les
mains de Madame Formalité, par laquelle nous leur
fouArayons en peu de temps les places de Clermont,
Joinville, Chafteaudun, & en Lorraine Stenay, Ville-
Franche, Dun & Beaumont, Chavigny, Aubenas
333 CONFESSION- DU SIBUtt DE SANCT.
& plufieurs autres. Voila la Huguenotaille i gron-
der chacun à part, fans pouvoir dire Nous. Or je
me puis vanter d'avoir frappé les plus grands coups
à fapper le rampari de cette différence. Pour U
féconde, Dieu ait l'ame de feu Morlas, mais fi lui
& re.<: compagnons euffent aufli bien joué pour le
faift de la Religion, comme fie pour l'Eftac du Fay,
il n'y auroit aujourd'hui d'Huguenots en France
que ks Confiftoriaux & bruflables : les Huguenots
d'Eftac ou d'efpee (comme je les appelle), culTeDtfaii
leur paquet. Encor avons nous entrepris, pour
eftonner les plus faints, d'avoir gaigaé les fut plus
huppez de leurs Minières , lefquels avoyent juré,
que edans choifis pour la dîfpute, après avoir faic
les mauvais, ils uferoicnt d'une facrec prévarication ,
Qu'ainft ne foit, mon Roian allant à la difpuie de
CHAPITRE IV. 333
dehors. Si j'euflè efté impadenc comme Cahier, ou
Iblliciceur d'af&gnadons, comme Serres, je n'eufTe
pas £iic au nom des Huguenots Teledion de la
Chambre, je n'euffë pas eu le credic de renvoyer
Chouppes^ fans recufer les Parlements ; car ce vieil-
lard dloit invincible, s'il ne m'euA penfé zélé. Je ne
içay qui en ce temps là alla barboUiller le dialogue
die Roihi & de Revol : je mourois de peur en le
lilîuic, d'y voir mon nom, car fi j'euflè efté décou-
vert par ce devin aufli bien que Morlas, j'euflè
perdu mon crédit. Ce fut de mon invendon, durant
kt affemblees des Huguenots,' d'en dépêcher dix en
leurs dix Provinces, pour faire femer la zizanie
qui a ainfi muldpliee. Ils furent defpefchez de ma
main, & prefque tous furent poufTés en cette entre-
prife, en me croyant de mefme Religion qu'eux :
notamment Source, ancien de Cour, qui fit faire de
fi beaux fermons à Mermet de Nerac. Ceftui ci ,
encor que nous reuflions mortifié par une longue
famine, me protefta qu'il n'euft pris ni mon argent,
ni mes inftrudions, fans Tafleurance de ma pieté. £n
ce temps là, j'ay appris aux plus fringants Hugue-
nots cette fentence : Ce qu'on demande pour le
public vient tard, gaigne les bonnes grâce aufli toft.
Fais tes affaires particulières, & laifTe les publiques.
Tarda Junt quœ in publicum expoflulantur ; privatam
gratiam cito mereare, cito accipias. Je ne vous conte
point les aphorifmes d'Eftat, defquels j'ay inftruit le
petit VifTouze, fon pedt lacquais, Lomenie, Maine-
ville & M. de Roy an. Tant y a que j'ay fait du pis
que j'ay peu, comme ceux qui ont peur dans un
fiege de ville : avant fauter la muraille ils efpau-
vantent le plus qu'ils peuvent leurs compagnons,
& quand ils Tont fautee, menez devant le General
334 COMFESSION DU SIEVS. DB SAMCY.
(]ui alHege, ils difenc & font le pis qu'ils peuvent,
pour n'eltre pas feuls deslioaorez. £t de plus il n'y
a point de Catholiques plus renforcez, ni qui facent
plu.^ de mal aux Huguenots que les nouveaux con-
vertis. Pour preuve de quoy je me vay rendre fol-
Uctieiir des Jefuilles ; pour lefquels je veux faire
une Apologie contre ce qu'on les accufe de faire
jouer le couteau partout. Par cela meûne je monftre
qu'ils font iraitaceurs de Jelus-Chrift, venus, comme
lui, mettre la guerre entre le père & le fils, non
por[eurs de la paix, mais du glaive : & ce font ces
petits glaives qui forteni de la manche de leun
Apollrcs. Il faut que les profelyies fignentleur zèle
par le fang de leurs anciens compagnons, & Foi^
g.iife. Gouverneur du Prince de Condé, m'a promii
Cha?itrb Cinquiesmb.
Dis miferes dtt Hugutnc
or AMT que j'ay ouvert ud beau
champ aux frères, pour difcou-
rir de ma converfion, je délibère
en ce chapitre coniencer mieux
les efprits curieux, que je n'ay
faîc les confcienccs ferieufes.-
Chacun s'enquiert qui a induîc
Sancy à fa révolte : Je demande, qui a contraint le
Roi à cela raefme? S'ils refpondent, pour fauver
un Edai, <T moy U mien, dîray je. Oûy, mais cela
efi honteux; la pauvreté l'tfl davantage^
Nihil hjhti in/tlix paupertat dur'uiSj tyc.
La miferable pauvreté n'a rien de plus dur, que ce
qu'elle rend les hommes ridicules
Hais philorophons un peu fur cecce queUion. Ce
n'cft pas changer que de fuivre tousjours mefme
but. J'ay eu pour but, fans changer, le profit,
l'honneur, l'aife & la feurté. Tant que le deffein
d'eflre Huguenot a efté conforme à ces quatre fins,
je I'm fuivi fans changer. Quant au contraire j'ay
veu dommage, honte, peine & danger, c'eull elle
JJÔ CONFESSION DU SIEUR DE SAKCT.
inconftanct di; changer des defTeins oppofei dia-
meiralement, J'ay donc fuivi mon but, je n'ay
changé que de moyens. Ad confiituium portum len-
deni eadein prorfus navigatione^ fed veHficatione
muinta. Or pour reprendre le premier de nos quatre
poinfts, qui eft l'uiilicé, quel moyen a de s'a-
vancer un pauvre Huguenot en temps de paix ?
S'il eft roturier, nous avons commandé qu'on fift
les AfToycurs ou Receveurs Caiholiques, & les Col-
lefteurs Huguenots. S'il a des procès civils, nos
Juges les changeront ea criminels. S'il elt Gentil-
homme, & qu'il efpere quelque chofe du Roy, nous
n'avons lailTé en fa puilTance de difpofer d'aucun
bien faift. Si Monlîeur le Huguenoc prétend quel-
ques bénéfices, nous avons fait prefter ferment à
tous les Ecclefiaftiques de retirer leurs noms,
&. leur rompre la foi, fuivant l'arricle du Concile
de Confiance. Leurs tthres leur fervîront autant que
firent ceux de Cheredame. C'ertoit un Huguenot de
la {Implicite ancienne. Je lui demandois un jour sll
jouiffbit paifiblemeni du bénéfice de Bandouille, que
le Roy lui avoit donné. Ouy, Monfiear, dît il, car
ce foni les beneficet dont lu Jerns joUiffanl, 6"c.
Item, mais hs bénins pofederonl la terre. Je ré-
plique : Oui, mais qatl lUlre avrj-vaus pour mon/-
CHAPITRE V.
337
les raifons que les Huguenots allégueront ferviront
autant devant nos juges, que celles de Cheradame.
Quant à Fhonneur, ceux qui auront à fe faire rece-
▼oir en la Cour, après TEdid receu, m'en diront
des nouvelles. Et cela foit fecret entre nous. Quelle
aifè peut-il avoir entre gens, qui n'oferoient s'eftre
resiouys, ni avoir raillé avec une de leurs voifines,
qu'ils n'ayent aufli toil un furveillant au codé ,
comme une efcarcelle } Quelle feurté à gens à qui
on fait le procez après edre pendus ? Si c'eft en
temps de guerre (ce que la paix d'Efpagne & le
Jubilé prochain m'ont fait appréhender) que peut
efperer un homme de mon eflat en leurs affaires }
£c comment pourrait-on grignotter en leurs fidelles
& bizarres formalitez? On me conta un jour que
durant ces dernières guerres, il y avoit en Poidou
deux financiers, qui feuls exerçoient tous les Eilats
des Prefidens & des Efleus de cinq Eledions, des
Receveurs généraux & particuliers, & de leurs Com-
mis Controlleurs, mais Payeurs à bon efcient : car
c'eiloit à la banque un à un. Ceux là affiiloient
aux jugements criminels & civils, & avoient la moi-
tié du temps à fe jolier. Les Capitaines ne les pou-
voient tromper d'un paffe -volant. Il paffa deux
milions d'argent par les mains de ces deux. Quand
il falut fuivre le Roy de ça Loyre, il fallut aufli
qu'un deux empruntait cent efcus. Oyant ce conte,
je me fouviens aufli d'un Efpagnol, qui ayant fervi
dix huift ans feu M. le Connellable, & lui voyant
renoUer une efguillette, le galand la prit & la
baifa, & ne Teuft pas fitoil remife en la place par
le commandement de fon maiftre, qu'il lui dit pour
adieu, bejo las manos, Aufli j'en dis autant à Mef-
fieurs les Huguenots, entre lefquels il fe void des
II. ai
ÎJ»
tinaiiciers pauvres. Quant ù l'honneur, en temps de
guerre il ne fe gagne avec eux qu'à coups d'efpee -.
chofe que je defdaigne fort, encor que l'on m'ait
fait Colonnel des SuilTes. Mais quel aife pcuveiii
fentir les Huguenots eoufus en leurs eu ira (Tes, comme
lormës en leurs coquilles ? Pour leur feurté ils n'ont
que Dieu pour tout potage, où un homme de mon
humeur ne fe fie qu'à raifon. Mais pour traiftcr
cette matière un peu plus généralement, je vids
que la melme violence qui avoit elbranlé le Roy,
devoil cfbranler les telles plus eflevees. Je vidg la
fiance qu'ils avoient en une ame agitée au gré de
fes ennemis, qu'ils cerchoient leurs feurrés ailleur);
qu'en eux mefmes ; prenoient leurs relblutions chez
leurs ennemis, & non pas chez eux, comme font les
Suillês ; lenoyent la paix pour faifle, avant qu'elle
fut bien commencée à traifler, & fe defpoiiiÙoieni
de leurs advantages & dillinaions premier qu'elle fut
exécutée. Qui pis eft, nous avions gagné trois ou
quatre de leurs principaux, qui les failbient traifler
comme desjà coufus dans le parti du Roy, non en
guerre, car ils porcoyent les armes pour lui, non en
paix, puis qu'il falloît traifler, non en trefve, car
ils avoient abandonné leurs dillinflions, 4 fçavoir,
finances, i
CHAPITRE V.
339
fbibleffe, fans confiderer les diilindions des affaires
de l'Eftat : de là ils commancerenc à craider avec
refpeél, pour conclure fans feurcé. Ils en faifoienc
aflfez pour offence, non pour deffence. Voyant ces
ptuvres gens en leur fîmple fidélité, condamnez à
cAre le joilet des plus Grands, advifez aux affaires
du Roy, divifez aux leurs, avoir pitié de la France
quand la France n'en avoit point d'eux, la vouloir
garder, & n'y avoir rien, la fortifier quand on les
en chailè, je dis Beiomanos de l'Efpagnol, jugeant
bien que celui qui a les mains liées de la crainte
de Dieu, & le front bas du refpeft de fon Prince,
fa paix ne fera jamais paix, fed paéHo fervitutis,
mais accord de fervitude.
Examen de quelques liv,
I
VASo Monfieur le Converti fleur
vint k mon logis & y fit apporter
trois charge* de livres pour faire
la ccrctnonic de ma converfion,
quelques cenfeurs de ce temps
CHAPIT&B VI.
341
ft aparc , ferc en gros : quœ non profunt finguta^
Mulia juwani, il a fallu ufer de mefme dextérité
contre cet orthodoxe, & effleurer les. matières, fans
deûnefler à bon efcient fes argumentations ferrées,
qui prouveroient toute l'orthodoxie. Quant à Ri-
cheome, les Hérétiques font contraints d'advoiier,
que c'eft le ilyle le plus courtifan qui foit forti en
lumière de ce temps, pour le moins la préface : fi
on dit qu'elle n'eft pas de lui, fi elle eft tienne ou
par don ou par achapt. Si le corps de Pœuvre eft
groflier, ne voit-on pas la jeuneiTe de ce temps por-
ter du linon empezé au collet & aux poingnea,
bien que le corps de la chemife foit de grofTe toile
& pourrie, & aufli peu coufuë aux extrémités,
comme ce livre à fes prolégomènes ^ Ne fait-il bon
voir ces trois bataillons, qu'on ameine devant le
Roy, pour lui faire recepvoir les Jefuiftes? Car à la
veriti trois bataillons, de huid mille hommes cha-
cun, accompagnez de cinquante Canons & leur
fuitce, feroient bien autant perfuafifs pour le moins,
& feroyenc mieux taire TAdrocat Arnault que le
livre de la Vérité défendue. Or pour fuivre mon
propos, je prins mes lunettes, comme quand je joue
aux dez, & voyant de prés ces bataillons, dés le
premier rang, je ne vids que des croquans, qui por-
toient morions dorez d'or de feuille, mais tout fert
aux guerres civiles. A la telle je vids un bel argu-
ment, pour prouver les miracles : La Nature peut cecy
ou cela : Contre fon ordre font advenues autresfois
telles ou telles chofes : Ergo les miracles des Ardil"
lieres ne font point faux. Les enfeignes eftoient de
beau taffeus, & bien neufves. Celui qui portoit la
Colomnelle, en voulut faire des tordions à la mode
de Paris, & la pafler fous la jambe, mais il l'em-
342
tCPESSlON DV IIECR DE SaVCT.
brena route : car \ï fe trouva une pierre, qui le fit i
broncher. C'cft la confefilon de defuna Beze, & h
telhmenc qu'il fit en mourant par lequel il donné
tout à fa femme, & le reilc aux Cordeliers, menï^
bon Catholique Romain & ce qui s'enfuît. On m^
dit qu'un vieux Herefiarche a leu ce rraiatf av6Ë
beaucoup de plailir, & y veut faire refpondre Pafie's
vent; mais peut eftre il crèvera d'en rire, & Vt
feroit un bel argument, pour prouver les miracles^
qui eft le fujeft de ce livre. Je fçai que force Cadttf^
liques ont trouvé monftrueufe la fuppofidon de cetn
mort; mais à un livre qui tnide des mervcilte^l
fam-il paB un difcours merveilleux? Moy je xietf
& maintiens aulfi vrai que les autres miracles qnS il
Beïe eft mort. Premièrement par l'argument par
lequel nous prouvons la TranfubUantiaiion. Dùu
r^.., f^ir* »>/./ *a m»r, Pr«o .'/ .d m».. D..'-
CHAPITRB Vf. 343
tkn trouva en Crecce, n'aie pas fait grand bien à
refiabliilemenc des MefTes privées ? car tout le inonde
n'a pas refpric, en voyant la lettre par laquelle ledit
Saind Clément advertit Saind Jaques de la mort
de S* Pierre, de fçavoir que S* Jaques eftoit mort
fepc ans devant l'autre, & auili le mefme conte
9 Pierre de la mort de S' Jaques. C'eft bien à un
honnefie homme de fçavoir lequel a dit vray, ou
Anadet, qui fe dit fuccefTeur de S^ Clément, ou
Irenee & Eufebe, qui difênt que Clément fut fuccef-
fêur d'Anaclet, lequel efcrivic pourtant une belle
lettre audit Clément après qu'il fut mort. Il parle
du temps de S*-Pierre, trois cens ans avant que les
Chreftiens eufTent aucun Temple. J'allègue ces chofes,
comme auffi ce bon Père, qui efcrit trois cens ans avant
Conftantin, & ne laifTe pas d'appeller Bizance Conf-
tantînople ; pour faire que Ton ne fe mocque pas de
la lettre que efcrit à la Vierge Marie, lui des-
diant fon livre, de celle que Jeius-Chrifl a efcrit à
trois bons Catholiques, trouvée foubs la croix d'Azé
en Poiétou par un Marefchal, profnee par les Curez
des ParoifTes. Mais pour ne faire point tort au
chapitre des miracles, & pour vous montrer que je
ne fuis pas converti fans fcience , j'ay leu prefque
tout BeUarmin, & me fuis bien engardé, (eftant
refolu à me convertir), de lire Wytaker, Lubert, ni
Raynoldus. J'ay les belles déclamations & fictions
de Campianus, où j'ay veu tant de Martyrs de la
nouvelle Eglife Catholique. Il fait bon lire ce livre
fans l'examiner. J'ay plus fait ; car j'ay bouché mes
oreilles, comme l'afpic contre les enchanteurs, oyant
un Hérétique, qui me vouloit montrer tous ces Mar-
tirs eftre faux, & m'alleguant qu'il falloit deux
marques aux Martyrs : l'une la pure querelle de la
Ï44
o^^FES5IOK
I atBfK DK SAKCT,
Religion, l'aucTË qu'il Toît abroliunent i fgn duKxdtia *
vivre ou de mourir; que penei eum fit Uherum futt
viltr necififug urbiiriitm jtifques à 11 mort. Je mc mU
à jurer que h Roine d'ElcolTe eftoit vrayc Mar-
tyrt: : ^A, dit IHeretique, laiftrable Heligioit. qui nu
point de Martyre ni pluf pu/e qu'un* hointciiit. m
plus chajlt qu'une puuiin. Je faillis le iVippcr, mais
c'ertoic un homme d'cl'pce. J'ay Icu Ici lerinons
amuureux de Moolieur S' Panigarole, & ne croy
pciinc ce que les Hérétiques dilcni de fon bardachr.
QuAiu à in maillreire, pour Uquellc il commaDça
fon i'errooti ainlî : C'tj! pour vout, belle, qu4 je
meurs, je ne reprouve point cette gaianieric; car il
adjoulU quelque paufe après, difoit Jefus-CkriS à
Jon Eglîfe. C'a eftd un hirdi Prefcheur, & toutes
fois il n^a pas elle lî hardi, que je n'aye leu en fes
leçons faice8àThurin,queeacorquelcsSaintsfoyeni
CHA?ITRB VI. 345
toujours refolu comme les chefs du Saind Parti,
que im magiu's voluiffe fat efl^ qu'es grands affaires
c*eft aflfez d'avoir bonne volonté. Si ne me fuis je
peu tenir de rire en lifant le lambonicum de Michau
contre lui. On fçait que la Sorbonne lui a deffendu
d'eicrire fur une lettre de Monfieur le Conver-
tifleur, mais par tout il y a de l'envie; mais je
Uafme en la réplique de Michau ce qu'il dit, que
les boulangers font de Troye en Champagne. Mi-
chau ne fçavoit pas quils eftoient venus de Lyon,
où ils n'avoient peu demeurer pour eftre trop prés
de la Provence, d'où à toute heure venoient qui
tvoient veu Maiftre Augufte fur Tefcbaffaut ou à
Teichelle. J'ay leu Pentree de Doremet, mais il
m'ennuya dés le commancement. J'ai prins plaifir
aux façons d'argumenter du jeune Sponde, car
nous avons Sponde le jeune, comme Noftradamus
le jeune. On dit aufli que la vefve efcric. Il y en
aura bien d'eftonnez, car on penfoit qu'elle euft
desjà mis tout en public. Je n'ay point parlé des
Traiélés de fon mari, pour ce que les premiers gaf-
tent les derniers, lefquels ne femblent point faits de
fi bonne humeur, ni de fi bon cœur que les autres.
Ceux ci font pleins de difcours agencés feulement
pour l'apparence , oratione in fpeciem compcfita :
les autres, ad fidemfaciendam. Mais le jeune, pour
perfuader, traidant des cymetieres facrez, tire
de l'eftenduë de fon livre cet argument confequen-
tieux : Les Juifs, dit il, ont elle curieux des fepul-
chres, comme il paroill par beaucoup d'hiftoires
alléguées à ce propos. Les Turcs tiennent les cime-
tières facrez, & vont en voyage au tombeau de
Mahomet. Les Payens ont fait de fi belles pyra-
mides, ont canonizé leurs morts, & leur ont
34^ COKFBSSIOK DU SIBVR OB «ANC
ordonné des fupplicttions ; Ergo les Chrefiiens A
vent faire de melme, pour reflTembler aux Juifs, i
Turcs & aux Payens. Hais pour n'ofter à pcrfoonj
riïonneur qui lui ell dcu, nous avons bien
que ce labeur efl de M. Rcymond, ou pour r
dire de fon hoile, auquel on attribue auflî rFpifti
liminaire de Richcome. Quoy que ce lbii,tousden
enfemble m'ont appris de belles chofes, comme le
premier, qu'il faut porter le Pape fur les efpaules.
Les Romains, dît il, eflevoienc leurs Empereurs fur
le bouclier, & le portoîcnt fur leurs efpaules; lef. ■
Payens le fatfoient aux Druytlcs, aux Vellales. Loita
Romains faifoîenc porcer leurs litières par deseJclapfl
vcs. Ceux de Tangoa à la Chine portent ainfi lemM
Religieux, & les payfans de Xainflonge fe font poi^V
ter le jour de leurs nopces, comme aufli foni cenH
de Lorraine à leurs efuoufees : Erao un dnir aidB
CHA?ITR£ VI.
347
meurtre qu'un bon Catholique avoit commis : // ne
faut pas^ dit il, faire difficulté de faire perdre les
biens à ceux defquels la vie efl condamnée^ ni de
condamner à mon les particuliers^ defquels le corps
gênerai efl condamné entre nous. Il n'a pas mis cela
en fon livre, pour ce que TEdift n'eftoit pas encor
modifié. J'ay leu de plus un livre de fa façon, pour
effacer la mémoire de la PapefTe Jane. Et pour vous
montrer que j'ay bien eftudié, & de plus ay intel-
ligence avec les dodes, je lui ay envoyé une epi-
gramme fur ce fubjed. Il commence : Fœmina quod
mentita virum. Vous le trouverez en fon lieu au livre
des Epigrammes, Il eft bien de ma façon, & attends
la refponfe.
Chapitre Septiesmb.
De l'impudence des Hagaenots.
■ Prince 4111 voudra tegaer
{ fans qu'on le barbouille par
l'eqaiié & fans élire controllé de
"i parole de Dieu, it faut qu'il
^xierminc les Huguenots. Car
gloire
CHAPITRE VII. 349
imprimez, deux mois après les grandes batailles
ft îuftiœs de la S*-Barthelemy ; en mefme temps
furent fi impudents de demander à Millau, & fe
faire ordonner une paix, lorfqu'ils n^avoîenc que
quatre ou cinq places, plus advantageufe pour eux
que la dernière paix, que leur a concédée la Cour
de Parlement. On ne fçauroit croire combien peu
de refpeft ils portoient à la Reine, & aux Confeil-
1ers d'Eftat qui Paccompagnoient. M. de Pybrac
avoic ufé deux paires de topicques, pour confhruire
une oraifon, laquelle il adrefTa aux Députez des
Huguenots en la prefence de la Roine. Toute
l'afliftance fut rangée : la Roine fe frottoit d'un
mouchoir, le Duc de Montpenfier pleuroit, Riche-
lieu foufpiroit, l'Abbé de Gadaigne ne montroit
que le blanc des yeux. Quand ce fut au dixi,
la Roine demanda : Eh bien^ mes amis^ que pouve^^
vous dire à cela? Au lieu de refpondre une autre
harangue bien faite, voici la refponfe du boiteux
la MeaufTe : Madame^ fi Monfieur que voila a bien
efludiéy eft'ce à dire que nous mourions pourtant?
Le mefme boiteux paflant par la chambre des filles,
oiiyt Atrye qui difoit, Faut-il que nous foyons
confinei en cette maudite Gafcongne^ pour trois ou
quatre efpees roûillees des Deputej? — Afademoifelle
(ce refpond le boiteux,) elles ne font pas fi fouvent
fourbies que vos engins. La pauvre Atrye fe plai-
gnit de TefFronterie des Huguenots, y adjouftant la
refponfe du Comte de La Rochefoucaut, à qui,
comme elle demanda de fes reliques, qu'il avoit
defrobees à St-Martin de Tours, le Comte ref pon-
dit, Ouy m'amie^ Je t^en donnerai qui feront miracle^
fi elles te font revenir les tetins durs^ comme à pU"
celle. Or je dis & maintiens que ces gens efloyent
350 CONFETSIOK I
I SIEUR DB IaKCT.
muins hùiiKiw que putains, puifqu'ils faifoient r
gir ces Dames. C'cft un grand cas de leurs hu<ft4
dielTes eJîroniees, de leurs rel'ponles hardies, tlm
n'cft pas croyable comment ils ont lemi telle
plus grands Princes par répliques brufques
celle du Prince de Condé à la Roîne Merc, iaqut
voyant pafler une irouppe de cafaques blanches, ]
reprocha que ces gens elloient meufniera. Ouy^ Ht '
le Prince, Madame, pour loucher vos ajnes. he
conte eft vieux, comme aufly l'imerp relation que le
Comte fufdit donnoit du moi de Catholiqu»
Romain en bougre univerfel. Le mefme RilU
l'enqueranc puurquoy il ne rccognoîll^iii pas ifl
Vierge Marie pour Roiae du Ciel, Pour ce. dît lu
Comte, qu'un Ji beau Royaume que ctttui là nr rfsJM
pas lomber en quenouille. Pour marques plus frail«fl
elles de leurs audaces, le Roy, pour lors Roy àg^
CHAPITRE VU. 351
Bernard à qui le mefme Roy parla un jour en
cette forte } Mon bon homme ^ û y a quarante ù-
cinq ans que vous eftes au fervice de la Roine^ ma
merej & de moi ; nous avons enduré que vous ayei
vefcu en voftre Religion^ parmi les feux & les maf~
faeres; maintenant je fuis tellement preffé par ceux
de Guife & mon peuple ^ qu'il m'a fallu maugré
moy^ mettre en prifon ces deux pauvres femmes &
vous : elles feront demain brujlees & vous auffi^ fi
vous ne vous convertiffei. — Sire^ refpond Bernard^ le
Comte de Mauleuvrier vint hier de voftre part pour
promettre la vie à ces deux faurs, fi elles vouloient
vous donner chacune une nuiél. Elles ont refpondu
qt^encores elles feroyent Martyres de leur honneur
comme de celuy de Dieu, Vous m'avei dit plufieurs
foiSf Sire^ que vous aviei pitié de moy^ mais moy
fay pitié de vousj qui ave^ prononcé ces mots : je
fuis contraint : ce rteft pas parler en Roy, Ces filles
& moyy qui avoiu part au Royaume des Cieux^
nous vous apprendrons ce langage royaly que les
Guyfards^ voftre peuple^ ni vous ne fçauriej con^
traindre un potier. Voyez F impudence de ce beliftre.
Vous diriez qu'il avoit leu ces vers de Senecque,
Qui mori fcity cogi nefcit^ on ne peut contraindre
celui qui fçait mourir. Or il a paru encore plus
d'effronterie à ces gens au dernier traidé de paix, &
aux AiTemblees qui ont duré quatre ans, où ces
opiniaftres ont impudemment refifté, non feulement
aux plus honneftes Députez que le Roy put choifir
en fon Confeil d'Eflat, mais auili aux plus grands
Seigneurs de leur parti, lorsque que confiderans les
affaires du Royaume, ils les vouloyent ployer à
quelques honneftetez. Vous voyez paroiftre d'entre
eux un front d'airain qui refpondoit franchement :
^52 COK'FESStON DU S1£UR DE SANCT.
Ces propojinont lu rtfpondent pas à la bonae opi-
nion qi/oni pris de nous ceux qui nous ont envoyej.
On demanda l'explicacion de cela, La Vallierc
s'avance, & dit en explicant : Cela s'appellt. Mef-
fieurs, trahir les Eglijts d£ Dieu. J'oiiys C« joun
Monficur de ViUeroy, qui contolc commeni lui avec
MciTieurs de Rhofny, de Thou, &. autres, s'eftant
abbouchez avec quatre de ces mal honnelles gens,
cependant que Calignon de la part du Roy voulmi
adoucir ces efprits par fou bien dire : le gros Cha-
rnier, ayant mis fon manteau fous fes felTes^ aroti le
CDudc gauche avancé prefqu'au [milieu de la table,
de l'autre main faifoit fes ongles avec des cyfeaux,
le^ coupcaux defquels voli
bùuche de l'orateur : ui
Rhofny, & en
pouvoir dire tit
à la mouilache de U
donna dans l'ceil de
CHAPITRE vir. 353
Courtifans s'eftans dits plufieurs fois Tun à Taucre :
Frere^ je te tiendrois pour brave ^ fi tu voulais aller
demander le nom de ce vieux Herefiarque^ D'O, qui
fe voulut montrer plus impudent que les impudents,
s'en va dire de caprice au plus vieux : Mon Gentil"
homme f ces honnefles gens ir moy fommes en peine
de fçavoir vôftre nom, — Si je fçavois^ dit le vieillard,
comment vous appeler^ je vous rejpondrois : Je fuis
bien Gentilhomme^ mais non pas voflre, D'O répli-
que : On m^ appelle O. — £>o;ic^ditle Député,/ voiw
aviei efté aux batailles^ vous me connoitriei. Pour O
il efl mieux cogneu à la chambre des Comptes que
là ou je vous dits. Je le connois pour un lero qui
fait compte avec tous les autres, & qui tout feul ne
vaut rien. Voila les compagnons du Cabinet, qui
s'efclattcnt de rire, & le meffager fort eftonné,
auquel le vieux Député adjoufta : Allei^ mon ami^
allei tuer quelqu'un^ afin que le Roy vous donne
une grâce ^ autrement vous n'en ave^ point. Le Sieur
de Believre, defpcfché par le Roy vers le Roy de
Navarre au Mont-de-Marfan, voyoit tous les matins
par la feneftre de fon logis la Comtefle de la Gui-
che, lors garce en quartier, qui alloit à la Mciïe,
accompagnée d'Efprit, de la petite Lambert, d'un
More, d'une Bafque avec une robbe verte, du magot
Bertrand, & un page Anglois, un barbet & un lac-
quais. Ce Sénateur remontroit à un Huguenot leur
défaut en ces termes : J'ay veu plufieurs fois de mon
temps quelques amies de nos Rois^ mais les plus
grands^ voire les Princes^ eftoyent bien heureux de
guetter P heure qu'elles for toyent de leur logis ^ pour
leur faire honneur; je voy cette femme ^ qui efl de
bonne maifon^ qui tourne ir remue le Prince comme
elle veutj la voila qui ça à la Méfie un Jour de fefle^
n. a}*
ÎÏ4
N'PESSIOK DU SIB0K DE SA
mcompagnee pour tout pollagt d'un fingtj d'un àm*-
bsi, ù- d'un bouffon. — lAonfieur, répliqua le Hu-
guenot, c'e/J qiien louu eettt Cour il n'y a fingt,
ny barbet, ni bouffon que ce que vous voyej. Le bon
li(»nmo fut eftonné, mais il le fut bien davantage,
qiiijid il fçeiit la frizarde de Sainâ MefTani fur la
joui: de Madame de Duras.
Chapitre Huictiesmi.
Det Martyrs à la Romaiiu.
B tout les livres qui peuvent
&ire un Hereâque, ou au moine
duquel un bon Catholique Ro-
(i I. main fe doit garder, je n'en
y j\ trouve pas un fi dangeteux, après
_^y^A la Bible, que ce gros livre des
'^'^1 Martyrs. Car c'eft grand cas de
voir fij ou fcpt mille morts, qui ont toutes les mar-
ques du vrai martyre, à fçavoir la probité de la vie,
la pureté de la caule de la Religion, non mellee d'au-
tres forfaits, les difputes, les follici talions, & pour
dernière marque, c'eft d'avoir eu le choix de la vie
ou de la more jufqucs à l'extrémité. Cela nous a
olté beaucoup de gens, qui ont veu autrefois ces
Prefchcurs, ayant pour chaire l'efchaffaui, refchelle,
ou le bûcher. Ce font ces fuggeEles, oh l'on dit que
les vaincs efperances font place i la vertu. On fe
conduit bien plus prudemment aujourd'hui en Efpa-
gne& en Italie. Il ne palTe année, qu'il n'en meure
lousjours quelque cetitaine \ mais leur conftance n'a
de celinoins que les geôliers & les bourreaux, qui
ne difcouvrironi pas le fecrei, comme les grues
d'Ibicus. Il y a trente ans qu'on lailToic defrober des
];6 coNfBfSioM ot; iiiua di ianct.
grcIFes des Cours de Pulemencs tous les procës
criminels defquels ce dangereux livre etl plain, 8c,
vérifié. Mais auSî bien n'y a il pas moyen d'en
L'ibiuffer la mémoire, & faire conter telles chofa
pour fables tant que les tefmoins occulaires vivront?
Que faut-il donc faire? je fuis d'advis que l'on
chiiirifTc quelque ftyle bien fleury, comme celui du
Comte de Permi^on, que nous lui faJIions faire un
livre, duquel le tiltre foit : Les Martyrs à la Ro-
maine, où nous ne coucherons point les Martyrs de
l'Eglilb primitive, parce qu'ils font en débat entre
les autres & nous ; & puis ces beaux Reformez
difent que l'Ëglife a elle reformée aulli longtemps
que perfecutec, fuivant ce que dit le Pape ^vellrê,
quand on l'arracha des rochers de Soraâe : AtUtM,
■il, la pauvretéj adieu la pureté. Il leur faudra
CHAPITRE TIII. '^fj
eux,ftlesTOuloir convertir: ces habiles hommes y
ont pourveu, ayant drefTé à Rome & à Rheims deux
Collèges de jeunes gens Anglois, qu'ils ont choifis
d%umeur melancholique, la plus part bannis, & en
cokre affamez, & quand on les met dans ce Collège
^omme efcrit Martinus Navarrus au troifiefme livre
dés Conciles), cela, dit il, eft eftabli par une Con-
fticution Papale, que qui veut entrer dans ce Col-
lège, eft tenu de jurer qu'après certaines années il
ira en Angleterre, pour y publier ce qu'on lui dira.
Et comme on a veu qu'il en eftoit forti quelques
efdats, teûnoin le Card'mal Alain en fon Apologie
pour les Séminaires, le Pape a redoublé la peniion.
Maïs il ne failloit pas que Baronius en fon Mar-
tyrologue romain mit ces mots : Sanéfos^ fanûos
fanâïijfimosque Sacerdotes a fanéïa focietate Jefu
Sanéiis conditionibus ad martyrium acceptiffimas
Deo hoftias in facris collegiis Romano & Remenji
velut agnos innoxios in facris Jeptis faginatos &
quod fanéîœ Romanœ Ecclefiœ fidem tenerent ac
ft^dicaretit in Anglia occifos effe; Que les très
fainéls Preftres, comme agneaux innocents, engrail-
fés dans les facrees cloifons par la fainte Société de
Jefus par faintes inftruétions au martyre, facrifices
agréables à Dieu, & facrez Collèges de Rome & de
Rheims, ont efté mis à mort, parce qu'ils tenojrcnt
& prefchoyent en Angleterre la doôrine de fainte
Eglife Romaine. Je voudrois qu'il n'y eut point là,
comment ils font envoyez de la Société des Jefuiftes,
pour ce qu'on les accufe affez d'eftre libéraux du
fang d'autruy , & que fe convier au Martyre eft loiia-
ble, mais non pas d'y envoyer les autres ; & puis les
nourrir comme hofties à Dieu, il fcmblefoh que
nous les facrifiafTions ; cela fentiroit un peu le
OtJFESSION DP SlïUR'l
a
Îî8
Baalpeor apris, ce mot fepiif (dnifons) fentirott
fa prifon pour leur faire tenir leur ferment. & là
deffus les Hérétiques diroîeni que ce Dieu à qui
nous les ficrifions, que ce feroit au Dieu de ce
ficcle, ou au Dieu en Terre, car celui du Ciel ne
veuc plus de facriâces fangUns, & n'a jamais voulu
des humains. Mais ce qui gafte toui, c'eft cc/agiiKf
rot, engraifTés. Je demandai à rArchevefque Vall^-
grand, que c'eftoit à dire : il m' alla quérir les Satur-
nales de Lipfius, au chap. 14 du premier livre.
Là. j'appris que ce terme eftoit particulier pour Ict
gladiateurs, qu'on amaflbic à Rome d entre les coi»-
damneï OU efdaves miferables, & puis on les nour-
rifToit dans des Collèges facrés, pour le moin* exé-
crables. & les nouriifoic on avec cecce fagine, CW
engratflement, afin qu'ils achecalTenc leur graiffle par
Ipiir mr.rr dnnt À\i PnwMV» -
CHAPITRE YIIU 359
defcouvrant les aSaires. Il fe faut contenter de ce
gros latin de Vicaire, duquel ufe Monfieur le Con-
vertifTeur en difputant. Et pour fuivre noftre pro-
pos, Q faudroit gaigner en Angleterre quelques
Jufticiers, ou quelques Miniftres, lefquels quand on
pend nos gens, leur parlaflent tout haut de quelques
poinds de Religion; & non pas d'entreprife de
guerre, fedition, de pétards, de faulcUTes, de mines
à faire fauter tant de gens, & de ces fubtiles poi-
foQS, que leur fournit l'apothicaire du Pape. Après
il faudroit qu^on leur baiîlaft à Tefchelle le choix
de fauver leurs vies en fe révoltant; car ces Héréti-
ques ne content pour Martyrs que ceux qui ont eu
un tel choix, & defquels le procez monftre, qu'il
n'y a que le feul poinét de la créance qui les face
mourir. Suivant cette reigle, ils n ont pas voulu dans
le gros livre de leurs Martyrs ceux qui font morts
pour leur Religion, ayant le fang efchauffé à la
deffenfe, mais feulement ceux qui n'avoient armes
que la prière, comme les dix fept mille Albigeois
efgorgez en un jour, & trente ou quarente mille
âmes defpefchees à la fefte & aux feries de Saind
Barthélémy. Pour nous, qui avons meilleure veuë,
je ne fuis pas d'advis que nous y regardions de fi
prez, mais que nous enrollions, par faute d'autres,
en noftre Martyrologue tous ceux qui font morts
aux batailles, aux fieges, aux efcarmouches, & aux
duels, fi ç*a eflé contre les Hérétiques, & puis tous
ces Hyrlandois, leurs femmes & enfans, qui meu-
rent de faim par les rues de nos villes. Et ceux là
font vidimes du grand Sacrificateur Sanderus, &
autres Dodeurs, qui après & nonobflant plufieurs
pardons, leur ont fait pratiquer la bulle du S' Pcre
Pie Quinte, comme la recite Bellarmin, & félon cela
u
n'ont pas fait difficulté de rompre la foy à leof'
Roine. El quant à ceux Ik qui fe liigeoycnt d»n* Irt
niches du Pont Neuf, lors non achevé, & (jiii au foir
& la nuiil prenoient pu- un pied ceux qui palfoient
fur le pant, & le; ayant prccipiiez & durpouillci ~
ieccoyent dans l'cju, k ceux là il on fait quelque di
culcé de les fanaiiicr, U faut avoir efgard t
preluppofoicnt ne fjirc mal qui des Hérétiques, it
y en a qui crient que Icî Evcfques les debvroient
nourrir; mais je croy que U plus parc ne leur bait-
icni rien en bonne intention, pour en faire des facri-
lices de bonne odeur, ï remplir le livre ^ & de ce
rang pourroyeni bien élire tant de pauvres, que Ht
bruller l'Evefque lie Mayence, à bonne inieniiuii
auill, pour efpargner les bleds. Que li les Hugw
nois refufent ceux ci à la montre, Il ferons noi
oalTer Marivrs. mau^ré eux. ûatix aae am
CHAPITRE TIII. 361
achever, & eux difent qu'il en mourut blafphemant
de rage. C'eft une genciUe phrafe que nos Doreurs
pratiquent aujourd'hui pour le Pont aux Meufniers
envers quelques uns, je dis mefmes Catholiques
bigots, qui croyent que Dieu ait abyfmé ce pont,
commançant par les deux maifons qui touchent à la
Vallée de Mifere, lefquelles efloyent Tefchaffaut de
la tuerie, le jour propre que les enfans des deux
maifons fe marioient enfemble, & que cela a efté
une notable vengeance du Ciel. Nous difons au con^
traire, que ce n'eft pas pour les cruautez exercées,
mais pource qu'on n'y en exerce plus, ft là nous
nous renforçons huift ou neuf cens Martyrs d'eau
douce. Mais faut-il cercher de ceux qui font morts
de fang froid } Taflre le plus luifant de nos Martyrs
c'eft la Royne d'Efcoffe, qui a voit fait fauter fon
mari, condamment refoluë à cela, contre toutes les
mignardifes& humilitez d'amour qu'il lui montroic.
Je ne puis ici paflêr fous filence ce que me refpon-
dit un Hérétique, à qui j'alleguois cette Sainde :
Malheur eufe Religion ^ dit- il, qui r^a point de Mar-
tyre ni plus chafle que celle là^ ni plus pure qu^une
parricide, C'eft tout un : à la vérité elle s'entendoit
un peu aux artifices de feu. Mais elle eft canonifee,
& fera dans l'Almanach, à la barbe des Hérétiques,
logée auprès de Sainétc Marie égyptienne, & pour
la diftinguer, elle s'appellera Sainde Marie de la
Sauciffe. Nous mettons à fes pieds Père Edmond
& Hard... avec leur compagnie de cent &dix, félon
le conte de Baronius. La plus part de ceux ci
eftoyent braves foldats, bons petardiers du Sémi-
naire de Maurevel & du vieillard de la Montagne,
qui pour une fort légère fomme vous defaifoyent
d'un homme qui vous fafchoit, ayans tousjours
,6.
NFESSION DU SIEUR DE SANCT,
1 contre l'Herclie. De ceux li il faut croire
que leurs âmes font faurees, car ils les ont voulu
perdre, & vous fçavez ce qui eft dit de ceux qui
veulent perdre leurs amcs, que qui voudra ptrdrt
fnn ame, la perde. Maurevel fut Catholique fi zélé,
que en haine des Mefcreans, avec un peu d'ar-
gent que la Royne lui avoit promis, ayant failli
à Miincconcour de tuer l'Admirai, il fit pourtant un
facrificc fanglani & de bonne odeur à la dite Royne,
en tuant à fes affaires Mouy, qui de long-temps le
nourrilToit, le monioit & lui donnoît des chauffes.
Il fut martyrizé par Moiiy le fils, qui y mourut
aulTi. Quant au vieillard de la Montagne, c'elloit un
habille homme, & foie dit en pafTam, qu'il fut le
Patriarche des Jefuifles: car en enfermant dans fon
Paradis contrefait fes alTaflins zelex, il les envoyoit
" chefs des
CHAPITRE VIII. 363
les fœurs prenoyenc la peine d'enferger, & quelque-
fois gehenner les prifonniers Huguenots. Nous avons
des plus nouveaux, ChefTé & Maillé Benharc de
Vendofme, & cette autre belle lifte de Pleffis de
Corne, Fontenelle. Si ne faut il pas oublier nos
Martyrs de Blois, de qui le père fut auffî Martyr,
aufli canonizé à Rome, foubs le nom de Sainâ
François le piftolier. Leur pofterité fera canonizee
demefme, fçavoir Saind Henry des barricades, &
S^ Denis Capitaine & Cardinal. D^une autre bande
nous mettrons Moniieur S^ Clément, & Moniieur
S* Sponde, l'un martyrizé par le Procureur General^
l'autre par fa femme. Ces deux zelez perfonnages,
que je mets enfemble par defpit des Huguenots, lef-
quels jaloux dequoy Tun fut canonizé, & l'autre
prés de là, les ont mariez en Tepigramme fui-
vante :
Qui modo Clementem voluifii jungere Divisj
Et Spondam Divis annumerart potes.
In vitas Regum fuit infidiator uterque :
Ille animam Régis fufiuUt, hic animum.
Toi qui as voulu canonifer Clément, tu peus bien
aufli canonizer Sponde; Tun & l'autre a drefl*é des
embufches à la vie des Rois.: l'un a ofté la vie au
Roi, r autre lui a ofté Tame & le cœur. Que de-
viendront S' Pierre Chaftcl, S» Bourgoin, S' Gui-
nard, S' Barrière, S» Joanille, S' Garnet? Encor
y aura-t-il place pour le Prefident Briflbn, pour les
cinq Martyrs qu'ils pendirent & le Sainft Boureau,
qu'ils pendirent avec eux? Et à ce propos le feu
Admirai, faifant pendre aux fécondes guerres douze
fainds Cordeliers de Chafteau Vilain, qui n'avoient
pas aflbmmé des fains, mais des malades de Tarmee,
î*4
N-FBSSION DU ftCVK DI SANCT.
les pauvres Martyrs eurent ce defpUfir, que dexdP'
Ae leurs frasres briguèrent la commiifion de fjîre
l'office. Sur !e débat a m bilieux, leur fut baille i
chacun un cordeau, pour voir lequel des deus feroii
le plus habile à fucceder. Jamais Retlaires &
Laqueaires ne firent pliiî de tordions contre Seci^
teurs & Myrmillons, que Srem ces deux paillards,
defquels enfin l'un fut empoigné, comme il vonloït
faire un pafle deiToubs. Le viftorieux ayini tort bien
eftranglé fon compétiteur, pendit tout le rcfte. Et
eftoic le pendeur&les pendus tout d'une livrée. C*'
rejetion de S' François, tant que la guerre dura
chargea ni d'office ni d'habit, & fçachancenquelqi
lieu un grand jeune novice, qui s'eftoït fauve, "
voya quérir pour eilre fon vaiet : qui faifoîent api
la belongne fort joyeufemcnt, & fervoyent moult
e. Et
CHAFITES YlII.
3<5
gongne il en baifa une entre deux cftrons. Ce fut
une grande perte pour TEglife, car il avoit renié
Dieu de bon cœur, qu'il mettroit la guerre tu France
contre les Huguenots. Ce fut une belle fin d'homme,
& en bons termes. Croyez qu'il ne juroit point en
Huguenot, non plus que Cotton, quand il receut
un coup d'efpee à la fefïè gauche. Vous avez un
notable Martyr en M. S. Baumier, duquel ce mef-
chant Fœneile nous a defrobé Thiftoire ; mais il a
oublié, ou n'a pas fçeu en la defcrivant, la diffé-
rence qu'il y eut entre la femme & la Comtefle de
Norton, fur la robbe & les cotillons que gagna la
médecine, en faifant & ne faifant point : & la Com-
ceflTe ayant déclaré à fon mary, qu'elle avoit faiâ un
vœu de chafleté quatre jours la fepmaine, fon mary
en fit un pour les autres trois. Elle en mourut de
dcfplaifir, & c'eft un Martyr à la mode.
Chapitre Neupvissme.
il
N jour qu'il tonnoit, Monfieur le 1
Cùnvcrcî fleur me vint voir, &
me irouva tout eftoimé, peu de j
Ktaps apriîs ma cunvufioa.
CHAPITRE IX. 3(^7
difputoit publiquement que l'Eglifé Romaine eftoit
l'Eglife de Chrift : Barriliere comme il commançoic
à propofer fes chefes : Salectes entrant en mefme
train, & ayant appris de fa femme, que quiconque
craignoit beaucoup Dieu craignoit auffi les hom-
mes, elle qui ne craignoit & refufoit homme du
monde eftoit hardie contre Dieu. Toutes ces morts
me vindrent en la penfee avec plufieurs autres de
mefme farine. Comme j^eftois en cette agonie, j'ap-
perçois M. Cahyer fe pourmenant en la baflTe cour.
Je lui cours demander qu'eftoit devenu le Miniftre
de Vaux. Monfieur^ dit-il, ce malheureux^ après les
belles promejfes qu^il avoit fait à Aîonjteur (TEvreuXj
& argent receu pour les exécuter^ il lui print une
fiebvre poltronne , & s'en alla dici en fon pais^
riant & braillant que la caufe de Dieu eftoit trahie
par lui^ & cinq de fes compagnons^ le f quel s il deji~
gnoit fans nommer. Il adjouftoic à cela que Dieu lui
feroit pardon, qu'il alloit à fa maifon, vendre fon
ame entre fes mains, aulli toft qu'il feroit à Millau.
Il s'offrit cependant à efcrire des lettres à Monfieur
d'Evreux, Icfquelles lettres portoyent créance par
quelque habille homme, & fur lesquelles Monfieur
d'Evreux defcouvriroit la prévarication de la dif-
pute de Nantes, & les autres préparatifs de Rotan
& de Serres, que vous fçavez. De bon heur, les
Huguenots ont éfté fi fimples que de refufer fon
offre, difant que le règne de Chrift ne s'eftablit
point par rufes. Je romps le propos de Cahier, &
lui demande. Mais qu*eft devenu de Vaulx? — Peu
de temps ^ dit-il, après qu'il fut arrivé à Milhau^ il
continua fes regrets & fes cris^ '& notamment le Jour
de fa mort y lequel jour il fe pourmena hors de la
ville avec fes amis^ fouppa bien^ & fe toft qu'il fut
tSSIOV DU SIE0K DE !
au hâ appelle fa- fernmf, lui dit qu'il/atlloù mourir,
prononça ce couplet du PJalmifi* :
Je fffty aujji J«^ tu aimti dt fait
Vrayr t^iiit^ ittiLuit la cùnfcienee,
Ce que rt'ay tu raoy, à qui tu m fiât
Voir Utfecreti ât U grand fa^ience.
El à ce mot il expira. Après y avoir refvff, je
repris la parole fit demandai comme fe peuvent aujour-
d'hui couvrir parmi eux Rotan & Serres & les au-
tres. Ces deux là, refpond Cahyer, n'cnt que faire
dt couveriurei; car tti font couverts de terre. Jt
vous dirai comment. Si lojl qu'ils eurent f^eu la
confeffion de Vaux, ils s'encouragent l'un Cautrt
par lettres, fe font eflire pour U Synode tialional
de Montpellier, avec refolution de paffer le Rubico/t,
CHAPITRE IX. 369
quelque choie auffî en voftre poulx ; mais je vous
prie gouiler mes paroles, comme remèdes lenicifs
& palliatifs pour voftre playe extérieure. Nulle vio-
lence [de] dehors, nulle promeffe, efperance ni crainte
ne peuvent changer l'intérieur des opinions. La
raifon feule qui les efmeut eft celle qui les arrache.
Aufli fa puiflTance eft la faculté des efperances & des
craintes, & eft & fe preuve à régir les aâions de
dehors. Quand je parle des craintes & defefpoirs,
je Tentends des affaires de ce fiecle : car à la vérité
quand il y va du fiecle à venir, lors Tefperance du
bien & la crainte du mal exerce tyrannie fur Tune
& fur les retraittes du cœur. Vos penfees vous
affligent : n'eftes-vous pas bien heureux de ne fentir
que le doux règne & la puifTance naturelle de vos
penfees, & non pas la violence des neceflltcz }
Sçachcz que prefque tous les hommes en font réduits
à ce poind, ou d'eftre en mauvais mefnage avec fa
confcience, ou avec les affaires du fiecle : mais pour
ce qu'il n'y a point de félicité parfaite, les fages
voyans perfecutcr la liberté de leurs penfees, s'en-
fuyent aux cachettes du cœur, & quand voftre con-
fcience ne fe peut unir aux condition du temps, fuyez
à ces cachettes des fages, afiervifTant à vous mefmes
les chofes defquelles vous eftes le juge, & aux
autres celles qui tombent fous leur jugement. Vos
aftions extérieures peuvent eftre jugées par ceux qui
dominent, & pource qu'ils en ont la cognoiffance,
vous ne pouvez empefcher que cette partie ne foit
de leur gibier, qu'ils n'exercent fur elles la recom-
penfe & la punition, mais ils ne peuvent exécuter
fur vos penfees, aufquelles ils ne peuvent faire le
procez. Je di ces chofes pour vous Se pour moy,
Monficur, pour vous prier que les combats de nos
II. 34
37°
COKIKSStO» DU StlOK DE Sa:
conrciciices ne fortcnt point lichors, & li k con-
fcicncc picquc pour cfclaiEcr, tic h pouvant rendre
raortc, il !a faut pour )c moins «rndormif. Cahycr
m'a dit que vous vous cftonnica pour dix ou douze
mores prompics de nos nouveaux eonveicis. Le
Baron de Salignac&tnoyfommcscncorcs en vie. Les
femmes de lui, de Salcttc, de Sponde, & MorUs, &
autres ne fonc pas mortes non plus. La raifon en dl
facile : ceuit qui font morts ont voulu laiiTer vivre
leur confcience, 8t elle les a niez. Il la hat donc
tuer à bon efcient, (comme je me vante d'avoir fait),
ou l'endormir par ftupidité, comme le Baron ou
coitiine fa femme & les autres par mille petits paffe-
temps d'amour. Tenez, je voua donne un pedt
centonet que je defrobaî à Lucaia.hicr au foir en
me couchant :
CHAPITRE IX. 37
Principibus pLuuiffe viris non ultima lauêéft.
Infoelix prohitas f imper laitdatur Cr algct.
NU hahet infoelix paupenas durius m fe
Quam quoi ridiculos homines facit improha vin us
Quos nuda immitis patitur ludihria vidgi.
J'en faifois davantage, tous de&obez en divers
autheurS) mais on m'eft venu appeller pour reconci-
lier un mariage defbauché. Enfin, Monfieur, voila
à quoi î'ay pailé le temps à voftre contemplation,
m'affeurant que vous en ferez voftre profit, comme
eftant cède médecine propre à vofire naturel. Car
au lieu d'eflire des amis miferables, miferos amicos,
tu aJUiétis infultabis [vous infulterez] aux affligez,
comme vous fifles bravement à Compigni, lequel
cftant matté de trois ans de prifon, ayant veu tant
de fois les voix mi-parties, la moitié à fa mort,
Tautre moitié à une vie pire que la mort, quand
vous vifies que la longueur eut adouci le procez
(comme il advient aux criminels), vous priniles le
temps de fa frayeur pour avoir de lui dix mille
francs, defquels vous vous rendlftes difpenfateur à
vos collègues : mais vous corrompiftes tous les
autres de paroles, & vous de la fomme. Bien filles
vous une faute de bailler un mémoire du partage
efcrit de voftre main, qui fut difficile à recou-
vrer. Je remercie Monfieur le Convertiffeur, & pre-
nant fon propos lui dis : Je vous ai dit ct% chofes
connue en confeffion; je vous recommande mon
honneur. Mais pour vous monftrer que vos enfci-
gnemens font femez en bonne terre, tant s'en faut
que je me vueille embrencr de Tamitié àts affligez :
j'ay appris de M qu'il faut manger les viandes
lors qu'elles font mortifiées, & profiter fur les
i?^
hommes quand ils fonc aiicndris par leurs milercs.
Et à ce propos je vous conterai uh brave trai<l que
je fi à ma féconde converfion. Nous cflionsàOrloinG,
l'AbbÉ du... & moy, quand le maffacre fe fit. L'Ahbtf
me confciilc de fortir en rue l'efpce à la main, &
faire le maflacrcur, poLir fauver ma vie. Voyant
que ce confeil avoit fuccedé, & que pour avoir mi»
mon efpce dans le Corps d'un pauvre chappcUcr
mort, i'eftois le bien venu parmi les tueurs, il me va
iouvenir du Sire... (à qui je dcvois cncor ma nour-
riture de quatre mois). Je m'envay à fa porte avec...
& autres compagnohs. Ce bon homme clloii à genoux
en fa cliambre, fc préparant à la mort. Quand il
oiiii ma voix à la porte, où il courut foudain, me
reeeut plein de joyc, & s'efcria tournant les yeux au
Ciel : 0 Dieu, tu m'as envoyé ett ami eomme lui
CHAPITRE IX.
37Î
lardoient pour un temps. Je me délibère de m'en-
durcir en pareilles refoludons, penfer peu au palTé,
fouvent à Tadvenir. Il ne me refte que deux petites
craintes : une d*£ftat, l'autre de Rdigion. La pre-
mière eil que fi les Huguenots fe ravifoient en leurs
affaires, fuivant le difcours du chapitre précèdent, je
voy que la meilleure pan de la France fuyroit
entre leurs bras. En ce cas nous fçavons, Dieu
merci, le chemin d'y aller, d'en venir & d'en retour-
ner, quitte pour contrefaire Ezebolius, & me veau-
trer dans un fàc à la porte de Saind Yon de la Ro-
chelle, en criant : a Chreftiens foulez-moi aux pieds,
qui fuis fel fans faveur : Cakate mefal infipidum^
Chrifliani. • La crainte de confcience efl qu'une fiebre
chaude me pourmeine, & trompe, comme elle fit
Morlas : au fort peut eftre que Dieu me pardon-
nera, n je puis, à l'exemple de ce bon compagnon,
donner des coups de pieds au Crucifix, en figne de
repcntance.
LES AVANTURES
DU
BARON DE FtENESTE
COMPRINSES EN QUATRE PARTIES
Les trois premières reveuis,
augmentées & dijHnguees par chapitres :
ENSEMBLE
LA QUATRIESME PARTIE
NOUVELLEMENT MUE EN LUMIERE
Le tout par le mefme ÂUTHEUR.
-^é^
^
q4U DEZERT
IMraiMÉ AUX OESPEKS DE l'aUTHEUR
M. DC. XXX
L'IMPRIMEUR AU LECTEUR.
BcTBUR qui cherches^ is- as
trouvé à rire de contes ejhigatj
du fcurrile, je te veux dire fans
le reprocher, que fi cet ouvrage
mjr ""^-^ mérite quelque gré, il m'en ejl
ew^rVl ^ deu plus qu'à l'Àuihear, leifuel
'< — --f-J^^^-t ayant perdu /es humeurs gail-
lardi-i. ou pour I âge, ou pour les nfiiûiaiUj avoit
condamné au feu ce dernier livre, fi bien quf mes
prières, & celles de plus grands que moi eftans
efconduites , je trouvai moyen d'en defraber une
grande partie par l'aide d'un Gentil-homme qui efioit
prés de lui, & lors efiant menacé que ce que je tenais
au^poing tout bourru & tout imparfait verrait le
jour, il a eflé contraint de faire comme la bonne
mère ne pouvant voir Jon enfant mi-parti. J'efpere
mettre la main fur quelques autres livres qifil nomme
T» iiioîa, déplus haut goufl que ceux-cy , fi j' en puis
venir à bout, yen ferai part au public : & qu'on ne
]78 L'nwcRtMïUfi. »\J LBcnro.
me die pas commt faifoii no^rt Auth*ur,qià« Iti plai-
fanis propos ejioieni âtjfaijonnti en un temps de
guerre ir d'affiiéHont : je dis es que j'ay appris de
lui-mefmc , qae lors Us irijiitjfes viennent aniffi riud à
propos que /j peur dans Us périls. Adieu.
LES AVANTURES
DU BARON DE FjENESTE
LlVIifi ■P%E^IE'^
PREFACE
K ^fit, hffé de difiours graves
& tragiques j itfi voulu recréer à
la defcriptlon de ce fiecle, en ra-
affant quelques bourdes vrayes.
l pource que la plus générale
différence des buts & complexions
des hommes ejl que les uns poin-
tent leurs defirs & deffeins aux apparences, <T les
autres aux effeéls, t'Auiheur a commencé ces Dialo-
gues par un Baron de Oa/congne^ Baron en l'air,
qui a pour Seigneurie Fscnelle, Jlgnijiani en Grec
paroillre; cetui^à jeune eventi, demi courtifan,
j8o PKKFACE.
demi foldat ; ir d'aune pan ua vieil Ctniii-hûnime
nommé Enay, qui en mefmt langue Ji unifie cllrc homme
confommé aux leltrtj. aux txperieates dt la Cour &
de la guerre: cettui-ci un faux PoUtevia, qui prend
occajion de la nncoaire de Fanafle pour s'en, donner
dit plaijir, & mtfme en faire pari è quelque voifin
qui pour lors efloit chej lui. Je dejire faire favoir au
Lcéteur que celui qui eferit cet chofet,fur louiei Us
partiel de la France affeélionne la Gafcongnt, fr en
fes difcouri communs a'ejlimt & ne loui rien tant
que les Cafcons, autant qi/foa ptui dijiingutr Us vices
& venus par naliont .' & mefirte i^tfl par le confeil
d'un des plus excellents Gentils-hommes de ce pays-
Id que ce petfonnage a ejlé choiji, comme l'efcume de
ces cerveaux bouillants, d'entre lefquelsfe tirent plut
de Capitaines & it Atarefehaux de France que d'au-
ARGUMENT.
B Baron de Fxnefte r
la guerre d'Aunîx, prend des re-
lais à Nyort : à quelque lieue de
là, fe trouve efgaré avec celui de
fes laquais qui moncoic à cheval
en fon rang : les autres deux
mutine7 d'un mauvais desjcuné
& dequo/ le Monfieur ne pariagcoïc pas bien les
heures, fuivoient i regret. Le Baron enfermé d'un
parc & d'une rivière, rencontre le bon homme
Enay, vcitu d'une Juppé de bure & fans foulicrs à
cric; il l'accofte en ces termes.
Rencontre d'Eiîay & de Faatfte qui couche
Centrée de dix ou dauje quereltei.
SKBSTB. Bon yor, lou mien.—
Enay. Ec i vous, Monfteur. —
V] [T^'.fgJj ^ F. Don benez-boiis enfi ? — £.Je
£ «j^^S^' ne vien pas de loin; je me pour-
'■ mené autour de ce clos. — F. Com-
ment Diavie, clos, il y a un quart
d'ure que je fuis emvarracé le
long de ces murailles, & bous ne le nommez pas un
parc. — E. Comment voudriei-vous que j'appellafTe
celui de Monceaux ou de MadrîcP — F. Encore
ne coudera il rien de nommer les choies pour noms
honoravles. — E. Il ferviroit encores moins qu'il
ne coufteroit. — F, Et de qui ell cecy? — £. C'eft
à moi pour voftre fervke. — F, A bous? [à part]
J'ay failli à faire une grande cagade, car le boyani
)84 AVAMURaS DU B*JlON CE FANbSTB.
fans fraife & ("ans pcnnache, je lui alluis demander
k chemin. ^ £. Mais, Monficur, où allez-vous
ainfi? Vous vous enfermez de demie lieuî; de ri-
vières. — F. Nous nous fommes cfRarci dans uii
bill^e il y a une hure ; car, pour bous dire, il mcft
fafchuK de demander le chemin, & mes bcilccs de
pied fonc demeurez arrière, hors mis ce couqutn trop
gluriux pour parler à un bilen, s'il n'y en a dus.
D'aillurs on ne peut faire marcher ce mefchant rcicx:
j'ai quitié à Surgeres mes rouiTens, en la compenio
de Monlur de Cantelouz,qui m'en aboie accommodé,
ils font miens & ne font pas miens, on nous les
garde pour une autre vegade, — E. S'il vous plaill
de venir vous repofer à une petite maiCon à mille
pas d'ici, nous envoyerons pour faire rallier vgllrc
train , & vous me ferez honneur & plaifir. —
<
LIVRE I, CHAPITRE I. 385
cabalier qui eft exterminé à ne foufirir d'aucun, &
qui a eu trente querelles pour un an ; car au premier
c'eftoit à qui en auroit au Varon. Mentenant il n'y
a plus preife, ils n'y voyenc rien à gagner. — E. Je
vous plains bien de tant de querelles; je me fuis
autrefois trouvé bien empefché d'une. — • F. Il n'y
a pas ourdre de pareftre en Cour que par ces
vroulleries : un mien laqué nommé Eftrade me ra-
pourta qu*un fouldat des gardes lui aboit auté une
garce : je m'aveilè tant que de lui emboyer le villet,
mais ce galland s'ennuya de m'attendre au pré
aux Clercs. Autresfois nous faifions à première un
Aboucat de Paris, ou aumens un follicitur. Il bit
que mon laqué me faifoit quelque grimace par der-
rière ; il lui donne du chandelier par la tefte & me
prit huift libres de mon aryent. Nous fufmes appo-
entez par la compenio ; il me pria d'ouvlier. Pour
l'argent, je luy laiffai bolontiers. Autre coup : un
fort honefte homme qui fuit Monfur de Cadeau-
bieux fe mocquoit de mon pennache. Je le tire par
la cappe, je le mené fur le pré. Nous desfimes les
voûtons, l'egullette, la jartiere & le ruven du fou-
lier; & là nous y fifmes, (à paroles, s'entent). Toft
après, un efcoulier me combia de jouer; j'eftois
en coulere d'aillurs pour quelque pic qu'un ezent
des gardes m* aboit donné à fon abantaye, comme
je cuidois entrer au valet de la Marquife. Je ref-
pondi donc à Tefcoulier que depuis la querelle de
TAboucat je ne joliois plus que je n'euffe l'efpeio &
le poignard nud à vout de tavlc : le ruftre me ref-
pond qu'il aboit de couftume de tirer trois coups
d'efpeio pour faboir à qui auroit le dai. Je répliqué
que je me defpoiiillerois de qualité de Gentil-
homme & d'autres grades acquis pour le convattrc.
II. 2J
î86
NTUR8S t>U I
OK DS rjIMESTII.
Ce fac redouvie que fant me dépouiller il me
vatieroLC vico coiii vcHu : • Cap de yim, te dis je,
iV faut que la beut tn dejcrubs lou fuit. • Il me
foubinc en chemin de la rigur des ordoBoaiKcs, &
partant, boulus adoucir l'alTùre en lui difanc : 'Quand
je ne propofe poini d toi, pourquoi ptopofti-tu à
moi? I Cela ne ferbic pas de rien ; nous en binfjnes
aux raens. Sur le vor de la ribicre il fc croube une
grande paillarde qui laboît quauquea hardes \ la bikac
lama au coulct du jeune homme, & je ne le boSlus
pas ciier entre fes vras. — £. Cela n'eft pas fans
exemple : Madame de Bormeval de Limoufin, votant
un appel fait chez elle, fit anelcr fa llincre pour
feparer, & arriva lout à temps pour jetter le caducée
entre les combattans. — F. Je hai Paris de cela. Je
fuffe menccnant encre les r'aEnez d'haunur, maU on
V cil croD foubeoi fcDaré. &. d'aillurs la iuiiicc &c
J
Moyens de parejire, deffenfe des boites, & des
rofeSj pennackesj & perruques.
Voila bien des affaires,
mais puis que vous me let contez
fi privement, vous ne trouverez
pas mauvais que je vous demande
pourquoi vous vous donnez cant
de peines . — F. Pour pareftrc.
■ E. Commcni paroill-on au-
jourd'hui à la Cour? — F. Premièrement faut cftrc
vicn bellu à la mode de trois ou quatre MefTurs
qui ont l'auiourité : il faut un perpunt de quatre ou
cinq tafetas l'ua fur l'autre, des chauITcE comme
celles que bous boyez, dans lelquelles, tant frife
qu'efcarlatte, ;e bous puis aflurer de huiâ haulneg
d'ellofic pour le mens. — £. Eft-il poilible que ce
gros lodier qui vous monte autour des reins ne vous
faffe point fentir de gravelleî — F, Qu'appellez-
bous loudier? Bous autres abez d'ellrangcs mouis
pour francimaniifer aux bilayes. Or grabcUe ou
non grabelle, fi faut il pourier en Etay cette emvou-
rure; puch après il bous faut des fouliers à cricq
ou à pont leredis, fi bous boulez, efcoulez jufques
à la femelle. — E. Et en Hyver? — F, Sçachez que
dux ans abant U mort du fu Roy, il luy ci'chappa de
loiier S. Michel de fes diligences, & d'eftre tousjcurs
voicé : dellors les Courtifans prindrent U feçon de
une vottes, la chair en dehors, le talon tore hauffé,
abec certes pantoufies fort haulTees encores, le fur-
pied de l'efperon fort large, & les fouleties qui en-
betoppent le defTous de la pantoufle. Ces voices ainfi
lirces tout du long bous efpargnent toutes fortes de
vas de foye ; fi bous allez à pied par la bille, on
ronjecture que lechebal n'cll pas loin de bous : mais
il faut que l'efperon foit dounî. Bous boyez tous
ces honelles gens d'entre les Huguenots qui boni à
pied & en cet équipage à Charanton. Je fai un de
mes camerades &. un parent mien qui ont fait le
boyage du pays en cet ellat, & quant ils trouboient
LIV&B I, CHAPIT&B II. 389
— F. Oy vicn, nos autres, oy : fur les dux pieds,
trainantes à terre, aux dux jarrets, pendentes à mî-
jamves, au vufc du perpunt, une au pendant de
l'efpeio, une fur reflomach, au droit des yralarts,
& aux coudes. — £. Et quels fruits de tant de
fleurs } — F, Ceft pour pareftre. U y a après la
diverfité des rotondes, à douvle rang de dantele, ou
vien fraifes à confufion. — £. N'avez-vous point de
difpute avec les Dames? — F. Boila de boftres pre-
paux, à bous autres qui benez quauque biages en
Cour abec le cul plat & le coulet ravatu, comme les
Surs de la Noue & d'Auvigni ; ce n'eft pas pour, y
pareftre, & je m'eftonne comment mûfier oubre
pour telles gens la porte du cavinet : & puch, il y
a tant de velles feçons de pennaches, — £. Accor-
dez-vous bien ces pennaches avec les perruques? —
F. Oy da : fi bous euifiez bu Monfur, l'autre yor,
quand il fit fon entrée debant la Rouchelle, bous ne
demanderiez pas cela, ou vien fi bous abiez bu
Monfur de Sulli commander à un bailet à TArcenal
avec la calotte, qui eft vien pis que la perruque, un
vraffard de pierrerie à la men gauche, & un gros
vaton à la men drette, bous diriez bien que c'eft
pour pareftre. — E. Et bien, voila pour les habille-
mens : eftans ainfi veftus à la trotte qui mode, que
feides-vous après pour paroiftre? — F. Eftans ainfi
couberts, abec trois laquais, de vroderies, pluftoft
loiiez, un videt pluftoft emprunté, bous boila dans
la Cour du Loubre. — £. Tout à cheval? — F.
Non pas, non ; on defcend entre les gardes, enten-
dez : bous commencez à rire au premier que bous
rencontrez : bous faluez Tun, bous dittes le mot à
l'autre : t Fraire^ que tu es vrave^ efpanoUy comme une
rojey tu es vien traitté de ta maiftrejfe. Cette cruelle^
^
390 AVANTURES DU BARON DE FiNKSTE.
celle revtlle, ffnitlle point Us armes à ce veau/roni.
à cejle mouftach» «l'en iroufte, & puis ceJleveUt: grtvt,
c'eji pour en mourir, 1 11 faut ilire cela en dcmcnant
les vr.is, vrjiiliiit 11 tcftc, cliangeant de pied, pçi-
gnan[ d'une men la mouftachc, & d'aucimcfois les
chcbus. Abcz-vous gagné l'antidnmvrc? bous
accuulkz quelque galant homme & dilcotjrez de la
hcrni. — £. Vraiment, Wonficur, vous me raviina,
& croy qu'il n'y a gLierea de courriiacs qui en fça-
cheni cane : mais encore les vertus dciquellex vmux
difcourez font-elles morales ou intcUeftuelles^ —
F. J'ay vien oiiy dire ces moure là; bous boulei
(aboir de quoi font no» difcours : ils l'ont des duels,
où il fe faut vien garder de admirer la balur d'au-
cun, mais dire fredcment iï où il aboit quelque
peu de couraye ; & puis des vonnes fortunes cnbers
LIT&B I, GHAPIT&S fT. jpi
fang-de-beuf, couleur d'eau ^ couleur d'ormus,
argentin, cinge mourant^ couleur d'ardoife, gris de
ramier, gris perlé, bleud mourant, bleue de la febve,
gris argenté, merde d^enfant, couleur de felle à dos,
de vefve resjouie, de temps perdu, fiammette, de foui*
phre, de la faveur, couleur de pain bis^ couleur de
conftipé, couleur de faute de piflèr, )us de nature,
ftnge envenimé, ris de guenon^ trefpaflTé revenu,
Efpagnol mourant, couleur de baice-moi-mà-mi'-
gnonne, couleur de péché mortel, couleur de cry»-
taline, couleur de boeuf enfuiné, de jambons com-
muns^ de foulcys, de defirs amoureux, de radeufs
de cheminée. J'ay oiiy dire à Guedron que toutes
ces couleurs s'appellent la fcience de Cromaticque,
& que d'orefiiavant on s'avilleroit de couleur de
Phyficque, comme de jambes pourries, de nez
chancreux, bouches puantes, yeux chacieux, teftes
galeufes, perruques de pendus, & le tout à la mode,
fans y comprendre les couleurs de Rhetoricque, &
m'a dit qu^il fe falloit garder de la couleur d'aminé.
— E, £t par ces difcours à quoi parvenez-vous?
— F. Quelquesfois nous entrons dans le grand
cavinec, dans la foule de quelque Grand, nous four-
tons fous celuy de Beringand^ defcendons par le
petit degrai, & puis faifons femvlant d'aboir bu le
Roy, contons queiquei lloubelles, & là faut cercher
quelqu'un qui aille encdrtf difner. — E. Comment,
encores? Et difne-on detife fois à la Cour? — F, Ha!
pourquoi demandez bous cela? — E. Pource que
vous dites encores : mais je voi bien, c'eft un dialeéle
du pays, comme le feulement des Angevins. Ne dif-
putons point du langage, mais trouvez-vous tousjours
ce difné à propos? — F. Nenni pas, non; les
Maiflres d'Hoftel quelquesfois grondent, les Sei-
RXS DU BA&OK DK FfNBSTB.
gneurs font fermer leurs portes, difent qu'ils ont
affaire, yu qu'ils fe ireiivent mal, — E. Et lors,
vous ne vous trouvez pas bien? — F. Nemii certes;
mais lors il faut bouter couraye, faire voonc mine,
un curedem à la vouche pour parcftre aboir difné. —
E, Et quel appoinftemert avei-vous, ou quel eftat?
— F. Pas eftat autrement; je fuis Monfur de Guifc,
quand Monfur n'y cil point, qui eft un galand Prince,
de velle bumeur, qui a de vdles paroles. — £. Ex-
cufei-moi fi je vous demande qui eft ce Monfieur.
— F. On ne l'appelle point Monfur le Duc autre-
ment en l'innee : depuis que la Rouchelle eft rendue,
je bous laiffc à penfer s'il le faut appeller autre-
ment : en fin c'eft le vrave des vraves, & le baillant
des baillants, — E. Vous tenez donc la Rochelle
pour rendue? — F. Non, pis du tout; mais je ne
bous doime ;^me aue de Pafuues. wuir hmr oue -
Chapitre III.
Àrrntt de Faïufie à la Cour.
SNBSTi. Premièrement, il ùm
que bous iàchez que le cadet
de Piulaflron & moi £fmes laat
& fi vien, que lui eut de fon
frère deux cens cinquante (ranct
(VourdeUis s'entend) pour l'a légi-
time, & moi bingt cinq |
de mon coulin l'Ebcfque d'Aire. Nous nous havil-
UfmeE doncq allez proprement, & abec des lettres
de recommandation & unes mémoires, nous def-
cendifmet par Garonne à Vourdeaux : 1^ nous trou-
balmes au Chapeau rouye un grand Gentil homme
?[ut alloii à Paris; j'ai eftai tant fat que je n'en
ai pas le nom. Nous boulumes lui faire compenio;
il nous dit qu'il courroit en polie. — Commtnt,
ài^ytf abét bous un rouci qui puisse pouffer d'ici
à Paris? — Il nous conta & apprit comment on
alloit en polie. — • Boila, di-ye, un veau plaijir;
nous bous prions de nous faire vailler chevaux, ■ Il
commande à fon ballet de nous en faire venir au
vatteau, où nous nous rendifmes, aianc vonnes
chauffettcs de toile vlanchc & fine. Ce biel Cour-
J94 AVARTUtlt DU I
t bE FfNESTE,
tilan nous remonftra vien dans le vacceau que nous
falloit aboir vôtres & coullinecs, de quoi nous nous
mouquions entre nous, comme cela n'eftoit propre
qu'à Francimants, lingues pelucs & glacayafes. Le
cadet & moi fiOnes cinquante carrières l'un contre
l'autre abint qu'eftre arribé au Carvon vlanc : là,
ne poubans plus durer fans cdrii^rs, il nous fit
acheter à checun un chappelcc. Nous commençafmcs
à la Grolle <k nous trouber las; à Sent Sivardcau,
je m'apperçeiis que ma chauiTctie eftoit en fang ; ce
qui m'y fie plulloll regarder, eftoit que le pollillon & îc
bailety regardoient en riant, J'eftois fi cfchauffifquc
TardiKon de l'eftricre m'aboîi encrtf dans le gras lic
la jamve fans 1c feniïr : quant à mon compcgnon,
il fe difoir aboir la fiebre d'un coUillon enRi, & ne
courroit plus que fur une cuific. De i'arreller pour
A» r.»n}»J» Poi
fin J.n
LIV&B I, CHAPIT&B III. 395
lut quitter la houpelande pour faire parellre fon
tren ; je cru$ deboir faire auili comme lui : t Tien,
couquifij fis-ye au pouftillon, pren la mienne i & les
mit encore toutes dux debant lui, en prenant l'equi-
paye des dux autres courriers; encores ne nous
apperceufmes nous d'eftre démantelez qu'à la fé-
conde pofte : & comme à chien maigre bont les
moufchesy nous troubafmes en la Veauce les poufies
tellement rompues par Monfur de la fiarene, qui
couroit lui meûne en perionne, que le Comte fut
contraint de me laiiTer à Anyerbile, abec quauque
aryent pour Tattrapper le lendemen. Le pouftillon
de Guillerbal & moi eufmes querelle, pource que
ye le nommois couquin, comme c'eft la feiçon; il
me répliqua : t Couquin bous mefmes, i Ye m'ap-
proche pour lui donner une platafTade; mon efpeio
s'efloit prife dans les defcoupures; comme lou taquin
bit que ye ne la poubois arracher, il me boulut
donner de fon fouet : toute la courroie s'entourtille
à rentour de mon cou. Pou! cap de you!... me
boila par terre, fi eftonnai de la cheute, que mon
bilcn eftoit hors de buë, & lou pis efi que mon
chebal Taboit fuibi. De vonne fortune il n'aboit
nulles hardes à moi : ye prins donc mon chappelet,
qui eftoit tunvé abec moi, & m^en allai, à veau pied
s'entend. Toutes hures me furent velles quand ye
fus fur le haut d'£(lampes, où ye troubai & le fa-
vlon & la balee enfemvle. Le chappelet me fit grand
vien, car fans lui ye n'eufTe pas feu louyer qu'en
quauque cavaret. J'alai donc aux trois Mores; vien
vous dirai ye qu'il me falut hauffer la fraife, pource
que ye me sentis la gorye fort efcourcheio. Après
aboir foupai en vonne compenio, un homme maigre
me demanda fi ye boulois pafTer Taprés fouppeio.
Î96
N'TtmBS DU BARON DZ FUNESTE.
Ve ne cerchois autre chaufe pour faire baloir tous
les traiis de cartes que y' abois appris des laqués
de Monfvir de Roquclaure : y'entendois la carte
courte, !a longue, la cirec, la pliee, les fcinences,
la poncée, les marques de toute force, l'attrappe,
la ripouffe, le coude, le tour du petit doigt, la
manche, lou chappeau, l'ange 8c lou mira'd. Pou T
cap de you! abec tout cela, mon homme, qui s'ap-
pelloii Montaifon, m'empourta les trois piftoles qu'on
m'aboit laiiTai : cncores fuc-i! iî honnelle homme,
que pour ma varbe il paia l'hofte & me monftra
de courtefie une feçon d'efcamouter & de mettre
arycnt bif dedans lou dai pour faire petit. Comme
au matin ye me leboîs fort trifte, y' abifai lou cha-
pelet & lou fouet qui m'elluit demeurai; ye bous
ben l'un vrabement huiÔ bons fous pour me loener
Renemirt du roufftaa, l'accident datfigott^
& rambitKm de Fanefie.
NAT. Et bien, Monfleur, voua
arrivé. Vous m'cxcuferez
eft de joie de vous voir
ces peiics accidents : Sl
comment vous milles-vous au
monde? — F, Monfur le Comte
me fit fort vieu aviUer, bran,
il faut dire coubrir, (i vien qu'ils me rrou-
boieni tous trop vonne mine pour eftre aux gardes;
comme y'abois penfai en parlant, il me laifTa ii Mon-
fur de Montefpan ; ye me fis fi vonne feçon que
y'enirois par tout, horfmis au petit cavinet : ye
prens conncfTance abec les Maiftres d'hollel & cer-
tains Gcntius hommes fetbans : quand ye fus lailTé
fui, ye fréquentai l'hoflel de Monfur de.Guife, par
la faveur de Monfur de Louit, qui me demandoit
foubant fi ye n'aiderois pas à tuer quauque Duc,
à quoi ye m'aufrois livrement. Par là me boila
familier, fi vien qu'un yor y'efcoutois debifer
l'Ebelquc de Scez, Vercaut, Malerve & Maihiu
abec un homme de vonne feçon : ces quatre aians
Jp8 AVAVTURES nu DAaON DE F^NESTK.
parié de la Phllofouphie comme de grands fabaous
qu'ils fon[, lou rouffcau eftânt demeurai fui, yc
lui demandis à qiù il cftoît. )1 me refpond qu'il cftott
de nuubeau arribai en Cour, & qu'il n'aboit poent
d'acceï pour le doncr à quiuque Prince. Ye lui
contis com.me y' abois faii. Lui me refpond qu'il
n'aboit point tant de hardiefTe; il mena Ci vieti l'af-
faire que ye le prefencis à Monfur de Guife, en la
chirovre duquel il aboit couchai la nuift d'aupara-
bant, comme y'ai fu depuis. De là à dux yors, yc
boi mon homme en grande familiaricai abec ce Prince :
y'eus quauque foupson, mais lui me remercioit
des faburs qu'il receboit pour l'amour de moi. Un
fuir que Moofur de Guifc bouoic aycc lou Roi, ye
bis mon roulTau qui lenoic la vougie du Roi,
& li difec force biedafcries à l'ourctÛe, dont lou
Rdi fi- rrehnir de rire: ve hip iwiiitte. rnmmi" i-Q»n«
tIVRS I. CHAPITR.1I IV.
199
bericai, ye fi$ un grand cri au commencement, mais
quand ye bis cou lou monde rire, ye m'efforcis de
rire, vien aife que tout fe paiTafl en raillerio. Cela
me ferbit d'autant de coneifance. Vien bous dirai-
ye que ce roufleau me fit autre coup mettre dans
le carouiTe de la René, difant que y'y aurois place ;
mais en fin ye le reconus pour le melme roufleau
des houpelandes.
Chapitre V.
Difeouis fur la m.u/on d'Enay, ir de la chaffe.
NAT, MonfieuT, cependant qu'o
couvrira pour vous donner u
mauvais fouper , voulei
point faire un tour d'allée? -
F. Oy vien. Monlur; cela noiu .
LIVRB I, CHAFIT&B ▼• 4OI
qu'une cour. — F. Oùeft boftre chenil? — £• Dans
les paillers. — F. Comment^ ye ne boi ni chins cou-
rans, ni aufeaux. — £. Ils m'empefchoiencde dormir,
me defpenfoienc en fauconniers & en hongres ; ils
eiloienc caufe que je combois en les picquanc. Quand
j'ai veu qu'ils me caflbienc, je les ai cafTez, & puis
l'aage en cafToic fa parc. — F. Oy, mais où eil la
nouvleffe? — £. Je l'ai cerchee ailleurs, après avoir
leu l'Utopie de Thomas Maurus, qui raconte qu'eftant
en ce païs là, il ouït un grand bruit de cors & de
trompes, & voianc pafler devant fon logis une
grande foule de gens de cheval, une meutte de chiens,
des limiers, des aboieurs, des chiens pour le fauve,
chiens pour le noir, lévriers de compagnon & d'atta-
che, & puis force oifeaux de leurre & de poing, trois
charrettes de cordes, autant de toiles, il demanda
qui eftoient ces Seigneurs : on luy refpondit qu'ils
eftoient fagneurs vraiement, que c'eftoient les bou-
chers de la ville, aufquels feids la chafTe eftoit per-
mife en ce pais là. — F. Fa au diavle lou païs,
qu'euffent-ils dit du Manefchal de Montmoranci, qui
embouié en amvaflfade en Angleterre, marchoit abec
huid bints aufeaux? Bous ne feriez pas comme moi:
ma mère nourriflbit dus vufs gras ; ye les trouquai
emper lou lebriet de Monfur de Roquepine, qui
depuis me l'a defrouvai, mais c'eft par familiaritai.
— £. Non, je ne trouve pas voftre change avanta-
geux. — F. Oy vien, mais c'eft pour pareftre, &
puch n'eft-ce pas une grande commoditai que les
aufeaux? Ye bous puis yurer qu'en la faifon, à
Fioux (fi bous fabez où c'eft), nous faifons vouche-
rie de perdigaux. — £. J'aurois peur que là où
feroit boucherie de perdriaux, le lard y fuft venai-
fon. — F, Quoi, des paillers en boftc vaffc cour?
n. 26
402 AVAMTVRBS DU BARON Ht PSSSiTS.
— E. CVft le mieiw quand elle m cft bien empc{-
chec. — F, Où a! lo nu-no us id> en une galerio? O
praube ! & boila du vlai deiians, faire de la galerie
un grenier!
Chapitkb VI.
Dti Vûdepitd,
1NAT, MonrieuT, nom fommes fi
groffien, que nous fommes enco-
re* plus marris quand nous fai-
foru du grenier une galerie. Il
me femble que voila vos gens
venus. — F. Oy, boila mes
laqués. Eh vien, Chervoniere,
que diavie avous tant demeurai? — Cher'
bonnUre. Ventre de loup, Monfieur, fa vous
pas bien comment nous avions desjcuné > —
F, Boyicz bous, pource qu'il cil biel, & qu'il a ellai
Seryent du Queicaine Papefu, y'en endure. — £. De
vrai, voila un laquais tout grifon, en un temps où
nous voions tant de Confeillers fans barbe : hola,
qu'on face, boire ces bons compagnons, & qu'on
apporte la cotation pour Monfieur leur maillre, en
haftant le foupper. — Ch, Ventre de loup, le maiflre
& les valets aimeroieni mieux un morceau de lard
qu'une prune. — E. Je ne vous ai pis demandé,
Monfieur, fi vous avez dîfné, veu l'heure qu'il ell. —
F. J'ai fi vien dcfyunai, que cela fe peut appeler &
parellre pour un dilhaî, mais cts maraus font 11
no»i<-ll,„„s™Sahoyc,„ons,r,
II»! en la icnie de «onfur de
Chapitre VII.
Dti qmtrê gtttna de FaHtfie.
T. Vous avei donc veu U
guerre de Saroie> — F. Oy,
y'y arribii le propre yor que
ce malhunis Preflre acheba U paix .
Nous fouârions veaucoup en ce
boyage, mais nous n'ufmes pas
loilir de faire parellre la balur ;
(juoi que ce foU, lou Roy fit pareftre fa biftoire,
viea qu'elle ne lui demuraft pas. — £. Nous fora-
mes malades du parellre aulË bien aux affaires géné-
rales que particulières. — F. Tel que bous me
boyiez mentenanc, y' ai bu quatre guerres, afTaboir :
celle de Saboie, celle de Juliers, où, fi y'eufle eui
en la place du Manefchal de U Chaftre, y'euffe vien
cmpefchai le Prince Maurice de faire tout fans
nous : nous coubrions l'armeio du coftai des pa'ifans
des Ardenes. La croifielïne guerre ell abec lou
Manefchau de Vois Dauphin, que ye bins yotn-
dre auprès de Chaftelleraut. La quatriefme, c'ell
cette guerre d'Aunix, que y' ai bue du commancement
yufques à la fin. — £. Vous elles bien heureux, car
je ne vous voi point cftropië. — F, Si ai ye vien
406 AVANTUftSt 00 BAKON Dl FfiKHSTt.
hti pluboir les raoufijuetadeî plus efpcITes que
grefle, tic, tac, toc, per aci, per entre las yambes,
ions les efieUes, rafibus les larcilles. Il fait von fc
faboir rcmuder. — E. Je ne doute point de cela
fuivani les belles occafions que vous avez dites. —
F. Ha lou baillant homme qu'eftoit ce Mmelchal de
Viron! S'il euft befcu, yc ne ferais pas en fi praubc
eftat : quoi qu'il tardCj La Fin en mourra. Que fl
y'eulTc cftai de l'entreprifc du pont Noftre Dame,
yc lui eulTe donai cinquante foilTades, il tarde ^
niDurir. — E. Il ne tarde- plus, il eft mort : vous
l'avez donc connu? — F. Oy, connu, oy; quant
il me trouboit : t El vicn^ mon rrabh, mon Varon ?
& vien, cela efl faitf . — £. Laifong là ces fif-
ehcux difcours, Monûeur, parlons cncores de
Cour & des Dames.
Chamt» VIII.
Amours (U F^nefft, ^turdlt Ai Carriffiar.
jBkISTs. Quant on parle de U
Cour ft dei Dunes, ye me troube
n mon lullre. J'aboit une «mie
& une maîllreire : la première
eftet U famé d'un bius Donir qui
prenoit penTionnaires. Elle me
donnoic de l'aryent, pour paier
davanc fon mari, qui grondoit fort quand il boioic
chez lui penfionnaires poruui varve: il ne bouloit
loger que des petits efcoiiillez. — £. Dîttei-voui
efcoijillcz? — F. Et il feroii encores von enfi :
bous elles un galant home. — E. Ce n'ell pas d'au-
jourd'hui que ce difcord eft arrivé : il y avoit it Pari*
un Loudunois, favani homme, nomma le Goulu; il
enrageoii quand fa femme prenoit en penfion ceux
qui elludioient aux Loixj Q ne vouloii que les petits
Grimaux, dont il fut fiiit an quatrain, duquel le fens
vaut bien la rime; le voici :
Da Goulu favanc ru prtni gurres
La barbui four peajioruuûra :
H ehoifit Iti pttiti infant,
JUait il Goulit U$ viut grand*.
. - ^« At&(a.u.aiii^ T ai ai.
mau dans Teftomach : fi fes ce
fcnt fouftcnu, yc Tabois difam
abcc les amis fi yc le dcbois app
qu oy, pource qu'il aboie eftai S
>ji^ nio. Enfin, il y eut un avilie ho
non, & par une velle inbendon, I
fonc beihu ces pendarts de ca
qu'abec hauneur ye ne le pouT
ce qu'il efioic homme de rove le
bienqu'il y a de bons efprits àla
.iS nur ne s'y eft yamais ofenrai
'!^ Si ye poutx)is parbenir à eftre co
tlilT nex, ye ferois vien contant. —
'"! que c'eft : ce m*ell un terme non
H
■i II
■■'t,
■■rî
Chapitre IX.
Dts bravts, det l'agiatj & duels.
.^jr^jm__i^ AHBSTB. Ce iont yens qui le
(r\ iJ'V-^iK ^*™°' P°'"' "° '^^i" '*''"^ ** "^
*j Ufw^lit' °^ ^'^ '^'''^ "î^^ ^^ acquit, pour
■^ ^^^éê^ une fredur, fi un manceau d'un
ï5 ^^j't'2^ '"""^ touche !e lur, fi on crache
?^=^ ^!^'<V\ que fur un rapport, vien qu'il
Te iroube faux, ou fi bous prenez un homme pour
l'autre, il en faut ufer comme firent dux Gentius-
hommes, dont l'un eftet au Cardinal de Joyufe. En
allant defliis lou prai, l'un demanda à l'autre :
t N'efles-botts pas un tel tfAubergne? — Non, dit
l'autre, ye fuis un itl de Dtmphiné. • Pourtant ils
abifereni que puis qu'il y aboit appel, il fi: falloîi
tuer, comme ils firent, & cela s'appelle r'afiné
d'haunuT. — £. Y a il quelque edac pour cela?
Vient-il aux parues cafuelles? — F. Non pas, non :
que c'en d'efire réduit aux bilayes ! cela n'eft que
pour parefire dafaantaye. — E. Me voudriez-vous
bien nommer quelques uns de ces rafinec d'honneur?
— F. Bous abez lou vrabe Valany, Pompignan,
B^ole, lou cabdei de Suz, Bazané Monglas, Bil^
4to
ANTURBS DU BA,B.ON_OE TXStSTU-,
raor, la Fontaine, le Varon de Monimorin, Peiris,
& tels autres vrabcs que kur courage a fait [lareftrc,
— E. Excufez moi, mais erapefché de pareftre, car
pas un de ceux là ne pareil plus... — F- Bous bou-
lez dire qu'ils font morts, mais leur renommée eil
immortelle, c'eil un veau moût. — E. Vous acicn-
dez-vous que les Hiftoriens facent mention de telle
forte de valeur? — F. Je ne'donnerois pas un efti-
flei de Roquemadour, ni un curedent de Monfur lou
Manefclial de Roquelaure, de tomes bos Hilloi-
regriphes ; c'eft aflez qu'on en parle à la Cour,
lors qu'oQ y ba, — E. Et qui voiez-vous à la
Cour parvenir par là? Y a il un feul Couvcrtieur
di; Province ou MareTchal de France qui doive (bo
avancement à un duel? — F. C'eft que les gakrnj»
&. baillants hommes ne font pas clîimez, — E. C'ert
à dire qu'ils ne paroî-iTenc pas, & cepemUnt tout le
LITRB I^ CHAPIT&B IX. 4II
ne foienc parvenus à leurs grades par celles efpreuves,
qui font juftes, & non celles que vous voudriez
eftablir. — F. Faut donc que les guerres foent
d'autre feiçon que les quatre que j'ai bues. —
E^ Nous en avons veu en France qui pouvoient
donner occaflon de touttes ces preuves en dixhui£t
mois : mais aujourd'hui les efprits font plus tran-
quilles ; je dis en dixhuid mois, dans lefquels nous
avons veu quatre batailles & deux combats d'armée
qui en valloient chacun une, huid fieges de villes,
autant d'aflauts, & deux fois autant de rencontres.
— F. J'ai leu les Hiftoires, mais je n'ai poent ren-
contrai cela. — E. Si vous avez lieu aux troifiefînes
guerres, depuis la bataille de Jamac jufqu^à celle
de Luçon, vous y trouverez tout ce que je vous dis.
— F. Cela eft veau, mais le duel ne s'exerçoit
poent comme auyourd'hui. — E. Il fe faifoit peu de
chofes comme aujourd'hui, & s'en fait peu comme
lors. — F. Boudriez-bous donc effacer toute la loi
du duel? — £. Nullement; il y en a qui font très
juftes, affavoir quand le Roi les concède, ou pour
crime de leze Majeflé trop caché, ou pour accufa-
tion detrahifon,'ou pour maintenir l'honneur d'une
femme de bien oppreffee, ou pour fupporter l'or-
felin contre le meurtrier injufte du père : encores,
le combat de deux Chefs entre leur$ deux armées,
pour efpargner le fang d'une multitude : je mets à
ce rang les duels qui fe font pour la gloire du parti :
il eft vrai qu'il n'y en a qu'un des deux qui foit
jufte. — F. Bouiez-bous pas que toutes les cruelles
punitions qu'on a ourdonnees là deffus n'ont de rien
ferbi. — £. J'ai veu plufieurs Jurifconfultes & grands
hommes d'Eftat s'eftendre fur cet affaire ; j'ai ap-
pris d'eux que fi on euft puni cette vaine & fauffe
LI3 ATANTORES
□ 8 FSNBSTE.
gloire par une pefantc & véritable honte, le rcmi
euft cfté beaucoup meilleur; comme qui euft ordonna
& fait exécuter foîgneufement, que tour appellant,
comme eftant celui qui blefle le droit du Roi, furt
dégradé de Noblefle, mis à la taille, les parroiflcï
où leurs biens font fituex crues de leurs eaux,
obligées de le porter au Retreveur, leur recours
fur le bien avec les mcfroes privilèges qu'ont
les exécutions des amendes ; d'ailleurs ceux là
privez de tous eftats & penûons. Ces hommes
l'urvivans à leur honte eufTenc prefché le malheur
du duel. J'eulTe voulu chofe beaucoup plus doticc,
pour les appeliez. Cela eftant ainfi pradiquÉ,
courages fe fulTcnt eflever aux adions, par l<
quelles nous defirons qu'on parvienne "
de îa Couronne. — F. Mais regardons fi tous nocJ
Mïncfchaux ont viea pilTaî par lou chemin qi
led^^l
3
Chapitkh X.
Entrée de tabit, attaque de Religion.
5 AT. MonCeur, vous cftes fervi ;
nom nous mettrons à cible
quand il vous plaira. — F. Mon-
fur, ]'û vien conu à bofle pricre,
6 i ce que bous n'ibez fait lou
Hgne de la croix, que bous elles
de la Religion. — E, Ouï, Mon-
fieur, & ne fuis pas fî bon religieux que je devrois.
— F. Il ^ a eu de vrabes homes de boite parti.
— £. n en a efté befoin. — F. Bous plaîft-il pas de
faire feoir ces honoelles hommes ^ ^ £. Monfieur,
ils prendront bien leur place. — F. II me femvle
pourtant que lou figne de la Croix fait parefire un
Chrefticn, -^ E. Il faut l'edre pour le paroiUre :
Dieu requiert de nous d'autres marques, & reprouve
celle là. Mais, s'il vous plaift, nous ne ferons pas
de la Théologie un propos de table. — F. Je bus
donc bous conberdr après foupai, & bous faire
pareftre que y' ai beu toute la Théologie moderne,
& vien efcoutai Père Coucon, qui prêche d'une
vellc feiçon. — E. L'eltofie eft plus que la façon.
— F, Abcz-bous bu Tes prières jocidatoires^ —
4'+
NTUHIS DU BAaQM Ol t-AN'KSTS.
E. Oiiy, Monfieur, & joyeufemcnt. Nous avons des
commencaires dcfTus : & nous ont fait defplaifir
de les fupprimer, quand ce ne feroii qu'en un en-
droit où il fait trois inierceflions, de Dieu le Père,
de Noftre Dame, & de Jefus Chrilt, cliactin i fon
tour & à la pareille. Mais ne nous enfonçons point
là : il vaut mieux boire, k quoi je voua convie. —
F. C'eft vien dit : mais fi bous attaquerai ye k
l'autre pourmenade. — E. Et moi je vou« rendrai
nos fimples raifong de village.
Chapitre XI.
Du Baron de FayoUe, & da Dogncn.
«NBSTX. Puis que bous ne
boulez pas que nous parlions de
h Religion, j'ai à bous dire que
nous ellions à Surgeres, où nous
faifions chcre enriero. Eftans à
tavie bis à bis du Varon de
a Ttcftittf qui elt de mes vrabes,
y'cncendis que lou prepan eJlec d'une certaine vi-
coque qu'ils appellent Dongnon ; les uns difoent
qu'elle clte[ imprenavle, les autres inallïegeavle, les
autres qu'elle eftet de maubaife apparence. Tous ces
Queiceines quielloienc là parloienc de la furprendre,
de l'aiTiegcr ; comvien il coufteroit à faire un païs
noubeau pour louger l'armée debant; Je ne bis
jamais une telle confufion d'oupinions; il me faf-
choic qu'une place fans parcHre full ft malaifee à
mettre à raifon. Ye me met lou coude fur tavle,
l'oureille dans la paume, je me ride lou front, you
vranle la tcfte quatre vonnes fois, & puch addref-
fant ma parole au haut vout : i Monfur, di ye, c'ejl
un ongnon dequoi bous parlej; ye ne boui demande
qu'une libre de burre, (r foi de Queiieine, ye le
-1 - ""^ ■"; inmnans y.i
. Ulrfi,,. Ji ,c, id ,:,.• ;■,.«.
„H«, ,„,„,„„„, ,,„, Jo„, l.„
ipine nominm le Lignoux^ gi.
neur de bSiet Ù" aboiî dts ir.
poent du commun, i Monfur in<
qiuuques unes ; moi vien aife, c
de pûeftre en grand conpenio.
^
Chapitre XII.
Eatrepri/tt de Du Ugaoux.
£NBST8. Monlur, a je, ye boui
en dirai des plus veaux. Il y aboit
une petite bille en Limoufin, où
lin varbé demeuroic à bet prés
delà pourte; louinouyendepren-
drela bille eftoit de donner à fepc
ou huiâ hommes des Tiens, vien
lidelles, chacun un coup d'efpeio fur la œfte, &
qu'aucun d'us veaucoup vlelTai , pource que s' allant
faire pcnfer chez lou varbé, ils amufoent lou puble,
Sl fur tout çus de la garde, &. durant cela en don-
nant à la pourte on pouboit prendre la bille :
boila encores toute la compenio à rire. J'ai vien
autre imbention, di je, /'ai bu conter à çus qui
croient dans Ouftande qu'ils aboient des mouriJers,
defquels il connoiffbient fi vien la pouriee, qu'ils
faifoeni tomver les grenades à poenc nommai, les
alTiegez dans ta tranchée, & les autres darrere lou
rempart. Or boici ce que ye dis : puch qu'abec pu
de poudre on pourte les chaufes enfi doucement,
aboi r quarante ou cinquante mortiers courts comme
4.1
pétards, & mettre devant la gulc des hommes vicn k
preiibe per darré, & faire qu'abcc pu de poudre ils
foent empourcez fur lou rempart, comme s'ils aboienc
fait un faut pour plaifir, & puch rechai^er jurqu'it
tjuatrc ou cinq fois. Boila dux cent» horamcs dedans
une bile, aquo as barrai. Rous ne bides yamaix
imbcntion troubee mîllure, horfmiï de quauquc fat
qui difoit qu'il faudroit choifir les bofTus pour mieux
emvoucher lou monier, — E. Pour ceruin, Mon-
fieur, voila des inventions du Capitaine Ligneux:
les aveï-voiis apprifes de lui-mcfmes } — F. Non pas,
non certes, que je ne le bis yamais. — E. Si ai tien
moi, & fore privement. Chicot l'appelloit Mathelîn;
& pour rendre un de fes contes au» voftrcs, }c
vous dirai qu'un jour je le menai au cabinet du
Roi de Navarre, où il nous conta la première de
■ ' 'i." ■ ■'■ ■" ■ ■" ■■ ■'
J'entendrai le bruit de la ville, & verrai accourir
ceux du fauxbourg; j^attendrai le iilence, qui fera
rheure où ils feront bien entencifs à ce que dira le
pafcient, & n^y a point dangé de leur conter go-
guettes, & à rheure l'efcallade. Qu'en dites-vous^ •
Le Lignoux fe mit à jurer que c'eftoit l'entreprife
la plus infaillible dont il eûft jamais ouy parler,
& que le tout confiftoit à ne prendre le temps ni
trop toft ni trop tard: & de là en avant ne donnoit
point de pafcience pour foUiciter l'exécution. —
F. Boila qui eft vrabe & vien hazardus ; /eufTe vien
boulu eftre de l'envufcade du bois.
I iBNfisTs. Mais changeant per~
I piux, yc ferai vien cmpefché k
^tfSV^LsJ mon orribce I U Cour, eu b
« •
à
LIY&B I, CHAPIT&B XIII. 4JI
- - -
■
E. Ouy, Monfieur. — F. Je bous bus repren-
dre d'une chofe, fi bous Tabez pour agreavle. 7—
E, Vous m'obligerez, Monfieur. — F. Je trobe
maubais que bospalliflades foient toutes de fruitiers ;
les efpaillers de buis ont vien autre apparence. Ma
mère a un jardin qui n'eft gueres plus grand que le
bolle : les efpalliers de buis y font hauts d'une
picque ; il ell brai qu'il faut que cela foit de char-
penteric ; auffi elle s'en faid tous les ans pour mille
piftoles, & cela n'eil pas le plaifir que bous prenez
aux proumenades, quand les Signurs & Gentius-
hommes bous bifitent. D'aiUurs nous autres pratiquons
tellement l'aunur en toutes chaufes^ que nous ne
faifons rien pareftre qui ne foit fort abantajus. —
E. Je Fai bien remarqué à vollre arrivée, & fur-
tout à cette grande efpee que portoit voftre laquais ;
& de vrai chacun a quelque raifon en fon efpece :
vous auftres, qui elles bien fondez, donnez vos pen-
fecs au paroiftre, & nous à l'eftre feulement. —
F, Bous me faides foubenir d'un fonet que quel-
qu'homme de bilayea fait contre nous autres Cour ti-
tans; je bous le donne pour bofte fruift; je croi
Taboir en ma pouchette; le boici :
Quand le Paon met au vent fon pennache pompeux ^
Il s'admire foi-mefme & fe tient pour ejirange :
Le Courtifanj ravi de fa vaine louange ^
Voudroic comme le Paon efire parfemé d'yeux.
Tou deux font mal fonde^; aufjl de tous les deux^
Quant il faut s^ef prouver ^ la vaine gloire change^
Comme le Paon miré dans fon pennache d'Ange
En defdaignant fes pieds devient moins glorieux.
Encore eft nofire Paon au Courtifan femhlabUj
Que de la voix fans plus il fe monfire effroiable :
Il def couvre l'ami qui U loge che^ lui,
NTURSÏ DU
// (Ji juloux de tout, il tfi fuhftt aax rhramti ;
Ih dijftrtni i'un poinâ, qut l'un m^nfirt /« plmaa.
Et qut l'dutrt tfi firi du ptnnacht d'aucrui.
' pREMiEn iivnt.
UV%E SECO^I).
Det grâces laiines <y de leur confiru^ioit.
ANiSTB. Et beatavifcera Mariât
qtut portaveniat aurai Palrif
Filiwn. Boila comment je di mes
grâces, moi, — £. Je croi
que vous les entendez bien, puis
que vous les dites. — F. Oy
da, j'ai elle de la première au
coulege de Guienne, & de laPhilofouphie ^ PoîAien,
où nous pareflions vien efcouliers, mais nous vatcioni
lou pabai : y'eltois un lebraut en ce temps là. Il me
loubient un your au )u de paume de Sant Vacques, ^
des Comédiens qui joiloient, ye me mis ^ interpréter
l'Italien it un vaibe raze qui s'appelloit Scaliger ; yc
&s vien rire Meflurs de U Saoce Marthe qui eftoeot
424 AVANTVRCS DU BASOtT DE FSrfESTS.
là. Il faut dire que nous ofcrbions dés lors le punt
d'aunur, comme eiift faîfl l'ecellent Caftcl-Vayard ;
c'eftoit cetiui là qui cilet lou maillrc des vraberics.
Paffanc à Poifliers, un autre Courtifm (|ui eut prife
abcc lui, lui aiani dit à lourcille : i Rindej bous à
la pone de la Tranchée, i la vrabc repartie qu'il
fit, f Je n'en ferai rien, dit il, car je ne me rend
jamais, > Mais j'ouvlle de bous expliquer ma prière;
c'eil : Et les vien heureules entrailles de Marie qui ont
pourti; le Fils du Père éternel. — E. Comment? vous
commencez par un Etf — F, Pour bous dire, il y a
debanc ; Laus Deo^pax vivisj requiesdefuneiù. Tu
auieiitj Domine} mtferere nobis; & puis : El beaia.
Mais je ne di jamais gueres le premier pour accour-
cir ; & puis pour ne bous mentir poent, il y a un
mont qui me deiplaill en diable, c"eli ce Dc/unàlit
qui m'a fait U plus grande trahifbn, qu'il faut que
LIV&B II, CHAPIT&B I. 4^5
euft fait un affront fous la cuftode. Me boila encores
hors de mon perpaux ; où eftois-ye? — E. Vous eftiez
fur la conjondion de cet Ei avec ce qui e(l au
devant. — F. Je m'en bois bous le dire tout du
long en Françés : Louange à Diuj paix aux bibansj
repos aux morts : Mais toi, Signur, aies pidé de
nous, & les vienheureufes entrailles. — £. Il faut
que ce foit que Dieu aie pitié des entrailles, ou
qu'elles aient pidé de nous. — - F. On n'ezamine
pas ces chaufes à boile mode ; noftre Theolougie n'a
que faire de la Gramaire, car auffi vien ce mais
debroit contredire & ne le bit pas. Boici comment
il faut proufiter ; après Defunétis (que lou diavle lou
mot), U faut faire une pauze, & après nobis une
autre ; à ces pauzes, bous penfez quauque chaufe de
contraire, & puis bous dites : Mais toi, Signur ;
& à Taucre: Penfez bous que Diueft vien hurux, &
auffi les entrailles. — E, Je trouverai bien moien
que ce Defunétis ne vous fcandalizera plus : Difons
paix aux vivans, qu'il y ait paix entre vous qui
elles vivant & les archers, ou que vous viviez en
paix, & puis requies defunéiisj que Defunéiis fe
repofe. Il y en a quatre ou cinq à la Ballille qui
diront Amen, Voila pour ce paflage. Mais venons à
VEt. — F. Boyez-bous pas que la MefTe commence
par un Et? difant : t £t j'entrerai à TAutcl du Sei-
gneur; • l'autre refpond : t A Dieu qui resjouitma
jeuneffe. ■ Il femvle qu'il n'y a pas grand fens à cela,
& c'eft ce qui faid tant de merbeilles. Il y a de nos
Dodeurs noubeaux qui bulent corriyer Plntroùit^
mais il s'en faut vien garder, car bous autres diriez
qu'on auroit falli. — £. Il y a plufieurs paffages de
cette forte, je fuis bien aife d'en apprendre la raifon.
— F. On ne parle pas aux chaufes excellentes comme
? Magie divine, co„„',di,7™
imputai, ^p i> -', ■ '*'î'™<
' t^ amour, aue nt f.,:. . ■ '
Mapliere. L'EgUJt tnvifibte, dis rtHqittj
& borne nUealian.
^ sstsTE. Four moi, ye defién-
'-^ drai tout jufqu'au vatefme des
cloches, & bous converiirai, H
bous en abcz la boulonuî. Con-
ccnccz bous que ma prière pareil
pour prière, comme VAvt Maria.
^ — E, Je voi bien i ce que
voua diiesque ceux que vous convertUTez le veulent
desjà eftre. — F. Oy da, y'ai aidai plus que nul
autre à combercîr lou Queicilne Maziliere du Régi-
ment de Nabarre. On lui £l du vicn, il alla à la
MefTe, & pudi il allolc chez les Grands pour faire
pareftre fa conbcrfion. Un your on eftoii en per-
paux chez MonTur de Roquelaure laquelle des Reli-
gions edet la meillure : t // faut, dit Monfur lou
Manefchal, demander à ce Qaeiiaine : Bien ça, die
il, lu as laflai & tronquai des dax depuis Jamedi :
que t'en femvU, qui tjl la milluref ■ L'autre repond
abec affurance que c'elloit la Caihoulique; lou Ma-
nefchal réplique : i Tu mensf fret
trompei, i
lu as eu de Parytnt de retour, ■ ■^
fendre a pcfif. „ '^* cro/ans ,„.
LIV&B II. CHAPIT&B II.
429
tenons que tout ce qui offenfe Dieu ne peut eftre
appelle bon. — F, Et comment jugerez-bous que
Tintendon eil vonne? — £. Quand elle s'accorde
à la règle du bien. — F. Encore faut il que cette
vonne intention parefTe. — E. C'eft ce que nous
demandons au jour & au flambeau de la vérité.
Chapitre ni,
d gageure de Canijt , la queftwn du bapiejmi
agitée à Rome.
[t|T>- Je demoure à cela
que rintenrion fait tout : c'ed
là où y'ai bu triompher Perc Cou-
m, quant il fut pris pour yuge
LIVRE II, CHAPIT&B III. 4]I
mon père dannai par la faute d'autrui. Un autre
difoît : Nous tenons lou Mariage pour un Sacrement,
& fi lou Preftre fonyoit à defyunai, lou Mariage
e(l nul, par enfi nous & les noftres ferions tous
fils de putens. -— £. Il y a bien pis : car, fi toutes
les Méfies du Saind Efprit qui ont efté dites à vous
faire des Preftres, des Evefques, des Archevefques,
n'ont efté avec Tincention, où font vos abfolutions,
vos Ordres & vos EgUfes, & par confisquent
la fucceflion perfonneUe de laqudle vous vous
vantez > H y a eu dans le Confiftoire de Rome
une pareille quefiion agitée plus de fix mois:
Un Archevefque des plus riches, des plus dodes
d'Italie, & un des plus grands hommes d'Efiat,
fut vifité par fa nourrice, de laquelle, bien que
pauvre villageoife, il voulut avoir la fréquen-
tation deux jours, pour (b plaire aux contes de fon
enfance. Cette pauvre idiotte, le fécond jour, ravie
des fplendeurs de fon nourrigeon, lui fauta au col,
en dtfant : V'è qui dunque il bambino Mio battenai
penfando che trapajfaffe, — Commenta dit le Prélat,
ma chère mere^ n^ai-je efté baptifé d'autre que de
vous ? — Non^ dit-elle, car nous vous tenions pour
mort, — Et il répliqua : En quels termes me bap-
tifaftes-vous ? — Alijiol, difs' ioj io ti batte^o nelnome
di noftra Donna, — L' Archevefque adjouftc : E
di piii? Non più^ diffe la balia^ che noi altre non
batteiavamo d'altra foggia. Là finit le plaifir de ce
perfonnage, qui emplit tout le collège des Cardi-
naux de cris & lamentations, difant : Je ne fuis pas
Chrefiien, n'eftant pas baptifé au nom de Dieu.
Où font tous les Sacremens adminifirez par les
Preftres que j'ai fait Preftres, & tant d'Ecclefiaf-
tiques faufiement facrez de ma main, qui en ont
plus ™>''" "° °°°* ""<••>■ ■
Chapit&b IV.
Le baron Harelaû, le Moine & autres Jeux.
MAr. Ouy, mais on ne veut pas
que la Coarecra[ion paroiflc : car
Gabriel Biel dit que l'invention
de la Secrète, qui eft de dire les
paroles miiTiSances bas, fut que
le pain des Clercs parue chair,
donc il y eut une grande pelle :
& cela va un peu loin pour noftre familière propofi-
tion : mais je vous demande fi le Baron fut contant
de cette refolution. — F. Non pas, non, qu'il le
fit très vien paier un von courtaut, qu'on appcloit à
la Cour, les uns le courtaut de la Confecration, les
autres de l'Intention, aux enfeignes que l'Aumounicr
de Monfur de Lucembour me le monftra un yor que
nous pallions au bois de Jouembal : il elloit là en
relez. Nous demandafraes aux payez fi c'eftoit là le
courtaut de la gayure. En débitant ils nous empoi-
gnent tous dux, nous depoiiillent, & nous fouccenc
en Diavle ; mais l'Aumolnier le fut plus que moi.
Cette quanaille rioit fi fort, qu'en fourtant de là je
m'efFourçai de rire; car cela s'appelle le relez. Cap
II. aS
feia ■ car ra c ."" — "'^"-i ne
r t-^::ï"^f'^■
S"«<^'»i^^--
J fa abois ou parier m ' ^^
»■" fil b„ui„i/d°;; '"",':■ "i
mes foulie, Cel, J ,' "l"''»"
q»enoaiHe du lifl .', 1"' •»<>ii pm
•i» l'«utrc. _ f -J '"<"<■ •l'iO! .
°= "« le difoi^,;) ,"",!'"1. Cte
LIVRE II, CHAPIT&B IV. 435
le plus fat ju de cous les jux; un autre, lui & moi
eftions etnbeloppez la tefte d'un tappis : je difois
qu'ils m'empbrceroienc les ongles de coups, car par
mefgarde ils firappoient fur le bouc des pieds au lieu
du deffous, & moi qui ay force cors, & qui me
chauffe à cinq punâs, comme bous boyez, penfez
encore ne pouboi je débiner pour forcir! — Ch
J^eufTe bien deviné^ moi. C'edoic lui qui paffoic la
main par deffous le cappis & qui cognoic les deux
aucres. — F. Ha! j'encen vien, c'efl à la faufle com-
penio; c'efl le ju de la paix de Lodun; s'ils me
Teuffenc nommai enfi, je n'y euffe pas encré. O vien,
il m^en foubicndra du faufimet, & m^en refTentirai.
— Ch. Ec dice moi, n'avez poinc fenci les deux
genoux, où vous alliez les yeux bandez pour empoi-
gner Tefcu? — F. Il y aboie vien à rire, car nous ne
le poubions faifir. — Ch. Vencre de loup! ces deux
genoux eftoienc les feffes d'un lacquais, oùvousfîftes
cane crevirer la pièce avec la langue, & la poufllez
en un vilain percuis. — F, Habalifque! comme
difenc les Provençaux de touce la Xenconge, je difois
que c'efloienc les genoux de ce bilen qui puoient :
car, pour bous dire, j'ai le fencimenc bon. — F. Il
y a dequoi s'en reffencir : mais c'eft en jeu. — F.
Nous paffafmes vien le temps eflanc là dedans. Tous
les dimanches il faid bénir cous fes bailecs pour jolier
abec lui. — F. Nous en enflions faid aucanc ce foir,
qui efl dimanche, fans la pêne que vous preniez
pour me convercir. Nous y fommes encrez crop
avanc, mais vous l'avez voulu. — F. Eflrade, dices
là vas que Monfur demande fes yens pour joiier
comme de couflume; boyez bous, je m'efvacterai
abec mes bailecs comme les Princes fonc abec nous
aucres : & cependanc qu'ils biendronc, je ne me puis
't\i
I"
Ckapitse V
Pt Alartht la démoniaque, & autres miracles.
AHitTX, J'y eftoii quand Marthe
la démoniaque y fui amenée; il
faifoit furiux de la boir. — £.
Que lui fit l'Eveftpie d'Angers?
— F. J'encens vieu ce que bou»
boulei dire; mais le Clergé fut
contre l'Ebefque, Eftoit-ce vien
fait à un Prélat, quant le Capucin lui dit qu'il tou-
chaftMardieaujarretdelabraye croix, il la toucha
de fa clef^ Et puis eftoit-ce fait en von Pafteur, au ,
lieu de lui lire de l'Ebangile, lui dire un Epigramme
de Mariiali' — E, J'ai oiii dire qu'elle fit gambades
à fes deun efpreuves. — F. Je croi vien, & je
bous payerai de raifon :. Les Diavles de Marthe,
qui eftoent Velzevut & Afcallot, comme ils fceurent
vien dire au Confeiller Matras, qui les inierroguoit
en Grec, elloeni l'ui] trop praube & l'autre trop
jeune pour aboir elludié. — E. Je voi bien, l'Enfer
muliiptie, & ils alloient enfemble, un jeune & un
vieux, comme font les Prefcheurs. Avez-vous fceu
ce qu'en ordonna la Cour? car Rappin qui la
ramena en garde & fes parens me l'a conté. — F. Si
& lui debinc abcLiglc. —
jours aprôs, il vid entrer
rdcl.ine, qao Dieu Taba
le boyage comme fon chebi
abez elle, il faut que bous i
y ont lailTé un amas de ro
planchai de cette falle. — i
du foimet que vous m'avez
un Epigramme qu'un efcolie
pour refpondre à voflre que.
Que iUei-voai, iifoit
U hon Curé da Aràil
Dei miracUt qu'on fa.
A U larlt it» mefcrta
— Je rtfpondt qu'il! j
— Voui efiet, dû Vaut
Si vaut oavrej cncor I
Si vos ortilUi ne font
Tant de houriii de eei
Qu'en diiei-vout? Cej
Chapitre VI.
Miracles de la RoduUe, de Sainûe Leanue,
du fainél homme de BilhOet, &dela Mer Rouge.
y^ — ^ <r^-4__:^.- 1 -BNKSTB. BoUa qui eft vien mef-
rl I '"J"-^^^^^ chant; je bous prie de me le faire
V Kfâ*^' '^""^' ~ ^' '^°"' ^'^"'■^^'
ê ~1r3^5^ & 3vec lui un qui eft en même
'^ ^\y^}^ P*g*i ^'^^ <*" ^"^^ ^^ '* Rochelle
L \jÊrz^^^^ qui avoir empli une garce, in-
1?^^^^ tî>V<îJ| fîruite à faire la démoniaque :
mais l'incrédulité des Rochelois ne lui permit pas
de faire miracle, &. voici ce qu'ils en difent :
ffaftrt Curé la haiîU belle
Aux Huguenot! de La Roeietle;
Il mie an DiaiU ituti ua corpi
Et lui mefme le mit dehors.
Elle deifi garait fa face,
Faifoii grimace fur grimace ,
Et pour miracle plus nouveau
Trouva bien la fève au gafteau:
Nul ne peut guérir cette garce
Sinon U Curé; c'ejloii parce
Que pour ckaffef tels ennemis j
Il faut celai qui les a mis.
.-». avons vcu for,
;? ^"uglet & h, t
^'"", lui ail, ,j ^
f"" ""'refaire k a
la confiance que u
»Jairee.L-£;er,.ed'
.»eren,p„a„\^
'MOTeni trouvée à '
f" lieue, environ, „'
■ie|«.inecl,„re„^
;=l'™,&ayan,ftiae
'«"porter fa pierre/ £
P»«'"™ir ruiné le ï.;°
fiill en T '°5= '"P'* J
I.IT&B II« CHAPIT&B TI.
441
baucherenc, & lui ayant tout fait confeilêr encre les
mains de la Juftice d'Orbec, la bourgade que j'avois
veuë en fa grandeur fut rafee en deux jours. Le
Cardinal difoic qu'il ne falloic pas ruiner les fraudes
pies. Ce font telles impoftures qui firent déclarer
Berne par le miracle des Jacobins, & Genève par
les enfans qu'on faifoit reffufciter fur un fourneau
dans Tautel, & des lames qui leur brufloient les
nerfs de la nucque : cela ne peut fervir que couver-
ture aux niais, & qui veulent desjà cftre convertis, & au
contraire ces villonneries vous oftent tous les efprits
qui ont quelque foin de falut, pource que jamais le
menfonge n*edifia la vérité. — F, Je bous dirai vien
qu'il y peut aboir eu quauques tragetaires qui ont
fadegé comme cela, ne fut ce que ce dux merciers
qui mirent Noftre-Dame de la Mer Rouge en la
Brenne, dans un nid de pie, & firent manger & em-
porter au peuple par dévotion un gros cheûie
jufques à la racine : bous ferez caufe que y'y regar-
derai de plus prés.
(iAiS
Chapitre VII.
Divers jeux.
to>i
vEKESTE. Boila velle compenio I
pour yoiier, ça cnfans, au Roy \
defpoûillay : on ayme (on d'y 1
yoijer, ou vien au poirier. —
£. Quel mcllanee d'olFatres eaj
LIT&S II, CHAPITRE TH.
443
du plaifir. Vos gens ont fait jouer noftre Baron à
Michau; voftre valet les a laiflez voir, Carmagnolle
& lui, leur apprenant à frapper un coup à terre en
entre deux, afin qu'il ne paroifTe pas qu'ils voient.
— E. Ainfi nous voyons tous à nous malfaire , nul
à fe garder. Hé là, Monfieur, vous tenez trop long-
temps ce jeu debout. — F. Je ne m'en foucirois pas
de rien, mais ce pendarc toque tousjours d'un
extrem. — Ch. Que ferai-)e, quand je ne voi
goune?
^^M
V
Chapitre VIII.
Difpute du Lymbe.
.KNEiTe. Or tou dîavle lou ]rea
& les ferbietres, tanr elles font
dures : lou palTciemps cil pour-
lani gaillard, mais c'cli atTez. Ve
ne sente ooent au'tl a'v euÛ
LIT&£ II, CHAPIT&B TllI. 445
toute fa créance ^ — F. Je lur ai fait une fois corn-
penio pour un de vas Poidou, qui s^appeloit la
Combe, mais depuch il s'eft decomberti. Ye pris
garde à tous les punds : ils ne s'attachent qu'à la
primautai du Pape, & font von marché de tous les
autres : ye me fafchoi qu'ils ne lui difoient rien du
Purgatoire; ils me refpondirent que pourbu qu'on
ne touchaft point aux Indulgences, toutes les quef-
tions de Teftat des âmes après la mort eiloent trop
difficiles per lou commun. Je demandai à Père
Baile comment il entendoit lou paflTage de plufieurs
mandons & du fen d'Avrahan ; il me dit pour tout
potaye : Lifei ^^ deffus Sont Auguftin. — E. Encores
qu'il me fafche de traiter ces matières entre des jeux,
fi ne puis je me tenir de vous dire qu'il avoit raifon,
car ce faind Autheur prend à tafche d'expofer ce
poind, d'ihnt: Puis que ces manfions font en la maijon
du Père, quelle impiété feroit-ce qu'il y eufl quelque
lieu de tourment? Il conclud en ces termes contre
ceux qui veulent plus de deux lieux, foit pour le
Purgatoire, ou pour le Lymbe : Cette foi y dit il,
r^efl point foi Catholique ^ & par deux fois je vous
prie quavec vous n^ habitent point ceux qui habitent
en telle erreur^ Et quant au fein d'Abraham : Quelle
brutalité de loger dans ce fein où efl noflre efperance,
unfouyer & un fourneau de tour mens. Je vous monf-
trerai mot à mot ce que je vous dis, fans partir de
céans. — F. Je bous en prie, & auffi l'eftranye
paffaye de Charon, & cependant ye bous prouteftc
que ye bus tousjours croire lou Purgatoire & lou
Limbe, quoi que ce (oit. — £. Voïe2-vous ce
grand maiïbn borgne & Tautre païfan qui efl avec
lui? Ils ont quitté le jeu pour nous efcouter. Ils dif-
putent fans ceffe Fun contre l'autre, fi bien que ma
44^ avaktukës du baron de fakists.
befongnc ne s'en fait pis mieuic; ils en viennent
quelquesfoiï aux coups, & concluent en ftria fans
s'eniendre, & protefient lousjoura, comme vous, de
ne fe viréjà. Leurs raifons ne fc connoiffcnt poini à
la Sorbonne, & feroient meilleures pour U foirce
ce que nous difons. Je »
Is enragenc d'en dire leur a<
. bien à Icui
Chapitre IX.
Théologie de Clochard & de Mâihi.
£inESTB. Oy, ce Toi^e nous
cfcoutevîendepréi. Qu'en dicet-
bous, mon compère, du Limbe
&du Purgatoire? — Clochard. Eft
to do Picataire & do Zimbre
que ve difô? Y ve veil foere
vitnis, que me fitnetre Menihcre y
quo Crapucin de l'otre femoine. Eft to pa vrez que
le ceau eft tôt d'ine pece? Que difé? — E. C'eft
qu'il vous demande fi le Ciel n'eft pas tout d'une
pièce. — F. Je l'encens vien : bous ai-je pas dit
que y'ai demuré à Poitiers? Oy, eompere, oy, ye
bus vien qu'il foit tout d'une pièce. — Cl. Ve zou
vêlé ben, le Moellre n'a que foere que ve li ajué.
O ben, eft-co pas vrez que glé fat en voûte? —
F, Oi da. — Cl. Et qu'o fo difputré d'ine voûte,
o l'eft mé qui en fé moeftre fafou; y ai fat toute
lez caves de cions, c ly en ai ine qui a cronce braftizs,
& fi avoure ve vehé veni picqué in piquataire, ou
ben y gratté do zimbres, pr'ou foere chère & foere
treviré la moefon, y ou endurré, feré? & necre
Seigneur, qui é pu gron Moeftre queque vou, laf-
448 AVAKTUK.BS av BAROK DE PANESTE.
cherai cil picqué do civera pro foere do piqujtaire
& do zimbrcs, dtfé? — F. A quin perpaux toutes
ces mafTonnerieï? — E. Monilcur, faifons lui rcf-
pondrc par l'autre ; Avancez vous. Mâché, refpon-
dez à Clochard, il fait le fçavant. — Alathi. MenTteu,
agaré, y n'encenpoeni tome y quelles vétilles ; Clo-
chard a bea pirouetté fcn bounet dons les eilx do
prefoune quant glc parle ; O me fonvent qu'inc
foi ve li deraondiei s'gle vou velet virebrequind la
cervelle. — Cl. O \'ez ma menere, mez vequi le
bounec à bas. — AI. Agaré, Meflius, o l'y a[ ine
choufe, qu'y ferai toute ma vie delaMeffe, &CI0-
charr, qui cl^ in bea parlou, ne me farei gongnï
d"y quo coufti, E(l-to pi vraiz que leg nouzillers fieu-
rifTant à toute lez netre Damme? — Cl. Et ben,
pre quieu qu'eft-to? — M. O l'cft que l'Eglefe ou
a ben ordonni. — Cl. Eft-to pas vriiî qu'o l'at deux
Ckapitls X.
AiMurs du Barom & tnckanumeiu.
KAT. Ne faifoni poini nos ri-
lees criminelles : çà, parlons de
-is. — F. Qui n'eft en Paris
n'cft pas au raotide. Ma praubc
maiflrefTe m'atccnd de von cœur.
Diu fait fi elle ell en pcnc, la
paubrecce , yc lui ai pourtanc
eCcric. — E, Vous avez bien fait : car encores que
voftre guerre aie plus efpandu de vin que de fang,
fi eft ce que la Rochelle eft redoutée. — F. Elle le
full, mais nous l'abons defcouvcrre : les chaufcs ne
demeureront pas comme elles font : le Roi beuc que
fcs fortiticaiions foient rafees. Y'ai oiii dire à celui
qui a fait lou manifellc de Monfur lou Duc, que ce
qui fort des mens des revelles fera nzé, mais ce que
nous tenons demeurera là, en changeant de quelque
nom feulement. — £. Je crains ce que vous dites ;
retournons à Paris. N'avez-vous point la coppic de
la lettre que vous avez cnvoid? — F, Oi braiment,
ye penfe aboir le vroilkrt en ma pouchette, —
E. Voyons, Monlieur, des fruits de ce bel cfprit.
450 ATAKTO&BS OV BABOlt DE FJIKKSTB.
— F. Accendez, la boici : touî en rirez, ceci i
tout vroiiillé :
I MadamifelU, tnfin Us ajlrei (r Ui tlemtn.t
m'ont Uni iitdifgrarii de bofte vtlU abftiue tr doae*
mémoire d'rflrt /epari dt bot veaux ytux, froivlarltt
à une aurore plobiuftf çuc y'aboit/Mnt de [nu] pribfr
des champs Elifut. Toutûtfots, t! Jtroit itiu grande
îndi/couriaifie à boas de de/ouvlîer bofit praubt ef-
clabe. Alt rafie nous aboat lire la pi/louladt pour
l'amour bofit, ayans tfii foixaate cabalùrs viem
extermirtej, entre le/quels ye fais efiimai pour tut
buis rouTurier de guerre, à bel près de Tadon, défier
les revelles par deffus îars murailles. Et croiej qu'il
fera piirU du Baron de Fanefie en vonne compenio. J»
vous diraipour noubelUs qui bous ne me reproachértj
plus mes ckebaux indompiei, pource qittnctlie armet
LITRE II, CHAPIT&B X. 451
chcrchoic. — E. Ne marmoctoîc-elle pas des orai-
fons à l'oreille de Icnfanc? — F. Oi vien, abec
une eilolle fur lou col & un cierge allumai, & lou
beneftier là prés. — E. L'enfant ne difoic que ce
qu'elle lui grondoic dans l'oreille. — F. Et que
diriez-bous de ce qu'elle me mena dans un janfin,
& qu'elle me fit boir ma maiffarefle^ — E. Je dis
qu'elle eftoit de l'autre coilé de la muraille, & que
vous la vides dans la refledion de deux miroirs,
dont l'un efloit demi fpherique, pour empefcher
qu'elle n'euft les pieds en haut : je gage qu'eUe vous
fit un cercle, duquel vous ne deviez point fortir. —
F. Oi vien , mais c^eftet pourtant enchantement.
Or, ye bous en ai trop dit pour bous pouboir rien
celer : fâchez que celle que ye boulois efpoufer me
mit à telle rage, que ye boulus parler au Diavle. Un
Italien m'en proumit l'experiment, pourbu que ye
n'euffe poent de pur. • Pur^ dis ye, fi lou pont
levedis d^ Enfer efloit vejféy ou fi y^entreprens de le
.petarderj ye bous irai abec un nerf de buf faire trou^
ter la quanaille d^ Enfer àmonfervice. • Il falut donc
bénir à la preube. La porte Sant Marceault eftoit
ouberte toute la nuid, pource que c'eftbit l'année
de la. pefte. Nous fourtifmes donc pour bénir dans
une petite plenne qui eft à bat de Riflextre, où nous
arribons fur les onze hures. Mon homme me rede«
mande fi y' abois poent pur. • Ventre de Sant
Chriflolij di ye, ce font les Diavles qui chient de pur
de me boir^ & te font demander cela, Oi vien, il fe
fepare de moi & fe ba pourmener prés d'une hure,
& puis me bint prendre par la main pour me mener
dans un cercle. Il aboit un coudre blan en men abec
un petit fufil; il allume de l'encens, & puch aiant
dit : Adcfit fpititus bcnevolij & quauques moutets,
453 AVAVTu&is nv B'&ROir de neKSsrn.
il me fjLt colirner bera l'Ourient. N'uiant rico fait
de ce coflé, i! me tiiurne au Midi, où il commença
par : E: ecce ego totus vtjltr. Et n'aiam encorc»rien
fait de ce collé, il me dit : Ce Joui Us SepteMno-
naux à qui ceci appartient. Nou! failbns demi tour,
& comme il commençoit : Agit Vurcan. ye bi>i
comme fourtir de terre un homme aufli grand que
nous dus l'un fur l'autre, boiiITu debant & derrière.
De bous direforibiCage, pour cap SantMamoulin, il
me prend fi grande l'raj'ur ; regardez comme met
chebux en dreflcnt encorcs, ye me mets à hutte plu»
bifte que lou bent, ye tumvai dans des efpines,
& dévoue : courant donc fans regarder, ye me pred-
pite dans une caberne fur quauque chofe qui n'eftet
poeni trop dur, li vicn que ye ne me rompis rien . A
un demi clair de lune, ye m'abife que y'eftois dans
^s^^!^^m3m
Chafitrb XI.
Autres amours.
Et bien , «prés tanc de
Jt, eullet-vous la maUlrelTe?
", Sachez que je conti-
ncores de lui donner des
auvades ; jr'aboîs trots honelles
fils de bille, & un foir, comme
nous achebions de chanter, il y
aboit tout plain de louanges, entr'autres qu'elle
clloii la fource de ma bie, fontaine de toutes bertus,
fontaine de grâce, tout par fontaine. Comme nous
finillions ces dus vers :
Sait ie iùuetar ta fomaiiu
Comme tu l'ei if ^imié.
me boila une terrace pleine de pilTat, abcc quauque
bilanic parmi, qui me tira du fang de la leÂe. Mes
compagnons fe mirent à injures : l'un l'appella fon-
taine de merde, l'autre fontaine de piflat, & nousen
allons. — £. Et voila la cadence de l'amour. —
F. Depuis, ye boulus l'aller rraber: ces couquini
forienc abec alevardes, û vien qu'il fe faluc retirer
fore bifle. Le guet nous prit; y' en fus pour mes
.454 AVANTUKBS on BAR.ON DE TXSESTt.
trois yours au Chaflelet. Avec quauques païas, Jou
Manefchai de Ferbaques nous tira de là. Ye fis
encores un autre amour pour mariage, & depuis ye
n'y ai pas penfai. Les gens du Manefchai m'accom-
pagnoient, m'appelloient lou Marquis de Francifcis ;
force honneftes hommes de la Cour me preftoient
carroife pour y aller. Ce n'eftoit que la fille d'un
plumacier, mais elle aboie dix mille efcus petits, au
mens, difoit fa mère, qui pour faire fa fille Marijuife,
me la fiança, Lou malheur boulut que lou Manefchai
me dcvaucha pour aller au vourdeau chez un miif-
tre Thomas ; il monta lou premier en la chamvre
haute, & puis me fit place pour aboir ma part. Cap
Sanc Philebcrt, ye iroubis que c'eftet ma fiancée !
Vou m'en alli fort penaut, & depuis n'ai penfai en
mariage, encor que Monfur Cayer m'euit promis de
m'en amener une au mouiouer ûar enduncement.
«' Chapits.1 XII.
Bifioirê df Cajrtr.
KAT. Et croies-votu que Ciyer
en feuft plus que les autres? — '
F. Ha, Monfur! il m'a monilré
des libres de magie compoufez
par lui, de dus pieds de haut;
il m'a fait boir dans une couque
d'uf où il faifet lou pcûl homme
abec des germes, des Mandragores, de la foie
cramaufie & un fu lest, pour parbenir à des chofcg
que je ne bus pas dire. 11 m'a roonflraî tes images
de cire qu'il faifoit fondre tout -vellement pour
efchauSer le qur de la galande, & celles qu'il bleC-
foii d'une petite flèche pour faire périr un Prince
à ce^ lieues de là. Qu'en poubez-bous dire? —
£. Je croi qu'il eftoit enchanteur cpmme les autres.
— F. Et quoi, bous autres ne croiez-bous ni An-
ges, ni Démons? — E. Nous ferions Sadduceens,
comme un hérétique de ce pais que je ne vous nom-
ffleru pas, pource qu'il a fait femblantdele repentir.
'45*^ AVAKTDRGS DU BAROK II* rfKESTB.
L'Efcricure nous apprend i^u'il y a des etidwiirciifs
& des forcicrs : les premiers rares, lefmnin qu'un
Duc de Savoie a defpendu cent mille cfcus k cti
ccrclier; les autres trop frequens, au nombre dci-
i]ue!s je mets Cayer, qui s'eftoit doiini.' au Diavle
[Mr cedule fignee de fa main, (lipulcc de U main de
l'acquéreur, Vuus avez oùy dire fon horrible mort;
mais j'ai veti encre les mains de Monfieur Gilloi U
pièce ori[^iiiaire, lors que la Cour delibcroit pour
faire brullec fon corps ou le pendre à Monfaucoiit
les pieds en haut; mais on trouva des Seigoeurs
&des Dames de li haute eftoffe qui pjrticipoient àfcs
horreurs, qu'on eftouffa cette ordure, comme on fait
aujourd'hui d'autres, qu'on cllime c!lre plus fcur île
faire pourrir en noilrc fcin, qnc de les mettre horî
en évidence ; & !à, le parcftrc n'cft pas à propos. —
F. Ed-il brai qu'il aboit auflî bcndu nu Diavle fon
X.ITB.1 II, CHAriTB.B XII.
4!7
poent beu, ye bous prie de me le donner. — £. Je
le fai par cœur ; il y a ainfi :
Huguenots, vous croies qu^au doux fein de VEgUfe
Sont nourris tT fauver Us fideUs fans plus :
Nous difons que parmi les agneaux, Us eUuSy
Elle emhraffe Us houes Cy Us loups favorife,
Cayer voulut loger Us putains en franchife,
Canonifer pour SamBs Us veroU^ perclus,
Noftre Eglife l'a pris quand vous nen voulie^ P^p
Catholique, il pour fuit encor fon entreprife,
La paillarde le veid Martyr pour Us bordeaux,
L'Avocat des putins, Sindu des macquereaux ;
Elle ouvre fes genoux, VaccolU tris humaine.
Honteux, banni, puant, verolé, ladre vert.
Huguenots, confeffer que l Eglife Romaine
Tient fon giron paillard à tous venans ouvert.
— F. Cet homme aboit proumis au Mencfchâl de
Ferbaques plus velles chaufes du monde, & deboit
en eftre.
i
CflAriTRB Xni.
Du Marefchal de Ftrvacquts tr des clers du Palais.
ïM{
KAT. Comment cll-ce que le
Marefchil avec qui vous avo eu
tant de privauté, oc vous a
avancé? — F, Oi viea, pri-
vauté, oi, fi vjcn qu'un embius,
LITRE II, CHAPIT&B XIII. 459
nenc leur marche de ma mefure. Je penfois au
commencement qu'ils vactiflènc la garde, & ne bous
mentirai pas, que comme ils prenoient la pêne de
s'afTujettir à ma démarche, aufC abec quelque plaifir
ye m'adonnois à lur cadence. Je m'apperçeus en fin
qu'autant de rue que ye changeois, ils en chan-
geoient aufC. Ye m'arreftai, & eux aufli; ye repars,
ils vattent aux champs. Quand ye fus vien las, ye fai
ferme & lur demande : Pourquoi bcnei-bous par tout
où ye baiî Eux refpondent : Pourquoi alUi^ous
par tout où nous tenons f — Pourquoi fonnei-bous
quand je marche? — Eux : Pourquoi marchef-bous
quand nous formons? — Pourquoi ne fonnei~bous
pas quand ye n^arrefte? — Eux : Pourquoi bous
arreftei'-'bous quand nous ne fonnons plus? De
mefme fur la marche à Taccord & fur l'accord à la
marche. — En fin^ di ye, ye boi vien que bous
efies des vouffons : pou cap de you, you bous
fondrai lou parchemin, — Nous bous nuttrons la
caiffe dans la tefte^ comme au Curé \dé\ Sant-Euf"
tache, Ye mis la men fur la poignée de Tefpee, eux
fur les lur : en fin, le plus veau que ye puiflTe faire,
c'eft d'entrer che2 un fourvifliir, — E, Vraiment,
cette champifferie n'eftoit que gaillarde; j'en vis
faire autant fous la halle de Nyort à un Gentil-
homme qui avoit un de fes bas de chaudes bandé
au haut de la cuifTe & l'autre en courcaillet. —
F. J'eftois vien de mefme, mais cela ne me fepara
poent : &me(mes quelques vadineries que ye receuffe
chez lou Manefchal, fi la guerre à la huguenotte
euft commençai, ye lui abois promis une petite bri-
gade d'un païs. Ye lui eufle mené quauque huid
mille harquebufiers & dux mille chebaux, force
cabdets ; mais ye fus irritai par d^autres biedaferies:
460 AVANTURBt DU FARON DB FSKESTe.
comme un yor ilt firent partie en difiianr, une bin-
Esinc fans les bcîleis, de s'aller praumener dans h
làllu du Pûih tous clperonnez à quatre hures. Ve
ne mis de U partie, La taquanerie fut qu'en mon-
unt loo degrai, les laquais ouiereni les efperons de
lurs maillres, & les miens me demureni. Quand nous
fuîmes dans la falle, eux-mefmes m'accufercnt. Bcci
aufli tuil à mes yomves de petits \'afochicns, & moi
à trucs, penlanc qu'us en titrent de mefme. Les
boila touii à rire, & moi oSenfé des pugnadcs que
tirent ces maraux. Us m'enlcbirent fur lur ceile ; boua
culTics dit qu'ils me bouloient faire leur Roi :
& patience puur cela, n'eidt elle que les petits me
donnoienc par dcffbus quauqucs foiÎTades d'efpiugles.
Quand ye fus efchapai, ye dis tout haut que qui-
conque aboit fair cela eiloii un fot, ce qu'ils abuiic-
reni. N'cllant pas facisfiic, y'appeUi traître un qui
Crafitkb XIV.
Comi de Matthéf dtt quatre Cunj,
NAY. Si vous euflîei mené la
brigade promife au Marefehal en
Aunix, pour le jour de l'entrée,
vous euITiez elle le bien receu. —
F, A diavie! ce n'cflec pai la
huguenoccc, & puch abec ceire
trouppe y'eulTe fait celle pouSiere
que nous n'eu0ions feu boîr la bille, ni cUe nous.—
£. Voila une belle difcreûon ; mais i. propos de
n'cflre pas fur les armes, il arrive de grands acct-
dens faute d'eflre préparé. Voyez-vous bien ce faux
païfan avec fes nouzîUes ; il lui cil arrivé une avan-
ture qui n'efl pas excellente comme les voltres de la
Cour. Je vous la dirois, mais il me fafche de vous
faire un conte de village. — F. Ne laiflez pat,
Monfur, ils font par fois les millurs. — £. Ce
compagnon ell un macquereau de village. Il entreprit
tout ji la fois quatre Curez & leurs quatre cham-
brières. A chacun des Curez il dit : u Que vouitj-
vous faire di celle vilenne falaude, cette efdenieef
Je vous en xtux doMifer une propre 6* honiM(fie. n Et
l AVAVTDRES DU
RON DE TSKtiTC.
dit mfli à chacune des garces : h Çue veax-iu fiire
avec ce vieux pourri, veroU, qui n'en peut plut?
Je te veux donner un maiflre quï fati bonne ehere :
tu es encores jolie.n Tous les huifl aiant promis un
prcfenc, i! fit mettre les manches rouges aux quatre
chambrières , & adimaacher les quatre Curez,
& changea tuui fans forcir des huîA , & en eut un
manceau, un chapeau & cinq pilloles, donnant
pourtant ordre que la moins vUetine fuft à fon pro-
che voilin. Un foir il lui faifoic l'amour par la
fenertrc en l'abfence du Curé, & n aiant pu faire
ouvrir h porte par proraelTc, en fin il la menaça que,
fi elle ne lui ouvroîl, i! cmmeneroît le gorret, & s'en
met en devoir, & Magdclene de crier aux volleurs.
Voila le compagnon à la fuite. Le Curé de retour,
la fidelle ne faillit pas de lui dire dans le lid, qu'il
LIV&B II. 'CBilPITB.S ZIT.
4^3
ouvrir la porte, il mec le doigt au pertuis en delaf-
chanc. Ce fut à crier à plenne tefte, & Macthé à fe
fauver, & aux voifins, qui accoururent au fcandale,
à deviner qui tenoic ce pauvre homme.
CH-*PlTttB XV.
Théologie de Surgeres, gaerelle du Baron.
«N«T*. Boila vonnehiRoirede- 1
bilayc. Toucque la mcn, croit- (
ye fuis ton camcrade d'à
bamures amourufcs. A l'autre |
biace aue ve fis à Sureer». ve J
LITRl II, CHAPITRI MT. 465
dans lou conniberc. Ils difenc que Sanc Rigoumé
guérie de la coulique, mais pour cette hure il m'en
vailla la malaufie. Je ne me foubenoi pas de Tefcri-
mur que ye bous ai contai, qui m'aboit appellai :
par lou villet queye lui enbouiai,ye lui donnai aili-
gnation à demie lieuë hors des faux-bourgs, à Pendret
du clocher Santé Genebiebe ; ye n'abois garde de
prendre lou codai de ViiTeftre, de pur de la pur
que y'eus de l'enchantement. Ye m'en allai aux
pierrieres de Baugirard, où quauquefois ye me
mettois à coubert de la vize. Ye ne fai pas fi lou
galland fe pourmena long tens : mais pour fe ban-
ger, il me donna affignadon, comme la Cour eftoic
à Moulens, pour nous vattre au Grand Jardin. Bh
pcnfant aller à lui, ye me ronce dans Tatitre conni-
bert. C'eft grand cas quand dux ofiniaftres font
enfemvle, ils ne bulent rien lailfer alter. Loi! Manef-
chal de Viron, y'entens lou dernief5 ellani à Ch#t-
voutonne, m'accorda une querelle abec un auyereau
de là prés ; nous fuûnes fur lou pré : ye m'arreftai
fur un petit tuquet plus haut pour hoir au loin, de
pur de fupercherie. Lui qui eftoit au pré, me dit
que ye defcende ; moi lui dis qu'il monte. — Biens
à moiy difoit Fun. — Biens à moi, difoit l'autre.
Chacun bouloit garder fon haunur. Nous fuûnes
fi long tens fur lou : Monte haut, & fur lou :
Defcend ça bas, que lou mounier & fa femme fe
mirent entre dux. — F. C'eft bien fait d^avifer aux
fupercheries ; eft-il poifible qu'en tant de querelles,
il ne vous en foit point arrivé une ?
^^.
HT
II. 30
CKAFITaE XVI.
Combat d* Cvri>i/ieju.
AN8RTB. Poubez dire, c'efl ce
qui fait que ye n'y bai plus i la
(levaRilidc. Il n'y a pas im moi»
j'ciloij lougé à Nollrc Dame, à
Xentcs; il abinc qu'cfttni un pu
LIT&B II, CHAPITRJ XVI. 467
dont, pource qu'il eftet eftropié d'un vras & d'une
yambe, ye l'appelai à chebai, au pré lou Roi. Le
Courdelier à qui ye me confefTai abanc aller au
comvac me dit gouguetes de ce paillard, & me le
defpeignit comme le fraudeur des rufes que boiitf
boiez en Amadis. Il fe troube donc à Taffignation,
dit qu'il me bouloit bifiter, de crainte que y'eufle
cuirafTe. Que fit lou defpouderat? Il mit vas la
vride de mon roufli, & de meûne tens lui donne
de la vourde fur veau nez pour lui faire tourner la
tefte. Ye mis l'efpee à la men, penfant lui donner
un pic par deflus ^elpauie;i^'pa^e de la vourde &
tourne à pics fur moi; boiU mon chebai dans lou
fauxbourg des Dames : ny utez que c'eftet un yor de
marché, où il y aboit force cabales. Boila mon
diavle après ; le bilen me fuiboit tousjours à pics
& foilTades abec fa vourde. En chemin fe troube
lou praube Chanoine Roi, qui alloit à Therac;
cette mefchance vefte lui mit les jamves fur les ef-
paules & embeffe fa yument. Boila lou puble à rire,
8l mon Corvineau me boiant aflez emvefongné, me
dit : (( Faites j faites^ & bous en berui, 1 Encor lou
pis fut des pitaux qui à velles peyrades & valions
bolants, bouloyent feparer le chebai & la yument,
dont /eus par Tefcbine force trucs & vallonades,
ce que je ne pris pas au poent d'aunur, car ce
n'eftoit pas à bon efcient ; d'aillurs force canailles
qui chantoient au tour de moi Jehan Foutaquin,
Que boulez- vous, ye ne peux pas tous les appeller
en duel. J'ouvlie à dire, comme il me pourfuiboit,
qu'il crioit bidoire : ye n'eus patience de tout le
monde que ye ne fuffe appoenté. Lou Maire, qui
faifet l'accord, havile homme, m'allègue fon eftro-
piement, que /eftois demuré lou dernier fur le lieu,
KTURES DV BARON Dl FJSNESTK.
& qu'en fin s'il efloic moi, il fe coDceaccroii ; ye fui
donc prie d'ouvlier. — ■ £. Je croi que fi euft il fait,
s"il cuft cHé vous-mefmes; mais pour le codu, je
vous prie, ne me priez pas de l'oublier & en tout
je dis que voila une notable fupercfaerie, & fi a'e&
point faite à la Cour.
Chapit&b XVII.
EnchanUKiju à la Cour fur lu oituivt du Banm.
*_£~^à-*-z:=^ «wifTi. Je bi« raconter duu
iÇr^^^^V la chimTic du Roi une querelle
•I mrWSnts fcmvkvle & un »eau prouceder.
Ve boudrois mboir donné cent
pillolu de la coupie. C'eft l'excer-
lence de U Cour ; ollei en les
Daines, lea duek & lei bileu,
ye ne vondrois pa* bibre. Là & aux champs ^aî
cousjours troubé force erobiua à ma fornrne. Mais
pour laiiTer là ion billage, yc bous dirai que ye
m'accouflai d'un Counifan qui s'appclloit Sani Vha-
lix, homme vien benu chez tous les Princes & Priiw
celles. Ceitui-ci m'ayant ouï &ire cas des encbaa-
cemens, me dit qu'il en faboit plus que Coftne,
Casfar, lou pedt Preâre, k)u Curé Sanc Sainroin,
que Meffire Louys de Marfcille, qui aboie lant coo-
facré de crapaux, couché abec fiz bingts bierges
par enchantemenc, mangé tant d'houlUes denabcaux,
qu'il en faboir cncores plus que ces dux Prcltres de
qui bous boycz les proucez imprimez, & que Tans
tant de myfteres, lî ye boulois, il me meneroit en
vonne compeino, où il paJIÎHi les foines, fans que
470 AVAhfTURlS DU BARON DE P£MB£TB,
ye fuifc bu. Pour m'alTurer davantage, i! me gagna
un laqués qui s'appelloic Vulpin. I! me fi( mettre
mon mmteau à l'enbers & mon ehappeau la gu!e
en fus, prendre de chaque meti de la cendre, yetœr
de l'une en vas, de l'autre en haut en difant : Taf-
Jiui ti. Cela dit, y'enire dans la charavre où ef-
toient fes beilets & le mien; un d'uï me tocque
bentre contre bentre; mon laqués me donne d'un
tros per l'os de la yamvc. Anfi affuré, ye m'en boii
abec mon homme [cher] une DuchefTe, là où une
fille de chamvre qui empefoit, me vrida lou nas
d'une confufion par mefgarile, Sl moi de fous-rire.
Le yor d'après, il m'y mena en chebal ; toutes le»
Dames fuïuient & fc cachoent fous les lids, par-
ce qu'il me faifoii ruer, mais quant Sant Fiielis Mt
que les beilets benoient à l'alarme «bec fourches,
chamvricres abec nerfs de vuf, il rae mené entre
dux portes, me remet lou mante & lou chapeau-:
boila la paix faide. Un auireyor il me mené en lioa,
& un autre en afne, & me menoit par l'oureille ; &
puch, quand ye fus debenu amourux de la Dune,
il me changea un yor en efcaveau, furquoi Fer-
baques s'a£oit prés d'elle; le rivaut. me fil ploier
Ica rens en fe lailTant choir fur moi, & pris plaifir
d'entendre de lurs amours : par fois ils difbent mal
du praube Varon de Fznefte : en fin, mon gouber-
nur s'abifant que les yamres de l'efcabeau plioient,
ft fuoii à groffes gouttes, il s'en bint dire au Ma-
nefchal : • Si bout boiJej efire au eouchtr du Roij
il efi temps; i enfl il me delibra d'unpefant fardeau.
Quand nous eufmes enfi plufieurs fois fait de le*
nolb'es, il s'abifa d'un veau plaifir : un foir il me
mena vien bellu, & quand ye fus dans la falle,
tout !ou monde me prenoit pour sud, & me cluuf
I
LIVRE II, CHAPITRE XYII^ 471
gea les mots, me faifanc dire au lieu des premiers :
teuo fel faruaut. Les yunes Dames s'eftoimoienc, fe
cachoienc; les bieilles & les beilecs prenoienc des
cencures; alors il me faube dans la garderove, &
monftra que c'eftec par enchantement. £n nous
retirant au foir, ye m'abife d'un vrabe trait : c Cette
dame, di ye, me met la men fur les chaufTes en
debifant ; ne me fauriez-Bous mener là dedans tout
nud, & que ye femvlafle bien beftu? — Autant
faflible Tun comme Tautre, dit mon homme, t — Le
foir du lendemain benu, il me mené dans une petite
gardçrove, & là m'aida à defpoUiller. Quand y'eus
ofté la chemife, y'eus quauque apprehenfion , me
foubenant le foir auparabant que les Dames m'a-
boient dit : « Ne benei -plus enfi tout nud^ on bous
def coupler a des fouet leur s. » Je dis à San Phelis à
roureiUe : « Ye me troube moi mefme tout nud.
Lui me réplique en coulere : « Et où eft Vaunur? Hé
depuis quand la pur au Varon de Fanefle ? • Ce fut
affez dit : ye faute en la falle comme un lion ; &
Dames & filles à gagner la porte du jardin. Noutez
que le mefchant Sant Phelis bouloit aboir fon plai-
fir de tous, tellement qu'ils n'eftoient poent abertis.
Tou lou mal que y'eus fut une bieille Damoifelle
& une famé à chaperon & dux petits payes qui
aboient quauques centures & quauque vufc. Après
quauques effuyades, ye gagne la garderovc, où ye
m'enfermai : Texcufe de l'architede fut que nous
abions failli aux moûts, qui eiloient te uofel iaruaj.
— E, Tous magiciens font fujets à faire des fautes,
car le Diable eft trompeur. Je ne m'eftonne pas fi
vous dites que qui n'eft à Paris n'eft en nul lieu;
vous n'cufliez pas trouvé ce plaifir au village. Le
profit de voftre hiftoire eft fur ce mot : Oit efi Vhon-
47'
NTURBS OU BARON DR FfMbSTC.
ncurî C'cft une refolution qui mené les gcn« aux
coups, non pas feulement de ceinture & de bofc,
mais au gibet & à l'echaffaut. J'en l'ai cjui ont prit
U vérole par honneur, St i ce propos je vouk veux
rembourfer d'an eonie empour les vollres, duquel le
mot poLir rire eft cci hontieur ; feulement voua veuit
je faire fouvcnir que VEflre & le Pûrejlre lombcrent
d'accord en voftre accident. — F. Tant y a bou-
yant qu'on me faifei h guerre au Loubre de cvs
foulies, ye m'en bins de dcfpii en celte expédition :
mais ayons donc boile conte.
Chamtri XVIII.
ÀMUare fur Brillraiit & far U MM : Oi ^
l'hoMMâurt
KAT. Le Roi de Navarre, cftani
Ion à Ageit, avoû promia ^ une
vieille macjuerelle nommce Mir-
roqum, de loi donner une nuiAee
de fa Majcfté, poorven qu'elle
lui livrait one de fes bellet fceurt.
-La vitenne avoît quelque vérole
& la peau greoee, dont elle avolt eu ce nom. Un
foir que ce Prince fe defroboic par l'efcorte, avec le
Sieur de Duras & quelquea autret, & Peroton qui
portoii l'elchelle, un jeune rouITeau qui t'appelott
Brllbaut, tousjoun brillant, fe fàifanc de felle, quoi
que fouvcnt reponlTé, fe mit de la compagnie, mal
venu du commencemeni ; mais quand l'efcallade fut
pofee i la feneftre, il prit un mal de coeur au R<»
en peniÂDi aux boutons qui fervcûeni de pMnçoni k
k Nymphe ; il fe repenne donc d'acheter û cher
un repend : il fe tourne k Brilbaut, lui demande
sll efioll foQ ferviteur ? L'autre ayant proteSé ;
tAlUj, dit il, /w Moi'j & r€vtae\Jmu parUr.—Jé
n'avuMm, dit BrittNUiir 911* ^'< n« mttu ta la pUog
474
ITAMTURIS DV BAftOM DE F«MtTH.
de mon Aîaiflre. iLeRo! adjoufte: ■ C'efimanqaeà*
courage. Où eft Phonneitrf Si vous eit avej, vaut
ferei ce que je commande. » Quand Je PaUdin veid
qu'il y alloit de la réputation, il faute en rcfchcllc
comme vous fiftes en la falle, trouve la feneftre
ouverte, il entre & va au lift, où il fut rcccu avec
harangues bafles & baifers. Il voulut bien exécuter
tout habillé; mais la Dame dit que ce n'ellnit pat
fait en Prince. Elle donc le dcfchaufTe Se. lui oilc le
pourpiitnt. Entre les lînccux, h courilfiine voulut
du prcambule: aQttoï^ Sire, ne fnuroi-ye aboir utie
parole d'un Prince qui /ail tant d'hauniir à u/te
praul'e Damifeile? i Tant fut preiTii le tnuet qu'il
falui di re k l'oreille : « Parle j bas, je ne fuis pas le
Roi. u — Il Que diavbU efles tous donc ?v lui rdpodd
elle. Il n'eut pas ficoft refpondu ; t Brilbaut, * que la
voila rrier i nleineteAe : uBotseï BrUumîif lumtmii ■
I
LIVRE 11^ CHAPIT&B XVIII. 475
vingt tambours par les rues, les trompettes & les
cloches. Il ne fe debattoit plus pour fe depeftrer,
quand les vallets du Sieur de Frontenac courent
par deiTous la treille porter les armes à leur maiftre;
le premier donne du mourre de la falade dans une
cuifTc & de la crefte dans les genitoires du fantoûne^
& tombe en arrière du coup. Celui d'après voyant
cela blanc en Tair, & fon compagnon à bas, fe met
à crier : Avete^ omîtes fpiritus. Mais le pendu ref-
pondit : « Héj mes amis , ayei pitié de moi In — A cette
parole les deux coquins fe refolurent de le prendre ;
il ajoufta : « Ne me monftrei à perfonney & je vous
ferai un prefent. » Alors ils crurent que c'eftoit un
des traiftres dont venoit Palarme; fi le menèrent
prifonnier fur fa foi dans un coin de Teftable, lui
donnant pour le couvrir un caparaflbn bleu bandé
de blanc & de jaune. Le prifonnier, ne fçachant
comment appaifer toutes chofes, les prie de ne
s'efmouvoir point, les affeure que ce n'eftoit rien,
qu il racommoderoit tout, que ce n'eftoit pas à lui
à monter à Tefcbelle, qu'il avoit efté trompé. Aiant
olii ces propos, un valet de chiens picque à la
chambre du Roi aflurer qu'ils avoient pris un pri-
fonnier qui eftoit un des principaux de l'entreprife.
Le Roi commençoit à foupçonner qu'au mefme
temps de la folie fud arrivé quelqu'autre chofe,
quand le cadet de Frontenac, qui avoit porté de
la lumière à l'eftable, vint avertir que c'eftoit
Brilbaut, qu'il Tavoit connu fans eftre defcouvert.
Quand la nuit & l'alarme furent paffees, le Roi vou-
lut avoir la gloire de délivrer le prifonnier, s'en va
avec joyeufe compagnie à l'eftable refpondre de fa
rençon aux vallets, & remmenèrent tout boiteux,
la tefte paflee dans la teftiere du caparaçon, dont
470 AVAWTUliaï DO BARON Dï FfiMBSTll.
Peroton portoit la queue, parce qu'il eftori trop
long; & ainfi le menèrent en la chambre du Ror, où
il fuc receu honora blemcnc, coui le monde criaiu :
« Vivt i'konneurtr V amour ênfembU ! a Rien ne UScht,
tant Brilbaut qu'un pcnnachc du mulet de Froi^
tenac, que ces coquins lui avoient attaché par der-
rière. — F. Boila le plus veau conte que y'ai jg
entendu; e(l-il pollivie qu'il foii cidî arribai>
^"W
CHAriTB.1 XIX.
Sur PEfirt (r Parefire, le couchtr da Baron.
HAT. Nous avons au com-
meDCcroeni protellé de bourdet
vrayes : nous n'avons rien dit
en tout noilre difcours qui ne
foit arrivé , feulement avont
nous aicribu^ i un meCme ce qui
appartient à plufieurs. Le profil
de tout noftre difcours eft qu'il y a fut chofes def-
quelles il eft dangereux de prendre le Partfire pour
VEftrt : le gain, la volupté, l'amitié, l'honneur, le
fervice dn Roi ou de ta Patrie, & U Religion. Vous
perdiftes voflre argent quand vous penfiez gagner;
vos voluptez de Paris vous ont donné des m^adîesj
voRre ami vous a faiA Fouiitier; l'honneur battre
& mefprifer. Les deux derniers poinfts font de plus
haute confequence, aullî en eft la tromperie plus
dangereufe : car ceux qui font pareRre defirer le
bien public le deGrent, mais pour ioi. Et à ce pro-
pos, il fut fait à Lodun quelques couplets fur les
zélateurs du bien public; quelqu'un y donna cette
conclufion :
E* fin tkituit iatftt
Im gutrrUf Cr prMtjU
NTURES DU BAKON DU ;£\ESTS.
Ni vouloir qui U bien :
Chiicun au tUa a/pirt.
Chacun et tua âefirt^
El te dtfire fi£tt.
S'il y a du Pareftrt fins Efire de ce «jfté-Ià, il
n'y en a pas moins de l'autre; mais l'abus du
Parejlre en la Religion, qui eft le dernier poinô,
eft le plus pernicieujt, pource que le lerme d'hypo-
crifie, qui fe peut appliquer m jeu, à ramitié, à la
guerre & au fervîce des Grands, eft plus proprement
voiié ;iu fdc de la Religion. La condition de nos
dilcours & l'heure qu'il eft n'en permettent pas
davantage, & nous convient aller dormir, Prenes
ces cliandeliers, vous autres : iUouï, Idonfietir. — ■
F. Bous me faiftcs grand defpit : que ne ditca .
LIVRE II, CHAPIT&B XIX.
479
poenc de perpunt; vaille lou mante. G)mment,
Monfur, bous ne me difiez pas qui bous efies. Tout
lou monde bous connoift : bous avez de fi vonnes
places, tant faic de ferbices; on bous a ofté bos bieilles
& noubelles penfions, bos gamifons n'ont efté paiees
il y a dux ans, on bous pille, bous qui fauriez vien
piller les autres, & bous ne boulez pas que nous
parlions de TEftat. Y'ai appris quauque caufe de
voftre fecretari. — £. Je n'ai point de Secrétaire ;
celui qui efcrit fous moi en pourrait trop dire, & je
ne me veux pas venger par paroles de ceux qui me
font tort, fçachant bien endurer perte de vie & de
biens de mon Roi. Mais de ceux qui abufent de fon
nom, après avoir bien enduré, je me pourrai plain-
dre avec efficace. — F. Je bous bus monftrer demen
matin que ye fai le fecret de l'efcboifle, & bous
dirai dts noubelles que bous ne fauriez bous empef-
cher de repartir. — £. Bon foir, Monfieur, vous
vous morfondez, — F. A Dieu fias,
FIN DU SECOND LIVRE.
LIVIDE TI{qiSIESmE.
t de Fanefle à Paris.
NAY. Que cherches-iu mon
fils? — Ch. Quelques efpoul-
fettes, un miroir, une chauffe-
recce, un manche de cuillère,
du bran de froment. — E. Mou
ami, tu trouveras tout céans ;
mais à quoi bon cela? — Ch.
C'ell à irouflêr la mouftache, à netcoier le cuir ;
noftre homme ell propre comme un chandelier de
bois aux chofes qui parefTenc; pour le refle... je
lui ai veu mettre tout fon argent en une fraîfe Jt
grand danielle blanchie en Flandre, que fa chemife
eflant pourrie fur lui, il n'en avoit plus du tout.
Quelquesfois, enpaflan(pa'is,ilempoigne la chemife
f cttoïc de la ficiuc d'cniaiu,
[>')ur rcincvlc à la matrice, i
oc iiilt [loir blaïKJiir les <
Baron Tem porte dans le deg
fon aile, & clic lui ferma la
la batcift. — £. Vraiment, n
honnefte maidre. — Ch. IL .
Targenc ne manquoic point;
faute d'or, nous ne pouvons
E. Si, a il aflez bon cqui{
pied bien couverts. — Ch. Q
Paris, chacun pour foi & D
nous promenons aux foirs ave
la M atte ; tout le jour nous j
devant le Louvre , avec les
& tous les avantages de cartes
vanté à vous, & à quoi il i
& puis nous lui donnons fo;
Quand nous fommcs par pais
nous plumons la poule fans cri
village, c'eft à dire que nous fai:
fourriers. Nous nous mettons d
tous en un, pour avoir argei
avons toufjours auelnnoe ^«-J-
LIVRE III, CHAPITaE I.
483
à rhoftellerie, ce qui n'arrive gueres fouvenc, nous
emportons tousjours quelque ferviette, & s'ils n'y
prennent bien garde, le linceul ; mais le plus fouvenc
nous logeons par honnefteté en quelque meftairic,
& puis aux noblefles par fois, & fi nous avons
affaire à gens qui n'ayent pas le courage de foiiillcr
l'équipage, nous faifons fauter ce que nous pouvons :
mais en un lieu comme céans, nous n'avons garde
de jolier à ce jeu là, car ctH moi qui leur ai appris
qui vous eftiez. — E. Vraiment, mon ami, je te
remercie, & comment me connoiflbis-tu ^ — Ch.
J'ai porté la pique à quatre cornes dans la compa-
gnie du Capitaine Bourdeaux, votre Sergent major.
Je me fouviens bien quand vous pendiftes de vos
mains Patavafl & fes quatre compagnons auprès de
Barbezieux, parce qu'ils vouloient que Thoftefle leur
greffait Tengein de beurre : mais vous leur fiftcs coup-
per la corde pourtant par le capitaine Fonfalmois,
que nous cachafmes plus de dix jours dans le bagage
& au logis, pource que vous faifiez femblanc de le
vouloir tuer.
W
m^^^^^^sm
Chacitre II.
l'ie de la Dame de ta Cofle if dei Bohemient,
Vraimetii, mon camarade,
me donnes des enfeignes de
connoiffânce, Tojche moi à la
LIVRE III, CHAPITRE II. 485
■ - ■ ■ W • I II ■
de cela, il faloit loger avec excufes & grands re-
grecs de rincommodicé de Madame & de fon hofte.
Le lendemain au partir, on commandoi^ à la Damoi-
felle de donner quelque efcu : elle en monflroic un,
en difant tout haut que le bon homme nVftoic point
fi mal appris. Or, U advint qu'à jour couchant,
ayant fait joiier le trebuchet entre les deux meftairies
de Maifigni, oCi il ne paroiffoit perfonne dehors à
caufe de la pluie, nous les .crouvaûnes toutes deux
plaines de la compagnie de Charle Anthoine,
& c^eftoit lors qu'il venoit de faire un bon tour de
fon medier à S. Cire : car, aiant fait furprendre un
des compagnons en larcin, il le falut aller pendre à
un demi quart de lieuë du bourg, où tout le peuple
courut pour voir le pafTe temps. Eftant bien confefle
& admoneflé, aiant baifé fa femme & fes enfans, il
s'avifa d'en appeller à la petite Egypte, à quoi il
falut déférer, & cependant le petit mefnage avoit
fait un grand mefnage dans la bourgade, & fur tous
vifité le Curé admonefteur du patient. — £. Je
connois bien les compagnons : ils firent des leurs
à Maillezais, le jour S. Rigoumé. Le Capitaine
couppa la bourfe du Prieur en fe confeiTant à lui,
pour commencer le bonne journée. Ils defiroberent
quarante cavales aux pèlerins, leur remonftrant fur
le foir qu^un tel voiage fe devoit faire à pied, eftant
le bon Saind neveu de Sain£te Catherine à la mode
de Bretagne, & me(me leur remonftrant l'accident
arrivé au médecin Baumier, à une proceflion de S.
Mexant, pour y avoir cheminé fur ion mulet.
Du Théologal de AS(ùlh\4ii.
NAY, Un Théologal qui eftoit là,
aiaai furieufement prefch^ contre
les difeurs de bonne avanture,
fut tellement mefnagé par une
vieille Boefmienne, qui lut fil
croire qu'il eftoit enforcelé, qu'il
s'alU cacher arec elle en fon
logiN. Elle fit apporter de l'eau claire, & prefenta
une bague au DoÂeur, qui l'ay^ant mife de fa iluin
dans le verre, & l'eau eilant troublée, Se depuis p«r
l'épreuve d'une poule & d'un mouton, qui mouroient
fur l'eilotnach du patient, & qu'il faloli jetter par
dclTus les murailles, où le petit mefnage acteodoit;
il faluc venir à une ofi'erce de treize doubles ducats,
doRtlavieilleen donnoit un, qu'il porta vingt quktre
heures coufus au coing de fa chemîfe. Durant cet
affaires on lut crocheta le buffet, & quatre ceat
livres dedans. La vieille pour fe fauver deguilèe,
prit le bail du mulet du moine, mit la croupière dans
fon cou, le baft fur fon ventre, & couvrant le tout
d'une gracde mantcline, pafla pour femme preRe k
LIVRE III, CHAPITRE III. 487
i
accoucher. Le lendemain le Dodeur fe trouvant
trompé monte à cheval, ce quUl n'avoit fait il y
avoit longtemps, court après les Sarrazins, les me-
nace. Anthoine Charles lui difoit : t Hé! que cous
eftes bien hurux, mon bon Signur, d^eftre fi bien
guéri! Voiej, Meffiurs^ comme il fe tremouffe^ Hé)
la belle cure que voila! i La bonne femme avoit
eiludié fix ans à Montpellier, fi bien que le monfîeur
ne fut rembourcé d'autre monnoye. Mais je vous
amule & voftre train n'eil pas logé, car vous elles
demeuré entre les deux meftairies. Que fi(les-vous>
paflaftes-vous outre? — Ch. Meffire Julien, Curé de
Boulié, nous bailla coura^, fi bien que n'ayans peu
obtenir qu'ils nous quittaient une des meftairies,
nous nous meflafmes dans toutes les deux : le Capi-
pitaine aiant faid deffenfe que nul du mefhage ne
touchaft aux hardes de la bonne Dame, femme du
noble Chevalier, duquel il monftra des paffe ports
en fon livre. Au matin nous partifmes-les premiers,
i\ bien que nous fufmes à S. Rémi deux heures après
foleil levé. Le cimetière du lieu fut trouvé propre
pour faire reveuë, & la marmaille le demanda,
pource que Mademoifelle de la Vefliere, la mefme
qui avoit faid femblant de payer à Mailigni, avoit
au dernier butin caché une cuillère qu'elle penfoit
d'argent, mais elle fut trouvée dans la recraide de
fon bufc. Là, fur une belle touffe de fauge, Meflire
Julien eftendit fa robe. Là deiïiis, chacun ayant
defployé fon induftrie, nous trouvafmes avoir gagné
quatre chandelles de roux, un cizeau, un roifignol à
crocheter, un grignon, un fromage, le relie d'un
autre, un canapfa, un petit pot caffé demi plein de
beurre fort, une bague d'argent de Limoge avec une
crapodine, une livre & demie de lard fort rance, un
I '7lf
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LIVRE III, CHAPITRE III.
489
rons, entreprit de lui defrober fa chemife veftuë,
& en vint à bout. — E. Mais que j'aye un peu
achevé de rire, je vous monftrerai que le lieu de
voftre reveuë nous fera encores un prefent.
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il NAr.
I avoit
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.e»,oeîiyKv4„,ïïir,
1"«v,,„i.o„7f„ '
'7„* f' fm»e nnttm,
LIVRE 111, cHAPiraK IV. 491
crcignans & tenuz d'où fumi. Agaré m'nami, y
penfez gardé iquieu, & que pre le moeas d'iquelle
pece, y n'arez pu foce de pouen ; mes quand ma
moenagere a elle oguë morte de maleze, ma fé, y
ouez tout vendu, & lez befochous en pape font iqui
à rEilrilIe qui m'actendanc pr'ou achevi. t Chefne-
verd prend Matelin par le bras, liû difanc : c He !
eu m'as vendu le refte de ton bien, que je t'ai fi
bien payé ; pourquoi t'es-tu addreffé à d'autres ? •
Macelin refpond : c Ma fé, mon moeftre, ve me
diciré jeudi, quan y vou demaondi quatre fran à
emprunti, que ve n'aviez pas in dené. t UAvocat,
après quelques cxcufes, s'enquiert fi le marché eiloit
fait de tout poind, trouve que non^ s'enquiert du
prix & des différents, mefhage fi bien fon client
qu'ils concluent à quatre cents livres contant, & cent
que fur fa foi il lui devoit envoier à Breffuire ;
mais de peur que Matelin ne fuft battu par ceux qui
Tattendoicnt, il falut faire diligemment, payer
& chafler le compagnon, qui monftroit avoir grand
peur. Encores voulut il toucher à la main, en jurant
à fon patron que jamais il n'avoit fait un tel mar-
ché, & qu'il fe fouviendroit de lui. Le lendemain
l'Avocat & fa femme, fans perdre temps, vont à
S. Rémi, defcendent devant rEglife,&puisfe tenans
par deffbus les bras, vont à la porte du cimetière,
où eftoit la foule des habitans ; là ils fe vont enquérir
de leur acqueft, lifent dans le contrat les tenans
& aboutiffans de leur ouche, mettent en grand peine
la compagnie pour deviner cet héritage. Après demie
heure de difpute, un vieillard le pouce fur la cein-
ture , va s'écrier : • Y faiz ben oure o Téc avourc,
Monfieur le Bailli. Pré la vretudé, Matelin a efté le
moeftre yquiai quot ; o Té be vraiz qugl a part en
493
; BAKOK DE F<BKB8TB.
la pcce, mai o n'é grin loii fon. — Comment,
l'Avocat, feroit-il bien faux vendeur J — Ma fé, dti
!e bonhomme, o \'i le cemeiere qagl bous a vendu, •
Ce qui fut trouvé fort vrai, & vrai le proverbe tjui
dit que le Diable fait des nopces quand on trompe
un Avocat, — Ch. Et où peut aller vivre ce pauvre
Diable ? — £. Il s'en aUa jardinier à URoche-Boî-
ceau, où les Sergens ne font point d'ordure, — i
Ch. Comment?
1 ordure. — -^^^h
Ckapit&b V.
De la Roeke~Boifftau & des Sergtnu.
KAT. lÀ. dedans y a bien pis
qu'aux noces de Bâché: je vous en
pourrois faire force contes, com-
me quand il frat[a un Sergent de
glu, le mit dans de la plume,
& puis les bras eftendus liez à un
bafton, avec une mitre &ua efcri-
leau portant l'Antechriflj au poinftdu jour le fit lier
fur fon cheval, & en cet équipage l'arouta dans le
grand chemin. Il fit fi grand peur à ceux qui le ren-
controient, qu'il fut fans fecours jufqu'à la nuiâ,
que fon cheval s'eftant mis dans la haie de Maule-
vrier, palTa par les boucheries, & le lailTa pendu au
crochet des veaux. Je vous diroîs bien encore de
tels tours, comme d'un autre Sergent qu'il apprivoifa
par bonne chère, & puis ils jouèrent au foir à une
perdrix, deux perdrix & la caille : un Gentilhomme,
ayant fait le mutin, fut lié avec une fervieite, la
jambe à la quenoiiille du \i&, & fut diA que tous
les autres jouëroyeni ainfi, comme fit la Roche-Boi-
ceau lui mefme,mai!i le Sergeniy ellanteui le talon
494 ATAKTVRES DU BAJtOV t>B VMKtST».
dilloqijc d'avec le refte du pied, doiii il fut boîceux
loiice Ci vie, & pour ceU appelle lu pays le Sergent
U Caille. .le ne vous dirai point les tonniverts
exploits & les cedules'fe perdoicnc, je me contenierai
d'une rude malice, &qui a pouruiu quelque propor-
tion. Un Sergent de Douai voulant prendre un
adjournemem à lui poner, fes parcns & voillns lui
racontèrent comment depuis peu de jours il avoit
fait faire tout !e poil d'un Sergent avec des fufees ;
mais ccttui ci fé moqua d'eux, difani : • Par la mon.
s'il me graiigne je te mordrai. . Roche-Boice;
feu ct^s propos, Voit de là à deux jours arriver Ton
homme, ie reçoit avec toute honneftcié, le faitdifner,
bien bnirc & clianter le bcan pioceatl. Le upu mis,
il fe fait donner des cizcaux, comraoïce k a'en faire
les ongles, mais ne s'y- prenint pat bien, il prie le
Sergent d'achever la bcfuncnc. & le mu à. au '
I
^>}m^€w^*^m
Chapitri VI.
Miracle du loup, & de l'u'urt, du
plfiolei avaUé.
HERBONNiBEE. Ventre de loup!
je trouve qu'il y avoic de la rai-
fon par tout ; mon maiftre ne fut
pas fi heureux i Paris, que deux
Sergens emmenereni , lui don-
nant du pommeau de la dague
dans le croupion pour !e faire
aller. 11 fait tousjours le brave au commencement,
& puis Te couëSe de fa cKemife. L'autre jour à
Villebots, il fut battu par un foldat pour ce qu'il
l'appelloit compagnon trop defdaigneufemcnt. Quand
il trouve des gens qui l'efcoutent à gueule bee, vous
ne fçauriez croire ce qu'il dit. Il contoit ces jours
devant des Dames comment il avoit efté prifonnicr
des Turcs, cent Iteuës par delà Alep, qu'ils l'avoyent
pour prifon enfoncé daiis une pippe, & \ù^é en cet
eflat, fur le bord d'un grand rocher, & que là il
vint un loup qui fe mit à piller à l'endroit de la
bonde, par laquelle avec ce grand ongle qu'il porte,
(& dites que les ongles ne fervent de rien) il avoit
4.9a ATANTUaiS OD SAILOK DC VMHVST»,
lire le poil de la queue & fait un nœud de Ta gri
mouftjche gauche, & voyez à quoi fervent les grandi
oii};les & les mouftaches qu'on porte aujourd'hui:
le loup fe femant pris, pour fe vouloir fauver,
entraîne la pippe du haut eti bas du rocher ; la pippc
femiten canelle, & lui eut la vie fauve, pource
qu'il tomba fur le loup, & le lua. Il maintenoic que
les huitres, derquelks on rejetcoic la coquille en la
mer, fe refaifoient comme auparavant, pour preuvr
dequoi il diloit qu'en Alexandrie, ayant mis Ion
chiffre, qui eft un double Fi, fur une coquille, il
la trouve en Broijage irais ans après. Il difoii
ijii'ellant lombi! à un certain combat dans t'cftang de
Cungn^c, un brocher avoit avalé fon piilolcc tout
bandé, & depuis le brochet pris à Cherac fur Chi-
rentc avec le pillolei dans le ventre, il gagea cent
pillulcs qu'il tireroit. & av manaua uas. 11 accï
;t2^™
Chapitrs vil
La proceffion i» Bauaùr.
NAT. Je voue «nccnd, €*«& le
jnedttin Baumier de Nyort; il
eftoii fi zélé qu'un autre bi|(X Je
priant d'afÏÏfter fa mère fon 4>u-
gucQocte & malade 4 la mort, lui
difani que c'eftoU chofe horrible
de refiifêr fecours au ventre qui
l'avoli porté, Baumier refpoudit qu'il l'iroit voir
comme fa mcre, mais qu'il offiEuferoic fa coidcience
de guérir un Hérétique. Un jour il eftoit & S.-
Mexant, & comme il vouloii paroillre reft&ur«eur
de l'aniiquicé, il lui fouvînt qu'oc avoii Autrefois
fait une procellîon folennelle & iroii lieues de la
ville, jt un S. Silvin des bois, où les mazures ne
paroifToient plus. Il avilâ arec le Cur^ que le vent
après avoir efté longtemps au Mord, toumoit
au Su, & faifoit un chaud picquant Se. eftoit,
marque de pluye au lendemain, & pourtant eftoit
bien à propos de faire une brave proceflkm à la
barbe des Hérétiques pour demander de l'eau :
c'eiloit en Juillet, & la chaleur fin fi grande qu'H
n. 3a
4pit AVAIk'TVKBS DV BAROH OB FfKBST Et
en efvanouïr, & d'autres curent le mal de couRiï,
mais povres gens & qui ne pouvoient faire gagner
le Médecin, pource que les plus ipparens s'cftoicnt
retirez : d'ailleurs la populace commençi à gronder
lie ce que Baumier elloit monté fur fa mule fans
haut de chauffes, couvert d'une grande fotane de
demie oftade ou ferge d'Arras. Les paifans donc
devifoient ainfi : • M'arme o l'é qu'o n'i a pu de
dévotion depeu qu'on vec à chevo. — O lei inc
mule, dit l'autre. Vant-eilz pas ben beftez o Zardi-
lere, & lez Curez lez beaz prcmex ? • — Va tiers
adjoufte : t O l'é preian in houme mou fantaxiou ; gle
baiUit à fa famme in cocillon pre qu'il ne couchift
poent olé, & in otre ine robe pre qu'a ne couchifl
pas foule, O gliac in an à quietie Chandelour, qu^
m'avet pm pre le mené à Partenai; i pranguî le
LIVRE III, CHAPITRE VU. 499
mufique ne fut pas longue, pource que la mule, née
8l native de Chorals, nota^ où ils font tous Héré-
tiques, & elle n'aimant pas le fon des cloches, fe
mit par haut, à temps & contre temps. On crioit au
Médecin de tous codez qu'il jettaft les efchiles;
c Mater Dei! je n'en* ferai rien, difoit il, car elles font
baptifees. t Tout le monde court pour empoigner
la bride, & le bruit échauffa fi bien la mule, qu^elle
pafla fur le ventre à la proceffion, & comme îi elle
euft eu un taon au cul, s'enfuie dans les bois. Le
cavaleris voulut empoigner une des renés ; le mal-
heur fut qu'il donna d'une des efchiles fur l'œil de
la befte, & en gardant la ciitole & diaftole, il fe
donna de l'autre par le front. De ce/oup la mule fit
deux cents pas tousjours le cul en haut, & au bout
de cela le Médecin mit le nez à terre, le pied pa(fé
dans un eftrier, & fi fit encores quelque chemin
trainé à Tefcorche-cul, la fotane & la chemife autour
de fa telle. Je ne fai s'il appella Saind Silvin à fon
aide, mais bien lui prit que l'eftriviere efloit petacee
d'efguillettes, dont Pedrier lui demeura dans le pied.
Le Curé & les plus charitables de la proceffion le
mirent à les chercher jufqu'à deux heures de nuid,
& enfin la lune eflant levée, lui virent le cul le pre-
mier, & le trouvèrent auprès de Pillas, la telle en
bas en un fofTé, en profonde méditation, & oncques
plus ne fit fon prou. Quant à la mule (comme les
lieux font fataux), elle s'alla rendre à la croix
ofaniere du cimetière S. Mexant, au mefme lieu où
fut amafTé frère Jean Tappe-couë, un grand Jubilé
auparavant, comme efcrit Maiflre François, aucheur
excellent.
ism^sm^m^^
CHA.-ITRI. Vlll.
Le qiiadran des Oitfekti ; 4u cours eu Soleil.
[ HFRGnvNiERn. Monlicur, je
vous UifTc ici, voici venir noflre
homme, qui ne R'eft point peigné.
EïVai riJ, CHAPIT&l Yin.
501
foubienc que Monfur lou Manefchal en rioic fort,
& n'y aboit que lui qui n'en fuft vien eûnerbeillé.
— E. Et vous, qu'en penfez-vous ? — F. Ne bous
ai-ye pas die que ye ne fuis poenc de ces cherchurs
d'Antipodes ? aufli ne croi ye pas qu'il en foit. —
£. Vous voila compagnon de S. Auguftin. — F. Et
n'en croioit-il point? — £. Non, & dedaroit Héré-
tiques ceux qui en croioient : mais n'avez-vous
jamais veu coucher le foleil, & quel chemin il pou-
voit prendre pour venir à fbn lever? — F. Oi da,
y'ai pafTé vingt mille nuiâls à chebal, mais comment
pafleroit-il fous la terre? — -E. Il faut qu'il repafle
de l'autre codé pour recommencer les vingt mille
journées que vous avez attendues à lever, & cela
font prés de foixante ans. — F. Et il rebienc par le
mefme chemin qu'il eftoit allé. — E, Et ne le
verroit-on pas retourner ? — F. Non, braiitfent, car
il s'en rebient de nuid. — E. Vous l'avez tAs en
grand peine de fe cacher vingt mille nuiéts: & pour-
tant, vous qui ne voulez point ufer du quadran,
vous avez une monifare à la ceinture. — F. Pour
n'en mentir poent, ce n'eft qu'une vouëtte, qui me
fert de drageoir, & cela pareil autant que fi toute
la monftre y eftet. — £. Je voi bien, pour vrai, c'eft
une monftre.
Chapitre IX.
Songe du Connefiable . Aàioufiat d'Efiratit.
i «KESTE. 11 faut que ye bout J
conte un fonge <jue j'ai fait ceiW J
nuift, Sl fur le matin i l'hui
LIVRE III. CHAPITRE IX.
Mappemonde, cerchez une Mappemonde. — E.JXy
en a une des nouvelles en la galerie. — F. Cap de
you ! cerchez dedans, bous ne crouberez place en la
terre où lebilen fe puiffe cacher; à moi defrover, à
moi : t O vien, patience. • — £. Je fuis bien aife de
vous voir refous ainfi, & voila voftre fonce arrivé,
car celui qui porte Tefpee du Roi e(t fon Connéta-
ble, & c'eft Eftrade qui s'eft fait Conneftable du Roi
François maugré lui. — F, Il y a parmi celaquauque
bintaines de piftoles, de quoi ye ne fuis pas trop
marri, parce que cela fera pareftre à ceux qu'il ferbira,
qu'il ne fort pas du ferbice d'un quauquin. J'abois
abant lui un autre pendart qui s'appelloitBarbacane.
Ce maraut, ye lui faifois pourter après moi trois
vagues de ces ruvis valets que y'abois eu d'un du
Mont, pour faire prefent à ma maiftrefle: comme
j'eflois aflis au bet prés d'elle, ye tendois le doigt
par derrière pour qu'il mift dedans les aneaux,
& cela parefToit dabantage que fi ye les euife pourtez
moi mefme : ye troubai que mon bilen aboit efcar-
pinai. Ye courus yufques à la rue fulement^ mais
quant & quant me boila refoulut. — £. Ha que
j'aime ces refoludons, elles fentent bien le cavalier.
W
ChapitkK X.
Dtt refoluiioiu.
ftrtSTï. Dés mon enfance j'^
elle tuusjours rcloluc, & pour
cela fouetté en diavle. Monfur,
1 commençant lou defyuna
LIVRE III, CHAPITRE X. fO^
n Hola Ôiouletj biras bous <faquiou. i Ce fat tour-
nant la telle, me refpond, « Je n'en ferai rien. • Et
moi refoulut quant & quant, ye redouvle : f Demeuras
y donc. > £t par ce mouyen il ne fit rien fans mon
commandement. — E, Que c'eft de fçavoir prendre
fon avantage. — F, Au fauxbourg S. Germen, en
la rue du Cœur-Bolant, comme y^alois un foir hoir
ma maiilreflfe, ye fis rencontre d'un taquain qui
benoit la tefie veflèe : fans refpeâ il jette la maie
men à mon mantou, & de Pautre me porte une efpee
courte à la gourge, fi vien que n^eilant pas fur mes
armes, il falut lui avandonner lou mantou, encores
fut il fi impudent de s'arrefter à dix pas de moi
pour me regarder. Lors fans m'eftonner yelui criai:
« Cabalier^ il y ba de bofte haunur^ car bous ferej
mon pour te manteau, i Et ainfi foulage des efpaules^
ye ne laiffe point d'aller hoir ma maifireife tout en
perpunt^ comme abec plus de pribauté. — E. Ce
fut bien dit ^ car au moins il efioit emporte man-
teau. C'eft entendre le numéro ou je ne m'y connois
pas. Il faut pourtant un grand r'envitaillement de
patience ou de philofophie pour prendre ces relo-
lutions, mais que voulez-vous } quand la chofe eft
faite, il fe faut refoudre à ne faire pas pis : & de
cette forte de refolutions s'arma bien à propos le
Miniftre de Glenai, — F. Attendez, abant faire
bofte conte, que ye bous die comment y'en fuis
fourti une fois mal fatisfait, faute de m'eftre refoulut
comme autrefois. — £. Et bien, j'attendrai ; auriez-
vous bien manqué une fois à prendre vos bonnes
refolutions, & qui ne font communes qu'à vous }
CKArlTKB XI.
Queielle avec It Siabania-t, dit*! dt Valteh.
1£S'bSTB. Oc coûtes mes que-
relles, ye n'ai regret qu'à une,
fb ro nui mVn f.O-k^ ^Vll ,„..
LIVRE III, CHAPITRE XI. 507
lou galand me bienc dire : « Monfur l'ignorancas, ye
ne fai poenc tant de Grec ni de Lacin que ye bou-
drois, mais pour m' accommoder à bous, ye bous dis
en Francés que bous eftes un fot; • & là defliis me
hauiTe lou nas du pung. Là fut grand lou refpeâ de
ma maidrefle, qui fe mit encre dux, & le boyage
de la guerre a empefché que nous n'ayons parlé à
mafle, encore qu'il me faiche fort abec un Ladnifte.
— E, Vous voiez, il eft François quand il veut.
Mais cela s'appointera bien encores : peut élire,
puifqu'il eft fi mal heureiu de favoir du Grec & du
Latin, ne fe faura il pas battre en Francés. — F.
Cap de you, il me fafche fort d'une chaufe qu'on
m'a dite de lui, c'eft qu'il n'y a efcrimur dans Paris
qu'il n'ait pourté par terre. — E, En Latin? — F,
Je ne fai pas ; mais Grand Jean^ TAnglois, ni Jean
Petit ne bulent plus tirer abec lui. — E. Vous eftes
deffendeur, le choix des armes eft à vous. — F,
J 'abois penfai de le faire appellerabec une arvalefte
& chacun trois mattras, ou vien à chebal. Put-
eftre qu'il chebauche en Latin, mais diavle, c'eft un
coureur de vague. — £. Il faut trouver quelqu' autre
invention. Le Prince de Condé en trouva une pour
un fommelier & un v^et de garderobe, deux bons
foldats & qu'il ne vouloit pas perdre. Il leur accorda
le combat à Valeri, leur remonftrant que comme
ferviteurs d'un Prince du fang, ils fe dévoient battre
à cheval, & que gent de Roi appelle à Baron, Il les
fit donc armer avec les hautes pièces, eflire parrains,
fe confeffer, leur fit cirer les deux meilleurs che-
vaux, & quant ils furent fur le montouër, ne pou-
vans regarder qu'à la hauteur de leur vifiere, les
palefreniers les montèrent fur deux mulets d'Auver-
gne bien empanachez. Les mulets ne combattirent
5o8
.NTITKKS Dl' BA&OK DK PSMBSTS,
que du derrière, ft les chevaliers atans fait leur
pouvoir, furent appointez. — F. Je croîs que boai
ne boudricit pis faire comparaîfon d'ux à moi, nuit
pourtant l'imbendoQ en efioit gaillarde.
C HAPITRE XII.
Du JUiniflre de GUnay.
»£- — ^c-'*— -^1 «NHSTB. Mais benons à bofte
^r^^^V Miniftre. — E. C'eftoi celui de
*. Ki^Jw Glenai, norainé la Fleur, per-
ê ^J^xî*^ fonnage fort grave, qui ne faifoîi
(v iKjty^^ rien que meurement & avec mo-
% _L^^--^^$r^ deration. Ce bon homme donc
t__^^ — *i--i Q, I yg[iau[ (j'un Synode de Nyort,
prit fa couchée à Lageon, où il ne fut pas pluAoIt
arrivé qu'il void venir en mefme logis un Cordelier,
qui avoii le nez plus haut en couleur que lui. L'hor-
reur de cette rencontre lui fit gagner un jardin pour
fe promener à part ; mais il n'y fut pas pluOoli que
le Cordelier y entre, & comme M. de la Fleur, avec
une mine fort defdaigneufe, en tournant l'efchine,
monlïroit au Frater toutes fortes de defiaveurs, lui
d'une voix bien modérée, commença ainfi: t Monfieur,
je voi bien que cet odieux habit ir que ce froc de
déception vous font à contre cœur. Celui qui tes
porte en ejf las ; mais au nom du Seigneur & en la
charité d'un fidelle qui rr'eft jamais foupçonneufe, je
vous fupplie ckreftientument j ne n^abandomiei point
AVTVRBS Dt' BAROK DB vaKrST».
ainji; pource que ce voile d'hypocrifie m'»ft ennuieux,
& ma délibération ejl de U changer hieniefi en
l'babii d'un homme de bien comme voue, (r ce
moiennani la Graee, que iront tnt deve\ aider à
implorer. Dejpouillei voui donc de ee qui empefcht
notre communication. Ce fut afTez dit, car le Mi-
nillre embraffe le Cordelier, & avec routes fortes de
congratulations lui promet de faciliter fou dcllèin,
& rhoilelTe qui n'avoic qu'un lift ne fui plus en
peine de les coucher enfemblc. Voici ce qui «dvini :
c'ellqu'ellant jour fur le lia, &Ie bonliommc, trou-
vant fon camarade le premier debout, fc voulut lever
auifi: mais ne voiani rien à fes pieds que îe iVoc
& riiabit gris, penfà refver au commencement, & puis
fe mit 3UX exclamations, remémorant que le caute-
leux avoii appelle fon troc de déception, & avoii dît
Chapitre XIII.
Hifioirt de Paiarot, & de la Dame de NoaiUi.
^r~'^- *• '*'^ j1 ^NESTE. Nous abtoni eu que-
Ç, ^7T~^\'^ '■elle au Marché Neuf, Monroud
y fei^l^*^ * rdoi, 8c, abions efté leparez
^ Rç|^^^\** faifans à paroles, fur un coup
C* I Jj^ "l"''' ™*''<'" couché le collet.
ïi_X^{S^^v?) Caiteine Frîfquet me dît à
— ^ — ^- — ' la rue deSenio: • Varon, je bous
beux faire boir eofemble Monroud & bous. • Je ref-
pondis : • Je l'abcecte, Cabalîer. > Incontinent il me
mena par la rue des Maraiz, que nous autres appe-
lons le petit Genève. Quand je bis qu'il me pafToit
au Pré aux Clercs, je demande : ■ A quin cabaret me
mencz-bous voire ? — A Penfeigne de la bataille, dit
Frifquet. — Vous m'abez, di ye, corabié à voire,
je ne'beux pas qu'on le moucque de moi, & eftre
ainfi mené par lou naz : je m'enioume. — Et où eft
l'hauneur? fit l'autre. — Je donnerai, di ye, cent
piftoles à qui me faira vattre abec ce galand homme,
mais non pas à fauffes enfeignes. ■ Et m'entoume
relolut; car nouiez que quand Frilquct aboit dit
voir enfemble, j'abois entendu voire enfemble : boila
AVaNTUREB ou B*aON DE FfNESTC
que c'cft de Frandmentaiïa. — E. LailTbns ces
refulutions furieufes. La couftume du Poitou ell que
les meilleiires maJfons du païs retiennenc des cham-
bres à Nyort & Fontenai pour fe trouver aux foires
qui font en ces deux lieux. Une Dame de Noaillé
reccnoit i chaque foire de Nyort, chei Barberic, la
petite chambre qui cft au haut de refcalicr. N'eftant
point arrivée le premier jour, le Sieur de Pautrot
de la mailbn de S. -Gelais s'y logea. Le lendemain
à deiiA heures après midi, arriva la Dame, & cepen-
dant qu'elle difoii les honûefteiez à fon hofte, Yfa-
beau, fa fille de chambre, d'une gentille humeur ;
car il Faut que je vous die en palTant qu'un char-
pentier, nommé Biraui, lui atant donné des lettres
pour fa mailirelTe, jamais ellenevoulut nommer le
porteur par fon nom ; eflanc prelTee, elle lendoit la
porpe  dunandoit ua couteau nhifloft nu^ Je -
LIVRE III, CHAPITRE XIII. 513
remarquent vien au procédé. — E. Les voila fur :
• Je n endurerai pas cet affront ; • — l'autre : • Ni moi,
& que ma maie foit précipitée. » — Elle : f J'ai cin-
quante Gentilshommes en cette foire, mes ferviteurs
& parens, pour prendre ma querelle, Yy ai auili
deux gendres que vous connoiflez bien. • Celaefchauffa
Pautrot à dire : f Madame, fi vos gendres reçoivent
le prefent de la querelle aufli libéralement que vous
leur donnez, ils me trouveront plus roide en leur
endroit que je ne faurois eftre au voftre, veu voftre
aage & ce qui en defpend. i Cette dépendance picqua
fort la Dame, pource qu^on difoit qu^il lui pendoit
quelque chofe, joint qu'elle ne fe fentoit pas encores
à l'aage de mefpris. Elle donc troublée de colère
revint au dialogue. « Voila mon lid, dit elle, où j'ai
accouftumé de coucher, & j'y coucherai cette nuiâ. »
— Pautrot réplique : f Voila le lia où j'ai couché la
nuid paflèe, & j'y coucherai encores cette ci. — Je
dis que j'y coucherai, reparc la Dame* — Pautrot.
Et moi auffi. — La Dame, Je ne di pas que vous
n'y couchiez, mais j'y coucherai. — Pautrot, Et
moi je ne di pas que vous n'y couchiez, mais fi fçai
je bien que j'y coucherai auffi. — La Dame, Et
pour vous faire pareftre mon courage, j'y coucherai
dés à prefent. > Là defTus Fsenefie jetca un grand fouf-
pir, difant : « O couraye, tant que tu me cofte. • —
Enay pourfuivant fon conte : Pautrot dit qu'il alloit
faire comme la Dame qui appelle Ifabeau pour la
deveftir ; Pautrot, Martin pour le defchaufier ; ce
fut à qui feroit paroifire la refolution par la dili-
gence. La Dame eut l'avantage pour efire la pre-
mière prelle, èc Pautrot eut la mette. Yfabeau
regarde Martin, & lui levant le nez, dit : f Eh bien,
maitre fot, favois-je pas bien que nous y couche-
11 33
;t4 AVANTURBS DU BARON DS FSNBSTZ.
rions : — Et nous, dit Manin. i Sans vous amufer
plus long temps, voila les deux qui prenaent le che~
niin de leur rouftre & maîllrefle, premièrement eo
paroles, mats plus racourdes, & puis au lïâ j mais
pDurce que Martin ferma la porte, & qu'il difputnit
ce puinr d'honneur, il eut pour partage la place de
devant, Penfez charitablement qu'ils ne firent riea
que bien à propos. Cette dame a dit depuis & quel-
ques uns qui l'en ont voulu gaufler, qu'elle n'avoit
rien fait par amour, mais pour faire paroiftre qu'il
ne lui pendoit rien, & faire mentir les merdifans.
Chapitre XIV.
Dt Bourronj anigtne dt Fil^e.
g^--^'e^t<r^>^^ «NESTi. Or il faut boire fur ce
S I ^3^''^■^^r "'"'^i * ^'^ '' refolution, Ye
C iK^tf^ nlj ne bus pourtant poent monter i
chebal que ye ne bous aie fait
prêtent ae quauques pièces rares
que me douna lou praube Bour-
ron quauques yours abani fa
mort. — £, Eft-il mon ? — F. tt, c'en efl fait. —
£, Les nouvelles le font aufli. — F, On a fait des
epitaphcs pour lui, defquelles ye bous dirai le plus
Ci gifi Bourrcn, qui ie nouvttUi
Ni far jamaU chUht ni fou^
Et qui oHoiCj m païant ^Ahi,
Dt tfanit à Liaa pifur tm fou,
E. Et bi^, Uonficur, le tapif e& mis, donnez
nous donc la pièce que vous nous promettiez, —
F. Ceci n'eft plus du rang des railleries, U ne
faut pas tousjours fadeger ; c'ell une prou|dietic
uaabee aux ruines de Panenai lou Biux, abec une
5l6 AVANTURBS
Manefclul
lettre que Nofire-Dame efcriboii
d'Afai, Ye bous puis afTeurer que ce
les plus fabans hommes de la France. Liiez,
vous plaid. — £. . Du refte des fleiux & lempetlei
pdffees, & d'entre les fers poinmi & preflcx qui
feront voler 40,000,000 de telles en deux mois, je
voi préparer à la difcorde des rcmences qui de
foi mefmes s'etchauffenc, & ces matières élire bien
receués & pratiquées, mefmes par les plus pefanics
liumcLirs. Je voi au premier beau temps qui pafTera
l'Equinoxe de Mars, les entrepreneurs donner U
telle baiflee & mettre le fer en befongtie, nommé-
ment fur ie4î' degré de h France Occidentale. Je
voi quelques vieillards Sacurniens faire quitter i U.
jeuncITe le repos & les délices, foit pour aller 1
garde, foit pour attaquer. Le tumulte s'echaufiê
LIVRE III, CHAPITRB XIV. 517
VOUS difanc que les plus outrecuîdez, plus par rufes
que par effort entreprendront fur le Soleil & la
Lune, couverts d'armes deffenfives que Saturne leur
fournit, & aians pour offenfives les plus rares pre-
fents de Mars.L'ingratte de qui nous parlons efl celle
par qui tant de vies periflfent ou fe confervent, par
qui les efperances font dreflfees, par qui abbatuës;
c'eft celle qui retient ou lafche la bride aux fureurs
de l'air & à celles de TOcean; par elle Samfon
fut dompté, par elle S. Paul fut fauve : elle eft fi
neceffaire pour les exploits martiaux qu'elle a les
effeéts du feu en fa puiffance, & que par faute d'elle
toutes les Princeflès de Cartage fe coupperent les
cheveux. Sa querelle donc viendra des paroles aux
coups ; les uns s'aidans des armes des Parthes, les
autres de celles qui défirent les Philiftins. Oferai-je
dire que contre les débonnaires, comme par nécro-
mancie, feront emploiees les chofes mortes, les
fpedres, les promptes idoles & la defpoiiille des
pauvres, mefmes des reliques qui feront des effe£ts
contre nature par les terreurs & efpouvantemens } Je
refte à vous dire que les forces de l'air y feront
emploiees, fi que par un mouvement fpherique les
efprits animeront les chofes fans voix à des bruits
& rumeurs pour refve'dler les plus endormis : garde
la nuid contre les efperviers de la fagefle. Les
défendeurs penferont avoir vaincu ; mais lors qu'ils
s'efcrieront :
0 fortunati nimium quels militât ather
Et conjurât i veniunt ad clajfua vtntil
ils fe trouveront circonvenus par la multitude,
& voici le fecours des enfans d'Hercule, qui forti-
fians Tefperance des plus bas, mettront Tingratte
,,8 ,
: [>n rsKgiTE.
deffenduc hors de péril. Quelques mois après (t
ferdtit des embriflemens : o Marmande, o Too-
neins, que peu dureront les feux de joye, car on
y brullera les 08 des morts defpoiiiUeï de leur peau
& de leurs nerfs ; les derniers effeiXs de tout ecci
plus familiers aux AogloJs & plus redoutables aux
Hfpagnob.i
mt^m^maim
CHAriTx.« XV.
ÈJfplication lié Ptnljgmt.
MHtart. Et vien, le* chefci» Hit
bous drefTeniHls poent en It
telle > — £. Je dentande loifit
de repaffef ceci à part mrt. — F.
Cependist qu« bodt liret, <re
m'en bai faire un tottr Wlx dHS-
baïut. Hola hant, Chervoriniere,
Carmagnolle, Eftrtde] à pfoUpaux, te oMqiDtl (^
eft plus. Er rien, Mottfiif, bdus f abfa penfai.---Ê.
Oui vraiment, ft l'énigme eft faite tvec fes lois ; mah
de prophétie il n'y en a que le pareflre. — F^ Cost-
ment, parettre t — £. Or bonnes vous patience,
St. je TOUS monllrerai à quoi tombent leaf cboféi
merveillcufes de cet efcrit^ duquel un feul mot ar'a
donné conooilTance du relie. — F. Bous ne férîet
vien eftonncr & mefprifer les labants bonniH que
y'ai oiii là ckiTus ; mais boyons. — E. Oa rtfit Ht*
feaiur 6- umptfttt fdftu. Les fieitieaccs ordioiire-
ment, ou vienneni de deflbiA le fléau, ou font rife-
mees, par ce que le mnivaîa tempi foi demeurer
dans le ohifmp. Et dfmart lèéftrt pttiHia & pttf-
530 AVAVTVRES DU BARON DK F«KESTB.
fej qui feront tomber quarante millioms de tefles 4
deux mois. Ceft le propre de ce que nous appellon»
icy & vers vous la chcrve, d'eftre efgrugee entre
des fers ferrez & pointus; & de conter les teftes qui
tombent par là il n'eil pas pofTibte, & pourcanc qua-
rante millions cft un nombre certain pour l'incer-
tain. Je roi préparer des femencei qui de foi mejmei
refchauffeni. Voila le mot qui m'a donné connoif-
fance de tout le relie, pource que le chencvoi
s'efchauffe foimefme, dont on tire un proverbe afliw
commun. CeJ matirres bien receuis par le-t hwnears
plus pefanies. Celles-là font les aquatiques, pource
qu'en tels lieux fe (erae ordinairement ta grcne dont
ell queflion. Je voi au premier beau temps qui paiera
l'Equinoxe de Mars donner la lefte baiffee (T mettre
le fer en befongne. C'eft la droite faifon que l«
marreuK voni aux cheneviereK mettre lesL mmtp^ m
LIY&E III, CHAPITB.B XY. * 521
autres font ornes doucês &fans fielj qui ne cerchent que
leur vie en paix. Ce font les pigeons, pour la douceur
defquels quelques nacuraliftes oncefcric qu'eux & les
courtres eftoienc fans fiel. C'eft une race chérie & de
bonne augure â celui qui ajeura PEglife, Pource
que la colombe apporta TOlive, marque de paix,
& afTeura Noé Prince des hommes qui reftoienc,
& Tarche, type de l'Eglife, que les eauxfe retiroient.
A la plus grande diffaite des Infidelles, Toutes les
defiaites du monde n'ont point efgalé celle là, & ce
qui n'efioit point dans l'Eglife fe contoit pour
infidelle. La querelle fera pource que les Occidentaux
entreprendront la d^enje de leur mortelle ennemie.
Les Occidentaux de la France font les habitans de
Bretagne, Poiôou, Xainôonge & Guienne : mais
plus particulièrement la Prophétie fembleen vouloir
à la Gafcongne^ plus curieufe que les autres àeflever
ce qu'on a nommé la falade de Gajcongne^ qui a
fait de mauvais tours à plufieurs du pais, comme il
pareil par ce qui fuit. Je dis mortelle ^ pource qv^elle
recompenfera d'une maudite mort ceux qui V auront
confervee. Elle eft maudite par l'Efcriture. Tel en eft
eilranglé qui l'a gardée en fa jeuneflè. Les rendant
compagnons du mignon d?Affuerus^ c^eft-à-dire leur
baillant Aman pour camarade. Lorfque les plus
téméraires effaieront de dejloger & de/placer les armes
de leur Roy d^obfcurité en obfcurité, C'eft quand les
couppeurs de bourfes les arrachent de la pochette
d'autrui pour les mettre en la leur : & les armes du
Roy s'entendent de toute forte de monnoie marquée
des armoiries du Royaume. Je dis davantage que les
plus outrecuidei^ plus par rujes que par effort^ entre^
prendront de ravir & quelques/ois raviront le Soleil
& la Lune, par la deffenfe de Saturne & par les
^21 AVANTUREÎ nu BAKON OE PJtRSSTI!.
ariaques de Mûri. Oci dcpcmt plus wtprfs les C
peurs de boiirfes : les Alchimiftes »ppellcnt l'or It
Soleil & l'argent la Lunej quand ihparleni donc île
ravir le Soleil & k Lune,c'eit f»vir Vor & fargent :
& loui de melmc poorce ijuc le plomb ell eoceodu
par Saturne, & le fer & l'acier par Marii, éeffim^
lie Somme ell fans doute le pouce de plomb qui
empelche le galand de le coupper, & les airai/uti
de Mars font les coups du petit couteau. C'fji *ae«r
elle par qui lanl de ries perifent ou /c eonftrviai.
Qui aeftéfur la mer Tait combien les cable* tt funins
font neceffairesà garentir les vies, & combien il ("en
perd lnute deux, fans conter ceux que la corde em-
porte en terre ferme. Par qui Itt efprrances foitl
drtffees. par qui abbaïuts. Les efpcrancc» fone Wt
ïoilea, qui font guindées & ameineet par les cot-
dases- C'en elle aui reii*nt is' lafcli» ta brida amx
LIVRE III, CHAPITRE XV. 523
guerre, firent des cordages en couppant les cheveuit
de toutes les femmes du pais, fans que les Princeffes
y efpargnaffent les leurs. Cène querelle viendra des
paroles aux coupsj les uns s*aidans des armes des
Parthesj & les autres de celles qui dirent les Phi-
liftins. Pource que les Parthes ont réputation de
vaincre en fuyant, ceci eft la fuite d'un des partis,
afTavoir des oifeaux : & pour ce que David ayant pris
pour armes une fonde & défiait les Philiftins par la
perte de Goliath, ceci eft conté pour les fondes def-
quelles les petits eofans tirent aux oifeaux. OJerai-je
dire que contre les débonnaires y comme par necromantie^
feront employées les chofes mortes ? Necromantie eft
une fciencequi fe praétique par les morts: l'Enigme
dit donc qu'on n'employé pas feulement les perfonnes
à ch aller les oifeaux, mais les chofes mortes, qu'on
appelle au pais les Baboiiins. Lesfpeélres^ les promp-
tes idoles. Speétre eft ce qui effraye du regard, &
ces hommes de paille font des fimulacres faits à la
hafte. Et la ruine des povres^ & les reliques qui
feront plus tfeffeél que ne doivent pouvoir les terreurs
& efpouvantemens. A cela fervent les depoiiilles des
plus povres : & quant au mot de reliques^ il eft fort
proprement emploie, car il fignifie refles^ & nul n'y
met rien de quoi il fe puifle fer\'ir encores. Et quant
à la terreur, qui a là plus de force qu'elle ne devroit,
c'eft pource qu'il n'y a point de raifon que les cho-
fes qui ont vie fuient pour celles qui n'en ont point.
// refle à vous dire que les forces de Pair y feront
employées j fi que par un mouvement fpherique^ les
efprits animeront les chofes mortes à des tours vio-
lents^ puifants à refveiller les plus endormis. Les
forces de Tair font les vents, & voici les moulinets
dans les arbres qui chaflenc de leur bruit, & auprès
Sa+
ANTUREt DU BARON DE TSHS.STB
defquels on ne dort pu à l'aife j leur mouvement eH
fpherique & paroift let quand ils voni vifle princi-
palemenl. Garde la. nuù^ contrôles efptrviers de ta
Sageffe. C'ell pour chalfer la nuiÔ, qu'il n'y a
point de garde, les chevêches & hiboiis qui y font
aulTi du mal : le cilcre qu'on leur baille ici eft paurce
que Jupiter va cousjours accompagné de l'aigle, ainTi
l'uifeau de nuiA elî l'aigle de Pallas, à qui la SagefTe
appartient. Les ptrtarbaleurs penftronî avoir vaiitea;
mais lorfqu-ils crieront :
0 forraniiti nimium queis militât atktt h
Et conjurati veniurti ad clajfua vend! ^1
ils Je trouveront circonvenus par la multitude. C'dfl
pour le mal que les mouëes font maugré tous ces
artifices. Et les deux vers font pris d'un Poète
Chreftien, qui aux guerres de Stilico s'esjoiiit de ce
LIYR£ III. CHAPITRE XY.
5«5
qui fe raconte ici : les chants font alléguez pour les
chanfons continuelles qui s'y difent en veillant : &
pour ce qui eft dit des os defpoiiillez de leur peau
& de leurs nerfs, c'eft une peinture aifez ezprelTe de
Teftat où on laiflë la chenevotte avant la donner au
feu. Les accidents de tout ceci feront plus familiers
aux Anglols &pius redoutables aux Efpagnois, Ceux
qui ont fréquenté l'une & Pautre de ces nations,
favent combien la mort de la corde efl familière aux
Anglois & horrible aux Efpagnois. — F. Bous me
faites fafchai & puis yoius : ye fuis marri de boir
de fi velles chaufes bénir à rien, car ye m'en faifois
admirer & pareftre en vonne compagnie, mais aufli
l'explication me baudra force vonnes repues.
Chautre XVI.
De Sourdy & fa Jtmnu. du Princt joUtur,
de Cheneritrai, du Pttjhe de Bougeuùi, du Maya»
de Maiiiejaii.
-iL<-s^^ *^^ NAY. Je vniia nrotfA» •
LIVRB III, CHAPITRE XVI. 527
tout à nuf; lors lou Monfur boyant cette vraberle
en dit ce petit moût,
Ouij ma femme^ il eft taa certain
Que c'efi vaincre la jaloufie^
Et un trait de grand courtoifie^
D* avoir revefiu ma putain.
Si je veuXj comme la merveille
Et l'excellence des maris,
Rendre à vos rihaux la pareille.
Cela ne fe peut qu'à Paris,
E. Bon, & cettui ci ? — F. Les alliances en font
changées, car c'efl d'un des plus galands Princes,
& de la plus gentille Princefle qui foient à la Cour.
Comme l'on a foin defes proches^
Vue tante blafmoit dujeu^
Son neveu, avec grands reproches.
A la fin ce dit le neveu :
u NeJoUe^ plus du cul ma tante,
Ni moi aux de^, Je le promets.
— Va, traitre, dit la reprenante.
Tu ne t'en chatiras Jamais » .
E, Voici qui va bien : mais en voila trois que
vous cachez. — F, Ye n'en cache qu'un qui me fe-
roit pendre s'il eftoit troubé fur moi à Paris; y'aime
mius bous donner ces dux ici. Le premier a le nom
changé, mais il eft de mefme rime.
C'ejl un drojle que Jenevieres,
Sa femme ru lui en doit gueres ;
Ils fe pippent en cent façons,
Mais il perd à ce marché, parce
Que lui n'entretient qt^une garce,
Et elle cinquante garçons,
E. Voions ce que dit l'autre. — F. Cettui ci eft
AVANTtrRXt DU BARaN DE F^KE
de Bougoin, où y'eTpere aDer coucher de foir ; c'eû
un biux conte du Curé Fraflart, qui en mourut de
[nftefTe, ou autremenc, Lifez,
Ci àtgous gifi un pauvre Pfifirt, ■
Plaintif ^ui Boogoin/on mJÎfirt ^m
Lui fit faut plu' d'un mtftUr. ■
l.'ifprit revient CS" lui reproche ^H
Quil virait en Efié la broche.
Et l'Hyver il ifioit poriUr.
E Je vousaiïure queceituilà n'eli pas mauvais:
laiis puis que vous craignez de porter à Parts tous
ces papiers que vous ferrei, où pouvez-vous le»
lailTer mieux qu'ici, k nous autres qui ne fommcs
pas fj ombragez des potences comme on l'etl k la
Place aux veaux ? — F. Il j- en a vien qui ne foni
pas dangcrux : auHl tenez, prenez lef comme ils bien-
Chafitrr XVII.
Da Cornu de Lorme.
j^— -^ 6— t.:.-^ SNBSTB. Puif que bous eftw
Hci V'y-""^^ *" '^P'"'*'^ * '>"''' l«autrei,gar-
jf lfcv#!)riLs dez les, &-nc les boutez que
quand je ferai vien loin, car il
efl dangenis en diavle d'ellre
troubé abec quauque caufe qui
(ouche Monfur lou Manefchal, S:
y'ai atTaire de fa fabur pour une grande encreprife
il laquelle ye fuis combié, & pour laquelle il me
faudra rcbenir en ce pais à un amvarquemenc. —
E. Eft-il poITible que je ne vous y faurois aider
puis que c'eft en ce pais? — F. Je ne fai pas; ye
m'en bat bous conter que c'eft, mais ye bous recom-
mande lou fccret. — E. Et moi 1 vous mefmes. —
F. Je bis à Paris abanc partir un grand cabalier, qui
cil benu ouffrir de merheillufes richeffes pour rele-
ber la Couronne d'une grande partie de les debtes,
mettre force Princes & Signurs à lur aife, & rendre
le Roi maillre de la mer en defpii des Anglois, Fla-
mans Se Efpagnols : cet homme bient de la pan
du General Stincs & huiâ autres grands pirates, qui
5JO AVANTURES DU BARON DK PiENESTS.
Diit boulu vailler au Roi d'Angleterre dux milions
il'or, & lut conquérir le Pérou à leurs defpens ; &
leur Roi (car ils font la pluCpari Anglois) ne les vou-
lan[ recevoir à aucun craiflé, ils criereni en levant
l'ancre devant l'ide de Wich, qu'il demeuraft Roi
d'Angleterre & ux de la mer : ils ont fait quelques
ouÛVes l'einvlavles amt Eftats, au Roi d'Efpagne, aux
Bcniciens, & au Duc de Florence : mais ces gens 1>
trop ccremonius, n'ont pas boulu prendre fur lurs
confciL-nces l'aboulition de tant de murdres & rabif-
l'umcn.s, & fur tout de cinquante mille âmes bendues
aux Infidèles. Tous les Confeillers d'Eftat de ce»
paisfe rendoieni trop fcrupuleux : vien eft brai que
les bius du Coareil d'Ellai s'/ oppouToieni au
commencement} mais les plus aviles, comme Maogot
&. \ arvin, & plus enror Monfur lou Manefchal &
abolition
LIYRE III, CHAPITB.B XVII. 531
300,000 efcus, & à Madame pour cent mille
efcus de diamans; à un Prince & à dux OufEciers,
chacun cent mille efcus ; pour cinq cents mille efcus
de prefents par ci par là. Tout cela ne lui eft que
fumier, car ils ont trente fix millions d'or en lingots
& monnoye, & plus que cela encores en diamants
bruts, n'ayans daigné empaqueter ceux qui eftoient
au defTous de quatre quarrats, pour feize millions
de perles, fi groiïes qu'elles incommodent à les pour-
ter. Ye me hafte de m*en aller là pour être emplouié
à ce grand ferbice : car on emvarquera en ce païs
pour aller quérir ces richeffes. — E, Et avez-vous
connu ce bon Seigneur là? — F. Oi braiment, il
m'appelle fon camarade; il m'a mené dux fois difner
abec les Gendushommes de Monfur lou M anefchal.
C'eft un petit homme vifarre & qui jure en Diavle,
ne parle que d^eftrangler mille hommes à la fois, &
ne proumet au moendre de nous autres rien moens
de 20,000 efcus. Ceft pour pareftre, cela. Il dit
qu'il a une tour à Vanes, qu'il a fait murer pource
qu'elle eft plaine d'or; qu'il a laifTé 1400 piftoles
entre les mains d'un fien ami prés d'Angers, & en
autres divers lieux autant, & dix fept cent mille
efcus à la Générale Chau, abec une licorne plus velle
qu'il y en ait yamais eu en France^ un pélican, de
qui les yeux d'efcarvoucle baient un demi million
d'or, un poignard, de qui le pommeau eft d'un dia-
mant : & moi là. — £. Ce que vous avez dit du
parchemin & de la cire, un voifin en pourroit ref-
pondre, parce qu'on a depofé entre fes mains les
premiers originaux : pour le fuccez de tout cela
c'eft une bizarre pièce; nous avons veu l'homme,
vous a il jamais donné ou prefté un efcuj^ A il
à Paris payé la commedie ou le bafteau pour vous }
5ja AVAKTUtttS DU BAROK DE P£KL$TE.
Avcz-vous difiié h fes dcrpens? Avez-vous erprouv<
une vérité de tout ce qu'il dii? - — F. Non pas ceries,
non. — E. Ces jours, ellant à Fontenai le Comte,
il fit un teftament, par lequel il donnoit quatre cenc
mille elcus i quelques Geniilsbommes & Dames. Le
Nouire Grignon, un des meilleurs de U Province,
prit pUilir à coucher cela en termes honorifiques,
comme la befongne U plus fptcndide qu'il eufl fait
en fa vie, mais la minutie & U grolTe lui demeurè-
rent, pource qu'aucun des donataire* ne voulki
hafarder vingt fous pour U f^'on, & pour U col^
tion qui fe fit à cette occafion, demeura le n
du laquais. Et là il déclame contre les Poîili
les appelle mauvais niais; & j'ai veu dans le cabinet
de mon voilin dixhulA ou vingt pacquets qu'il i
receus, & en reçoit tous les jours des plus grands de
il
Chapitre XVII!.
Qutique fuitte dt VOrme.
fNESTB. CtpdebuchI me boila'
aufll eflonnii que quind bous
abez réduit ma proupheiie en
filace. Comment diavie feroent
ti \S^J^l^% trompez tant d'aviles hommea,
V _L'^/^^^C^ ^ l*^' '^'" '' P'^* ^^ Souleil ? —
- — - — ■^T*'^! E. Le trop pré» eïbJoUit au
lieu d'efclairer; nous autres aux villages, à la jufte
proportion &. rencontre des ligaei vifuelles, voyona
quelquesfois plus à clair. C'eft que ce galand, qui
s'appells en ce pays lantod l'Amiral, pour refpe-
rancc de commander une armée navale, tantoll It
Comte de Marans, pource qu'il le veut acheter, tan-
coll le Marquisde Belle Ifle ou de Ré,Comted'01eroa,
Lieutenant de Koi en Bretagne, & ainfi prend le
ciltre d'autres Seigneuries & Gouvernemeni, ainfi
qu'il les defire : ces jours en un feftin de ce pays où
il avoir appelle trois Ducs fes confias, un maçon le
voyant à cable & ayant bien catechifé fa mémoire
pour fc reconnoiftre, le tira par les chaulTes au (or-
tir du difné, &lui dît : < Mon coufm, j'auroU bien à
5î+
oc r«VBïTS. ,
cette heure affaire des liuifl livres que vous louchaflet
pour moi, quand nous travaillions à BrifTac, • Les
Ducs qu'il avoir accoufincz n'empefchercnt point Je»
premiers coups de poings du coufinage nouveau, fit
apré'i la fepararion lircnt une enquefle fur M. <ie
l'Orme, comme pour k faire Chevalier du S. Ef-
prit, & le crouva que fon pcre & fort frère pleins
de vie Sl bons maçons, travaillent encores prés de
Cran. Ce mauvais coup fut fécondé par un Flamand
mal gracieux, qui dans un logis de Maran lui main-
tint avec le poing au vifage, que tous les pirates quTII
alleguoic eftoient noms contrefaits, ou perfonnes q^j
n'el^oient plus. Ces petits accidents, querelles «f
'mauvais fuccés, foufOet.t, coups de piedji & aui
rebuffes, que fouffrii ce bon Seigneur, m'aiderentlj
defcourager l' embarquement, où fe vouloient e
LIVRE III, CHAPITRE XVIII.
535
habile qu'eux, les defcrier, defdaignant de fuivre leur
exemple, en déployant votre afliftance & vos moyens
pour un affaire tant defiré ; pour moi, )e ferai mon
rapport de ce que vous me ref pondrez là deflus. Mon
voifm refpondit : t Monfieur, dites donc comment
je voudrois que ces pièces que vous eftimez tant
honorables, le fufTent pour tous : & quant au mef-
pris de l'exemple duquel vous me chargez, tant s'en
faut, car je fuivrai MefTeigneurs de poin^ en poinâ,
& comme ils n'ont point efpargné les tiltres & n'ont
rien defbourcé, ainfi j'appellerai Jean de l'Orme que
voila, Monfieur TAmiraî, mais il n'aura point de
mon argent, comme ce confeil n'en donne point. • -r-
F. Ha, Monfur, me boila deflFait : à la bentai,y'abois
vien penfai dux chaufes. Tune, qu'il ne faboit ni lire
ni efcrire, & l'autre qu'il n'aboit pas un villet fuie-
ment de la part de çus à qui il fe difoit Amvafladur.
Chapitre XIX.
Du Comit dt Manlt.
iKESTE, Or ye m'en bai boîr i
'i Cour comment cet aSure ril
abmçai ; fi ye ne puis riea de cr
toftii, ye me bai mettre de diu
LIVRE III, CHAPITRE XIX. 537
ces contre la Comcefle de More ft la maifon de
Caumont, à caufe d'un parcage de fon maiftre, avoic
pris connoiflance en un logis de la rue du Temple
à Paris, trouva fon maiftre arrivant fortuitement en
pofte, & le mena defcendreft loger où il y avoit pour
lui falle & deux chambre tapiiïees, en attendant que
le train fuft venu, pour lequel, la cuifine & les pages,
il erra un petit logis auprès, l'hofteiTe faifant le mar-
ché. Monfieur le Comte ayant receu nouvelles que
la biche privée eftoit morte, fe mit au lï6t de deplai-
fir, mais fous cette couverture e'eiloit pour Tamour
fans raifon qu'il portoit à Madame Avoie, fille unique
du logis, à laquelle il ne pouvoit manquer quarante
mille efcus de fucceflion, outre les immeubles. La mère
& la fille en peu de temps s'apprivoiferent fort avec
leur hofle, qu^ils louoient de fes bons propos, mais fui*
tout d'eftre bien privé pour un grand Seigneur. Le
Secrétaire fe cachoit avec elles derrière une cloifon
fendue, d'où ces femmes efcoucoient ce qui fe difoit
en la chambre de M. le Comte. Un foir ils efpie-
rent de plus prés pour un grand eontrafte qu'ils
entendoient encre le Maiftre d'hoftel & PEfcuyer au
chevet du Seigneur : c Comment, difoit le Seigneur
Francifque, pourrez-vous eomparolflre devant Mef-
fieurs du Lude, de Bourdeilles, de Rufiec ft des Cars,
& leur mener pour proche parente une Parifienne,
& pour alliez des fires & des chapperons de drap!^
— Ha, Francifque, difoit le Maiftre d'hoftel, penfe-
tu que noftre Maiftre n'ait pas combattu ces chofes
par la véhémence d'un amour, à quoi toi ni moi ne
(aurions remédiera II n'eft plus temps de le eonfeil-
ler, mais de le fervir ; il eft affez grand pour agran-
dir une femme, de laquelle les enfans ne porteront
pas le nom. • L'Efeuyer redoubloic : « C'eft toi qui
5Î6 AVANTUaBB DV VAKOS DE FANISTH.,
l'a.'; flatté en cette opinion : quand tu feras ta pafi
ces Seigneurs te feront pendre, — Vois tu, bougre,
difoit l'autre, fi tu leur fais récit de moi autre qu'il
n'appartient, jeté ferai manger un pied d'efpee. •
Le Comte levait le bras entre deux, & après quel-
ques foufpirs, difoit : ■ O Francifque, que tu
juge de ma vie iniquement. > La mère & la fille
dilbyent l'une à l'autre i l'oreille ; i Voigé vou,
jamais nous navons eu que du ma! pir ces cail-
lettes d'Eftaltans illcc. • H faut acfourcir que pat
telles menées, M. le Comte daigna efpoulcr Avoic, &
cMïi Francifque pour le premier de fon train, ïtm
cent beaux efeus content, & quelque promede, le
Secrétaire avec autant fut depefebè aux aâ'aîres du
pays pour ne revenir plus. M. le Comte difoit à foti
beau père qu'il le prioit de l'emploier à fes aSairet
ilAlemanBC * n.i'il nr*n<irmr iin-andn]i.iGr<t*w»i*.
LIVRB III, CHAPITRE XIX.
5Î9
Arnaud, lou vrabe home ! Y'abois vicn penfai d'en
faire autant, mais tout mon cas s'en ba en cagade :
ye biens à mon perpaux, qu'il me faut eftre ou coyon
de mille libres ou cfpion.
Chamtre XX.
De Cfyom du mdh tivres. des e/pions.
I¥î
.y. Qu'appcllea-vous coyonde:!
l'\ ;>-.— ^| il mille livres ? — F. Ce foat q.U4
/
LIVRE III, CHAPITRV XX. 54»
der : il vatteroit vicn tout lou Loubre. — £. La
garde des mercenaires s'eft trouvée bien fouvent
infidèle au befoin : & quel moyen auriez-vous d'en^-
trer en cette compagnie? — F. Il y a un Efcuier de
Madame que y 'ai accompagné pour un acqueft de
quinze mil libres de rente qu'il but faire; il m'a
dit que ye parufTe au difnai de Monfur & qu'il me
prefenteroit. — £. Comment! TEfcuier quinze mille
livres de rente. Je bous puis afTurer que celui
qu'ils appellent le petit Taillur murmuroit l'autre
yor debant nous autres que depuis la fourtune de
fon Maiftre il ne fauroit aboir monftré que cent cin-
quante mille efcus net. Il ne fut yamais une telle
puiiïancc ; bous ne bouiez par les rues de Paris que
poutances plantées pour çus qui ozent oubrir la
vouche contre Monfur ou Madame. — £. Et que
penfez-vous que ce foi t pour eux qu'on ait fait cela?
— F. Oi, ye bous maintiens que c'eft pour ux
qu'elles font plantées. — £. Peut eftre. — F. Mais,
Monfur, quand il n'auroit baillant que le rebenu de
la Poulette qu'ils ont efteinte, cela leur a balu trois
millions. — E. Si vous pouvez donc entrer en cette
coyonnerie, & qu'elle dure, vous y ferez mieux voftre
profit qu'à l'autre meftier d'efpion. — F. Pourquoi,
une vone penfion & la vone grâce des Gouberneurs
n'eft poent à mefprifer. — E. Oui, mais ce meftier
veut une grande dilligence, dextérité, invention,
impudence, & avec tout cela il n'eft point fans dan-
ger : car quand Tefpion n'a rien de vrai à produire,
il faut qu'il entretienne fa boutique de fauflètés, &
ne faut que la preuve d'une pour gafter tout de
l'une ou de l'autre part. Je vous dirai comment fe
gouverne un Sénat de telles gens que nous avons en
ce pays, compofé de quelques Catholiques ruints
542
AVANTUaBS DU BARON DE FjEKtSTE.
qui fe veulent relever par les chofes
d'Huguenois révoltez tout à plat, & d'autres qa\
prenenc terme pour l'eftre. Premièrement ils emplif-
lent leurs lettres des pas & des paroles des plus gcni
de bien du pays* en derourtiant toutes chofei de
leur droit fens. Ils voni difner avec un Geatilhamine
qui leur en donne de boa cœur: ils le meiteni i
prupoti du mauvais gouvernemeoi d'aujourd'lmi. Si
c'eli quelqu'un qui ait charge, ik demanient coiR-
bien de quartiers il a perdu depuis trois ans, lui font
voir au profit de qui va ce larcin, & que les chofe»
tronc ci après de mal en pis; allèguent les pcnTioni
nouvelles des perfonncs les plus indignes qu'ila peu-
vent choifir; de là ili viennent fur les comparaîToiu
du temps du feu Roî, & qu'on eftoîl bien payi foiu
l'adminilVation de M. de Sulli. Si U delTus ils
tIVRS III. CHAPITRE XX.
543
bien en proyc à cette canaille. — F. Si eft ce qu'ils
feront recompenfez, car ce font gens qui la plufpart
fe font faits nftruire. — £. Que TEglife doit main-
tenir.
Quelifuei (jUiiira
■ (t eommtnreilunt d* l'hifioi
iU Catopff.
cNSSTE. Il laut ^uc je bous dk
un vea.u plaifir^ c'clt ^ue ce min
^l^rîLâl freie en a mené huit oui le fiiat
LIVRE III, CHAPITRE XXI, 545
veautez que vous m^avez laiflèes. — F, Monfur,
cecce là eft d^une Dame que je ne voudrais pas qu'elle
fut nommée pour dix mille piftoles. Il lui prit une
debocion de communier tous les yours; là deflus
quauq'un de boz yens lui donna quauque rime, donc
ce quacrin fait la concluTion ; boyez :
BKAY.
Commune^ qui te communies
Ainfi qi£en amours en hoftieSy
Qui communies tous Us Jours
En hofiies comm^ en amours^
A quoi ces Dieux que tu confommes
Et en tout temps & en tous lieux ?
Toi qui ne t'es peu fouler d'hommes
Te penfes'tu crever de Dieux ?
Ceci eft de haut gouft. — F. L'autre eft vien plus
dangerus ; lifez :
BNAY.
On demande a quoi font utiles
Conchine O* force autres encor :
Philippes en euft pris des villes ^
Ce font des afnes charge^ d'or.
Touchez là, vous mettez le nez en bon lieu. Ne
me promettez-vous pas que, s*il vous tombe quelque
chofe de mefme entre les mains, vous me Fenvoyerez ?
— F. Oi, de bon cœur. — F. Et moi en revanche
je vous promets un livret à quoi un de mes voifins
travaille, qui vous fera baifer à la joue aux bonnes
compagnies que vous fréquentez, c'eft un Traitté
qui n'a point encores de tiltrc. On veut qu'il le
nomme le Rabilleur, les autres Efculape; le corps
eft d'un Baron de [ce] pays, qui comme Don Guichot
n. 35
546
HES OU BAROV t>E F^KESTE.
voyagea pour remettre la Chevalerie errante, cettui—
ci coure le pays pouf reftablir l'honneur des Set>
gneiirs & régler la menue NobleiTe, où il lui arrire
<ks accidents qui ne vous lairront pas dormir. — F.
Monlur, ye me mets à genoux debanc bous, pour
que bous m'en dtliez quauqtie caufe, & que yem'ea
aille en cène vone vouche. — E. Je ne l'ai leti que
deux fois, mais pour vous donner courage de m'en-
voyer des nouveautez, je vous en dirai le commen-
cement & la fin. Un Baron de ce pays, qui porte le
nom de Calopfe de bonne & grande maifon, noum
aux lettres, &. qui en fa jeuneiTe a eiti! homme de
guerre, depuis pir le loilir de la paix cil devenu
plein de médications, à force defquelles (fans
cela de fa race) il eft devenu ipocondr raque. C*
ci convia un jour des gens qui approchoycnt le
I
Chapitre XX'H.
Commtnetmeni des opinions du Confti
& la rtfilation.
UELQU'uN propofa l'opinion de
feu Segur, qui difoii qu'en Tur-
quie ]ëi fous efloyent cenus pour
Prophètes, & que tout y profpe-
roit: atnfi que la France iroic
bien, fi on vouloii adjoufter plus
' de Totaux Prophéties de Brocart.
Là fut allégué Renaudiere, difant qu'on ne porioit
point alTez d'honneur à la Noblefle, & que tous les
difcords de la France fe devoyent vuider par les
Annales de Bretagne. On mie en avant un pedi livre
qui pour régler la grande multitude d'Oflîciers vou-
loit eflire i30,oooCenfeurs. Le Prefidcnt de Provins
qui efloii là, mainienoit tout aller en décadence pour
ce qu'il n'eiioit pas Chancelier. Un baladin nommé
Faucheri, qui n'eltoit pas alBs avec les autres, vini
dire par delTus les efpaules comment il avoit leu en
Bodin que les Royaumes fe ruinoyent fauie de la
dance, & pour cela il ne vouloii plus mouftrer qu'à
pilloles, & qu'en fin la France le perdroii. Ce pro-
54^^ AVANTURBS DV BARON DE FfKESTE.
pos fuc rejené, pource qu'il n'y avoîi Ik perfonne
pour les caprioles. J'aimerois autant, dit le Baron
de Calopfe, l'opinion de Mademoifelle Sevin, afflâ-
voirquc le monde fe perdait à faute de pèlerinages :
& Grandri d'auprès de Mellc, s'efcrioit roiisjours
i]uc le monde fe perdoit par trop de Clergerie. Ce
)>ropos fut rompu par Madame de Bonneval, la
bonne femme, qui avoîl leance en ce Confeil, &qui,
après avoir difcouru fur la félicité d'Angleterre du-
rant la Reine Elîzabech, maintint qu'il faloii mettre
la France en Guno[;ratie . Voila le Baron en colère :
• Rran, dit il, j'aimerais autant la Jobelinocratie du
Prince Malaifé de la Rochelle, i Aufii à propos fut
l'opinion du bon homme de Cliflbn, difant que tout
rtlfiiii faute d'ufer de pimpenelle; j'y adjouller
LIVRE III, CHAPITRE XXII. 549
de Grammere : car cette Grammere, qui vient de
grandis mater ^ tiendroit tous fes enfans en paix, s'ils
faifoient d^elle Tellat qu'ils doivent. C'eft par elle
que nous nous entendons les uns les autres. Faute
de Grammaire fait que nous ne nous entendons pas;
fiiute de s'entendre ameine les diflentions, les guerres,
la ruine du pays : ergo^ faute de Grammaire ruine le
pays : c Mais encores voudrois je, difoit maiftre Ger-
vais, que cette Grammaire fîifl chaftree d'une grande
quantité d'adverbes, comme charnellemenij realle-
mentj corporellemenij tranffubflantielUment ; d^auftre
cofté^ facramentellementj figurêment^fpiriiuelUmenty
inneffablementj accommodemem \ & encores parmi les
Courtifans tant de Extrêmement ^ je fuis vofire fervi"
teur éternellement; & aujourd'huy courz furieufit'
ment y jufques à dire «7 eft fage^ il eft doux furieufe-
ment, La première bande de ces adverbes a trop peté
dans les efcholes & trop fait peter de coups de ca-
nons: les autres emplifTent la bouche des plus fots
Courtifans, & cet accommodement eft terme de haute
vollerie ou de gibecière, ou ftyle de bourreau pour
raccommodement de la corde au patient. On ufe mal
auin de pluiieurs adverbes à la Cour^ comme : je
vous aime horriblement ; on dit mefmes grandement
petit. » Sur ces propos, le Baron de Calopfe con»-
mença à changer de couleur, & ne pouvant plus tenir
fon eau, jette fa calotte fur la table, va dire à
Conftantin : c Je vous dis que vos difcours font fpur-
ques d'impertinences, d'incongruitez & comme dit
Coton, vefvô de jugement. » Il efchet rem acu tan-
gère : tous les defordres viennent de ce que la menue
Nobleffe ne refpefte pas affez les Seigneurs comme
moi. La Cour m'a efté en abomination en oyant les
petits aubereaux dire : c Hau Vicomte^ hau Marquis,
550 ATANTURES DU DAKON DE tJeHiSTK,
veax-ia venir jouir? . De là (outcs chofcs vont fur
ce moi Jurjum algue deorfum & tous ceux qui
elltment aucrcraenr, font pié-gris, rulliijues & c^ra-
bins. Or n'ell ce pis alTez d'en dîfcourir paihologi-
iguement, il faut procéder à li thérapeutique, à quoi
je m'offre en cetie bonne compagnie, par un voyage.
duquel il fera mémoire, & pourcani je detire vi»
confcniemens, iiem que vous l'accompagnez de vo%
prières & benediftions, refcrvé à l'arriére boutique
de mes fecretsle progrez de l'expédition, La fureur
qui parut au vifage de ce Seigneur fit approuver le
tout, pour le motus par filence, & Aés le lendenain
le voyage & l'équipage préparé comme s'enfuit.
Ckapitrb XXIII.
Extcution du voyage.
RBHiBKBHKNTilconviencCivoir
l'habit, qui elloit d'imc paire de
boctines fourreesde peau de lièvre,
ua haut de chauffes de veloux
cramoifi rouge, un propotnt de
facin bluf; par deflus une Juppé
fana manches de demie olûde
rannee, une robbe de liretennc Tourree de renard, un
chappeau de veloux violet à quatre quarres & ouppet
pendantes, & delTous une calotte de colle blanche
picquee, qui defcendoic jufqu'auz efpaules, & par
une feneftre carrée lailToic paroiAre un fort grand
nez & deux gros yeux admirans toutes chofes. Sa
lidere, doublée d'efcarlatcc d'Angleterre, edoiiportee
par deux jumens, l'une rouge, l'autre poil d'ellour-
neau. Il eftoit affilié de fon apotiquaire, nommé
Riclec, chevauchant une mule entière, garni d'une
feringue à l'arçon de la felle & de l'autre collé d'un
pot de chambre : le relie de fon bagage elloit ime
petite varife verœ, que fon jardinier, à cuilTes nues,
portoit à pied. Le premier logis de ce convoi fut en
S52
AVANTURBS DU BARON PE f
J
Ars, où le Seigneur foa parent le rcçem félon le*
loix qu'il lui avoit oiii prercrire, & puis ayxai
entendu l'expédition, & que de ce pas il marcboit
à la correftion de la menue Nobleffe. l'hoUe propofe
que le train eftoii un peu trop modelle & de trop peu
d'd'dat pour une fi haute entreprife, pource, difoit
il, que lans pareftre vous ne pouvez garder voftrc
authorité. — F. Et vien, ye bous y tiens au Pardlrc;
mais ne laiflez pas de fuibre bolle perpaux. — E. le
me rends à vous, & vous dirai en pourluivint mon
difcours, que M. d'Ars jura qu'il ne l'abandonneroû
point en un fi grand & fi honorable detTcin, & vooi
coucher à Saugeon, que Calopfe avoit mis fur fc»
tablettes pour avoir veu au Baron de là li mouftache
trop relevée. Saugcon le rcçeut avec toutes les civi-
li:ez qu'il fe pcuft ivifer. Le vieux Baron i toutes
LIVRE III, CHAPITRE XXIII. 553
fous ris hors de faifon. Là deflus force injures; &
puis fur la longueur d'allumer du feu & Taccente du
fouper. Saugeon, préparé par Ars, ne refpond que
desexcufes, & qu'à avoit efté eibloui par la grandeur
du Seigneur. Au coucher, le Baron encrecinc fon
coufin du beau commencement de reformation quil
avoir desjà obtenu fur fon hofte, lequel pour marque
de fa repentence, fe renge au train pour reformer
les autres. Là deflus ce livre conte un beau voyage,
comme il arrefta des chafleurs; comme on punit un
page qui avoit percé fon pot à piflêr; ce qui fe paffa
à la rencontre d'un équipage plus bizarre que le fien,
au Confeil de Cherveux, quand il fut adoré à Chef-
boutonne. Je ne vous faurois dire le livre, msâs il
me fou vient du dernier adeque vous m'avez demandé.
Enfin tant chevauchèrent qu'ils arrivèrent chez Riou,
beau frère du correcteur, où il ne trouva rien à
redire fur la réception; mais fur la mi-nuid, un
efpagneux s'eflant mis à japper & hurler, ce Seigneur,
à qui le dormir eftoit cher, fait fauter Ars en place :
a Allez, luy dit il, faire tout prefentement aflbmmer
le chien, & eftrangler le Fauconnier de céans. » —
« Cela vaut fait, refpond Ars ; & ayant un peu pzffé
le temps avec Riou, il remonte anoncer comment le
chien eftoit mort, & que le Fauconnier eftoit mort
joyeufcment, puis qu'il avoit offenfé fa Grandeur. —
Vraiment, dit Calopfe, je m'en repens, & cela me
fait fouvenir de ceux que le Pape Sixte faifoit mourir,
& qui refpondoit à ceux qui demandoyent remiflion
pour leurs parens : Andate^ confortateloyaccioche moia
aile gr ornent e; io li mando la mia benediiione. Le
mal heur fut que quatre autres chiens fe mirent à
japper au fécond fommeil. Telle fut l'impatience du
Seigneur, ou l'authorité qu'il avoit prife à fes pre-
554- AVAMTtrai
OU BARON PI TMStSTU.
miers progrés, qu'il prend un ballon, defcend t
chemife, s'en va lirer le rideau de ton beau-frerc.
crUnt : • Ineptie , ftlonnt'f & Ciimbinage ineffable! t
Mais ce n'eft pas tout, car il commençoit la charge
quand Riou vint aux pril'es; & fa femme, refveillee
à grand peine, pource qu'elle cfloit fourde, vint au
fecoiirs de fon mari, empoigne fon beau-frerc par
le manche; luy, quitte tout pour la faifir à la gorge.
Ars & Riou fe mettent à les defprendre, ce qu'ils ne
pouvoieni faire fans le fecours d'un fceau d'eau. O
duel eftanc feparé, il n'y eut humilité ni repentante
qui peuft empefchcr le reformateur de marcher à la
vengeance. Il fc fait donc pofer dans fa litière, raarcbe
droift à Pons, arrive au chaAeau à foleil levant, ne
voulut pas qu'on avertifl la Ûamc, fa eoufme. qoi
furprife en fa chambre en fe voulant habiller, fu*
I
LIVRE III, CHAPITR.t XXIII.
555
aUx conclurions. Mais le Baron ayant faifi un grand
couteau Bayonnois qui pendoit lez la braguette de
Colineau, le porte aux gorges des refufans, & les
contraignit à chofes eftranges, au moins en pleurant,
à defcouvrir & faire exhibition. A la vérité la pièce
eftoit moult livide & d'un regard affreux; enfin, les
rieux ofterent le coufteau. La leâure du procez &
un occicrate appliqué adoucirent un peu la douleur
& b fureur.
Chapitre XXIV.
Hijione de RuUl & du Medtan.
oiLA comment fortune accourcit
un beau livre & un beau voyage,
car il falut gaigncr la maifoii.
LIVRE III, CHAPITRE XXIV. * 557
velee, fans luy bailler loifir de cercher fa couëffe,
& ayant délibéré de changer d'armes, luy fait porter
le dard après foi. Et voici comment il s'efquipa : il
avoit fur fon bras gauche, d'un bout, & de l'autre
fur Tefpaule, une grande Bible de Jean de Tournes,
ouverte fur le 20 d'Exode ; porte en la droitte une
efpee nuë, & en cet équipage, marche au lia où le
médecin & Riclet eftoyent enfemble couchez. Le
médecin, efveillé en furfaut, eut encores plus de peur
de la chambrière que du maiftre, s'écrie : • Si tu es
de Dieu, parle, fi tu es de l'autre, va t'en ! » Mais
aufll toft il reconnut fon malade à la parole^ difant :
• Traitre au Supernel & à ton ame, il convient que tu
la rendes maintenant. » Voila le médecin à mains
jointes, demandant la vie & pardon à Dieu & à
Monfieur le Baron, proteftânt que quand il devroit
eftre le plus pauvre médecin du pays, il feroit fa
reconnoiffance dés le lendemain. Calopfe cependant
lui prefente tantofl la Bible, tantoft Tcfpee, douteux
qui devoit opérer le premier, le glaive fpirituel ou le
temporel; mais le bras gauche lui faifant mal, il mit
l'efpee fur le pied du lift, prit la Bible à deux mains
& frappoit fur la cervelle en criant : • C'eft pour
t' inculquer ce que prononcent les iainftes pages. >
Sur ce mot, ayant ouy Riclet qui rioit, il tourne là
fa fureur : t Riclet ! difoit il. Hérétique comme un
rat, voici ton heure pofterieure ! » Comme il couroit
à l'efpee, Riclet qui cognoiffoit fon maiftre, prit fa
chemife entre fes dents, efcarquille les ongles, &
tournant les yeux en la tefte avec un grand bruit,
fit tomber de frayeur Monfieur le Baron à la ren-
verfe, & lui fa chambrière ; & Riclet le premier, le
médecin après, paiTerent fur le ventre des renverfez.
Voila comment fucceda le remède aux defordres de
!58
STUHES DU BARON DE F^KEtTr.
U France. — F. J'eniens vien ; bous boulez dire
que nousabons force medednsderEilai JLilIiprupr»
3 cela comme un ciuciiîx à jouer d'un ciliflei. QwukJ
bous aurez lou libre, ye bous donne mt kgiuntc, &
me l'embouiez.
'W
LIVT{E QV04T%fESiME.
Chapitre I.
Comme le Sieur d'Enay & le Sieur de Beaujeu, qu'il
avoit receu ta fa rnaifon, tjhient Jar
s mal en
ui/Hcr^ uiiivE lE Baron de tasefle plus ntui c»
poin^ que dt eoujlume^ (r n'ayant que luy il fui
dans la fallt avant efire apperceu : Enay qui le
void entrer, t'eferie ainfi :
NAY. VoiU Monfieur le Baron. —
F. Pour bous ferbir éternelle-
ment. — E. Qu'on aille loger
les chevaux de Monfieur le Baron,
courez. — F. Monfur, il n'cft pas
de vefoin : bous bo^ez tout mon
équipage pour cette hure; cette
pendarde de Fourtunc m'en a joiié des fiennes, comme
je bous dirai. — £. Lavei vous donc, & gardons le
J
560 AVAVTURES DU n VKOK DR FfHKSTI
refte après k fruift. — F. Cènes hoicî un von reo-
comre ; je n'ai rien beu fi à proupi^s depuis U vataillc
de Siinft Pierre que boftre uvie, — £. Vous venez
donc de ce mauvais affaire. — f.Oida,oy,c'cftIàoù
y~ji beu delà guerre à von efcient. -le me fuis troubi
depuis l'haunur de boftre beuë en trois guerres où
les afiaircs ont efté vien vroiiillees, à la vacaille di)
puni de Sey, ^ celle de Trahonne en Balteline, (t
à celle de la Bal-Sinft- Pierre, à la frontière de
Pied m ont. — £. Appeliez- vous ces rencontres
batailles ? — F. Pourquoi non, quand ce font armées
Royales qui fe chocquenc, quand il y a drjppcau«
vlancs arborez & artillerie qui marche. — £. Maïs
n'avez-vous point quelque cheval de loiiagc pour le
moins? — F. Non pas non, que je me fuis mis en
l'infancerie, coiomc 1c fui moyen de pareflre & de
LIVRB ir, CHAPITAS I.
561
mais il me fouvient que fi un Capitaine ou un Maiftre
de camp euft eflé veu avec des bottes & efperons à
quelque exploift de guerre, on euft crié qu'il avoit
derrière le bataillon quelque barbe ou cheval vifte
pour jouer à la faufle compagnie, & gaigner le mou-
lin, fi bien que les gens de commandement ne por-
toient que la gamachc. — F. Que boulez-bous? il
y a afTez d'otres biedaferies qui ne font pas comme
en ce temps là. — E. LaifTons ce difcours pour
ouyr de Monfieur le Baron les avantures qu'il a
courues en ces trois guerres. Par où eftes-vous
d'advis de commencer? — F. Suibons Tourdre du
temps, & ce fera la guerre du pont de Sey.
35»^
^y
H.
,6
Du pent de Sei, & par occ^/mil de la n»oJe.
ESTE. Oli/, i'ellois au pont de
SeJ, & fis bingt & dus liués en
bingi quatre hures. Je palTat à
LIVRE IV. CHAVITRB II. J63
ner un demend. Ceft un vrabe pais pour fe fauber
que ce vas Poié^ou, tout plein de haies, que nous
fautions par les efcaliers. Yamais je n'abois maudit
mes efperons qu'à l'hure, car je tenuchois à tous
coups, & les uffe bifTez, mais c'efl ce qui fait
pareftre le caballier. Soufaent b tefte alloit la pre-
mière & le cuiou faifoit le fouvrefaut, comme je
difois : mais bous fçabez qu'un homme de guerre
doit prendre fes abantages partout. Se po dire
que nous en fçabins trop per efta notaris; c'efl une
velle chaufe qu'une retraite vien faite. — B. Qui
commença cette defroute du pont de Sey? -^ F. Ce
fut un vrabe Duc, qui boyant les approches^ prit
une gaillarde refolution, & lebant la main haute,
s'efcria : • Qui w^aime^fi me Juibe! faute qui put !%
Il dit cela de fi vone feiçon qu'il fut ovei, en defpit
d'un bieux Meftre de camp nommé Voifguerin, &
quelques Huguenaux qui bouloient comvattre. —
£. On apprend tous les jours ; jamais je li'avois ouy
applicquer ce commandement : « Qui m^ aime y fi me
Juive y • fmon pour aller au combat. — B, Et moi
j'admire la refolution de ce jeune homme; vous ne
dites rien du Comte Sainô-Aignan, qui alla bien au
combat. — F. Je n'en fai rien, car il eftoit delà
l'eau. — B. Et vous, où eftiez-vous? — F. A l'autre
eftreme du pont. Il y en aboit qui bouloient que
nous nous millions en vataille (ur un haut pour
pareflre; mais quand nous ouifmes la furie de la
charge, chaicun prit parti. — E. Vous fiftes fort
bien, & cène fois là vous aimaftes mieux Teftre que
le pareftre, & peut eftre eftes vous encor aujourd'hui
pour n'avoir pas paru. Peut eftre apprendrez vous
que Teftre vaut mieux que le pareftre, pour le mal
que vous avez receu à pareftre botté. — F. Bentre
564
NTCKIS DU VAKOK DX FjrKBITC.
S»Hi Fiicre! baus me icnez à cette fois. — B. J*âi
veu que nous do'js mocquions des Anglois, qui pour
pareltre Geacilshommcs, lont ious)ours bonez &
erperonuez duis les navires, & les genc de robbe
langue au Palais. — E. C'ell bien loing de ceux de
Pans, qui mal iraiiteai les GenrilshomoiMcfpcTonocs,
comme vous l'ciTayalles <]uincl Fcrvarqucs rous fit
cetce mefchanceid «u Palais. — F. tU font vien
encor ces bieduerics, & n'y a plus qu'us ; car les
loldais des gardes fonc prefques tous vonés, & cda
paroid vien dabantage, car ils fencent les gendarmes
reformez. — B. Nous cfperons un de ces {ours que
les Dames iront bottées & efperonnces pour iiûrt
iionneur à la mode, tt ï l'mvcflccur Sainâ Michd.
Je vùi quelque.sfois des Juges par la France
prennent de mauvades conjeâures de leurs prift
I
M
LIVEft XV, ÇH4P1T1LB II. 565
comme pédants du bieux temps ? A proupos des man-
chettes, y'eftois allé difner chez Monfur lou Bidafme ;
un fadafJTe de Caiteine prit mes manchettes pour la
ferbiette, & s'y efluia les mains : ye TufTe trucquai,
mais il aboit fait cela par ignorance. Ye bous dits
& bous maintiens, pour rebenir aux chebeux, que
c'eft une chaufe vien honteufe que le poil ne couvre
point les oreilles. — B. Vous verrez que cette
invention eft venue de Gafcogne, & quelques
uns s'en feront fervis, au lieu de cacher les oreilles,
à couvrir la place où elles avoient efté, — F, N'eft-
il pas vien plus veau qu'un efprit retiré en foi mefme
offufque ainfi les oreilles & les yeux pour ne rien
boir & ne rien oiitr qu'abec deldain, & ne deftour*
ner point fes velles méditations^ -^ B, ht Roi
paiTant à Grenoble pour aller en bts, demanda à
l'Evefque comme quoi il gouvemoic 1m Dames, ft
les voyant coiffées à la garcette, tint un Itngtge fort
à la défaveur de la mode. — F. Je croi vien que k
Roy n^aime que les armes abec lefquellcs les moudft
ne s'accommodent pas vien, ft fur cous les grands
chebeux dans les cafques, qui fe coupent encre le
haufle-col, font Thavillament de c«fte plus grand, &
par coal'equenc plus pe&nc ; meûne il y a un de fes
Efcuiers qui a ofé rimer fur les garcectes & dire :
Les Àrti/ans ont à leur porte
Ven feigne iu tnejtier qu'ils font j
Et tt0t Dames en tttte forte
Ont Us garcettesfur Itfromt,
Chai-itre Ml.
Du fécond dejajirc à h l'ululiiu.
ÏÏm.
«NESTE. Ayam tout perdu
I yu & me boyuni «igagi de de1>^l
j tes pour les bibrcs, yc me laiflîij
LIVRE IV, CHAPITRE III. 567
diavle, fans fe mettre en forte haleine. Il me lougea
dus fois à Sant Germen, que je ne fçabois où aller,
& m'apprit les coumoditez qu'il y a de n'aboir poent
de rouffis. Mais, Monfur, quel von conte fçabez bous
de lui? — B. Si fçai, &qui viendra à propos d'aller
à pied ou à cheval. On did qu'un Grand de France
qui porte l'efcarlatte, ne defdaigne point cet homme
de pied, & fi âilletava délia Jua buona robba. Un
jour que nous eftions bonne compagnie à pafTer le
bac de Chattou, nous voyons venir à courfe de cheval
un autre Aumofhier qui n'ayant put nous joindre
que nous ne fuifions à milieu de l'eau, s'efcria au
SouifTe qui parloit tousjours latin: c Redij redij Do-
minus te vult conventum^ & fi ulterius progrediaris^
acerrimas dabis panas. » LeSouiflè s'efcria du milieu
de noftre batteau: t Tomine^ Tominatio feflra ticat
Tominationi Tomini Prafoulis, quodnon fiolo machis
inferfire illious prœpoftera lipidinip quantoquitem ego
fado petes. i Le cavalier du bord replicqua force me-
naces, n'entendant point ce Ladn tudefque, que fort
peu du batteau entendirent aufli. Il n'eut pas fi toil
dit : t Que dites'-vous^ Monfieur le barragoUin ? vous
aurei des eft rivières^ i que le gros brode répliqua :
• Parti ^ moi lit qu'il r^efl point raifon chevaucher moi ;
chevaucher point un cheval. • — E, Ces difcours font
dangereux : il fe pourroit trouver quelque courtifan
qui approprieroit la chofe à fon poinél; laifTons
cela, Monlieur le Baron , je vous demande, l'armée
que vous menaftes aux Grifons eftoit-elle belle? —
F. Mais des plus velles, prefques tous les foldats vien
accoumodez à la moude, tous les perpunts vien de-
couppez. — B, Vous ne dites que ceux qui avoyent
moyen portoient tous des Royales ; mais les gens de
pied furent contraints de les laiffer, ou rougner (au
506 AVAN'TURES DU BARON DE F.BMB5TE.
moins ceux qui portoyeni bones), ctr ^ tous coups la
cfpcroiis s'cngageoyeat dedaQi,& faifoycni faire des
partares. — E. Je ne vous demuuiois pas cda, je
dcmanduis fi l'armée eftoit tonc, — F. On nous con-
coic pour quatone mille hommes de pied, Se dus
milli; cliebaux. — B. MonTiuir, j'jr fis un tour avec
Miinficur de Vaulecourc ; quand cout fiu jrnm, il y
avilit cela. — F, Mais, Monfur de Vesuju, ces v«n-
dc6 ne parelTeni-elles pM borriblestem velles^ —
B. Ouy, il n'y eue que le delàflre qui gaAa tout. —
E. Que fufTe, Beaujeu? — B.Ce fut que l'année, qui
[cnuit quatre lieues d'afliette, fut un joar attaquée
par le régiment feul de Papuem, lequel changeant de
cjrùcr, les Capiuines prefque tous yvies aulli bien
que le relie, Te dirent l'un ^ l'autre : u Voyomt^ eti
gerti Jont fur Uwt armes, t lÀ delTus, fant comman-
LIVRE IV. CHAPITR» IIL.
5^
refpons que de ces onze pièces il n'y en aboit que
dus Roïales, trois badardes, &le refte n'eftoic guieres
que de pierrieres. Pour le ralliement, nous abions
quelques uns efchappez jufques à 4 iieuës&dcmi; il
n'y aboit moien d*en faire 9, & encor ne fe pouboit
qu'au lendemain, qu'on fe rallia après que ces
ybrognes fe furent retirez. Mais, boiez bous, il y a
des chaufes qui ont empefché l'entière liverté de ce
pays, qu'il n'eft pas vefoing que tout le monde
fâche; car il y aboit des terres où nous n'ofions
voûter lou pied, pour ce qu'elles eftoient ou au Roy
d'Efpagne, ou à TEmperur. D'aillurs nous eftions
vridez par le refpeft de Sa Sandeté. — E. Et eux
n'uferent pas de ce refped. — F. Comme j'ai appris
d'un Secrétaire de Monfur lou Marquis, les affaires
d'Edat ne font pas comme celles de la guerre. Nous
eilions là pour negotier, il y a des efprits qui
bout 622222222^ & qui beulent qu'on donne {t/i^
craq, boutte^ mais il faut aller à pied de plomb. —
B. Et en ce faifant, on va quelquesfois à pied de
veau.
CHAl-ITtlP IV.
■r de FmielUr O qatlqur chcjf.
du rfyugc d'Ilillir.
r , 'gJ^^ry-:^ NAV. Mais, Montieur, vou
IT<1 r5Tr~iljl avez parlé de triîis deftflre
LIVRE IV, CHAPITRE ÏV. 57I
US que les proubes goinfres. — B, Voyez vous
comment les couflumes fe changent. Je me ^uis
trouvé aux vieilles bandes, où fi nos chefs nous
euffent commandez de tels ouvrages, nous nous
fuflions mutinez, & euflions refpondu : c Allej cercher
des gaftadours ! » — F. Oh ! il y aboit vien des glo-
rioux parmi nous qui firent de telles refponfes ; mats
on menaça de pendre, & l'exemple de nous otres
Gentilshommes lurfit quitter lur gloire. — B. Gloire?
vrayement ceux qui ne poUurent point leurs mains
à telle befongne, eurent à bon efcient gloire de
cavalliers. — F, Qu'eft-ce que gloire de cabalier ? —
£. Beaujeu dit vrai. Il y a trois fortes de gloire :
la divine, celle du cavallier & celle du barbier. De
la divine, il n'en faut point parler en nos cauferies;
la féconde, c'eft celle qui fçait parcere fubjeéiisj &
debellare fuperbos ; celle du barbier gift en morgues,
ou en affetterie de putain, en habits à la mode, &
telles marchandifes. — B, Ha ! Monfieur, vous ne
comptez pas la glori Bernât? — E, Où avez-vous
trouvé cela? — B, En un feftin où je me trouvai à
Nerac. Le Sieur de la Cheze, qui avoit acheté un
edat de Confeiller, fe maria à une riche fille de la
ville. Or eftoit il fils d'un riche laboureur, tellement
de la vieille mode qu'il n'avoit jamais porté de haut
de chauffes. Le fils fut deux mois après lui, &
employa tous fes amis, & mefmes quelques Eccle-
fiafliques, à lui perfuader de porter des hauts de
chauffes un jour feulement, pour tenir place de père
aux nopces de fon fils. En fin ce père le promit en
pleurant, & predifant qu'il en arriveroit quelque
fmiftre malheur. Le voila donc veftu d'un grand
cafaquin noir, & de chauffes de mefmes, où l'on ne
mit que quatre efguillettes avec celle de devant. Il
faluc lui aider à chcmioer pour le mener â cap de
table. MoiiTieur de U Che»c fcrvoit, & prcnoit garde
à pouffer devant (on pcrc les plua friands mource^ux
qu'il pouvoir. Ce grand vieillard Icc&avide, voyant
d'auu'es vivres <)ue U cap d'ail, le mit i etcrîmcr
des mains & des dents furieufcmcnc, non l'ant le
IbuTns de la compagnie. Quand Ton ËIs Berrut le
foUiciioit de prendre des chauRes, il n'avoit autre
refponfe fjnon : <i Ah! Btrmti, tjat ut >i glvitUj
Maujitla gtoriSeriui! • A toutes les ftiandifes qu'on
approchoit de lut, il diloii entre les dents : ■ Akl t/ué
de glori, & de glorious! > La furie de mander le fit
pouriatii laire jufques un peu avant le truiâ, & lor»
on lui vid faire des mines d'un cuUi>]ueux, rougir &
pallir. Or avoir il atipréa de lut un charûcr, fon
vallet, auquel il làifoii part de fon difner. En fin.
Chapitrb V.
Sailt det gloires.
1 lAUjBu. Voui trouvez de ee«
morgues de vent couftuntereiaent
nax Efpagnols. Je vous en reux
donner un exemple. Un Efpagnol
&. un foldat Gafcon arrivèrent à
loger enfctnble [& It Reole], i
l'enfeigne du Maa^ieux. Tout
eftani miné en ce pays là, l'hofte eut peine à leur
trouver un chaponneau. Comme ils furent venus i
la petite chambre bafTe, le foldai nommé Perot y
eftïnt le premier, l'Efpagnol entre avec grandes
dermarches, & après pluficurs morgues Erpagnolet,
il creut eftre de la civilité de faire une entrée de
difcoufs, & le commKtça aiofi, en regardant cette
volatile par defdain : i Vo m« efpanto d» ws otrot
FrAnetfei) quients conuit tos empmus fin naranjas t »
LeGafconreipond: < Etyou^debousotrtjSpegMtu,
qui mtHgai lasormigtt faut Cëpoiu.' L'Efpagnol, li
deinis,efclatteunris pour faire trembler la maifon,
& fe mit le dernier k nble, pour achever Ion ris,
cependant que Perot tranchoit le chapon. Le rieur
r4
AKTURCS DV BAROK DK tJEKtSTt.
fuit : t Pur Diûî. grandts palabrai par reir! Dt gra-
cia. kermano, dejirme tl lu nombre, por recitar fftt
apophiegma? — Cap du y ou, d'il le GafcQn, digas
meelvojlre nom <T yùu dirai fou min! • &CC difant,
commença à manger. Le cavalier fuit ; < Vtrda-
deramenle, es la rajon qite el que pide ri itombrf dt
loi mro! diga tl fuyo primera. Htrmano, ya rat llarao
Don Juan Hemandei Rodrigo de Parmeniiera. Sehcr
de las Arenas de la Sierra Mortna. CavaiUro de
Alcaniara, — Cap de you ! laitl de gens ! dii l'autre ; fr
you. m' appela Perot. i L'Efpagnol fe met la face tntre
les coudes far la table, criant ivcc un effroi tleltcat -
Aaa a a, Perot 1 a a a, Pcrot! aaaa, Perot! Perot I
O Diiis. (jual nombre ! Nombre dado y inveniada del
tieiiip-' de Noi! Eatonces el manda trm'a falia de
nombres!» Là delTus Iw ris redouble); ne peumit
LIVRE IV, CHAPITRE V. 575
que les Juges tournoient en rifee. Comme ayant un
Rapporteur très rude & hergnieux d'une fiebvre
quarte, il fit pafTer un homme apofté devant le banc
du Procureur de d'Eftrancards. Il n*y avoit que les
clercs ; il leur dit : c N ^ a il perfonne ici qui puiiTe
advertir Monfieur d^Efirancards que Ton Rapporteur
le demande, mais promptement pour refclaircir de
quelques poinds importans fur le procez? Ceux qui
ont plaidé favent quelle faveur de Rapporteur eft
cela. Noftre grand homme donc adverti, & un efcu
donné au clerc, entre tout hors d^haleine au cabinet
du Confeiller, qui le receut à belles injures. Je vous
conterois quelques autres traids, mais je me con-
tenterai de celui que j'eftime le meilleur. Il y avoit
à la Cour de Parlement de Bourdeaux un Confeiller
plein de hautes imaginations ridicules pour elles &
pour fes contenances. On ne lui refufoit point la
feance, mais on ne prenoit plus fon advis; il fe
difoit Confeiller d'Eflat, & homme qui pour fa gloire
joiioit des mains. Nous vous l'avons fait voir à
Montferrant, quand il joiia avec d'Ardillon. La
Beauffe fe botte & s'efquippe en courier, & ayant
bi^n troufTé un pacquet, cacheté des armes de Por-
tugal, par le moyen d'un petit ducat, va trouver fur
les neuf heures du matin noftre Confeiller, avec
multitude de révérences, lui dit : c Monfeigneur, voila
un pacquet que je vous apporte en diligence de la
part du Roy noftre Maiftre, le Roy de Portugal : vous
y verrez de grandes nouvelles pour vous; je vous
fupplie, quand vous ferez en voftre règne, avoir
fouvenance du pauvre Capitaine Romarin, vodre
ferviteur. ■ Le Confeiller lit la fufcription : • A Mon-
fieur... noftre cher & honoré Chancelier de Portugal
& des Royaumes qui en defpendent : Sur voftre bonne
I BAUON DS FiCKSSTE.
^i, fait de probité de vit, de priuUiifift grande
dodrine, expérience aux grandi O- impt<rianj nffiatrtJ
de l'Ejht, evmme attjf d'konomblê famille dont iwkj
ejhx iffu, Nous avons fait cfutix de tvjlre perfomte
pour vous faire Chaneeliet & Chef de nojlre Juiitct,
tant en Portugal qu'aux Roxaumes ^ui en dffptftde'M.
ilequoi leilret plus «tapies rout feront depefrhee-f <i
x'ojlrt arrivée. Nouj vfiui prions danc font achtmimet
le plujiofl que faire ft pourra, l^'oui avoitt diuuii
charge au Siear d' Efira/mrdt, nofire Threfcrùr, de
vous mettre en mainquatre mille ducats pour ie voyage.
Nous remeitans du chemin, fr auirei pariirutaniej
i)ui en defpendeni, an Capitaine Rom-arim, prafami
porteur, (/ai mui dira plus pariicuiieremenl eem-
ùien rtous defiront vofire venue, ire, % La prtDCtpïlc
penfee de nollre Chancelier fut de f^avotr le lô^s
I
LSTHB IV, CNAriTJLB V,
577
defpefcher aujourd'hui les quatre mille ducats qu'on
m'a ordonnez, comme vous verrez par la defpefche
que voila. La refponfe fut en Xaindongois : c Agre^
Monfieur^ vous vous mefprenei ben. Par la mordi\ J9
ne fçay que Vè ni de Portingal^ni de la Portingalerie^
y ay ben i£ autres efcuelles à laver, • Le Chancelier
repart : c On m'a bien dit que vous faifiez le rulbe
& le mefconneu. Contez moi argent & marchez droit,
ou je vous montrerai comme je fçai chaftier tels
galands que vous, • Pourquoi m'amuferai-je à vous
conter les replicques & les duplicques, jufqu'au pre-
mier fouiHet que de(cocha le Chancelier^ L'autre,
qui efloit aufli fort que lui, lui ramena la boule, &
eut fait bon voir l'efcrime de ces deux demi-Geants,
fi les couppe-j arrêts de la conduite ne s'en fuflent
meflez. L'hof^e & les voiiîns arrivèrent un peu tard
au fecours du Threforier^ & le Capitaine Romarin fie
jolier cette farce fur le poind qu'il allok faire ven-
danges au Guas.
II.
37
Chapit&b VI.
De la guerre du Prince; famiUariié du Roi <r d«
Faneflt; Chaliu, tillrex : Régnante Jcfu ;
l'aniiquùi de Langin.
■. KAV. Mais Monfieur le Baroa,
LIVRE IT, CHAPITRE TI. 579
Nos Grands le bruloienc, à la motide sVncend, c^eft
à dire qu'ils prenoient cenc efcus d'une Pareffe pour
la laiiïer buide au milieu du departemenc. Çus qui
faifoienc la charge aboient cinquante efcus pour tous
enlemble, & les plus grands chacun vingt cinq. —
B. Vous avez bien faiâ: de m'expliquer ce brufle-
ment; je penfois que ce fuft mettre le feu pour faire
degaft. — F. Non, cela n'appartient qu'au pais des
Parpaillots. — £. J'ai veu le temps que la tefte d'un
Marefchal de camp eufl fauté pour avoir laifH^ un
village vuide entre les logis de l'armée. — F. Quand
nous eufmes joints lous Huguenots, ils en difoent
autant que bous, & appeloent cette liverté defourdre ;
mais nous nous mouquions vien d'us, & ce defourdre
nous a ferbi quelquefois : car une nuid que nous
eilions parti de Chefnai, où nous abions gagné chacun
la piflole pour garder une maifon de Gentilhomme,
nous nous amufafmes à voire en une otre. La nuiél
nous furprit à Thourignai; nous allions trouber
Monfur à Selles. Nous eilions efgarais pour toute la
nuiét, quand nous troubafmes dans le chemin un
canon, de là à un quart de liuë un otre, à mille pas
de là lou tiers ; cela nous ferbit de vriffees. Il y
aboit un fadas de Caitaine du bieux temps qui bouloit
que nous envoiailions abertir comment le canon eftoit
avandonné, par un de nous, & que les dus otres
demouraffent en bedettes dans lou caiûin ; nous nous
mouquafmes vien de lui. Il me foubient auf& qu'à la
Croix blanche de Lufignan, Monfur y eftant lougé,
Rochefort abec lui, & un grand trin, il fit demourer
à coucher un Marefchal de camp Huguenot, qui le
lendemain au partir, boyant qu'on ne donnoit pas
un hardit à l'hofte, fut vien fimple de payer. A
voire j Pagej à voire! Excufez moi : je penfois
umilierement,
Je (lire : Que d
%ez tousjours
liir cow quand
craigncr-vouï m
faift ne faffè <
faveur P — f . s
n'eicufer pa« 'jej
homiDef, ou pou
^. Vous me fait
entre le Roy [
Lunoufin, qui t\
fijie, & nui quao
cftoit heiiciere. J
Parler Jt lui, po,
encreprifes du Li
^«y>ge. aalu( a
firent trancher ig ,
«^e li prit occa
«flaire, en cet lera
ff<^wt, & capoilù.
» nptii, Dieu à m
ptmr Ut txetr aiui
Liv&x iT^ cHAPirmB vu j8l
m'attends d'aboir autant de pribaotai abec Sa Majefté
à mon retour qu^ auparavant. Il fait vien d'où je
fuis, & que baut lou Baron. U a eftai chais mon
couiln de Poulailroa abec les plus galands de fa
Cour, pour comvactre lou Diavle, qui avoit faifi la
moitié du lougis, & à grandes peirades fefoit pur i
çus qui y bouloient aller. Ma couiine fut vien eilon-
naye, quand elle bid la meifon pleine de gens qui
aboient totis Tefpee à la droite, Se lou piftolet à la
maie man : lou Diavle s>n efloic allé. Il arriba que
crois mes couûns qui alloient en une partie de vagues
entrèrent mafquez dans la vaffe cour, la lance fur
la cuifTe, us & lurs chebaux vardez de taffetas vlu.
Boila un grand cri : Boia lou Diavle, boici lou
Diavle! Ceux ci s'enfuirent, & lou R07 à chebal
après us, qui les prit à une liuë de là, & ce Prince
les amena diiner. Il eftoit fortdrofle en ce temps là;
& quand lou cadet de PaulaHron & moi arribafmes
à la Cour, il s^en foubint, & le fit mettre aux Gardes.
— B, J^eftois lors à la Cour de Navarre, & me
fouvient qu^on difoit comment c'eftoit un efcolier de
Thouloufe, qui pour coucher avec la Damoifelle du
logis, fit le Diable comme cela. — £. Vous eftes
tousjours fcandaleux. — ^. Le R07 mefme, pour
aller à Famour, accompagné de Frontenac feul,
eftant tous deux defguifez de cappes de Beam
blanches, alla en pofte à Yemanc Ayant paffé
Artez, trouva la populace du pays^qui avec baflons
ferrez pourûiivoic des forciers; toutes les cloches
fonnerent fur lui^ & deux cents populaces, qu^à
pied, qu^i cheval, les pourfuivirenc aux rai^ de la
lune, criants : A la cauje^ à la caufe! jufques dans
le jardin de Yemant, où la Comtefle qui lea atten-
doit, fit le hola. — F. Je beux vien cela, mais je
I
583 AVANTURKl DV BARON' SB FXHtSTE.
continué à dire que Sa Majeftii fçaii viea d'où ye
fuis, &encorqucye fniexàpied, ye fûts lousiours lod
V^ron de Fxnefie, aulTi vîen Gentilhomme que Idq
Rny mefmes. 11 y 2 des liltres chez nous qui diTcnc ■
Ri!gnanie Jtju propktia. — B, Je ttic trouvai une
fois à l3ia.ble d'une DuchelTe qui allégua la tnclme
chr>fe, ce qui fuc relevé par un dcx plus dottct
Gentilshommes de la Franec en difani : « J'ai vru ai
divers lièilx des tiltres de merme datte; l1« fnot
lou^jours honorables, car ils lont de ci(K| cent ans,
du temps d'un grand Schifme qui el)ablit un Pape à
Rome, un à Ravcnnc, & l'iutre en Avigiton. La
Papes avoieni lors gli;né tin tel avantage que l'zrt
du liccle courait fur leurs nnmx, & difoii on Ion :
Régnant lel Pape ; les Seigneurs, qui rc voulurent
prendre parti avec aucun des Schifmes, comme le*
Chapitr.! VII.
NobUffe de Fanefie, & en faille difcoars
de Renardière.
Gentilhommt
ticque d'un Orphevre, & demanda
ANBSTB. Tanty a donc qu'aullï
vien que Langin nous fommes à
la Vivic. — B. La NoblefTe de
vollre pays eft fort heureufe à fe
faire valoir & à pareAre. J'ellois
ces jours chez un Orphevre au
bout du Pom-au-Change ; un
couvert s'arrefta devant la bou-
Kiboiu Favre? »
Le Parifien ne l'entendant pas, je refpondis pour
lui. Il redoubla s'il feroit bien un cachet? Cela
accepté, il mit pied à terre, & je demourai à la
bouticque pour leur fervir de truchement, parce
qu'il vcnoit tout bourru de Gafcongne. Pour accour-
cir, rOrfevre prit fon ardoife, & l'autre fe mit à
dider ce qu'il vouloit : i Je bus, dit il, mes armoi-
ries. — Demande. Et bien, Monfieur, quel en eft
le champ? — Refponfe. Boutats me aquiou un camp
de millet, — D. Et bien, Monfieur, que mettrons-
nous dedans? — R. Boutats me you, me dis. —
D. Conunenc ? — A, Souvre aquell roulHs, qui me
;84 A.VANTlI&fiS DU SAROK DE FAltBSTI.
foufli; cents vons efcus. pctÎK s'cnicnd, Boutats me
un efptTverot fur lou poiag. — P. N'y k U que
cela } — R. Quatre cayiioig efpagnouls, vîgarraz tic
vlanc & de negrc. Ne di-membrcz pis lou plumer,
ni lou manie d'efcarlaKe. — D. Cela e(l fait ; & U
devife } — R. Ccft ; Hari ptr atjuiou fit de l'oire
ertrem : Tout pour parefirt, L'Orfèvre ne fe peut
cmpefcher de rire, & il y eut eu de la batterie entre
lui &. le Gentilhomme, fans quelque petite alltlîano:
qui les Tcpara, & envoya le Gentilhomme en cercbcr
un autre plus habile que cettui ci. — F. Cap de Sani
Vafilc ! je me fuITe ouffert d'cftre fécond contre ce cou-
quin, car ce Gentilhomme aboit de velles inbenûons.
il n'y a point tant de fadeiges dans les miennes : c'eft
une fencltrc en iiicarnadin d'Efpa^ne, & la divife:
EalfE comme lou vent, — £. Les plus courre» font
les meilleures. — F. Monfur, quand je n'aurois otre.
1
LlTRX IV, CBAFITRI TU. ^85
des pieds. — - F. Il y a des fats qui diroienc que ce
feroit fentir le voue, mais c'eft Thomme. Rebenons
au proupos que difoit Renardière. — B, Il difotc
que quand le chafleau de la Renardière fut fondé,
Hercules pafTanc pays pour aller en £fpagne, y mit
la première pierre, aux enfeignes que, quand il fallut
démolir un coing pour baflir la grofle tour de Thor-
loge, on trouva dans le fondement un quadruple
d'Efpagne, & quelques maloedis. — F. Hé ! Monfur,
noftre meifon a fleuri^ & fleurira encor maugré les
enbieux. Où eft lou temps, où eft lou temps, qu'al-
lant hoir quelque couquine de Princeffe, la vraverie
de mes havics trouvloit ma vonne fortune, quand les
vroderies de diamants, & quelques efcarvoucles
parmi, me defcoubroient à la veue de tous? C'eft
lors que je maudifTois lou pareilre. Ce n'eft pas
d'aujourd'hui que les grandes bertus ne fe peuvent
cacher ; & quand à la balur, où eft lou temps que
nous allions lougeant par la Veaufle, & comme les
couquins des billages fe defifendoient, après aboir crié :
Sus ! 1/ faut menger la muraille à vglles dents I Si
me arroufois lou bel premier; d'où bint que les
compagnons me nommèrent lou mangeur de Mu^
railles. Quant à l'efprit, je fuis lou premier qui aie
inbenté à louger bingt chebaux en cinq eftavles, &
en toutes nompairs ; & les chanfoonettes d'amour en
veau Gafcon, quauques unes ne font-elles pas con-
tées pour rien? Je fuis fils de maiftre. Abez-bous
yamais efté à Turaines ? — B. Ouy da^ & efpere
encor y aller bien toft. — F» Je bous prie, à la pr^
miere fois, regarder fur lou mantou de la chemineo
en la grande falle, & bous y berrez, de U feiçon da
peire miea, en lettre d'or maffif: Epitaphefur &t
naijfance tUenxi da U Tottr^ Hjm il mt refouvienc
NTURBS DU BARON DB FaXBSTB.
que bous m'abcz accomparé à ce Renardeau ; quel
homme eiloit-ce ? — il. C'cltoii un homme muitié
Soldat, raoicii* Procureur, taa'n'ià Gentilhomme, qui
briguoit eftre Aide de camp, difoit au Roy tout
ce qui lui venoit en la bouche. Quand on publia les
droicHs de reprefentadon pour maintenir le Cardinal
de Bourbon, plus habile à fucceder h la Couronne
que le Roi de Navarre, lors que par toute la France
les deux tiers l'appeloient Charles dixiefme, & la
monnoye battue en ce tiUre là, fe prenoit, horfmîi
aux villes Royales, le Confcil du Roy travaillant tous
les jours à ordonner & à faire efcrire fur cette
queftion, Renardière frappa à la porte du Confcil,
qui lors fc lenoit au cabinet, demandant audience
pour chofe qui importoitrEllac. Eflant admis, charge
d'un gros livre, il dit au Roy que ni lui ni fon Coo-
I
LIVRE IV, CHAPITRE VII.
587
grand Prince du monde, car vous faites plus que
Dieu, pour ce qu'il ne promet à fes enfans fmon
que. du labeur qu'ils favent faire, ils vivront com-
modément ; & vous faites vivre vos Marefchaux de
camp très commodément du labeur où ils n'enten-
dent rien. — F. Je ne troube von qu'on m'accom-
pare à un Flongnac, & il me foubient maintenant
Taboir beu. — B, Ceft ce que j'avois envie de vous
dire, quand vous nous avez dit n'agueres que vous
n'aviez porté les armes qu'au parti du Roy, & il
me femble vous avoir veu en l'armée du Roy de
Navarre, quand il reprit Marans, aux enfeignes de la
petite cafaque de drap rouge. — F. Ha ! que je bous
dirai, mon perc aboit charge à l'Artillerie, & quelques-
fois par voutade & pan caprice, je prenois quelque
cafaque d'un des pionniers de fa compeinie, mais
par fantaifie, non pas autrement. — B. Encor eftiez
vous pour lors Huguenot. — F. Oui da, en quelque
façon ; mais je bous dirai que veaucoup d'honneftes
gens ont quitté ce parti pour les peines qu'on y
trouboit. — B, Vous ne contez point les périls.
— F. Comme le Roi s'abançoit à Coutras, je
troubai un honnefle homme qui s'appelle Sponde, à
Taillebourg, qui s'en retournoit. Il me mena cou-
cher chez Monfur d'Echilais, & me douna connoif-
fance du Curai du lieu, havil homme, ou il n'en fut
yamaie, & qui mettoit en pradique ces inftruétions
touchant l'accord des Religions, & je bous dirai
comment.
Invention du Cari i'Efthilitis { di^renet
dei Sermon I,
sTE^ Danc()uca tr Carè
j d'EfirhiljiU qui aboit c(\i Moine,
LIYRB IT, CHAPITRl -Tlfl. 5I9
lui tmplemenc en la Coafeffion de Sand. J'admirat
l'eTprit de l'hoame qui marioic & vapcifoic les P«p»
pUles à lor moude, & les Huguenaux à la lor, &
depuis ye me fis inflruire par quauques Pères Capa«
chins & par un Père Bemabit. — B, S'il t&cm
Bemabic, il nXloit pas marié, ou vous feriez fils
de puuin. — F. Bous ocres prenez les choofes fia^
plement; c'efl une feiçon d^haunur qu'on leur poone;
on les appelle aufii Doâurs. — £. Ce n'eil pas
obeyr au paffage de TEvangile qui defi*end fi explirés
aux Chrefliens de n'appeller auom Pere^ pour ce
qu'ils n'ont qu'un Père aux Cieux, ni aucun Doc-
teur, pource qu il n'y a Dodeur que l'efpric de
Dieu. — F. Tant y a que ce font d'avilies hommes :
mais fur tout je fus conberci par un fermon que fit
Père Ange à Paris, le Judi-Afolu : il conta la
PafHon unt pitufement que je ne pus pas me tenir
de plorer, ou de pitié, ou pource que je regardoîs
attentibement les yeux chaflius de la bielle de Mer-
fec. — B. Et que put vous dire voftre Père Ange,
qui n'avoit jamais eftudié? — F. Il aboie un Pré-
cepteur fabant homme, aufii vien que le Cardinal
de Sourdis, & ap^renoit auffi vien que lui les fer-
mons par quur, mais diberfemenc, car le Cardinal,
qui aboie une mémoire cabaline (comme on di^
redifoit fa leiçon fans y changer une fyllave;
Totre ne difoic que lou comancemenc, & puis allotc
à l'efcarpoullet, s'enboloit dans les nues, hardi en
diavle, & difoit des forfanteries les plus aggreavles
du monde. Il faut abouër que le eftyk & la feiçon
de nos Prefcheurs font bien otres choufes que
celles de vos prouves Miniftres, aufquels on ne per-
met ni Allégories, ni Paravolles, ni Favles, ni gen-
t'dlefles, ni livertez qui biennenc quelquesfois vien
59°
AVAVTURBï DU BARON DE F«NESTB.
à proupos, quand ce ne feroit que poiir relbeilicr
lou puble, à l'imication de Ciceron, qui boyant
palTcr Ion gendre aiani au codai une cfpcc de fa
grandeur, s'dcria : Quis laaio geatnim alligavù
gladio? — E. De mefme façon fut ce que fit un
Grec au milieu de fon oraifon : voyant tout le
mortdtf endormi, il fit k difcours de l'afne vendu,
& de la poiTeflion de l'ombre, à laquelle chacun des
deux vouloii dormir; le vendeur maintenoir ne
l'avoir pjs vendue. Telle fut encor l'inveniion d'un
Cordclier, qui ayanr pris une pierre en fa chaire,
fit lemblant de la vouloir jettcr à la icftc d'un cor-
nird, & prenant fon branle la fie bailTer à plufieurs,
&puis : I Je pcnibis (dît-il) qu'il n'y en eut qu'un. •
Le ris refveilU leg auditeur§. Non, on ne permet
pas ces gayetez ï nos Miniftres, mcfmes on leur de-
LIVRE IT, CHAPIT&B YIII.
59'
elles venu fi avant, je vous dirai Tencree & la fuitte
du fermon de Père Ange, lequel auflî bien Mon-
fieur le Baron a mis en jeu, s'il ne veut lui mefme
le raconter, car c'eft le mefme, puifque ce fut le
Jeudi-Abfolu. — F. J^aime mieux que ce foit
Monfur de Beauju, car pour dire lou brai, je n'en
ouys que la moitié; lou relie me fut contai par un
otre. — B. Or bien, vous en faurez autant que ma
mémoire •& vollre patience en pourront porter.
Après les croix, les révérences & le plonge, ayant
fait branler la pointe du capuchon & celle de la
barbe, touflit en E-la^ mit le haut moût devotieufe-
ment, & craché trois fois, il commença d^une voix
haute, difant :
^^^^^mn
^l^^^^^ê^J
CHAflTRH IX. ^^^H
Sermon du Père Ange. ^^^^^^^B
^^ ocrvELLES,nouvclli.'s,nouvcU«î... ^|
V (là une grande paurc|. Et quelles ^|
^ nouvelles?... (li ereor une), de ^|
LIYB.E IV, CHAPITRE IX. $93
reftoit pas proprement, mais il en avoir faiâ faire
une toute pareille, & la fuppofa en la place de la
vieille. Ce Prélat, bravant en fa tyarre & habits
pontificaux, avoit par fes menées eftabli l'Empire de
Rome prefque par tout, & fous TEmpire politique
fortifié & enrichi fon Ecclefiaftique. Ce Tyran, tant
au fpirituel qu^au temporel, vit venir le pauvre
noftre Seigneur, fils d'un charpentier, qui eut pour
premier logis une eflable, & une crèche pour ber-
ceau, accompagné pour tout potage de pauvres
pefcheurs, & quelques difciples maigres, pailes
& morfondus, comme vous diriez ces beliftres de la
vallée d'Angrogne, qui ont mieux la mine de de-
mander rauQnonne que de prefcher la vérité. Il y
avoit long temps que Maiilre Sathan difputoit contre
les Prophètes, leur oppofoit les traditions de fes
Rabins, maintenoit lur tout que le Mellie viendroit
avec main forte & bras eftendu, comme peut & doit
faire un bon Capitaine & grand Empereur pareil à
Mahomet, qu'il couvriroit la terre d'armées, fe
feroit bien conoiftre & paroiftre, en fin feroit le feu
violet. Là defTus, ellant arrivé le Meffie, après
l'avoir elîayé par la tentation, il fe mit à prefcher
contre lui. Comme Tautre prefchoit de fon codé,
tous deux dans les Synagogues, tous deux aux de-
ferts, il appelloit Jefus Novaliile, fuborneur, trou-
blcur d'Ifraël, demandoit fa vocation, difoit de lui
8l de fes Apoftres qu'ils s'eftoient ingérez; l'autre
faifoit des miracles^ chaflbit les Diables de pluficurs,
principalement des pourceaux de Sathan, & l'irrita
grandement quand il chaflfa fes marchands du
temple. Il arriva que le mefmc jour que noftre
Seigneur venoit de jouer du fouet fur ces canailles,
& qui lors n'eftoit pas en humeur de courtoifie
H. 38
594 AVANTUKES.OV SAKOK DK WMKKST».
Kl dhumilici, idie qu'a bien dépeinte un Cnrd<
F-lpa^nol en defcrivinc la tcntaiioa, & iiiurul
Saihan le conviant i fc jcttcr du pînade en bas, it
relpondit, como CavaUero bien eriadù : Be/a las mt-
n<ii . Schor Saihanas, por que yo ungo ejcalai paru
t'a/arme. Lui donc, eftiini cncorcrmcu de it rhuyc
qu'il venait de faire, Sachact s'appriiclia en eoirrr
âtiHi, &. fort refolument lui dit : ■ ,1iï te maintiens
que lu n'es point le 61s àc Dieu. — Tu en u mcDti
(dii II- Seigneur) par ta puanie gorge, ce que je
El' maintiendrai à telles armes que tu voudras. • Cet
propos, au jugement des Minidres, fcroient d«
bUIphemes, mais nous autres appelions le pain, pain,
S, difons les chofes comme elles font ; tant y » que
Saihan le prend au mot, demande i loiiir l'eli
des armes. — F. Je maintiens que Saihan abott
ion. car celui uul a reçu luu dcl^icaii. c
I
LIV&B IV, CHAPITRB IX. 595
Gentilhomme de bonne maifon, il s^ refolut. Si fuft
choifi pour le lieu du combat le champ de Golgotha,
pour Juge du camp Pilate, pour fécond le bon Lar-
ron, cloiié d'un collé. — F, Ho, ho, c'eft à l'efpee
que y'entendois eilre fécond. Et qui eiloit fécond
du Diavle ? fut-ce point Monfur Sant Longisr } —
E, Bran ! Longis n'eftoit qu'une lance. Ne rompez
point propos : vous ne courez pas fortune de ce
codé là. — B, Il ne fe peut dire comment ce veillac
Sathan fut efbahi. Voyant que fa fupercherie n'avoit
point rompu la refolution de fon ennemi, il va fol-
liciter dans la preffe, & quand d vid le Seigneur au
plus fort des tourmens, il fit crier par fes heraux :
« Si tu es fils de Dieu^ defcends, )> La finefle efloit
grande, car ne defcendre point eftoit donner à fes
gens dequoi rendre douteufe fa divinité; defcendre
eftoit quitter le combat, ce que noftre Seigneur ne
voulut jamais faire, mais ouy bien le poltron Sathan,
qui ayant abandonné Thonneur & le champ, fit de
la querelle une guerre, & eut fon recours à fa
garnifon, comme nos gens faifoient aux efcar-
mouches, quand les Huguenots vouloient venir aux
mains. Il arrive vers les fauxbourgs d'Enfer tout
efchauffé, & le vilain de crier : Aux barricades!
Aux barricades! Vous eufliez dit que c'eftoit le
Comte de Briffac en la place Maubert. Et jeunes
Diables de cercher des barricades par tout, & les
vieux de les placer aux advenues. Vous autres,
ivrognes de Paris, leur en vuidates affèz au dernier
Carefme-prenant pour fervir aux Diables à jouer la
Paflîon. Voyez que c'eft que de tant boire. Vous
fourniflez les Diables de magazin contre les Anges.
Or voila les barricades dreflees, mais non remplies,
car Jefus pourfuivit fa poinéte, comme faifoit le feu
!f!:t^
596 AVANTD&W.Bit BftROK DB WatHES
Roy, & ne s'enfuit pas comme les Bretons 4 Fonie-
ni\; m^is ayani rallié un bon rcgimcni d'Anges, fii
mener les enfans perdus pjr Siind George, loui
ïccouduiné ï combattre les Dïibles; le fit foultenir
pjr Siinâ Michel, de mefine mdlîcr, avec une
trouppe gaillirde ; lui print U croix fur fon col pour
fervir de bélier, donne furieufement aux barri cadet,
des premiers coups les met en canelle, le» couche à
ha : la canaille ne peut fupporter l'aiTaui, tout s'en-
fuit jufquesà unauire retranchement, qui s'appcUoil
les Lijnbes. — F. Bous diriez que c'eft la vaiallk
du pont de Sey ; il m'cft advis que y'y fuis cncoros.
— E. Taifez vous, li vous pouvez. — 3. A cei
Limbes, l'armée fe fortifia de tous les Pcrcs (]Ui
eltoicnt en chanre, &. qui pour avoir fçcu les adve-
nues & rufes d'Enfer, aidercni beaucoup à fatre
LIT&B IVy CHAPITRE IX. 597
viftoire, Noftre Seigneur choifit d'entre les délivrez
ceux qui eftoient de meilleure maifon pour les mener
faire la révérence & baifer la robbe de la Roine fa
mère. Adam marchoit le premier, 8l menoic fous les
bras la bonne femme Eve. Il lui vouloit auflî pre-
tenter les Princes des Diables, mais elle en eut peur.
Il fut queilion de faire un feu de joye, à quoi le feu
d'Enfer ne fut pas trouvé propre ; celui de Purga-
toire fut en difpute ; mais enfin, ceux qui s'en fça-
voyent le mieux aider s'en fervirenc à cela, comme
n'eilant pas dommageable à tous, mais au contraire
propre à faire resjouyr plufieurs honnefles gens
& bouillir la marmite. Tout fut comicque jufques
là : puis le Prefcheur commença à montrer que
c'eftoit nos péchez qui avoient faits la querelle de
ce combat, & nous, caufe par confequent du grand
danger où s'eftoit mis Noftre Sauveur. Là deffus ce
grand Prédicateur tourna les yeux en la tefte,
demeura longtemps comme efvanouy, fe reprend
pour s'eftendre fur les douleurs de la Paflîon, des-
quelles il fit comparaifon avec toutes douleurs dont
il peut fe fouvenir, mefprifant toute forte de fièvres
& de maladies, qu'il cotta de rang, & puis les blef-
fures légères & les autres maux ; là il fe pafma pour
la féconde fois, & tout tranf porté de fureur, tira de
fa poche une corde faite en licol avec le nœud cou-
rant ; il fe la mit au col, tiroit la langue fort longue,
& pour certain fe fuft eftranglé s'il euft tiré bien
fort; les compagnons de la petite obfervance y ac-
coururent & lui ofterent la corde du licol. Toute la
voûte retentifToit de cris des fpedateurs,qui avoient
changé les ris en plaintes, Pentree comicque en tra-
gédie, laquelle fut toutcsfois facrifice non fanglant.
[ pennifet aux Prefihtart.
^3
£NESTe. Celaellvienotrecboure \
que les Prefches nuds & Timplei
des Minillres qui oc beulent pwj
LIY&B IV, CHAPIT&B X. 599
catholique, & s'attira 8l emmena avec lui deux
enfans de bonne maifon pour aller au Jubilé de
Rome, mais il fit mieux, car dés Thouloufe, il leur
fit faire le vœu d'ignorance & de mendicité ; & les
ayant efcroqués tous deux de cent cinquante efcus,
il fe defroba. Le lendemain, ces deux garçons mis
prifonniers, on leur prefenta la géhenne pour ref-
pondre dequoi eiloit devenu le fainét homme. Ils
demeurèrent en ce fainft eftat, jufques à ce qu'on
envoyait de Nyort une authentique attellation de
r innocence & fottife des deux pèlerins, & outre une
information fecrette, pour l'honneur de TEglife, fur
ce que le bon Prefcheur avoit defrobé l'argent des
pauvres avant partir. — F. Ce fut vien fait de
tenir cela cachai. Lou Prince de Guimeney fut ainfi
difcret enbers la perfonne du Capuchin, fort fant
homme. Ce bon Seignur aboit au Bergier des cham-
vres pour toute forte de mendiants, refolu d'en
revailir tousjours pour autant d'ourdres qu'on
inbentera; il y en aura comme de yors en l'an. Ce
Père ayant eflei trois yors fans aboir mangay aucune
choufe qu'on euft beu, & n'ayant efté quérir à la
foumelerie rien que l'eau, on fe profternoit debant
lui comme debant un Sant. S'eftant troubé un
chandelier d'argent perdu, le proube Soumelier fe
refolut d'aller à Jeanne la devinerefle de Denee,
& pour ce que c'eiloit lou camin dou Moine, il lui
fit compenie bolontiers, cfur 'd le confouloit difant :
« Recommandez bous à Noilre-Dame de Recou-
brance, ou vien à Santé Reftituë, qui ell auprès de
Soiflbns. C'ell là où alla Madame de Mercure, en
chcmil'e, marchant fuie 8l fon trein dus cents pas
après elle, quand elle trouba une trouppe de trente
chebaux à l'oree de la foreft. Les cabâliers s'en-
NTURES DU BARON DE FUNESTE.
lifL'iic au large, & die Ce jctra dans l'efpaig, où
le s'cnl'iinçoiiau prix que fes getiî la cerchoient,
tV ixnioic fans l'aide de Santé Bejlitui, qui la
iHli[ le lendemain matin. Au voui de crois lius, à
:k- jildrciragc, il fallut fauter un fofTai : le Saoi
cil.' ciimvi & fourttt de fa manche, par miracle ou
ircmont, le chandelier d'argent. Lou Soumelier le
eu prilonnier au Bergler, & le von Seignur du liu
.nindic à tout fon puble de faire aller la choufe
lus .lisant. — E. Certes vous me mettez aux
i,im|is & fur vos contes de Prefeheurs j'en dirots
un une douzaine des vieux, comme d'un qui rom-
ictiç.i l'on ffrmon par trois jurements : Par ta vertu.
ir lii itiorij par la chair^ par le jang, adjouflant
lu^j(lurs de Dieu^ & puis, aprës une grande
■Ui fomme! fa„vej & délivre^ de FErfer.
LITRE IV, CHAPITRE X. 6oi
commença en criant : • Vive les Rois! vive les Rois! §
& à cela ayant joint un grand difcours de Tauthoricé
des Rois, où cous les traits de Sainft Pierre & dt
Sain£t J ude en leur faveur furent alléguez, comme
vous les pouvez avoir levez dans Tantichambre du
Duc de SuUi à TArfenal, avec un crucifix au pied.
— F. Pourquoi le Duc de Sulli arvoroit-^l ces paf-
fages ? — £. C'eft pource que lui auffi fe joUoit de
Targenc des Rois. LaifTez moi achever. Après avoir
haut loiié le voyage des trois Rois, il s^efchauffa
& fuivit : f Mais ces trois Rois pourtant laifToient
perdre TEglife; fi le quatriefme ne fut venu, le jeu
efloit perdu, tout efloit defolé. Cefl ce Henri
Quatriefme que vous voyez devant vous, qui a fait
fentir fes efforts à la France, & fon fecours jufques
aux Portugais amis & étrangers. Ce quatriefme Roy,
uni avec les trois, nous donne grande matière de joye,
de gain & d^ utilité. §11 fallut que le Prefcheur s'ar-
rcflat, car le Roy, le Comte de Soiflbns, Montigni
& Montglas, quieftoient du jeu, & tous les affiflans
qui avoient veu jouer, eileverent un tel ris que toute
r Affemblee en prit la contagion. — F.Cap Sant Pigot !
bous en donnez de vonnes à nos prouves Prefcheurs ;
mais bous n^ auriez garde d'en dire autant de bos Mi-
niftres, qui en font vien de mefme que les otres. — B.
Si ferai vrayement. Il faut ad vouer que quelques uns
de nos Miniftres ayant commencé à tirer penfion du
Roy, il y eut un jeune Pafteur devers la Guyenne à
qui il prit envie de parvenir. Pour ce faire, il fit un
grand & long panegyric, à la loiiangc du feu Roy,
où il y avoit de quoi dire. Cela fait & appris par
cœur, il prit l'occafion d'un Synode Provincial.
Comme il fut commandé félon Tordre, fur une
queftion qui courut touchant quelque defmariement,
602
NTURSS OU 8A&ON BK F^KBSTE.
il fe lève, compofe fa fobe, fa barbe & fes yeux à
la modcftie, & ayant cracW & toulli clair, il com-
mença le quamquam. Le Prcfident lui rompt les
chiens, lui remonftrc qu'on ii'eftoii pas !ii pour faire
des harangues, mais droit aux parties. Le petit
homme s'efclatie. ■ Il y a quelqu'un (dit-il) à qui les
l()ûani;es de mon Roi font de mauvais gouâ. • Cette
defgainee fil fdrc filencc, & falut entendre paifiblc-
raent la harangue de prés d'une heure, jufqucs au
Dixii. Là dedans, parmi les loiiange» dit Roi, il
declamoit contre toute les AITemblecs politiques,
& contre ceux qui vouloicot cerchcr autres cautions
& protefteura à la liberté de leur confcience, que le
Roy, quoi qu'il fut allé ik la Mcfle, exalta fon cfprit
divin, courage invincible, & fuffil'ance en l'ElUt,
& par là le maintient capable d'eftre proiedeur
LIYRB lY, CHAPIT&B X. 603
avez prononcée en une Affemblee, vous a ordonné
quatre cents efcus de penfion annuelle, payable à
deux termes, Tun pareil à Tautre, & m'a commandé
de vous en apporter le premier femeftre, fans en
donner autre depefche, de peur que les Secrétaires
ne caufent, & fans que vous ayez affaire à Belli-
gnan, qui eft encor Huguenot Confiftorial. » Ce
Courier defchargé des deiix cents efcus, convié à
foupper, le refufe, & après avoir dit en ferrant la
main : f Le Roy efpere de plus grands fervices de
vousj & vous tient pour fonferviieur fecretj • n'ayant
comme point montré fon viJfage, fe defrobe & gaigne
fon cheval. Trois fepmaines ne paflerent point que
le Miniflre ayant communiqué fon argent & fa joye
à fa femme, elle s'en va à la Métropolitaine du pays,
employé force argent pour fe faire brave, fans
oublier fon mari. De ce temps il y avoit grande
perfecution contre quelque Noblefle du pays pour
avoir forgé, & notamment des pièces de dix fols.
Le marchand, ferrant F argent que fon homme avoit
receu, le connut pour tel qu'il eiloit, fait fes en-
queftes, & puis les pourfuites. Voila le Miniflre
prifonnier ; voici les peines où il fe trouva. On lui
demande de qui il avoit reçeu cette monnoye. 11
n'ofe nommer le Grand Maiftre ; le meflager lui eft
inconneu, la façon en eft ridicule, la caufe vilaine. A
faute de refpondre à fes queftions, le voila criminel.
On lui prefente la queftion, à la veuë de laquelle il
laifle aller que le Roy lui avoit envoyé. On parle de
le mener à Paris, & l'affaire paflbiten tragédie, fans
le remède que celui qui avoit fait la playe y apporta,
pour ce que le Prevoft, juge du jeune homme,
eftoit fon ferviteur,«& en fut quitte pour cent
efcus.
Chapithb XI.
Aiiioju ejlrdngej lin geni ^Eghft,
— vtr-*—- jgri «NisTl. Moboilacontcnt;iMaut j
I *>~^r ^''""'^'" 1"^ )""' twilu grand mal i
Ife^ir^niLîl Wcnri Klliennf, tiuî cft cnnuyiw^
LITRE lY, CHAPIT&B XI. 605
tion de ro^aboir mis là dedans). Cet homme nous
monftra une bieille Chronicque dibifaye par aages,
en lettres gouticques, où il y aboit ces moûts : Uan
mil quatre cents oéiante huiéip trente neufviefme de
l'Empire de Fridericj au mois d^Oéiouvre^ au pays
d'Obergne, en une religion de Sant Venoift^ abint
une choufe merbeilleufe^ cefl qu'il y eut un Religieux
dudit lieu qui debint grous d'enfant ^ pour laquelle
caufe il fut pris & faifi de la jujUce^ ir gardé pour
en delibrer. — B. Cela eft vrai; j'ai le livre,
aux enfeignes que le conte ell au mil cinq cents dix
feptiefme fueillet, & ai vcu encor un autre livre fur
le mefme affaire, difant ces mots : Et fut gardé pour
en eflrefait ce que la Cour en avoit rejolu. Ce pas-
fage de Thifloire a depuis eilé le modelle du procez
de ces deux Preftres, vos camarades, qu'on eftimc
avoir efté de nuift jettez dans l'eau. — E. Je
receus hier lettre d'un Confeiller de Rouen, qui
m'efcrit en ces termes : • La Cour a envoyé quérir
au Ponteau de Mer un Preftre nommé..., pource que
le Juge du lieu lui faifoit fon procez au gré des
Jcfuifles, & elle en veut tirer un exemple notable de
punition. Le fait eft qu'ayant donné une pomme à
une jeune femme dont il eftoit amoureux, elle, par
le confeil d'une tante, jetta la pomme à une truye,
qui ne Teuft pas pluftoft avallee qu'elle s'encourt
ccrcher le Preftre, & l'ayant trouvé, ne l'aban-
donna plus, montoit fur lui, & au foir fe mit entre
fcs deux linceux. Son frère, qui avoit part au li£t,
à cet horreur lui fit de rudes remonftrances ; puis
s'en allant pour quitter fa fréquentation, le Preftre
depefche, pour tuer fon frère, fon vallet, qui le laifla
pour mort de quatre ou cinq coups d'efpee au tra-
vers le corps ; mais tout a eflié mené en juftice. J'en
6o6
J BAROM DE VJESSSVg.
attends la fin pour vous en donccr idvis. • — F. Au
Diavle busvougres! Un pendardot me bendii l'otre
yor, \c libre de Mcffirc Louis de Marfeille qui, par
ibrccUeric, aboit dcpncellees fiji bîngcs [Se] lani de
filles. Yc iroubai au mefme endroit les paitlardil'es
& macqucrellages de cctieMagdeUine & douDiavIci
je dits quant & quant que c'efloient lotis Huguenots
qui abocni fait ce libre là. Ye faillis il m'cniaooûtr
d'aboir bu ces choufes; mais quand je bis que uo»
gens. & entre otres lous Mercures, oui rendent k
rEglile ce que Mercure rcndoit ï fon Dieu, l'cfcri-
obient, je mandai mes libres nu fu. — B. Je pafTai
à MarrciHi: peu de temps après ; mais le peuple nous
contoii bien des chofe* plus eftranges que celles
qu'on a efcrite». — F. Mais au moins bous ne
poubcz dire que juflice n'en ait ellai faite. —
LITRE IV, CHAPITRE XI. 607
entiers un vats d'aze lié fur la telle, & la croupière
entre les dents. — B, Nous Pavons bien fçeu,
& Monfieur que voici, lui fit ce prefent :
Pourquoi porta deux ans Jacohon le bon Frère
La croupière à la bouche , (T le hat garrotéf
Ceft pour avoir dix ans chevauché fans croupière j
Et f angle les Nonnains en afne defhaté.
Je me fafche bien d'alléguer ces vers en ce lieu,
pour ce que, depuis les trois premiers livres, on en
a imprimé un recueil; mais cela accourcit la peine
du lefteur. — F. O vien, à billans carbonnades
d'azes ! Si bous otres Huguenaux ne bouliez courriger
TEglife que de faire chaftrer les Preftres, je ferois
de voftre codai. — B, Mais voudriez-vous que ce
fut à bon efcient, comme un operateur qui couppa
tout au Curé d'Onzin, qui l'avoit employé pour faire
femblant, ou comme Maiftre Pierre, le Barbier du
Roi, qui fe trouva en noftre batteau auprès d'un
Preftre qui lui contoit comment fes chancres fe ntet-
toyent en gangrcine? Il fallut faire exhibition à Tabri
d'un manteau. Comme Maiftre Pierre eut fondé par
tout, pour ne coupper que ce qui eftoit gafté, & en
trouvoit trop, il demande à fon homme s'il n'eftoit
pas Preftre, & n'euft pas fi toft receu un ouy pour
refponfe, qu'il couppaft tout : * Auffi bien n'en as tu
que faire y • dit-il. — £. Aufli habile fut un operateur
fur l'Aufmonnier de Marmoutier, lequel il traittoit
d'une hernie : il lui arracha H habillement le tefti-
cule du cofté du mal, que TAufinonnier n'en fçeut,
jufques à ce que un Moineton, qui lui portoit à dif-
ner, trouva la relique ployee dans la ferviette, comme
on enveloppe les treffles en Xain^onges, & le Novice
lui demanda fi ce n'eftoit pas de fes biens meubles.
6og
^NTURBS OD BARON Oi rfNSSTB.
— B. Monfieur le Baron i raifon : celles forua
de gens n'ont que faire de ces pièces, & [es MoLu««
de Saint-Martin de Tours en Ërent \'ia palTi une
belle ordonnance; mais elle ne fut qu'en peinture,
&aux defpens du Diable feulement. Il y avuic duu
cette l'uperbe Abba}'e un auiel de Saînd Michel, au
devant duquel il eftoit peint combaccani le Diable, i
l'orilinaire. A ce ruftre de Diable pendoicai deux
gras & immenfes lefliculcs, où un bou frippon de
peintre s'efloic efgayé. Cela fut trouvé de mauvais
exemple, & leChapître alTcmblâ (wury advifer, pource
que cela fcandal^oît les DarasK & failoit rin:
Huguemnii. Le débat fut grand, fi on pouvoti tou-
cher à eltriipicf un tableau faeré, comrae le marque
Rinu!du8, en traitiam des tableaux facrei; les plus
vieux vouloicnt conl'ultcr l'oracle de Rome W delTuw;
enfin, k- plus de vult poru uue le Diable n'
1
Ckapitrb XII.
Des NoJtnaim.
K AY. Il y avoir de quoi disputer,
car ce Rinoldus dont on a parlé
allègue un Canon qui die : ■ On
ne doit pat ftulemeni faluer le
Sainéf ou la Sainéle qu'elle re-
prefeniej mais pource quelle efl
image confacree dans PEglife.^
B. Cela excuferoil bien la bonne femme qui pre-
Tentant une chandelle à Sainft Michel, pour lui faire
du bien, en prefenta une autre au Diable pour ne
lui faire point de mal, — F. Si eft ce qu'une Eglife
ne fauroit vien parellre fans images, II y a un her-
mttageà Jcvtjdediaià Monfur Sant Pol l'hermite : la
chapelle cil pleine de fi veaux tavleaux qu'on y ell
tout rabi en dcboiion. — B. N'y a il pas une gal-
Icrie fur le coin, devers la porte du parc^ Je fai un
homme qui y menant de la telle une fois, vid contre
l'autel deux tableaux mobiles, defquels l'un fembloit
tout craché le feu Roy, & l'autre l'AbbeiTe de
Montmartre, & cette veue faillit à lui coufter fa
ruine. — F De cet cflrem li y'en fai plus que bous,
II Î9
I
A.KTURHS OU BARON DK P«RBn-«t-
ear y'ai demouraî huifl moit à Jovi, & faut nboufir
ijueladefvaufcheyefloit fori grande. Durani le Gcge
de Paris, les Avay« de Maubuiffun, Lonchamp,
ftloniraartre, le Lis, & Poiffy cftoîeni viffn cxcrcRW
dcK dfboiions de la Cour. — B. h tac fouvicnt (rtt
bien que la Cornene du Roy efloit logée dans l'Ab-
baye de MiubuyfTon, & cdîorut tous aflez bien
loRez, fans qu'il y eut huiit Nonnaîas qui ne pco*
rem nous faire place, parccqu'ellcs fuoycat ta
vérole. — £. Ceux qui mcticni leurs filles en telles
garnifons pour la fcurté de leurs pucelage* auroieni
bufoin de l'indruâion Je la DamoifcUe de Sa;nâe
Orle. J'eflois un jour eouchtf au Mont de Marfan,
& les deux fœurs de cette maifon cftoicni coucheet,
qui n'y avoit entre mon lid & le leur qu'une cloifon
de fdpin fort mal jainâc. 11 bien que i'avuis Icuu
LIVRE IV, CHAPITHE XII. 6l I
cipalement celles qui font inbentees de noubeau, il
y en a de fantebie, & qui ne penfent qu'à jufne&à
ourâifon. — B. Vous m'en faites fouvenir d'une
bonne : le Roi Henri troifiefme eftant allé vifiter
les Dames de Poiffy, qui vivent très catholiquement,
y trouva la Dame de Ventenac qui couroit les
champs, de l'amour qu'elle portoit au jeune Oraifon.
Le Roy parla à elle, comme T ad vouant fa parente,
& lui demanda à quoi faire elle eftoit là; la bonne
Dame refpondit : Jy fuis pour le Jeu/ne & oraifon.
Depuis le Roy ayant feu qu'elle vouloit dire le
jeune Oraifon, la mit dans le chafteau de Loche en
penfion. — E. Il a efté dit que ces religions d'au-
tour de Paris avoient efté bien exercées; il arriva
de cela un affez bon conte. C'eftoit au temps que
tous les Grands de la France preffoient le Roy, par
toutes voyes, de changer de Religion, jufques à le
menacer d'un tiers parti. Le Roy de peur de ces
importunitez couroit tous ces cloiftres de Nonnains,
& un jour avoit quitté TAbbaye de Longchamp,
& TAbbeffe excellente en beauté, & l'ayant trouvée
trop chaude, il s'en ennuya pour aller planter fon
picquet à Montmartre, dont s'enfuivit la vifion des
tableaux de Jovi. Sur le foir, le bon homme Maref-
chal de Biron vint voir le Roy à Chaliot, & avec
une contenance froide, dit : • Sire, je fuis bien
marri que je ne puis entretenir voftre Majefté de
propos qui lui foient plus agréables; mais voftre
cheute emportant au précipice de la France TEftat,
& dans l'Ëftat tout ce que nous fommes de vos
fidèles ferviteurs, noftre defefpoir m'ouvre la bouche
pour me plaindre à vous de vous mefmes. Il y a fi
long temps que tous les Prélats de voftre Royaume,
les Princes, les Officiers de la Couronne, font à
"lNturï/ Dtr
DS FANBSTB.
loux devant voflre Majefté, pour la fuppUer de
lis tenir les promelTes qu'elle nous fit i la mon du
I Kov, qui cllolenc de changer de Religion, afin
0 W l'cc^'cre ne changeafl point de main; encore*
T, je VOUS fus importun jufqu'aux larmes; U
lins, vous me coupalles court que la mort vous feroit
!•: iliiuce que de changer de Religion, que vous ne
uli^v. (las ellre damné, &C. Et cependant, je vient
lire adverii qu'aujourd'hui vous aviez fiùa le
ir, cliin^é de Religion entièrement, &fait, ii l'ap-
:i[ d'une perfonne indigne, ce que vous aviez
ulO aux plus dignes de vos fcrviteurs. — Moii
lo Koy, changé de Religion ? CÇ font des maraux
iIls iraidres qui font courir ces fauffctei, pour
II- ruinera vous & moi, i Le Marefchal repUcque :
?îir, ■■ ■ ■ " ■
Chapit;re XIII.
Crottfque de la Terne.
£NE$TE. J'ai entendu qu'il a
eM faii un veau tavleau de cette
VJ t^y«'ry muraille garnie de Nonnains& de
^ ^J^V* bilans qui lurs jettoienc à coup
tv *v^Çi^i de fondes ces eftres. — B. Je
VJ_i.'?^5^êty^ "'^"^ '*''^^' •'^ ^"^'^ * ^'^^ peint.
Le Comte de la Rochefoucaut,
Seigneur d'un agréable & excellent efprit, avoit
demandé & un de fes amis une grotefque ou drô-
lerie pour la belle gallerie de la Terne; on lui
donna trois files de peintures : affavoir une danfe,
un bagage d'armée qui chemine, 9l une proceflion.
Je voudrois me pouvoir refouvenîr de toutes les
parricularitez, mais je vous en donnerai ce que peut
mamemoirc, par ci, par là. A la danfe, il n'y avoit
rien de remarquable que des pofturcs pantalonnes-
ques, toutes différentes les unes des autres, & de
mefme les vifaget ; comme le Curé qui menoit la
danfe avec fa robbe develluë en efpaule, avoit un nez
en as de treffle, & les joues enilees, k couleur de
gorge de cocq-d'inde; il menoic une vieille garce
«H
maigre Si pafle. Si l'auni; d'après ivoit quelque
grand jiez, celle qui le fuivoit cftoît cunuze comme
un tiirijuet; tant y a qu'il n'y avoit rien de remar»-
quable que les différences dca geftcs & des faces,
des coiffures & autres habits. Au bagage, c'ettoit
bien une plus grande diverfiié ; il me fouviendra de
4 DU ç pièces : une vivandière qui avoit un chaudron
fur le cul, une poiile en efpce, & une eueillicrc en
poignard, la tcfte dans un pannicr, une cfcharpe
d'oignons. & un maTque de fatin, & un garçon du
tambour fur un afne, fa caîfle rompui; fur l'cf-
chinc & une nye dedans; un Aufmonnicr qui va
après fur une mule entière, s' endormant & baisant
la telle, & l'oye qui lui empoigne le nez ; uu laquais,
le chapciu bien garni de plumes de chapon, qui
roulle une civière & une malle verte delTus; un
chameau & une DamolTclle daii& le balL aui tieni
1
1
LIVRE IV, CHAPITRE XHI. 615
nez la fuivoit, portant Feftendart d'une bourfe ren-
verfee pendue à un ballet, & dedans efcrit : // /l'y a
point de F argent. Après cela marchoient quatre Dames
nues, horfmis des brayes de fauvages au devant de
leurs parties ; fur la peau elles avoient de fort greffes
bottes, fur le croupion chacune trois plumes de coq,
une bourguinotte de lanfquenet à la teffe, une
queue de renard pour pennache ; celles-là portoient
les cierges. Pour la mulicque, & en mode de Chaffe,
par quatre bedeaux de la Sorbonne eftoit enlevée
l'excellente chantereffe Beaulieu, contrefaite comme
vous favez ; mais contre raifon & nature, la viole
eftoit afiize dans une chaire, & avec un bras qui
fortoit de la roze, elle joiioit de Tarchet fur la
boffe de la dite Beaulieu. De là marchoit bravemen
le petit Carme à tefte pelée qui fe nommoit Domimc
de Jefu Maria j & dix ou douze principales Dames
de la Cour, qui pardevant, par derrière, avec des
cyfeaux, lui decoupoient fa robbe à barbe d'efcre-
viffe, & eft bien apparent qu'une Princefle lui em-
porte de la peau des fefles à ce jeu là. Il y a un
Godemard Efpagnol qui fe fait porter à la procef-
fion dans une chaire percée, & va conchiant tout le
myftere de fes fumées. La Chaftellane de Milan fuit
après, accompagnée de fon nain tefte nuë, pource
qu'il perdit fon chapeau en refmouchant, & falut
[que] le barbier du Cardinal d'Eft lui mit la fonde
en la nature, premier qu'on fceut qu'il lui fut
entré dans le corps. Venoit après une mariée que
TEvefque de Sifteron menoit par la main ; chacun
d'eux, du cofté qu'ils fe tenoient, un bras nud, un
pied [nud] & un vertu; la mariée avec une peau de
jambon fur la tefte, le fein & la gorge toute bordée
de faucifles en lacs d'amours, & lui des andouilles à
ANTltRM DU BAROK DE FiVBSTB.
relquipollent; l'un portoil de main \uide une bou-
teille. & l'iutrc &ifbit un cfventail d'une cfpaule
de mouton. Voici la mufîci^ue chingee : c'eftoit de»
aveugles avec U Autre & le ubourin , & voila
marcher la reveué des geus d'Egtifc, faite à Parii.
le... Que m'amuferai-jc à vous contcr> Vous l'avci
vcuë en peinture aux bonnes maifons. La plufpxn
portoit la mefche d'une main, & icnoit le muufquct
lit: l'juire; plufieurs ellolles fervircnt de portp-
efpecs & de bauldriers, & c'eii de cette monUrc
qu'a pris fon origine la façon de porter l'efpec le
pouitiejii dans la braguette. Vous y voyei un Moine
qui fe crevé un œil de l'hallebarde de celui qui va
devant. Je pris plaifir à voir un Carme reforma qui
porcoit fon fourniment dajis le derrière du froc.
Tout y eft comicque, horfmis qu'on Moine, tjui
I
LIVRE IT, CHAPITRE XIII.
617
fon rang pour leur courir remonftrer que cela con-
chioit toute la befogne ; il eut pour reponfe quel-
ques injures & quelques coups de pierre : enfin
Tamas de la proceflion, qui fe faifoit au Pré-aux-
Clercs, eftoit encores auprès de S. Sulpice, que
la telle eftoit à la dernière repofee que fit le bon
Saint, quand il porta fa tefte à S. Denis. La patif-
fiere Defcarneau voulut eftre Sergent majeure des
Amazones. Le malheur fut que, Fafiaire n^ ayant pas
efté concertée, il n'y eut point d'enfeignes bien
faites ; feulement la chambrière d'Inceftre arracha
Tefcharpe verte que Madame de Belin avoit fait
faire à la mort du Roy, & la porta au bout d'une
quenouille ; les PrincefTes, qui en portoient toutes
depuis la journée de S. Clou, donnèrent aufli les
leurs, ou pour efcharpes aux Capitaines, ou pour
arborer. De mefme Mefdames de Montpenfier & de
Guyfe y accourent, mais par infolence, demeurent
derrier ; elles crient fouvent : Alte^ al te, al te y pour
paflTer devant. Madame de Nevers, qui arrivoit, leur
crie : • Ne vous fâchez point, faifons la retraite;
favez-vous pas bien que les boftuës & les boiteufcs
doivent eftre au cul de la proceflion ? »
^^^^^^^1
i^^^î^^c^
ffM
Chpitrh XIV.
H
Titres de Piincienneié de Ftmejie eti Grtc ;
Vidus, Diable qui n'appelle point â la
le caillou blanc, & ti>yt blMcfu.
: Atùti/ln
cbambrt.
LIVRE IV, CHAPITRE XIV. 619
quin2iefme : «v otç çouvtodt oc ç«<jT«ptç ev Koo(m«. C*eft à
dire (ce difoit le Curé) : la race de Faenefte reluira
comme flambeaux au monde. Etnoucezque ce Curai
eftoit fabantas, comme ayant fait biàlu le Miniftre
du Mont de Morfan, en lui demandant comme quoi
s'appelloit le chien de Toubie. — E. Certes, il en
eut bien faid viâus d'autres, car l'ancienne Bible ne
rendant point conte de ce nom, pour fon importance,
je ne fai en quel [livre] il Fa pu trouver. J'ai leu
les Antiquitei Judaicques de Jofeph, il n'y en a pas
un mot. — F. Monfur, je bous dirai lou fecret,
pour la grande amitié que ye bous pourte, quoi
qu'il m'aie eftai vien deffendu, pource que nos gens
font fort eftimais quand il fe troube quauques
coyonneries de ces difficultais, pour montrer que
l'Efcriture n'eft pas contre nous par tout. — £. Et
dites moi donc le myftere. — F. Il aboit nom
Canis; car en la Vulgate il eft dit noutamment que
canis erat femper cum illis, — F. Vrayement,
Monfieur le Baron, vous avez bien dit, & je forti-
fierai cela d'un exemple de telle fubtilité. Un de vos
Prefcheurs entreprit de prouver par tej^te formel
de la Bible que le Pape de Rome devoit eftre fupe-
rieur fur tous les Patriarches d'Orient : pour cet effet
il allégua le texte du premier chapitre de la Genefe
fur ce qu'il eft dit à toutes les créations, & par fix
fois, « fi fut le foity fi fut le matin • ; (i donc en
marquant les premiers jours du monde, le foir va
devant le matin, l'Occident doit aller devant l'O-
rient, & par mefme raifon l'Empire d'Italie, qui a
nom Hefperie, devant Conftantinople & Antioche,
qui font de l'Orient. — F. Ces vous efprits pren-
nent ainfi des preubes vizarres. Je bous en diray une
abenuë ces yors à Thouloufe. Il y arriba qu'un
I
620 AVANTUKES DU BARON DB PANESTE.
praube mélancolique fe plaignit à Melfieiirs de U
Cour du Parlemem que Ion Diavic l'aboîi fcduit,
& obtenu de lui une cedule pir laquelle U s'ouvti-
geoii corps & ame. La Cour donna un adjourncmcnt
perionnel à Sathan, & h faute de c-onaparoiftrc, par
cnnrumac^ le condamna à rendre U cedule. Un
coufin mien eflant prell de fe rendre à rEglifc^ à
caufc de la prife de Pamiét, alla conlidcrer qtie tes
Diavli?s n'en appelloient pas i la Chamvre mt-panie.
Ce proube miferavle, jugtant par là que lous Dîavlet
n'efioenc pas Hugucnaux, pailqu'ÎIs ne relcboîcni
poini !a fentence àla Chamvre favorable, U ne peut
croire ce que lou Vernabit aboît promis de faire
paroillre, aflaboir que lous Huguenaux cIVoieni du
parii dou Diavle, &fur cette fubtilitai i] ne reboln
point. — E. Ce n'ell pas toui, Moafieur le Baron ;
LIVRE lY, CHAPITRE XIY. 621
quand Monfur d'Enay fit bénir toute ma prouphetie
en fillaffe. — E, Mais, Monfieur le Baron, de tant de
temps que nous avons efté fans vous voir, il faut que
vous vous foyez employé à quelque chofe que vous
ne dites pas. — F. Il faut que bous fâchiez tout :
certes, y^ai pafTai une couple d'années abec de
vrabes hommes, à qui je ferbois potir amener l'eau
au moulin, c^eft à dire des duppes; mais en fin je
bous bai dire lou grand de mes malhurs. Lou Pro-
cureur du Roy de la Rouchelle, Barbot & Gen-
dreau, qui aboient eftais Maires, ayans quelques
petits proucez à Paris, prirent cela pour couberture
d'une velle entreprife : c'eft qu'ils mirent chacun
quatre mille francs dans une vourfe, pour y em-
ployer les rufes de cartes & de dez qu'ils aboient
fait baloir à la Rouchelle. Us me prirent pour com-
pagnon & aide du ju, comme nous dirons des Aides
de camp, me nourriilent, & donnent de bingt efcus
de gain, un. Nous abions fait merbeilles. Un yor,
fur les dix hures, arribe un grand homme mal fait,
fur une jument, abec une mallette derrier, que
rhoufteffe du Cygne eut vien peine à pourter. Ceft
homme qui prefchoit fa nouvleffe en arribant, aboit
un chapeau pelu, un grand cafaquin noir, fonefpee
pendue à un ruvan rouge, fes vottes qui en pefoient
deux paires, & un efpron, fes chauffes de drap
jaune. Cependant que lou beilet ferroit la monture,
ce fat fe mit à entretenir fix ou fept raillurs qui
eftoientdcbantlapourte, & y'ouiois qu'il leur difoit:
« Quelque mal havitué que vous me boyez, y' ai
eftai à Rommle. • Un Vreton qui eftoit des compa-
gnons lui demande: « Et quel chemin abez-bous
pris, noftre doux maiftre? — Bous penfez, dit
l'autre, parler à un idiot: le grand chemin, braie-
"y, m homme bi
''">"'•'■ ^ 4foi.
I'»irc-di», ou i 1^
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LIVRE IV, CHAPIT,&B XIV.
623
nous abons dit fe trouberent les compeignons du
Vrcton de Paris, qui froutterent vien les Rouchel-
lois & faifirent tout l'aryent, & m'en eufTent faift
autant fi je n'uffe fautai lou degré, & les compei-
gnons eurent nom à la Rouchelle, Meiïieurs de
rOye blanche.
La l-jiailtc de Sainâ-Pierre.
w.
NAY. Enfin, il f3U[ que vous nous
contiez voftre dernier dcfartre ;
n'eft-ce pas de Siinéi-Pierrc que
vous rappeliez ? — F. Si yamm .
LIVRE IV, CHAPITRE XV. 625
peine un jour. — B, Tout fe fait par aides. J'ai
veu qu'on ne parloit d'aides de iid qu'en Poulogne ;
cela eft aujourd'hui tout commun à Paris ; le Pre-
fident Le Syrier en fit l'ouverture. Il me fouvient
de trois Prefidentes qui fervoient par nuiâees le
Sieur d'Ayacete. A leurs eftreines, Û leur fit faire
trois cotillons qu'elles lui avoient demandé plufieurs
fois; il les fit border & femer de chiffires grands de
demi pied, bien reluifants de perles, & c'eftoient
les mefmes chiffres que portoient les lacquais fur
leurs mandilles, fi bien que fans fe douter l'une de
l'autre elles furent le fpedacle d'un bal. — F, Ha,
qu'il y aboit là de quoi pareftre, mais bous me des-
vauchais tousjours de mon conte. Ye bous dits donc
que la plus velle & reluifante arme qui ait paru
depuis Coutras eftoit celle qui fut mife entre les
mains de Monfeignur lou Marquis d'Uxelles. Ce
n'eftoit que clinquant; fon veau père n'y aboit
efpargnai ni or ni argent, — E. Ni tant de courtoi-
fies defquelles il eftoit plein. — F. Poudez dire, en
dix huid ou bingt mille hommes, il y aboit fort pu
de fouldats qui ne parufTent comme Caiteines. Je ne
beux point faire ici de l'hiftouriographe, je bous dits
fulement, comme nous eufmes long temps montai
pour parbenir à Sant Pierre, quand nous fiifmes
enbiron à quinze cents pas des varricades, le four-
rier de la compeignie & moi monufmes fur un
petit tuquet, fulement par curiofitai, & nous arres-
tafmes pour hoir à man droite quauque pu de
caballerie de l'ennemi, qui de tous temps s'abançoit.
En mefme temps nos gens donnent aux retranche-
mens, au moins nous entendifmes Pefcopeterie & en
bifmes lou fini. Enbiron cinquante rouflis de çus que
nous abions contemplais s'abancent ; l'effroi fe met
II. 40
626
i OV BAKON Dk FSK'BSTE.
p.ir [jLtt; chacun crioit: Ferme .'& moi aufll haut que
pas un ; maïs ye ne bis aucuB qui touraaft bers les
Liiiicmis, qu'un officier de l'armée qui s'appeloit
Marollcs. Ceiiui là fe mit k nous crier injures, août
ap;'cllcr canailles & poulirons; mais en ycRanc per
fouhrc l'erpaleun defmeniit & un repoutit, autant en
emporte lou bent. Nous ellions refoulus à prendre loa
vas pourcercher une place de combat. — B. CeRctat
mcIniL' curiofité qui à la bataille de Pragues, fit que
le« M^illres de camp & quelques Capiiaîoes firent i
cliLval une grande révérence aux baïaUlous, quand
on ciimmcnçoit à bruller l'amorce, & par compagnie
alliTcnt fe pourmener & vificer les fortificadons de
la \ illc, tout par curiofit^. — F. Ce fut une grande
(k'fri'jcc; mais les Sabo^ards, ou par pur de nous,
(.iiirioUlc, ne nous prcfTeni pas lous lalons.
LITRB ir, CHAPITB.B S^T. 627
bindrenc fauter dans noftre caaiin, quHls faiUlrenc
à s'efcatia lou coul. — B. Il me fouvienc du temps
paiTé, que Monfieur du Maine, paflant devant Ponts,
Monfieur d^Elbœuf ayant choid cinquante Seigneurs
de la Cour, fe vint prefenter pour demander le coup
d'efpee. Sur tous, paroifToit à fa tefte un Comte de
Champagne, tout couvert de broderie d^argent battu
en velours incarnadin, horfmis les braflards & la
fallade argentée, empannaché de grandes aigrettes,
& le cheval qui eitoit blanc d'un pennache incar-
nadin. Quinze chevaux 4^ U ville vont ^ )fi charge,
& le petit Brueil qui les menoit choififlancle Comte
pour fe coudre à lui, Tautre quitte fa place de
la tefte, & fe va nichcf derrier le cul de la troupe. —
F, Boila un grand cas; il mVfchappo^t de crier que
c'eftoit vien pour pardftre. O vien, je bous ai contai
lou maihur. Je me troubai à table à Diyon, en lieu
où ye fallis vien en avoir des querelles. Il y eut un
floignac qui nous tirade fa pochette une lettre que les
Confuls de Briançon ont fait imprimer en ce païs là,
pour fecouër deflus lurs teftes la faute qu^ils attri^
buoient à Monfurlou Marquis; car les mulets qu'ils
n'ont pas fourni ont faiâ tout lou dommage. Ils con-
tent que les pillages aboient fait fiiir tout lou monde ;
que nous abions trop fejournai, & toutesfois nous
eftions partis d'Amvrum lou bingt feptiefme Juillet,
& arribafmes à Billards le cinquième d'Aouft. Je
refpondis à cela que Monfur ne boulut point fur«
prendre rennemi, pour faire en bieux Gaulois;
& faut dire que ces maudits mulets ont donnai un
grand coup de pied à la France. Nous difons que
cette retraite a furpaifaye celle de Monfur de Mer-
cure debanc Canife. Nous eftions fans nmnitions,
& lou moien de trouber du {domb encre ces mon-
DE FfNESTC.
lagnes où l'on ne fe fert que de bailTclle de vois?
Nous ne nous fierons plus aux mulets de Vriânçon.
Enfin quelque vUfme qu'on ait mis fur nous, tout
cela n"a pu empefcher un hocnelle homme de faire
à noilre louange ce petit fizain que [e tire de niJ
1
Ca/jr gui II monde con^oifi
Après tout vtiinca^ fe Viiinguit.
D'UJfel lire une gloire extrême
En la guerre des Savoyards;
Lui O" les Jùns font des Carfartj
Car iU fe font Vidneui eux mefmi
E. Vous les penlîezbien furprendre, mais
dit le Gafcon, Doou s'en penfe fait, de l'aliro lom
Imicadour; & fi vous regarder bien à l'Epigramme
mJK
LIVRE IV, CHAPITRE XV. 629
molire. Au vieux temps, tel a efté fept ans à la f de
par Dieu. — E, J'entend bien : il fe vouloit vanter
d'eflre bien fondé. Cela baloit-il pas mieux que les
malices de ce temps P N'eft ce grand cas que les
Jefuifles aboient fait un bers qu'ils ont imprimay
tournai en fix mille feiçons, & qui eft :
Tôt tihi funt laudes ^ ^^gOj ^^^^ fidera cœlis.
Un de bos Huguenaux Teft allai coëSer d^un otre,
& le boici :
Tôt tihi funt fraudes j Gerroy quot gramina campis,
Encor y aboit il un malicieux qui aboit mis ftercora
pour gramina. Le boila encor rembié par un tiers
qui fe put tourner en trois fois autant de feiçons
que l'otre :
Sic maie fraus tua fert laudes qua non hene cedunt,
— B. Et vous n'approuvez pas que Ton en fâche
tant; à la vérité, il efl bien mal aifé que tels
efprits croyent aux petites oyes de voftre religion,
comme au baptefme des cloches, à Tufage des grains
bénits, des chemifes de Chartres & des Agnus Dei ;
& vous mefme eftes trop cavallier pour eftre bigot
jufques là. — F. Ye me fuis une fois laifTai em-
pourter à ufer d'un Agnus Dei; mais, à un vallet
qu'on faifoit à l'Arfenal, un exempt des Gardes me
donna dans la prefTe (car il ne me remarquoit pas)
un coup de vafton qui me [le] fit entrer dans la peau;
je n'en ai plus boulu pourter depuis de telles fadai-
zeries. — E, Vrayement, Monfieur le Baron, vous
nous avez conté des combats fi eftranges, que l'An-
tiquité n'en a guaires de pareils. Quoi que ce foit.
^fl devenu t
^m»^i}f^*^!^^:
Chapitre XVI.
Lti triomphes.
EAUJBtr. Par le difcourg palTé,
je me voi engagé k vous conter
la malice de du Monin...,que le
Roy nomma lepoiu des chevaux
Itgtrs. Ce galand eftani un jour
dans le carroffc de Madame de
Mcienare, il arriva que b la def—
t vtauxj celui de Madame de
Bran, celui de laChoifi, qui venoitde l'Arfcnal pour
fuccedcr au défaut de la Clin, celui de la dti Vire,
qui vcnoit de l'Univerfiié de chez le Confeillef le
Grand, Sl s'en alloic vifiter fa tante Madame de Guife,
& la coufine de Montpenfier ; d'autre codé le carrofle
de la Barai, & encores les deux carrofles de la du
Tillet&de la Poyane, avec la litière de Monfieur de
Bourges, tout cela s'embaralTa & fit faire une pôfe
k Madame..., qui en efmeut fa colère, & jura par
S. Philibert que Monfieur la refuferoit, ou il y
aoroit un impoU fur les carroiTcs, & cependant elle
pria du Monin de lui faire une Elégie fur ces emba-
raircffleais. L'autre refpond que le fub}eâ efloit
biea pitoyable, mats plus propre poor une fircc. EÎi
6}2 AVANTURES DV BARON DB FANBSTB.
bien, pour farcir, moB m»ri s'y eoteiui; & je lui
ay ouy dire quelque chofe pour rîre fur les efpinu-dt
de Monfieur de Vandofroe. Comme un propos tire
l'auirc, il avoit concé il cette Dame comment il
s'en alloit à Lyon, celant qu'il s'alloit rendre au
Duc de Savoye pour aSbtblir la France d'autant.
— Puifijue vous allez à Lyon, dit la Dame, je vous
prie de me faire faire une patiffcrir (je voulois dire
une tapitTerie), de quelque nouvelle iaventioQ. S'il
fe peui, qu'il y ait des brefmes? — Qu'appellcz-
vous des brefmes? dit le poète. — C'eft, repond la
Dame, de cela qu'il y avoit en la tapifTerie que le
Roy ofla à Madame pour donner à la DuchelTe; on
l'ellimoic cent cinquante mille efcus ; ma foi, il euil
cfté plus honnefle au Roy, maintenant qu'elle ell
mone, d'en faire un prefent ii Monfieur, que de fe
faire héritier de la deffunfle; mais les vieux ferri-
LIVRE IV, CHAPITRE XVI. 633
noftre capillier vous en envoira les mefures. Mon-
fieur n'y veut rien efpargner, & a délibéré fur
tout d'y tapifTer la cuifine, chofe qui ne fe void
gueres ailleurs; mais aga, voyez vous, il n'eft point
glorieux. On dit quUl faut commencer un baftiment
par la cuifine (les autres difent par la cave); Mon-
fieur dit librement que la cuifine a eflé le premier
fondement de noftre maifon. — L'entrepreneur
picque en pofte jufques à la Farnache : il vid la
grandTalle, qui ne fe pouvoit tapifTer à moins de
douze pièces, trois de chaque cofté, feparees par les
feneftres, 8l d^une bande par la cheminée. Eftanr
donc à Lyon, U fait reiiflir fon entreprife, laquelle
depuis fe fit voir à la grandTalle. Elle eft de quatre
triomphes, chacun de trois pantes. Ce n'eft pas le
triomphe de la Chafteté, ni rien de Pinvention de
Pétrarque. Le premier eft le triomphe d'Impiété, le
fécond de l'Ignorance, le troifiefme de Poltronnerie,
le quatrième de Gueuferie, qui eft le plus beau.
Les couleurs 8l les diverfitez y font fort agréables ;
rien n'y va à nuances ; les changements y font tout
à coup. La bordure des grotefques eft d'efcriture en
chiffres que perfonne n'entendoit; mais du Monin,
qui ne craint plus rien, pour avoir pzfTé le Mont du
Chat, en a envoyé l'explication, & les mémoires
tout du long, au petit Chevalier, qui a meilleure
grâce à les lire que fa cotte mautaillee des religions,
8l Dieu fçait les glofes que les copieux feront fur
ces belles hiftoires, quand ils en auront fceu le
fecret.
^"", pli» lui
""■'lourde
*"' «voi, „i, ,
LIVRE IT, CHAPITRE XVII. 6j5
(Iration. — B, Ouy, vraycmeûtj mais, pour fuivre
mon propos, vous faurez que dans le mefme chariot
alloit à reculons la Volupté, qui n'avoft couverture
que fes cheveux, qui lui couvroit tout le front, lui
faifoit des mouftaches, & des bouchons à la lac-
quaife, & en un mot elle fembloîc toute crachée à
la Marquife, & dei là la mode a pris fon modellâ
pour la garcette de ce temps. Aux deux fieses des
deux codez, comme portières, eftoient en tutre de
captif, premièrement la Cotifcie^e : c'eftoit un
corps demi mort, qui, fans fentimem, eftoit
afiis ft fommeilloit fur un monc^U de chauiTe*
trappes; de Tautre codé, la Stupidité, qui avoit la
peau faite à efcailles de fer roiiillé< La mufique qui
entournoit ce chariot efioit de tambours, de tombâtes
& de cornets venus des Bacchantes par fucceifion,
avec tout efquipage de charivari. Souveneai vous
qu^à chaque codé de la falle il faloit trois pentes de
capifferie : la première, de ce que foumifToit F Anti-
quité; la féconde, de ce que nous avons appris
durant la primitive Eglife; la troifiefme eft des
Modernes & de ce temps. Et cet ordre eft obfervé
par tout, horfmis au troifiefme triomphe, à caufe de
la cheminée. Si bien qu'à la première pante d^au*
prés de la porte, marchoit devant le chariot la
première troupe des prifonniers : elle eiloit des
Patriarches & Saints honunes du premier fiecle,
comme Abel, Enoch, Noé, Abraham & fes enfans,
David, tous les Prophètes enchaifnés comme les
prifonniers des Lanfquenets, & les bouts de leurs
chaifnes dans les poings des champions vidorieux.
Vous voyez à la telle Caïn & Cam, Nembrot, les
Géants qui fe mocqdoient de l'Arche; au milieu,
Pharaon, Og : vers la queue, les cinq Roiâ que
6j6 avanturks od bakoh de tskbstb.
pendit Jofue; AchaE & Jefabcl, habillez en Ama-
zones. Ces pauvres prlfonniers vont à regret, & con-
icmplent d'un œil trifte les roués du chariot, qui
ont pour pavé les tables de la Loi & l'Arche
de l'Alliance, qu'ils ont mis en pièces. — F. Cap
de you! ye troube eftraoge de boir pareilrc Pha-
raon, Og, Seon, & lous otres qui ont elUi baincui,
au nombre des triomphants. — B. Leur élire eO
miferabie, mais le pareftre eft pour eux. Ce n'efl
pas d'aujourd'hui que les foldats de l'Impiété,
quelque battus qu'ils foyent, triomphent tousjours,
lefmoins les plus vaillants de ce fiecle, qui (ont
devenus beaucoup de fois en leur vie, biens 8t hon-
neurs, gibier des champions de rimpieti. De
tout pareil ordre marchoii l'Eglife primitive, Aptu-
très, Martyrs & CoofelTeurï, menez rudement pw
Î1
J
LIVRE IV, CHAPITRE XVII.
637
Diables. Mais les Sergents qui les font marcher font
braves & glorieux : vous y voyez le Comte de Buen-
dia qui porte l'efpee, un autre le grand eftandart
rouge ; les Inquifiteurs en pourpoind, tous mines de
maupiteux, 8l tels que vous les voyez defcrits aux
aâes de Plnquifition. N'eft pas oublié que la facree
Hermandad va en bonne ordre, deux à deux,
une main derrier le cul; ils chevauchent en latin,
8l marchent courbez fur des chevaux d^Efpagne,
fe tenant à Parçon, pour mener à la mort des
troupes de foixante ou quatre vingts vieiUards,
femmes & enfans baaillonnez. Plufieiu's tragédies
de France , d* Angleterre , d'Italie , de Flandres
& d'ailleurs, font en fi grand nombre qu'elles ne
peuvent trouver la place, & ne font mifes ici que
par abrégé.
Chapitke XVIII.
T^ïompht de l'Ignorance
N après marchoit le char triom-
phant de l'Ignorance, tiré par
quacre afnes emmuficqiiez de
trompes de bouche & de come-
fes. La Dame efl toute nuë,
n'ayant pas le jugementde Cacher
fes parties honteufcsj elle a le
fronteftroU, &les yeiw^rav, aufTi bien que l'autre;
la bouche demi ouvoifçc elle lit par contenance
dans un Bréviaire, de bii.fnhaui {comme feu Mon-
fieur de Vandofme qui elloit gaucher), s'cclatte de
rire en y lifant, comme y trouvant la matière plai-
fame & délicate; elle a beaucoup de traits de v^age
de Benhohne. Vis à vis de la triomphante, qui eft
& dire devant, eft la Folie qui s'efcrimc d'une
marotte; à fa droite eft L'Opiniaftreié, à la grofte
tefte, & de l'autre cofté la Superftition , toute
bardée de patenoftres. Tout de mefrae qu'à l'autre
triomphe, marchent aufli trois bandes de captifs, af-
favoir : du premier fiecle, Noé, qui voulut faire le
favant k inventer l'arche ; Moyfe, à amener la loy
LIYRB IV, CHAPITRE XYIXI. 6'}^
à des gens qui n'en vouloienc point; les Prophètes,
fafcheux corne-guerres, ennemis de l'aife 8l du bon
temps; 8l fi vous trouvez eftrange qu'ils foient
peints en plus d'un lieu, fâchez que telles gens font
bien gourmandez plus d'une fois, & en plus d'une
façon; vous les voyez malmenez par ces Geans, par
les ignorans qui baftifToient Babel ne s^entendans pas,
par ces mutins Juiis qui prefchoient le bon gouft
des oignons d'Egypte, & y vouloient retourner.
Cet efcoiiade finit par Sedecias, qui donne à Michee
un defmenti & un foufflet. A la féconde file vous
voyez les Doâeurs de TEgUfe, comme Irenee, Ter-
tullian, S. Hierofme & S. Augullin, quelques
Docteurs de Rome jufques à Sylveftre. Vous y voyez
d'autre codé ce paillard Lyberius, qui au commeor-
cément enchaîné avec Athanafe, trouve moyen de
fe fauver, & s'eftant r' allié avec les Arriens triom-
phants, firappe fur Athanafe & Chryfoftome plus
que quatre autres, comme faifoic Sanci au maf-
facre d'Orléans, en tuant fon hofte, & maffacrant
les corps morts pour fe fauver. Entr' autres tels
comittes paroifTent Zambres & fes compagnons.
Puis vient la troupe de ce fiecle, où vous voyez
tant de Dodeurs d'Alemagne qui ofoient prefcher
contre l'ivrognerie ; le pauvre Calvin , maigre
comme un haranc-foret, les douze Minidres de
Poifli, les Sieurs de Chamdieu, & de nouveau le
Pleilis Mornai. Tout cela eil traifné fi vifte qu'ils
n'ont pas loifir de parler. Les triomphants au
rebours ont la gorge ouverte, comme leur faifants
la huée, & faifans crier les pages & lacquais : c Qit'ii
eft laidj il a ejcorché U renard! U a chié au Uû. »
Là, dit le Poëte en fon mémoire, que le renfort des
corne-mufes eft pour eftouffer les remonftrances des
640
AMTURBS DU BARON Ot F£NES
ITE. ■
affligez. Le chariot a pour pavé force livres pole-
mictjues, VInJiiruMa, le Myfiere d'iniqaiié, qui
fut premièrement enfoiré à Saumur, & puis jonché
par les rues; de ce rang font la Sepmaiae de
du Bartas, les livres de du Moulin, & \' Hijhire
d'Aubigné. Les eilaffiers qui font marcher ces mi-
ferablesfont Cachât, la Bajlide, Lignerac.Ie Chan-
celier de Birague, redevenu gendarme quand il vid
que fcs harangues faifoient rire les gens; puis,
pour cloiture de la pante, marchent en foule derrier
le chariot les Princes qui n'ont rien fceu, le père
&. grand-perc du D^c de Monipenfier, le Connella-
b!e, qui fçaii efcrire & non pas lire, car il efcrit fon
nom, quelques Confeillers d'Eftat, qui, aufli bien
que les Preftres, ont ofé fe vanter de n'en fçavoir
pas plus. A la retraite cft TEcclefiaUique Alenot,
LIY&B lY, CHAPITRB XYIII.
641
celui qui fuie, eftans conviez à tous deux; entre
ceux là eft reconnu au vif un Marefchal de France
& autres que je n'ofe nommer, pource qu^ils portent
le cordon bleu.
II.
4î
cha^itrb xrx.
Triompht dt ta Poltroniurit.
, gare, gare le corps! car
I voici le chariot de Madame PoU
, tiré par quatre daimi _
tlVRÉ IT, tMAPlTkS Xix. ^Àf}
1
font force vaillans hommes du fîecle, tant de Bour-
bons, de ceux de Lorraine, les Chaftlllons, les
Marefchaux de Biron père & fils, ceux de la Noue,
de Motttgomeri, de Montbmn, toute la bataille de
k S. Bardielemi, le Marefchal d'Aumoût, Givry,
les Ducs de^ Bouillon & de Thoars
& de nottveaa Montbarot, criminel
d*avoir fauve la Bretagne de la prife de Rennes,
ft qui plus eft, coulpable de fa prifon. Il n'y a
pomt moyen d'enrooller cette multitude; j'y connois
bien pounant à la fin Pralim, mon de regret.
Tant y a que ces mauvais garçons font mener en
triomphe par force gens viÔorieux, entre lefquels
paroiflent le feu Marefchal de Rez, le Sieur de
Lanfac, grand père de ceux ci, car fon fils eftoit
des prifonniers, ayant perdu cinq Gouvememens
par fa libéralité. Maiftre René, le parfumeur, fervoit
de comitte. Mais voila une troupe montée de
Barbes, & un Comte à la telle, une Cornette après
lui, coëffce de gaze pour cacher la croix; ceux là
veulent renverfer deux Huguenots boiteux qui les
pouffent au combat; vous voiez à travers la gaze
une corbeille & le mot de PEmblefme eft : i Je
vous [vends] ce corbillon •. Voik enfuite cinq Cheva-
liers au cordon bleu, -^ vif âge defcouvert, & fans
vous donner à attendre 1-âtplication quelque jour,
comme ceux qui viennent d'eftre alléguez, les pre-
mières lettres de leurs noms font Do, Manou, Che-
meraultj un Clermont & Chafteau- Vieux ^ qui à la
bataille d'Ivry voulurent tuer un homme qui fe
fauvoit, & s'en fervir tous cinq pour rougir Tefpee,
mais ils ne peurent obtenir cela de lui, fans un
Argolet paffant, qui d'un feul coup leur donna de
quoi faire repaiftre le coutelas. Nous aurons encor
5
;
644 AVANTUKBS DU BARON I>B TSSESTB.
befoin de l'explicatton du Pocte pour un coing où
eA peint un Pantalon à barbe gnfc, qui tire en
a.rriere un Capitaine qui fcmbic tout craché à
Praliro, lequel defgaine à demi pour aller tuer ua
Horaiio, qui a le vlfige comme un des mignons du
fiecle, monté fur une Y/jbella. Pantalon, couvert
d'un jac de maille, void l'adultcre pris fur les cEufs,
jette cet apophthegrae notable, » Je ne puis croire
ce que je vois, 1 & cmpefche le matamore de jettcr
par les fencilres l'adultère catholique & univerfel.
Le payfage elt bordé bien i propos de force chaf-
icaux & belles maifons, fur les portaux defquelles
il y avoit en frontifpicc d.; belles pierres taillées
nouvellement, en la place des vieilles qu'on avoit
oftees. Là dloient enlevées les armoiries de U
Bafoche, mieux timbrées que les premières ; au bas
de tous les efcuffons elioieni ces trois marques :
D. D. D.; il vous eft aifé de vous les expliquer par
irois mots : < Difpari Domimi Domùtaris, •
Dt la Gueu/trU,
L ne refte plut que la facree ft
vénérable GueuTerïe, de laquelle
le chariot branlant, tout fait de
pièces rapportées & de contons,
eAoii tiré par quatre louves
maigres. La triomphante eft toute
edonnee & honieufe de fes
beaux habits, & ne fait quelle grâce prendre; mais
l'Impudence, qui eft allïze fur le coffret de derrier,
par une petite feneftre lut donne courage, & quel--
quefois de la main redrefte fa contenance efgaree,
qui ne fe peut alTeurer. C'eftoient les mefmes hon-
teufes contenances qu'avoit la Conneftable le jour
de fes nopces : car quelque fardée qu'elle foit ,
tousjours paroilTent en fon vifage les rides de fa
première condition. Quoi qu'elle fe voye en eftat
de donner aux autres, elle croit tousjours devoir
6^6 AVAMTUB.ES I
ON D£ rjEKBSl
demander & quaimandcr; elle avisa vis d'elle,
& qui a parc à fa gloire, l'infolcnce, affbz belle
de loin, efchevelec & veftuc de dix couleurs;
à gauche eft la RuiBnerie, que ces mefchans tapif-
fiers ont tird fur le portraift de Madame de S. Du,,
maquerelle de France xat'i^oxnv ; à droite la Flatterie,
qui donne à qui en veut des grains bénits & des
bougies pour aller dire des oraifons, A la première
panie des trois, font pluficurs Rois &. Princes chafTcz
de leurs pais, conduits à coups de nerfs de bœuf
par Bagouas & autres enucqucs, à qui je tie me
faurois amufer, pour ce que ce font bifloires trop
anticques. En la féconde vous voyez tant de riches
Romains, ou de ceux qui «voient voulu efpoufer la
querelle de la liberté; entre autres y font remar-
quables Senecque, Helvidius Prifcus, Thrafee,
qu'on appelloit la vertu mefme, la pauvre Epicaris
Sl une grande troupe de gens qui oui [c^ru] ^ar 1^
fortuneG, qui portent dus leurs tajûas leurs teÀg-
neots, pour les prefenter mut Tyrans & ^ leuK
valets. Cette troupe demi aueeftoiirudMDentgKwe
par quelques liâeurs, fur le chapeau delâucJs
e&oieMl ewitfi leurs ooms, comme Harâje, Pallas,
fleur dÂJit; fur le derrîer eQoit BiUiff^ànus, qui
demandoit l'aumofne, après avoir dompté & def-
poiiillé tant de Rois. Mais au plus vif efclattoit la
dernière troupe des modernes, qui avoit à fa telle le
Conneâable Montagu, faifaju elxharpe d'un ticol de
61 d'or; & conme il efloit £Is d'yn barbier, auŒ
fltoit il couplé avec le barbier du Roi Louis XI,
ponaut pour efcuJTon ua bafliii d'or, & efcrit eo
fable : FortiM» toajor quifyue ftur. Ces deui f.ù-
foient faire place aux prifonnlert, k la teAe 4ei^
iqudb vous vpyez biea piteitx le pauvre Xioofiilvc,
LITKE iy<, CHAPITRE XX* 647
nommé par ezcellenoe k Capicaine; le Comte de
Rocendolf, mort de faim à Paris, après avoir
amené & ezfdoiâé <}iiatre armées au feconrs de nos
Roit; il aroit for les efpaules «n manteau, <jae |e
lui ai veu autresfots, de fathi feurréde martre sibe-
Une, & maintenant de pardiemi»^ fans autre cotK
vertttfe; k Vidame de Chartres, parent de noe
Rois, mort aux gakres^ A de mefme, iforce
Seigneurs d^iUoftres matfons, tous vilages abbacus,
kxiiais un q«i oonfoloit fes compagnons, ft (f'eftois
^fi la femUance ne me trompe) Odet de la HchêH^
tout reifoui d^avoir orouvé à vendre «ne de fel
maifoos à demi prix. Là parokSbtt k brave Moiijr)
defefperé, qui avok dit à fon Maîftre, comme on
lui oÂoit fa penfion : f Je demeuré ridke 4f honneur
& £pamLî. » Il eut pour réplique, que chacun de
fes amis k nourriroit une femaine. De ce régiment
eftoknt* force Gentilshommes qui ont facrifié kurs
biens à la guerre, & que U pais avoit furpris, & 4
qui on aroit dit : Le Royaume a efté trente uns au
pillage : pourquoi n^avei^vous rien faut Les Maref-
chaux de camp qui trainent cette cadene font Ragot
(&] du Halde, qui a pour eftaffier l'héritier de Ptcoe.
Après ce diariot marche U troupe triom{rfiante t
k premier rang, de deux Cardinaux qui vont coàt
i cofte, de l'un defquels k rolkau dit : // Cardimda
de la Simia, eout moucheté fur l'efcarlatte de gros
poux & de punaifes. Cettni ci, eftant gueux à U
porte du Pape, fiit prins en amitié par fa fingefle,
pour la bonne moiiTon de poux qu'il portott, & par-
vint au gouvernement de cette befle. Son maillre,
Fajrant £Eut habiller, k trouva bonne n^, & par k
fiege parvint au S. Siège; rhifioire vous en dit
davantage. A foa oofté marchoit k Pape Sixte V,
64S avantures du baron de f^mcstb.
monté fur un porceau; à mon advis, c'eft ce pour-
ceau mefme qu'il perdit, & pour cette perte s'enfuît
de fon maiftre, devint portier d'un couvent de Cor-
deîiers, & de là Pape, comme les hîlloires vous
enfeigneront. O U brave troupe qui paroiflbtt en
ce triomphe de Ducs, Marquis, Comtes, Vicomtes
& Barons! tous noms qui dureront long temps,
car ils font bien nouveaux ; une armée de plus de
carrofTes que Xerxds n'eut de navires, comme ii
paroift les felles à la montre du cours; je dis les
felles, pour ce que la plufpart ont befoin de gagner
leur vie les jours ouvriers. Il y avoit à U marge de
h tapilTerie une grofle gibecière qui accuchoit
d'un cftui de bonnei, ccrt eftui d'une malle coffrée,
& eu fuite un gros vilain carofle qui accouchoit de
petits caroflillons, qui, comme une fourmilliere, fe
joignirent à la croupe, chacun fon efcrîteau com-
mençant par : Madame j & quelquesfbis Madamt dâ
Jean, Madame de Pierre, Madame de Martin, &e.
En un petit coing du tableau, on remarquoit deux
vieilles Damoifelles accroupies, à peine reconnuiés
pour Mefdemoifelles de Tuurnon & de BrelTuire.
Elles ont les yeux tournez au Ciel, font d'une main
un grand figne de croix, & de l'autre monftreni les
troupes des Dames; je penfe que c'eft par admira-
tion, pource qu'elles ne voulurent jamais haufler
leur tUtre de Damoifelles, , bien qu'elles culTent
l'une oâante, & l'autre nonante m'dlc livres de
rentes ; elles fe reigloient ainfi, pource que leurs
maris n'avoient jamais efté Chevaliers de l'ordre de
Saint Michel. Cependant la troupe s'cfcoule & la
fuite, il la fin de laquelle ferrent de Sergents le peut
U RtKhe, autrefois donné pour nain, car Belat,
Tilet de garderobe du Duc de Savoye, 1« maiftre
LIYRB IV, CHAPITRE XX. 649
de la tapifTerie, faifoic Thonneur de la maifon. Le
Poëte dit en fes Mémoires qu'il ne faut trouver
eftrange fi vous ne voyez point en la troupe des
gueux triomphans, ni parmi les autres un Porcins
CatOj autrefois porcher, ni un Serçmsj autrefois
efclave : comme aufli parmi les modernes, un Baron
de la Gardey autrefois nonmié Capitaine Poulain,
pour avoir eilé Saltimbardel, & avoir gardé les pou-
lains; ni la Burlotte, pour avoir eflé barbier de
village; c'eft qu'il ne veut comprendre en ce rang
ceux qui ont monté fans gueufer. Ce n'eft pas, dit- •
il, gue\iferie que de tirer falaire & honneur de fes
mérites, & partant, font bannis de ce triomphe ceux
qui font parvenus par la probité, par les fervices
fignalez, par les armes & par les lettres. Que ceux
là s'aillent cacher, n'y ayant place ici que pour ceux
qui ont fait fortune turpibus artibus. Il faut un mot^
des coings : en l'un defquels fe void un arbre
comme ceux d'Efcofle, qui d'un codé laiffe choir
fon fruit dans Peau, & le fruit fe change en canes &
canars; ce qui tombe à terre font chaperons de
drap, qui s'eftriffifrent & fe changent en velours ;
vous en voyez de demi formez, qui, aiant roi^é deux
tours, fe chargent de pierreries ; & c'eft de là que
tant de Madames de drap deviennent Madames de
velours, gagnent le Paradis des Dames fans avoir
paffé au Purgatoire des Damoifelles; & c'eft en cette
accroifTance que les petits fiefs de France font
aujourd'hui Baronnies, les Chaftelenies font devenues
Vicomtez, les Baronnies Comtez, les Vicomtez Mar-
quifats, les Comtez Duchez, & les Ducs voudroient
bien devenir Rois, s'ils avoient affaire à un maiftre
patient & à un Roy qui ne fuft point foldat. La che«
minée de la falle fe trouve bien à propos dans le
que le i'oëie n'a pu tnterp
couvre, c'eft une grande i
vous voies en une monu.
pefchCE, au foleil, à recouc
Uurs pourpoÎBM &ia k U
doublet mouftaches; ]k
bocez, use DanoifeUe qui
DomlMÎl & le* tdbu, ft toi
ailleur* de cette idairs bic
comme la movAuhe fanre
tout ce qui coooerne la gar
Et vicnl la mouftacbe, oi
quelques coups au bilain. -
coodure, je r'û plus à voui
où ptfTent le« roues du dern
caSbat, de chevrons brifez,
& nefme de fleuri de Es
momphe de U Gumferie n»
palTanc, l quoi aident encor
U y 1 de quoi £ure pleurer <
le* fpeâaiears. En &i, c'cft
fcrie, qui promet aux fraiflr
trons & aux beliftret les goi
les hoanmr» * '*• (.:— —
LIY&B lY, CHAPIT&B XX.
651
triomphe & dans la félicitai. — £. Et moi y efire
veriublement.
Adieu jufques à une matière qui pourra fervir
de cinquiefme livre
à Fanefte.
FIN
▼
LE
DIVORCE SATYRIQ.UE
LES AMOURS
DE LA REYNE MARGUERITE
IPablii d'iprti l'Ëditlon it ttio,
(X«uJl it Hnrfii fliiir fiTMia à rUftbi it Hnrj III, f. loo à foi*.)
k pour lu idditlou, fiprti celle de i6«j.|
I
DIVORCE SATYRIQ.UE
LES A^40URS
DE LA REYNE MARGUERITE'
'bit aux Rots i faire les loix,
difeni les Tyrans & ceux dont
la force & non pas l'amour reigne
fur les peuples, mais je ne loiie
point, ny apprenve ceft axiome,
encor que les armes & la vio-
lence m'ont rendu l'héritage & le
fceptre de mes pères. Dteil bénit la douceur, ft falA
profperer les deiïeins de ceux dont les aâions font
t. L'authenticité dn Dirorci tatjrrvpit, qoe ooui jngio»
d'aillenri adei févèrenient [*oir notre introd., p. u), ne
nouj ivsit pu fen^lé foSTimment établie pour reprodmre
dans notre édition de* tenvrei de d^Aabigné ce violent b mé-
diocre pamphlet. Notre opinion ne s'eft guère modifiée, maû
l'an de qaelqaei JD|e) compétent!, tels qna HH. Ch. Raid,
Ch. Lenient, Henri Sordier, Tamiiej de LwroqaB, etc ,
$^6 LK DirORCI SATTRI4UE.
autant aymees que redoubtces, & feray mon tefmoin
fi vos cœurs ingrats s'en rendent mefcogroi (Tans, que
j'ay pardonné à plus d'ennemis, que vciigé d'injures,
aux yeux de tout le monde, comme à la France, à
Paris, maclemence & madebonaire bénignité n'ayant
pas abfous feulement les perturbateurs de l'Eftat,
de leur crimes, mais auili remis mon particulier
iniercll à ceux qui téméraire ment ont oié attaquer
mon nom. J'ay celle obligation au bonheur d'avoir
glorieulement veu la fin de troubles démon Royaume,
d'avoir expérimenté la foy de mes bons fubjets,
d'avoir dtably pour long temps une iieureufe paix
avec mes voifins, & d'avoir efteini mes ennuis plus
particuliers par le moyen d'un divorce qui fepare
de ma maifon, ainfy que du cœur, ce!Ie-dont l'in-
famie a longuement obfcurcy ma réputation. Je fçay
que plufieurs Eftrangers, & plufieurs François mal
affeftionncz, trouvent fort eftrange qu'aprei vingt-
huia ans de mariage, un prétexte de parentage ail
délié ce qu'un facremcni fi digne avoit conjoliift :
les uns m'en appellent voluptueux, les autres athée,
& tousenfemble mefcognoiflànt, il &ut que. j'ef claire
à leur ignorance, & que je confonde leur caute ma-
lice, cachant ma juHe douleur, & déployant les digues
raifons que j'avois par honneur voulu deguifer à Ift
renommée avec des parolles exqutfes, ambiguiis & re-
cerchees. Ma grandeur m'expofe, & me met en
veuë, & l'intégrité de ma confcience fait trouver bon
qu'tm chacun lifedans mes œuvres, afin que les ma-
oou décide à le réimprimer fout toutei réfcrvei. Nom
réiameroD) au ootes les motifs inToqoét a l'appiû de*
diverfei ofânioiu. Nous aron» placé eaire crochets )et
addition! qae donne pour la première fois one dei ediriou
(te iM],
LE DIVORCE SATTR.I(J[JS. (S57
lint & mal intbnnez n'attribuent i tort aux delicet,
à la Religion ny ii l'ingratitude, encore qu'elle Ibii
des dépendance* de la Couronne, ce que det caufei
plus pregnantes & recevables excufent.
Une pluye de fang au moni Aventin durant la
Romaine fuper&ition, prefagea la deffaide de Canet.
& un torrent de fang refpandu par loutte la France
•t mes trilles nopces, prédit la dcffaiâe de mon hoi^
neur : le Ciel qui voit clair i nos adventures en
donne fouvent quelque cc^oilTasce avant le fuccez,
& les fages évitent le péril par la prévoyance, ie
voyoii le jour au travers de mon tnf<»'nine, & touctea
chofes [afchoieni à m'en efclaircir : mais je n'iy pu
fuir mon dommage, encor que le Roy Charles pour
lors régnant, ii qui l'humeur de fa fœur eftoit proe
cogneuë, m'en donna quelque fentiment deJToKx
ceû oracle, lors qu'aiïeurant les Huguenotz, pour les
aiirapper & les allécher d'une fèinie paix, il proteT-
toit fbubz mille fermens, qu'il ne donnoii pas fa
Margot feulement pour femme au Roy de Navarre,
mais à tout les Hérétiques de fon Royaume. O Pro-
phétie trop véritable, & digne d'une fainâe & divine
infpiration , s'il eut mis le gênerai & non le particu-
lier, & qu'au lieu des Huguenotz feuls, il eut com-
pris tous les hommes : car il n'y a forte ou qualité
d'iceux en toutte la France avec qui cefte dépravée
n'ait exercé fa lubricité; tout eft iodiierent k Ces
volupiez, & ne luy chaut d'aage, de grandeur, ny
d'extraâ ion, pourveu qu'elle faoule & faiisfaHê àfea
appetis, & n'en a jufques icy depuis l'aag e d'onze
ans dûfdit à perfonne, auquel aaf^e Ancraguet,
& Charins, car tous deux ont creu avoir obtenu les
premiers ceftc gloire & eacSt les prémices de fa
chaleur, qui augmeniuii tous les jours, & eux n'ef-
it. '.4s
^
6;8 LK DIVOKCE SA
i«nt point fuffifans à l'efteinilrc, encor que Antragues
y fit un effort, qui luy a depuis ibregé la vie, elle
jetta l'œil fur Manigues, & l'y arrefta 11 long [emps,
qu'elle l'cnroolla foubz fon enfeigne, & en don-
nèrent l'un & l'autte tant de cognoiffance, que
e'eftolt le difcours & l'entretien commun de ions les
foklatz dans les armées où l'on cognoilToit le dit
Martigues outre fa valeur pour Colonel de l'Infan-
terie. Plafieurs d'entre voys, vous fouvenez bien
d'une efcharpe de broderie, & d"itn petit cbien qu'il
porioit ordinairement aux lièges & aux efcarmouchci
plus ttangereufes, & n'ignorcï pas d'où parioient les
amoureufes faveurs qui continuèrent jufqiies à la
mort, aprez lnjuelle il fallut que par rentn-'milc de
Madame de Carnavalet, Monfieur de Guife en paf-
fac les mains, jeune Prince, brave & ambitieux,
lequel commençant desjà de conftruire celle machine
qui trop toft elbranAee luy chera deffuz, fongeoitde
parvenir de fes impudiques baifers aux nopces,
& d'en fortifier fes prétextes & fes defTeins, ayant
rompu dexirement le traicté de mariage d'elle & du
Roy de Portugal desji fort advancé & en tous
termes, par le moyen du Cardinal de Gutfe fon
onde, envoyé l'an mil cinq cens foixante huift en
Efpagne, poiu: fe condouloir de la part du Roy tr<s
Chrellien avec le Roy Catholique de la mort de la
Royne Ifabeau de Valois fa femme, Princeffc autant
vertueufe & fage, que celle fienne fceur vitieufe
& folle; & de laquelle les inconftances font fi fi^
quentes, que l'examen de fa mémoire mefme errt-
roii à compter fes fautes; celle-cy fçay je bien
toutesfois, qu'elle adjoulla toft aprez à fes falles
conquelles fes jeunes frères, dont l'un, à fçavoii
François, continua ceA incefte toutte fa vie
LE DIVORCE SATYE.rC!UE. âjp
& Heary l'en defeftima tellement que depuis il ne Is
put aymer, ayant mefmes à la longue apperceu, que
les ans au lieu d'arrefler fes defirs augmentoient
leur furies, Se qu'aufli mouvante que le Mercure elle
branfloic pour le moindre objeâ qui t'approchoit.
Voila la pucelle que mes proches, & le bien com-
mun, me Sreni prendre pour belle & bonne, à fon
grand mefconteatemenc 8l de fes favoris, entre lef-
quels Antragues, comme le Marefchal de Recz m'a
autrefois diâ, qu'il faillit àmourir de regret, oùd'un
lafchemenc de fang que la violence de la douleur de
nous voir marier luy provoquoit par divers en-
droits : mais le temps qui guérit touttes chofes, le
guérit auflî & le pourveui pour plufieurs années,
d'une moins belle, mais plus conftante MaidrelTe,
& elle de divers ferviieurs, dont l'un tourtefbis, k
fçavoir la Molle, s'en trouva marry, car foubz pré-
texte de tremper en quelque confpiration, dont furent
accufez tes Marefchaux de Montmorency & de
ColTé, en laiifa U telle i Sain» Jean en Grève,
accompagnée de celle de Coconas, où elles ne moi-
firent ny ne furent pas longuement expofees à la
veuë du peuple ; car la nuiâ avant ma preude femme,
& Madame de Nevers fa compagne, Sdelle amante
de Coconas, les ayant faiA enlever, les portèrent
dans leur carofTes enterrer de leurs propres mains
dans la Chapelle Sainâ Martin qui e foubz Mont-
martre, lailTant celle mort de la Molle maintes
larmes k fa MaiArelTe, qui foubz le nom d'Hyacinte,
a longuement faiâ foufpirer & chanter fes regretz,
nonobllant les fréquentes &. noâurnes confolations
de Sainâ Luc, que nous avons veu depuis arriver
par fois incc^neu 8t defguift à Nerac, jufques i ce
que fiufly luy en fie oublier la perte, qui a elle par
66o LS DIVORCE SATy&IvtUE.
elle dcfeouïerte, quelque repuution qu'il eut d'élire
bnve yiarmy les hommes, & de ne Teftre guerres
parm)' les temmes, a caufe de quelque colique qui
le prenoii ordinairement ii minuiâ. Cette dej^ouûee
deguifint en quelque façon fon appétit de divcrfes
faulces, s'en prit à MonOeur de Mayenne, bon com-
pagnon gros & graï, & voluptueux comme elle,
&. font tousjours depuis demeurez bons amis en
touttes leurs rencontres; bien furent ils quelque
temps brouillez pour une lettre efcrittc k la Vîtry,
OÙ il promettoit de préférer le Soleil à U Lune :
mais louiies chofes ptcifiees, lemaltaleot en demeura
leulemcni fur la Vitry, qui pour cela ne hilTa pas
de trouver party, non plus que celie pleine Lune,
dont je n'ay jufques icy déduit que les vemiz, ny
par modeflie compté U dlnne de ceux que la reuoia-
mee rend participuia de fes fecrenet faveurs, me
contentant de ceux feulement que je fçay fort bien
qu'elle ne voudroit, ny ne fçauroii defadvouër & fes
premiers amants fuccedereni doncques en divers
temps, (car le nombre m'excofera u je fauls & les
bien ranger). Ce grand dcgoofté de Vicomte de
Turenne, que comme les precedens, elle «ovoya
bientoft au change, trouvant fa taille difpropcKtioa-
aee en quelque endroift, l'accomparani aux nu^es
vuides qui n'ont que l'apparence dehors, dont le
triAe amoureux au defefpoir, aprez un adieu plein
de larmes, s'en allait perdre en quelque loingtaine
région, 11 moy qni Içavoïs ce fecret, & qui, pour le
bien des Eglifes feignois pourtant de n'en rien Ra-
voir, n'eulTe très exprelTement enjoinft à ma cfaafle
femme de lerappeller : ce qn'elle fit très mal volon>
tiers, deûrani de tout temps pour la vanité, que
qudqoe lourduu fe rompit le col i foa occaiîoa :
LS OIVOKCE SATrRIQUZ. 66l
mais il n'eQ guère plut de cet fotx depuis qu'on s'ea
mocque ; car de manger de rage les plumes de fon
chapeau, comme la B<Ak, ft cafler en colère uns
bouteille d'encre aux yeux des Dames, comme Cler-
mont d'Amboife, ce font petites rages St ialoufiet qui
n'eftoient que trop ordinaires ches nous, ft que
confentant à mon dethonneur, je fçavois À Yoyoit
clairement, donnant par celle tolérance aux uns
& aux autres Couvent le courage, & les commodités
de faillir ; elle le fçait bien, & plulieurt de voua qui
tenez la main à les gentilefles, auffi je ne fuis point
tellement aveugla moy mefine en un faiA li fetifible
& fi apparent, que je n'apperceulTe, comme le*
autres, que Clermont miintefois la baifoit touite en
Juppé fur la porte de fa chambre, tandii que le foir,
pour luy donner loifir de fe mettre au liQ, je
joiioii ou me promenois avec ma NoblefTe dant la
falle. Que direx-voua, fafcheux maris, de cefte fou&
France? n'aurez-vous point de peur, que vos femmes
vous lailTeni pour venir à moy, puifque je fuis ainfi
amy de nature? ou n'ellimerex-vous point pluHoft
que ce fut quelque lafchet^? vous aures raifon de
le croire, & moy de vous l'advouër, û confiderant
que i'avoLi pour lort plus de nex que de Royaume,
ft plu* de parollei que d'argent, voua m'approuves
que i'avois befoin de touttes met pièces, & princi-
palement de faire &. conferver det afflit, ou bien les
perdre & n'en point acquérir : la coniideration de
ceAe Dame, telle qu'elle eft, flecbilToit fes frères
tk la Royne fa mère aigris contre moy : fa beauté
m'aniroic force Gentils hommes, & fon bon naturel
les y retenoii ; car il n'eftoit point fils de bon lieu,
ny gentil compa^on, qui n'avoit une fois en fa vie
eàd ÀrviteBr de U Roync de Navarre, qui ne refuTiMt
i
LB DIVORCE S ATTRIQUÏ.
perfonnc, acceptant, ainfi que le tronc publicq, les
offrandes de tous vcnans : il eft vray que de quelques-
uns cllcfe moçquoii, comme vous direz de ce vieux
rufien de Pibracq, que l'amour avoit faift devenir
Ion Chancelier, duquel pour en rire elle me raonftroti
les lettres. Jecognois à vos yeux, ennemis de focietf,
que a vos femmes vivoietit ainfy, vous feriez en
peine & paraventurc iriez vous au Confeil de
Chaune ou de Vjlleclaire, pour fçavoir comme on
s'y gouverne : mais je n'eus jamais cette volonté,
quoy qu'on me confeillat, quoy qu'elle craignît, tiy
quoy que les Aftronomes plus entendue vilTent,
& cogneufTent au Ciel, & au poincï de Ton horof-
cope : je fçavoîs fon bien que dés le si juTques au
a8 de Mars de l'an 1560, fa nativité la jugeoit mou-
rir de ma main pour raifon d'honneur; mais une
certeine prefcience de noftre future feparation, ou
pour mieux dire, ime certeine prudence humaine, me
fit divertir les effefls des affeâions & impreflions des
aftres, continuans tous deux comme devant, moy ma
bonté naturelle, & elle fon opiniatlre inclination i fa
volupté, laquelle pour exercer avec plus de délices,
& hors des rudelTes de la toille, celle impudique a
d'kUErefois couché avec fon Seigneur [qui eft
le Seigneur Chanvallon, qu'elle Kiulloit appeller
fon Seigneur & Maiftre, par un refpeA & amour
paniculier qu'elle lui portoit, Se. dans le fecrei
& myfterieux de fcs conteniemens, fon confeil, fon
Apollon, l'ayant pour objeA faifl reprefeoter duis
fon lift, dans l'efclat & dans le luftre de fa belle
jeuneflë, accompagné de Mufes & autres galanteries.
Il y a plus que j'ay apris par relaiion que cette
Princedê tant elle eftoii amoureufe de ce Gentil-
homme, que pour lever tout foupçon il fe fûfoit
LE DIVORCE SATY&IQUE. 663
poner au Louvre dans un coffre de bois, fe fervant
à cet effed d'un menuifler fort expert, qui lui avoit
fait unefcallier portatif, pour appliquer aux chambres
& garderobbes, puis le recevoir] dans un liét efclairé
de divers flambeaux, entre deux linceuls de taffetas
noir, accompagnez de tant d'autres petites voluptez
que je laifTe à dire : ce fut lors qu^elles con-
çeurent de ces mignardifes non pas une Lyna
comme Uranie, dont à tort elle ufurpe le nom :
mais bien cefl Efplaudian qui vit encores, & qui
foubs des parens putatifs promet de reiiflir quelque
chofe de bon un jour.
[A ce mot je vous dirai que j'ay cognu & con-
verfé familièrement avec un jeune efcolier eflevé
& nourri aux eftudes en Tage de dix huid &
dix neuf ans par un nommé Moyfe, concierge de
l'hoftel de Navarre, & s'appelloit Louys de Vaux,
croyant eftre fils du Sieur de Vaux, parfumeur
proche de la Magdelaine à Paris, & chez lequel
ledit Sieur de Chanvallon le voulut voir un jour
& lui parler fans lui faire aucune ouverture ou
cognoiiTance, finon qu*il lui donna un tefton pour
avoir des plumes, lui difant qu'il fe tint droit en
faifant la révérence. Voila fes pères putatifs & ce
faifeur de mémoire a grande raifon de dire qu'il
promet quelque chofe de bon, car vous fçaurez
qu'ayant efté tiré de Paris & conduit à Bourdeaux
par ledit Moyfe fon Direâeur, il y a pris l'habit de
Capucin & y a vefcu cinq ou fix ans, ce qu'ayant
edé fceu par la fœur de Chanvallon, elle lui efcrivit
en de beaux termes, loiiant fa genereufe & pieufe
refolution : le jeune homme ne demeura court, & lui
donna le change, &, ce qui eft à remarquer, c'eft que
ce jeune hommç avoit le corps, la taille, les jolies,
fellès & des plus favorifees
j'ay dit toute rinllrudion dt
& du lieu où il avoii ellii m
Ne vout eAoonez plus, 1
retour de U guerre, de
sucret viokDs esemcn, ell
me c&rdTer, iufquei i. chu
n'avioat feuleiaent demeiu
enlemble, puilque libn defir
difes, & ne l'anTibuez plut,
celle facheufe feuteur de l'ti
m'accufe, ny au defdûn «
que voui ayex apperceu q
prifat & defeftimat l« mieju
un jour, que je voulou (
mengcai i Ta uble (car (^t
pareiu,) qu'il Talluii pluAo
bailinreinply d'eau, ftirnef
elle, iU fe lailTalIeni laver :
que c'cftoieac det gueux, t
la Cène, ne £e fouvcoaiw [
met nouveaux alliez,} qu'
Mercadans qui luy font plut
.... »,. „n ^11;^ Hp. niitft
LE DIVORCE SATTKIQVB. 66$
m'efcouter & d'emendre une partie de fes fortunes.
Depuis qu'elle fut homeufement foriie de Paris,
d'où un Capitaine des Gardes ta fit partir, aprez
avoir fouillé juTques dans fa littiere, & regardé qui
l'accompagnoit, & & Madame de Duras, & de
Bethune, Secrétaire de fon Cabinet, y elloient pour
les en chalTcr : cetl affront luy fit peur, & luy fit
tellement craindre pis, qu'elle fiii quelque temps
viranteaveclavergongnedc fes pèches : mais eftant
mal aifé que le poilTon ne revienne à l'hameçon,
& le corbeau à la cbarongne, ce haut-de- chauffe k
trois culs fe laiffe derechef emporter à la lubricité &
débordée fenfualiié, me quittant fans mot dire &. s'en
allant à Agen, ville contraire à mon pany, pour y
eftablu: fon commerce, & avec plus de liberté con-
tinuer fes ordures ; mais les habitans prefageans d'une
vie infolcnie d'infolens fucces, luy donnèrent occa-
fion de partir avec cane de hafte, qu'^ peine fe put
il trouver un cheval de croupe pour l'emporter, ny
des chevaux de loiiage, ny de polie, pour la moitié
de fes filles, dont plufieurs la fuivoient à la file, qui
fans mafque, qui fans devantier, & telle fans tous
le* deux, avec un defaroy fi pitoyable, qu'elles
reflembloienc mieux à des garces de Lanfquenetz k
la route d'un camp, qu'à des filles de bonne mai-
fon; accompagnée de quelque Noblefie harnachée,
qui moitié fans bottes, moitié k pied, la conduifirent
foubs la garde de Lignerai aux monts d'Auvergne
dans Cariai, d'où Marze fon frerc eftoit Chaftelain,
place forte, mais relTcntant plus fa tanniere de lar-
rons, que la demeure d'une PrincelTe, fille, fceur
& femme de Roy.
Je rougis, & remémore à regret tant d'indignttez,
içachani bien que les fiùâa da Grands ne meurent
)amais, & qu'après mille iiecles, iin fiecle moins
vicieux s'efraerv ciller a que le aortre ait produit
un monrtre au lieu d'une fêmrae, & le vitupère
d'un !i beiu Icxe de la femence des Oinfts de Dieu,
.IVfperois avant cefte dernière boutade, ayant
tant de preuves de fon naturel incontlant qui fc
lalTe lie lout, qu'enfin elle fe dcubr lafTer d'une fi
continué dilTolution, & que le gré de tne voir oublier
le prefent comme le pafTé, la deubt gagner & vaincre
d'obligation. J'en ay perdu, comme vous voyez, &
ma douceur & ma peine, & ne m'en refte que le
regret d'avoir veu ma maifon fouillée, & l'apprehen-
fion de fervir de fubjefl à ceux qui gravent nos noms
à l'Eierniid, ourre Tcnnuv d'elîre dcsji vieux, & de
voir à fon occafion ccftc petite famille dont Dieu a
béni noilre fcparaiion, en un fi bas aage, qu'elle ne
puiffe régir aprei raoy fans crainte cefte Monarchie,
ny recueillir en repos ce que j'ay femé avec fi grands
labeurs. Dieu qui m'a faift cette grâce qu'il fit i
Jonas en me délivrant du ventre famélique de cefte
baleine, fçaic combien volontiers je voudrois avec des
parollesplus douces pouvoir eitpofer l'article fecret
de noftre divorce, St n'eftrc pas contrainft d'ef venter
ce que je voudrois enfevelir : mais le murmure pu-
blicq & la calomnie m'y forcent, & l'alTeurance que
i'ay d'avoir plus de teûsoins de fea maléfices, qu'il
ne fe trouverott de voix pour l'exaucer, m'y convie.
Le Roy (on firere oyant cefte fienne fuittCf & ma
plainte, m'efcrivit que fi j'eufTe creu fon confeil tu
retour de Paris, & iraifté fa fœur comme elle le
meritoit, &. comme Tinformation qu'il m'en avoit
envoyé le confentoic, je ferois hors de peine, & luy
fans foucy de fes impertinances, & dit tout haut en
prefence de ceux qui le voyoienc difner : « Let Cadeti
LE DIVORCE SATTRIQUB, 667
de Gafcongne jiont feu faouler la Roy ne de Navarre;
elle efl allée trouver les muletiers & chauderoniers
d'Auvergne. • Je vous jure (car nous avons déformais
la perruque tondue & blanche efgalemenc) que le
refped qu^on doibt au poil blanc me retient, & que je
laifTe à dire plus de chofes que je n^en dis, me con-
tentant de celles qui font voir que je ne parle pas
par cœur, ny en homme qui paye mal fes adver-
ciflèurs. Chauny, qui luy a fouvent parfumé fon
devant de (lorax^ [eftoit des muficiens du cabinet
& des plus privez, lequel fut chaiTé & payé à coups
de bafton pour les bons fervices qu'il avoit rendus,
&e(l à remarquer que ledid [Chauny] ne l'ayant point
veuë depuis fon defpart d'Ûflbn jufques à une jour-
née de fon retour & fejour à Paris, qu'il la ren-
contra à la defcente des degrez de la Sainte Chapelle,
il conceut une telle impreffion & eut fi grand hor-
reur de Tafpeft de ce vifage, fe reflbuvenant du
pafl[%, que retournant au logis fur fes pas la fièvre le
ïaifit, fe mit aulid, & en mourut. Il eiloit Chanoine de
N. Dame de Paris,] outre qu'il m'a fervyde tefmoin
que c'eft le plus puant & le plus infed trou de tous
ceux qui pifTent, m'en a autrefois tant dit & de tant
de fortes, qu'il n'y a que les ignorans qui m'en
puiflfent defadvouër : à qui j'apprens que cefte perdue
eftant arrivée à Cariât, où elle fut long temps non
feulement fans daiz & li£t de parade, mais aufîy fans
chemifes pour tous les jours, elle commencea de
voir & de regarder fur lequel de ceux cy courroie
l'honneur de fon nom, elle jetta l'œil fur fon Cuifi-
nier, pour ne chaumer pomt, fe fafchant d'attendre
Duras qu'elle avoit envoyé vers le Roy d'Efpagne
3uerir de l'argent, encore que fa femme fa confi-
ante craignant qu'elle ne luy enlevât fQn Çaufa<jue^
£68
tB nuroRCB
luy prcfchai U conlluice & le mérite de ccll abfcnc :
mais ToD defir infaciable efgai à U faim d'un limier
qui caiife une LlerallUnce à qui ne Te faoiile [ousjours,
nepeui endurer celle atieote, ny celle de Sainte Vin-
cent, qui pour éviter la depenfc edoic allé jufques
k fa maifon. Elle s'en prit au triftc Aubiac comme
au mieux peigné de fes domefliques, qu'elle enleva
de l'Efcurie en la Chambre, & s'en fit tellement
picquer, que fon ventre heureun en telle rencontre
en devint rond & tnâé comme un ballon, vomiiïani
en Ton terme un petit garçon, avec le iecours d'une
l'âge femme que la mère de ce picqueur pour l'amour
de fon fiU y avoit conduiite, aflillee du Médecin du
May, lequel outre fa profellion, & de luy pcnfcr
quelque apoitume lur Ion derrière, luy fervit à ce
coup de porœr ce jeune Prince, nouveau Lyfander,
mal emmailloté en nourrice au village d'Efcoubiac
U auprez, fi. fratfchement né, que neanimoint pour
le froid enduré du long chemin il en demeura pour
touajourE privé de l'ouïe & de la parolle, & pour ces
imperfeâtons, abandonné de l'amour & du foin de
fa propre mère, qui ayant oublié let plaifirt de la
conception, a long temps permis qu'il ait gardé les
oifons en Gafcongne, où Mademoilelle d'Aubiac, fon
tyeule, l'a {tant qu'elle a vefcuj prefervé de mourir
de faim, & depuis elle, Gefilax île Firmaçon, fon
beau fili, qui monftre encore aujourd'buy par grande
rareté ce gage de la Couronne à ceux qui le vont
voir i Nerac, où il l'entretient moyenani deux cent
efcuz de penfîon que Goûte Raquette luy va depuis
quelque temps chercher ^'UlToa & à Paris,
PluTieurs de ceux qui fçauront fa fécondité s'ef-
merveiUeroni arec raifon qu'elle n'ait auflitot
retenu de moy que d'un autre, & ferontdivers juge-
LE DIVORCE SATTRIQUE. 669
Aens de mon impuiflance, au lieu d'attribuer ce
fecrec à celuy qui ne permet point que la maifon
paillarde profpere : je m'en fuis quelque fois esbahy
moy meûne, qui, Dieu mercy, ne fuis pas des plus
refroidis, & qu^il n'en deplaife à celle preude femme,
ay autant d'adultérins mal fèmez comme elle en
divers endroids : mais je n'ay fçeu onques deviner
la caufe de noftre compagnie fterile & infrudueufe,
ny pu l'attribuer aux raifons communes, bien que je
fçache qu'à regret elle a fouvent confenty à la force
àt mes defirs pour fe donner volontairement en
proye à mille, qui n'en euflent ofé prétendre ny
efperer aucune faveur, fi luxurieufement effrontée,
elle ne les eut, pour parler intelligiblement, mis def-
fus : entre lefquels on peut bien mettre Aubiac,
Ëfcuyer chetif, rouffeauft plus uvelé qu'une truitte,
dont le nez teint en cfcarlatte ne s'eftoit jamais pro-
mis au mirouër d'eftre un jour trouvé dans le li£t
avec ime fille de France, ainfi qu'il le fut à Cariât
par Madame de Marie, qui trop matineufe fit ce
beau rencontre, allant donner le bon jour fuivant fa
coufiume à la Royne, payant neantmoins ceft offi-
cieux debvoir avec la mort de fon mary, que cefte
vertueufe Princefle, entendue au boucon du païs
maternel, fit empoifonner, efperant, délivrée de ceft
obftacle & fortifiée des foldats que Romes, coufia
d'Aubtac, eftoit allé lever en Gafcogne, fe rendre
maiftrefTe abfoluë de la place, & en tirer ingrate-
ment ceux qui Tavoient libéralement receuë & mife
à couvert : mais l'exemple de Duras les avoit faiâ
fages, qui revenu d' Efpagne tout mutiné de trouver
fa Dame pourveuë & avoir ignominieufement efté
ietté par les efpaules, en danger de pis, fi Miflilac ne
fiic tout à propos arrivé au fecours, foubz preiexse
670 LE DIVORCE SATTRIgUB.
d'avilir prodigalement employé ce que celle nouvelle
Amazone avoit delUné pour me gueroyer, en guu
parfumez, chevaux d'Efpagne, & autres babioles
du piis d'où il venoii : û bien que la garde renfor-
cée, & fon fecourt gafcon defcouvcrc, on luy con-
fcilla familièrement de trouver autre gifte, & de
vuider promptemeni le logii. Ce qu'elle (peurcuTe
& apprelienfive) exécuta fur l'heure, pariant avec la
mcfme confufion & defarroy qu'elle y elloit venue,
& parvenani par fes journées à Ivoy, maifon de la
Iloync fa Mère, où it peine arrivée, elle fut du com-
manLlenicni du Roy par le Marquis de Canillac
alTiL'gcc & prife avec fon amani, lequel on trouva
vikincminicachéfoubz quelques ordures, fansbarbe
& fans poil; l'ayant fa HailtrefTe unfi deguifé de
fes cifcaux mefmes pour le fauvcr, & aprez que mille
LE DIVORCE SATYRIQUB. 6jl
d'excufes, lors meûnemenc quelles font conceuës
par un fale defir, guidé par reffronterie, entrete-
nues par la volupté, ainfi que ces deshonneftes plai-
firs, dont la diverfité vous eftonne, & le vice aug-
mente mon deshonneur, à la confufion de cède autre
Alcine, qui pleurante, & à peine hors des bras du
dernier amant, fonge & invente d'autres moyens de
prendre celuy qui Ta prife. J'ezcufe Canillac, quoy
que vilainement il trahit celuy qui fioit fa fœur fur
fa preudhomie, & je confeffe (moy de qui la fragilité
fe laiffe fouvent emporter aux femmes) qu'il eft très
difficile de parer aux yeux & à la voix qui confulte
noftre ruine. Ce Marquis tefmoigite mon dire & plus
né pour les affaires que pour Tamour, qui préférant
à la foy qu'il debvoit à fon Maiftre un chetif plaifir,
fe laiifa piper aux artifices de fa prifonniere, ou-
bliant fon debvoir, & quittant tout ce qu'il pouvoit
prétendre de fa fortune, pour fe rendre amoureux
de cette amoureufe, & tellement jaloux, qu'il en
facrifia le pauvre Aubiac au foupçon, luy faifant
faire fon procez par Lugoly, & puis pendre & eftran-
gler à Aigueperfe, tandis qu'au lieu de fe fouvenir
de fon ame & de fon falut, il baifoit un manchon de
veloux raz bleu, qui luy reftoit des bienfaiâs de fa
Dame. J'admire qu'en ce genre de mort fut accom-
plie une prophétie ; car plufieurs qui s'en fouvien-
nentencor fort bien, vous tefmoigneront que Aubiac
accompagnant le Commandant de Saind Luc, lors
qu'il vit cette Royne premièrement, did tout haut en
la regardant attentivement : t Je voudrais avoir cou-'
ché avec elle^ à peine d!eftre pendu quelque temps
après. * Il n'eft pas tousjours bon de deviner : ces
oracles ainfi exprez font à craindre, & m'eftonne
que ceux qui ont hérité depuis eux d'une fi precieufe
LE DIVORCE SATYRICiVE.
* rare fortune, n'en aycnt apprehcndf pûur le
moins autant : miis on void bien que les gibetz [ont
pour les malheureux, & non pas pour tous les cul-
pables. Caniilac pour ce criminel, fur qui il exerce»
piullojl fa jaloufie que ma vengeance, ne laifTa pas
de faire le» doux yeux, & de foigner fa petite taille
outre l'ordinaire, devenant en peu de tempe d'aullî
mal propre que je pourrois eftre, oinél & poli
comme un beau petit amoureux de village, mais de
quo/lui fervii ÏU longue fa bienfeanceî [L'hiftoire
cil plaifante des rufes & ariîGces defquels cette Reyne
s'advifa pour etloigner de ce Chafteau ledit Marquis
de Caniîlac, qui l'iraporrunoit fort, c'cft qu'elle luy
fatfoit croire qu'elle Vaymoit, qu'elle luy vouloii
&ire du bien, enfin elle luy donaoic fa maifon de
Paris, l'hoftel de Navarre, & une terre de valeur
de plus de deux mil livres de renie, fituee en fon
Duché de Valois, proche Senlis, & pour joindre
les effeâs aux paroles, elle luy fit expédier une
donation en bonne forme de ces deux pièces, & fiit
envoyée à Monfieur Hennequîn, Prefident en la Cour
de Parlement & un des chefs de fon Confeil, & en
mefme temps fit expédier une contre lettre audit
Sieur, luy mandant qu'il n'en fift rien & que tirant
l'affaire en longueur, il le tint tousjours en hal«ne
& efperance d'obtenir d'elle tout ce qu'il voudroit.
Il y a plus, continuant fes artifices elle feignit
d'aimer grattdemeni fa femme, & elle fe fit tin jour
apporter fes bagues, elle voulut qu'elle s'en par^
quelque temps dans le chafteau, mefme elle luy
ùdoit i s'en enjoliver ; puis luy difoit : t Ha qut cela
vous fed bien! ha qua vous efies belle, Madame la
Marquife! f Et le bon du jeu fut que fitoll que fon
mary eut le dos vMX'oé pour venir à Paris, elle la
LB DIVORCB SATYRIQUE. 67}
defpouillz de fes beaux joyaux, fe mocqua d'elle, la
renvois comme une peteufe avec tous fes gardes,
& fe rendu Dame & Maiftreiïe de la place. Le
Marquis fe trouva belle & fervic de rlfee au Roy de
Navarre, qui l'avoit commis au Roi fon frère,
& à coûte la Cour.] Cette inconflante, doni il
cuidoit retenir la légèreté foubz la clef &. foubz
rinexpug;nable forterefle d'UITon, fe fafche de fon
ordinaire & coullumiere façon de commander,
& d'approcher de fon râtelier ores l'un, ores
l'autre, & fouvent plufieurs à la fois, voulut de-
venir maiïlrefTe & chercher à l'acouflumé dazis
le change, la pointe & l'efguillon de fon appétit,
pour à quoy parvenir & fçachani par expérience *
combien peut le defir fur la volup[é, feint d'aymer,
de fe veoir aymee; & confentant à l'importuniié de
quelques prières, elle efmeut & allume fi bien fon
gardien, qu'enfin fes artificieufes careffes obtiennent
fa liberté, foubz promefTes que ce qui fembloit élire
feulement accordé pour lors chichement i la force,
feroit prodigalement départi par la volonté, lorfque
libre & maidrefie d'UfTon abfoluc, elle pourroit fans
apprehenfion vacquer à l'amour, le tromper en
cefte façon; car à peine euft elle obtenu que la gar-
nifon vuideroit, qu'elle remplaceroit des gens à fa
dévotion, & que fon facil Marquis cependant fe reti-
reroit à Sainâ Cirque cueillir fes pommes, qu'in-
grate de ce ferviteur, elle ne peut plus ouïr feul^
ment proférer fon nom ; & raifeuree d'une bonne
trouppe d'hommes qui luy fui envoyée d'Orléans,
qui faillirent toft aprez i la traifter en fille de bonne
maifon; ellefe refout de n'obeVr plus qu'à fes volon-
cez, & d'edablir dans ce roc l'Empire de fes délices,
ou clofe de trois enceintes & tous les grands portaux
mufcE, Dieu fç>ii & toune la France les beaux }eux
qui en vingt ans Te font jotiez & mis en ufage. La
Naiina de l'Aretia ny fa Saincle ne font rien auprex.
délivra/ qu'au lieu desgalands qui fouloienr adou-
cir fa vie paffee, elle y a efttî reduîcte, à faute de
mieux, à fes domeftiqucs, Secrétaires, Chantres
& Métis de NoblefTe, qu'à force de dons elle y atii-
roit, dont la race & les noms incogneuz à leurs voi-
11ns mefmea, font indignes de ma mémoire, horfrais
eeluy tant célébré de Pomîny, fils d'un chanderon-
nicT d'Auvergne, lequel tiré de l'Eglifc Cathédrale
de la ville, d'enfant de Chœur parvint, par le moien
d'une alfez belle voix qui le difcemoit d'avec fes
femblables, à la mufique de cefte Royne, s'introdui-
fani enfin de la Chapelle i la Chambre, ft de la
Chambre «u Gabion pour Secrétaire; où longue
ment il a tenu diverfes. partie*, & faid diverfet
depefchea : c'eft pour luy que fec folies fe fiHif fi
fbn augmentée*, qu'onenpouiToit fournir deapiftet
volumes : c'ell de luy qa'etle dit qu'U change de
corps, de voix, de vifage, & de poil, comme il luy
femble : & qu'il entre ï huis clos où il luy ptûft :
c'eft pour luy qu'elle fit iùire les lias de ces Dame*
d'IKTcHi, fi hauit qu'on y voyotc delTouz fana fe
courber, afin de ne g'efcorcher plu* comme elle foo-
loit les efpaules, ni te- fefiler, en t'y fourrant à
quatre pieds toutte nue pour le cercher : c'eâ pour
luy qu'on l'a veuë fouvent laflonner la ta[ufierie
prâfant l'y trouver, & celuy pour qui bien fou-
vent en le cerchant de trop d'afEeâion, elk a'dl
marquée le vifage contre le* portes & les parois :
c'eft pour luy que vous avex tant ouy chanter à
DOS bielles vtnx de Cour, ce* vers faiâs par ell»-
mefme :
LE DIVORCE SATTTRIQUB. 675
A ces hoisj ces pref^ Cf ces antres
Offrons les vaux^ us pleurs^ Us fons^
Idi plume j Us yeux^ Us chanfons
D^un Poéte^ à* un Amant^ d^un Chantres»
Et c'eft luy qu'elle nomme maintenant ce méchant
homme, qu'elle dift luy gafter tous fes ferviteurs,
& pour qui fon œil droid luy bat fans y faillir,
lorfque contre elle il braflê quelque malice. Qui
d'entre vous peut ignorer ces myfieres tant apper-
ceuz des moins clairvoyans,ny s'esbahir déformais de
nofbe divorce, ayant tant de juftes raifons de noftre
feparation? Je fuis un peu long temps en ce difcours
contre ma couftume, & cognois que je fafche peut-
eftre quelqu^un à qui la continuation de ma honte
eftoit agréable : mais le faid me touche, & faut que
pour un bon coup je me faoule aux defpens de
voftre patience & de mon loifir. Ce Manifefte qui
peut eftre vivra plufieurs ficelés, apprendra quelque
jour aux efprits amis de vérité, ce que j'ay voulu
taire tant par modeftie à noftre Saind Père, & au
Cardinal de Joyei^e Commiffaire par luy député
pour m'oiiyr fur les caufes de noftre répudiation;
n'ayant fur vingt & deux chefs en fon interrogatoire
refpondu chofe qui luy puiilè apponer deshonneur
ni blajfme, fi ce n'eft peut-eftre fur celuy qu'il s'en-
quift de moy, fi jamais durant le mariage nous avions
eu commimication enfemble : où je refpondis con«
trainâ par la vérité, que nous eftions tous deux
jeunes au jour de nos nopces, & l'un & l'autre fi
paillards, qu'il eftoit plus qu'impoflible de nous en
empefcher. La defcription particulière de fa vie ne
me dément point, je m'en rapporte à fes amis mefmes,
fi tant eft que fon vice luy en ayt encor laiflé quel-
qu'un, & me foubmetz à leur jugement, quoyque fort
furpcâ, fi i'adjoufle ou dinitiue au conte, aymaat
beaucoup mieux eo dire trop peu, que m' obliger à
déduire loue. Taut & fi diverfifiees font & ont edé
jufques iey fes affeftions, ou plutoft fes foibleiTes
(car ainTi faut il baptifer fes jaloufics & dernières
fureurs amoureufes) qui commencèrent à Bonivet
& qui ont lousjours continué depuis ; c'eft bien loin
de ce que fa bonne fortune luy promectoit, l'ayant
fait naillre d'un des plus grands & magnanimes Roys
de la terre, de la voir aujourd'liuy valeicr de la
forte, & tellement reduitte du trot au pas, que de
Royne elle foît venue Duchefle, &. de légitime
Efpoufe du Roy de France, amante paflionnee de
fes Viilciz. Partant on ne fçaurolt jiiftement s'olFen-
fer pour elle concre Madame de Guife, qui difcou-
rant une fois du ravalement de fa gloire, chanta
fon à propos une vielle chanfon de foa temps, dont
le refrein eftoit :
Margot MargutrilU ta haut,
Margot MoJ-gueritt m bat,
Margot Margutrutt.
Tellement on l'avoii déshonorée, & de grande
qu'elle fouloit eflre, d'un chacun merprifee & rangée
au petit pied, Dieu le caufant, dont irreltgieufe elle
commet fes falcs myfleres, ofant impudemment
depuis plufieurs années trois fois la fepmaine faire fa
Pafque dans une bouche aullï fardée que le cœur, la
face plailree & couverte de rouge, avec tuic grande
gorge defcouverte qui relTembloit mieux & plus
proprement à un cul, que non pas il un feio. J'ay
horreur de me fcandalifer, moy qui ne fuis pas des
plus entenduz du Royaume au fait de ma Reli^on,
de voir ainû prophancr celle lainâe reconciiiadon
LE DIVORCE SATYRIQUS. 677
avec fon Dieu, & de recevoir fi fouvenc le Sauveur
du monde en un corps û poilu de paillardes volupcez,
fi tant eft (car les contemplatifs en doubtent,) que
rhoftie que hypocritement elle feint recevoir , foit
confacree, ne pouvant quelques fois parmy la pitié
que j'en ay m'empefcher de rire des extravagantes
jaloufies, & fortes paffions qu'on raconte de fes
amours, qui la tranfportent plus fouvent à mefprifer
ce qu'elle void, & à croire ce qui ri'eft point, ores
cerchant furieufe & chaude fes rufiens en tous les
endroids les plus cachez dé fa maifon, bien qu'elle
ne puiflê ignorer qu'ils font autre part : & ores les
voyant & oyant, & toutes fois fe perfuadant que foubz
leur image ce foient d'autres qui tafchent à la déce-
voir, & à luy mefaire. Vous fçavez les particularités
mieux que moy qui n'en fçay que trop : mais peut
eflre vous ignorez que l'énorme laydeur^ & le
peu de mérite, & la qualité de ce Pominy, a fait
croire à plufieurs qu'il y ait eu du charme, quoy
qu'elle ait efté plufieurs fois charmée de mefme^
s'arrefiant fur ce qu'à UfTon on luy voyoit ordinai-
rement pendu au col entre la chemife & la chair,
une bourfe de foye bleue, en laquelle fes plus privez
avoient defcouvert une boette d'argent, dont la
fuperficie grande reprefentoit naïfvement (outre
plufieurs difierens & incogneuz caractères) d'un
codé fon portrait, & de l'autre fon chauderonnier,
qui l'avoit par un fi folennel ferment obligée à ne l'ou-
vrir de certain temps, ni à s'en defaifir, qu'elle con-
feifoit la larme à l'œil ne Tofer ny le pouvoir faire.
On m'a dit que le Roy fon père fut par Madame de
Valentinois enforcelé de mefme, & je n'ignore pas
qu'en niant la magie, on réfute en un mefme temps,
non feulement la propriété des herbes, des plantes, des
minéraux, des corps CGelelles,& des parollcs, mats auA|
U propre puilTancc de Dieu en la vertu des fubftancwf
feparccs. Que ce foil charme ou nos, à d'autres e0 '
fou II dirpuie, fi Taudra il i^uc l'on advouë qu'il
fe trouve pour cnforceler, des maiicrea bien aifees
& difporeeï, 8l une ame fort ïiliUlhce au corps, &
un corps fort fubjcâ a.u charnel plaifir : dont ICT
fréquent ufage l'a rcduiite 4 ne pouvoir plus oojjd
proférer, lans rougir ny penfer qu'où fe tnoct^iiH
d'elle, CCS mots (honneur & vertu) qui font eiuiem^l
& direâement oppofcz à fa profefllon. Il u'eA politf
de juge meilleur que la confcieace, elle nous efveille jn
noua poind ordinairement en la partie la plus dolente:
aulli celle Dame a beau avoir demeuré enfermée,
& n'aroir vcu que petites gens dans Uffon, elle a
elle pourtant trompecee partout le monde, & s'eft
rendue fubjette à ne pouvoir plus tolérer qu'on touiTe,
rie, ou parle bas en fa prefence, tant le bupçon & le
mesfy d'ellemefme lui faiâ appréhender le dlfcours
de fes actions. Je fuis maintenant i peu prez exempt de
fa honte, & délivré déformais dene m'en fouvenir, &
fuis alTez bon compagnon pourveu qu'elle en valut
la peine, pour luy en dire par humeur encor deux
mots auiC bien que les autres.
Jufquet icy fes fautes n'elloicnt que fleurs, quoy
qu'afli» mal couvertes ; l'a^e, le temps & fa volon-
taire prifon d'UlTon en faîfoii tolérer & cacher
quelques uns : fon habitude au mal avoit detjà laflé
les langues plus babillardes, & fa longue abfencc
avoit desjjt fait oublier fon nom parmy les Grands :
mais pour couronner fon œuvre, & donner la der-
nière main i ce beau difcours de fa vie, elle a voulu
venir revoir la France, & n'a pas voulu moins ctun-
fir que Paris & les yeiu de la Cour, pour f ervir de
LB DIVORCE SATYRIQUB. 6/9
théâtre & de cefmoin à fon hiftoire qu'elle promet*
d^efcrire cy aprez. Vous y voyez auiC clair que
moy : mais oyez en quelle façon un fourrier bien
inftruid luy marqua THoftel de rEvefque de Sens,
lors qu^aprez fon arrivée en cefte ville elle y alla
premièrement loger :
Comme Royne elle iehvoit ejlre
Dedans la Roy aile maifon;
Mais comme putain c'ejt raifon^
Qu^elle foit au logis d'un Preftre.
Je ne croy point que û on peut avoir quelque refTen-
timent d'honneur, qu'elle n'ayt d'eftranges eflance-
mens dans fon ame autant de fois qu'elle tourne fes
yeux vers le Louvre^ fe reprefentant qu'elle en a
perdu la demeure pour un f ubjed dont une plus chafte
qu'elle ne fe fçauroit fouvenir fans rougir. O infi-
gne impudence, & manifefte effronterie I à huis
ouverts, aux yeux de tous, & faifanc gloire de fon
infamie, exercer publiquement fa lubricité, & ayant
depuis fon enfance faiâ banqueroute à la renom-
mée, il ne luy chauc que l'on Feftime, pour veu qu'on
fatisfaife à fes ords defirs. Elle tint bon à Paris, &
au bois de Boulongne environ fix fepmaines : mais
ne fe pouvant plus pafler du mafle, plaignant le
temps, & ne voulant plus demeurer oifive, elle
envoya cercher un petit valet en Provence [qui
s'appeloit Dac & s'eft depuis hh connoifire fous
le nom de Saind Jullien] qu^avec ûx aulnes d'eftofie
elle avoit annobli dans Ulfon en Fabfence de
Pominy depuis quelques années dont l'eloigne-
ment luy caufoit tant d'impatience, qu'à fon arri-
vée pour luy faire payer le chaume, ils demeu-
roient fouvent enfemble enfermez dans un cabinet
&6 L« «»«'•&<■ 4À<rT&t«n.
des fept & huid jours avec les nuiAs entières fans
fe laifTer voirqu'à Madame de Chaftilion, qui cepen-
danc rongeoir fon frein à leur porte, & aydoit feule
ï tenir fecret ce que tout le monde fçavoii afTci.
Ceft amani eft ce Dat pour qui vous voyez encor
tant de palmes en fes tapilTeries; c'eft ce peiii chi-
chon tant reclamé en fc3 volupteï : cell ce fils d'un
charpentier d'Arles, jadis laquais de Garoier, l'un
des Malflrcs de ma Chapelle ; c'eft ce mignon que
le jeune Vermond luy tua deux mois aprez qu'il fut
arrivii à Paris [d'un coup de piftolei dans h lefte,
eftant à coftS d'elle, à la portière de fon carofTe,
proche l'Holle! de Sens où elle logeoit, entre midy
& une heure, au retour de la HefTe des Celeftitu,
pour avoir eflé caufe de la difgrace de fes Père &
Mère anciens ferviteurs de la Reyne, & qui avoient
efté nouris dés leur jcunelTe en fa mailbn, l'un
P^e & l'autre jeune Damoîfelle, cousjours aymee
de laditte Dame, qu'elle aroic mariez enfemblement
comme j'ay dit, cy deflus.
Ce jeune homme jura la perte de Sainâ Jullien
voyant qu'il «voit ruiné fa fortune en la perte de
fon Père : il elloit aflez mal monté, c'ell pourquoi
ayant eAé fuivy, il fut pris hors la porte Satnâ
Denis, ramené qu'U fut &. confronté au corp*,
• Toiimej /«, dit il, que je voyt s'îkejl mort; ha qut
jt fiùt content j put [qu'il efl mort! t'il m l'efioùj jt
Pacheveroit. ■ La Reyne outrée de colère protefta
qu'elle ne vouloii boire ny manger qu'elle iw l'eut
veu mourir, ce qui arriva deux jours après qu'il
eut la icfte tranchée devant l'Hoftel de Sens, repaif-
fant fes yeux dans le fang de ce Gentilhomme ^
de vingt deux ans; il mourut contant & confiant.
Defirantavoîr le colhaulicomme une picqtie, il fit
LE DIVORCE SATTRIQUE. 68 1
amende honorable & ne voulue jamais demander
pardon à la Reyne Margueritte & jecca la torche : il
eft à remarquer que auflicofl: qu'elle vit ce Gentil-
homme reprefentéau corps elle s'écria : t Qju^on le tue
ce mefchant; tenei^ tenei^ coda mes j arêtier es. qi^on
Veflrangle. • Le lendemain de l'exécution elle com-
manda qu'on luy trouvafl: logis au fauxbourg Saind
Germain, ce qui fut auflitoft exécuté, & par un ca-
price particulier, quoy qu'une Dame luy laiflaft fon
logis pour mil eicus de loyer elle lui en donna treize
cens efcus, &au meûne temps y fit abattre & badir.]
C'eft celuy, [le dit Dat] dont la perte luy fit changer
le quartier Sainft Anthoine avec Sainâ Germain, ce-
luy pour qui depuis elle a fait efcrire & chanter tant
devers^ & celuy pour qui Ton ne peut feicher ni ta-
rir fes larmes, quoy que le bien difant Beaujemont
en ait entrepris la cure, fecouru des plus fortes per-
fuafions que le Mayne fon ailiftant peut tirer dans
touttes les fleurs de bien dire. Que vous en femble?
ne debvoit-ellepas bien venir à Paris pour tefmoigner
ce bel amandement de vie paflee? & elle la plus
difforme femme de France, n'eftoit-ce point à elle
à faire venir des Moynes reformez? qui fera celuy
qui lira fes aâes héroïques (car ils ne manqueront pas
d'efcrivains,) } qui n'admire fon inclination au puta-
nifme, & qui n'approuve qu'ils méritent d'eftre
enregiftrez au bordel? ceux qui foubz cefte efpe-
rance de libéralité la louent en leur prefches, luy
adreflent des livres ou qui efcrivent à fa loiiange,
ont beau luy attribuer des qualitez qui ne luy font
pas deuës, car la véritable traditive, que malgré eux
les fiecles futurs conferveront de père en fils imme-
morialen\ent, faifant fort qu'ils font des menteurs
autant pleins d'avarice, & de flatterie, comme elle eft
excepté quelques uns, enrich
qui voyez les prifons pleines c
vric ? l'avez-vous jamiis veu ai
à Vefpre fans parler, & i la
Je crojr que pluûeurt luy pe
nuiaiesfbii prodiguer dû au
efi-ce qui luy a jamaii veu p:
debte^ Elle donne, je le fçt
pens, la difine de touttes fet
Convenu & Honafteres toui
aufli elle retient, dont j'ay gr
fei domelliques, & de ceux i
luy ont fourny leur denreei
forome tout fon faiâ n'ell qu'a[
fant aucune eâincelle de devo
cognois de longue main. Si
dirorce ne faiisfbnt i ceux
feparadon, ft qu'il n'y ait poii
prou de fubjeft pour l'abandoi
une autre fois à loifir les monfl
où vous n'aurez pas moins oc
vousefmerveiller.
Le fubjeâ m'emporte, & pli
LE DIVORCE SATYRIQUB. 68}
ceft efcha&uc. Ce Beaujemont, mecz nouveau de
cefie affamée, idole de fou temple, le veau d'or
de fes facrifices, & le plus parfaid fot qui foit
jamais arrivé dans la Cour, lequel introduit de la
main de Madame d'Anglufe, inftruiâ par Madame
Roland, civilifé par le Mayne, & nagueres guery
de deux poulains par Penna le Médecin, & depuis
foufflecé par Delain, maintenant en poflefllon de
cède pecunieufe fortune, fans laquelle la pauvreté
lui allait faffraner tout ainfi que la barbe le refte du
corps. Je n'ay que faire de vous conter leurs pri-
vautés, elles font prou cognuës, ny rechercher dans
la mémoire, pour vous particularifer leur amours,
aucuns termes de mignardifes & de douceurs : car
ce feroit tout autant comme d'appeller des gros
maftins de boucherie Marjolaine ou bien Romarin.
Je vous diray feulement en paiTant, [que de Loué
pour Finfolence & irrévérence commife dans le
chœur des Auguftins, ayant voulu tirer Tefpee contre
le Sieur de Beaujemont, il fut mis prifonnier au fort
TEvesque, elle fe rendit partie alléguant contre luy
plufieurs chofes criminelles, comme il lui fembloit,
ïefquelles les juges n'eurent point d'efgard : il
eftoit vivement follicité par Monfieur de Chaftillon
& autres Seigneurs de la Cour à l'adveu & du
confentement du Roy eflant recogneu pour un
brave garçon plein de courage & bon foldat. Je
vous diray en pafTant] que celle Dame ayant
depuis longtemps deux loups aux jambes, elle
a voulu que fon amant ait des caudiques aux bras,
afin qu'en leurs embraflemens, & lorfque goulue-
ment elle le recevoit à jambes ouvertes, il y puiffe
venir pareillement à bras ouverts ; & cecy foit did
comme feulement en paiTant & par parenthefe dudit
I.E DtVOIlCt ÎATTRIQUI,
BeaujemoDt atuodant de voir U 6d de leur tnfolence,
ft C ce cheval félon luy fera poiiu enfin comme
aux autres perdre l'arfoa. Pour die vous u'ignom
ce que je luy fuis, & la mémoire du pafTé m'oblige
i n'en dire point davuiïage, mait à luy foutuiier
quelque amaadement & à prier Dieu qui feul peut
loucher le cœur, de luy depanii quelque goucte de
rcpcnunce, fans laquelle l'eau de cire &. de chair
qu'elle alambicquc pour fon vifage, ne peut cacho-
l!ei impcrfeâiuns, l'huile de iaOemio dont elle (»aâ
chafque nuift fon corps, eropefcher la puante odeur
de fa réputation, ny l'herefipele qui fi fouvent luy
pele let membres, changer & dépouiller fa mauvaife
]
"^
APPENDICE
LETTRES DIVERSES
B. Bibl. Niiiouk, colIccliOD Cldninbâull, M) b> i iM.)
APPENDICE"
LETTRES DIVERSES
Hiilleiaii, ce ip* mari (ifii)].
ADAHB, fi celuy qui doit tout,
pouvoit offrir quelque chofe, je
chercheroU des nurques de re-
cognoilTance pour les prefenier
k Vollre MftjdU en temoigiuige
de mon refTendineat. Mais l'ad-
miradon de Tes bornez m'a/ant
impofé un refpeâueuz filence, }e penfe feulement
que les bienfoitz non preffei exigeni des fervicea
* Nou* doimont îd en appendice hnit lettre* direrlet
b un Memairt itt Ptntioai du Situr d'Aubigny. Cet
pièces, qui derraient fe tronver à la fin de notre Tome 1",
n'ont été tronvée* ^D'aprèg fa pnblicaiion par H. Uljflë Ro-
bert, jeune Tarant, attaché an dépulement des Hanafcril)
APPENDICE. 689
III
AU ROY
Février 1617,
Sire, je ne puis aflez reflentir ny Thonneur
extrême, ny Texez de bonté que Voftre Majellé a
daigné defployer en bien heurant de fes comman-
demans un vieux ferviteur opprimé d'accufations
continueles, foit de ceux qui pour vandre leurs pênes
cherchent des contrarians, ou de ceux qui mefurans
mes fervices envers un Roy qui a eu Tuzage de
ma vie avec les recompenfes & mes penfees au
leur, ne peuvent imaginer en moy le contentemant
que j'ay pris en moy mefme. Ce me feroit un grand
redoublement de bonheur, s* il plaifoit à Vollre
Majcfté oiiir de Monfieur de Villeite chofe que je
puis maintenir à toutes fortes de preuves, c*ell que
defpuis la paix de Loudun, je me fuis privé de
toutes compaignees & que ceux qui m'ont recherché
chez moy ne fe peuvent vanter que j*aye favorifé,
ny de parolle ny d'efFed, aulcun partifan, ne rel-
pirant que le fervice de V^oftre Majeilé & le repos
de ma dernière vieillefTe foubz fes bonnes grâces.
J'ay auffy prié le dit Sieur de protefter pour moy
coment je n*ay obligation ny à Prince ny à homme
vivant qui s'oppofe à celle de ma naiifance, qui eil
de monftrer par ma ferme [rcfolution] de vivre &
de mourir, que je feray jufques au dernier foufpir
de ma vie, Sire, de Voftre Âlajellé le très humble,
très obeiffant & très fidelle ferviteur & fubjed.
AUBIGNÉ.
II 44
i 690 APFKKDICE. J
IV
A M. PI rorratAKT&*nr
GMCMte * tKTMbt Mht.
* Miilleuj, te 1) loofl 1618.
Monfieur, je a'ay point voulu jurqucsicy importu-
ner vos plut graniA meilleurs ïlTaires des miens faf-
chcux, jufqucs àccque Monfieur de Rohan m'ait fait
Içavoir que vous ne reprouviés pas une ouverture
qu'il vous avoic faite fur nos propos. Je luy ay dit
avL-cq jmerrume de cirjr, qLi'iyani fervi Henry le
Grand avecq plus d'ardeur de péril &. de travail
qu'autre que je congnoiiïe, mais avecq moings de
foing de prelTer les recompances qu'il ne faloit,
j'en fuis demouré là qtic l'extrême violance de ma
jeunefTe ne peut faire eliimer qu'une autre aage
m'aye donné d'autres mœurs, joint qu'ellani obligé
de ferroens es mains de ceut qui les ont mefpriféa
& qui les avoieni exigés, je n'ay pas reglé'ma foy
à mes lutheurs : mais en la guardant je me fuis
angagé i un miferable parti bien que je le re-
congnuflë pour tel. Cet angagemenifut caufe que je
brigay à Loudun la claufe de l'Edîft par laquelle
il y a folution mutuele de tous fermans donnés &
receus, & de crainte que cela fufl oublié, j'en
envoyai de mon lia un billet i Monfieur de Ville-
roy. L'obfervation que j'ay randu à cet article a
paru aux derniers mouvemens aufqueU vous ne
doubtés point que je n'ayeefté folicité, ayant quelque
crédit & experiance parmi les armes, & encor vons
pouvés vous fouvenir que deflors j'eftois privé de
APPENDICE. 691
coures mes pétitions, criminel de mon apfance & des
avantages que les prefans ont pris fur moy par leurs
rapports. Toutesfois l'obeiffance que je dois au
Roy n^a point fanti ni les defpitz que plufieurs
prenent [de] telles chofes, ny les vaines efperances,
ny les folicitations des defefperés. Je n^alegue pas la
congnoiiTance de mon devoir pour reproche, mais
contre les mauvaifes defcripcions qu'on fait de
moy. Or, Monfieur, je fuis demeuré defchiré &
defpouillé : le premier m'eft infurportable , je y
aporte mes efcrips, foibles remèdes pour les apfans.
Je porte Tautre plus patiemment, ne pouvans rien
avoir que je puiiTe difputer contre mon Roy, à la
juftice duquel tout apartient & puis ces remar-
quables fervices qui m^avoient acquis des pantions
y a quarante cincq ans, ont eftés dévorez par le
temps, mefprifez & peult eftre hayz en cetuy cy.
Je ne fuis pas moings prefl de porter ma vie au
fervice de mon Roy que ceux qui vont croifTant en
biens & honneurs, & outre cela fi defireux de fa
bonne grâce que j^ay dit & efcript' à Monfieur de
Vignoles plufieurs fois ce que je vous adrefTe main-
tenant, non feulement comme à celuy en la famille
duquel j^ay congnoiiTance dés le berceau, mais
"'comme à perfonne publique & qui a en charge la
province où je fuis emploie. C'eft que je defire
patiemment la bonne grâce du Roy qui ne peut
eftre fans que Sa Majefté prene confiance de moy,
ne m'ofirant point à eftre ni fon ferviteur ni fon
fubjeft, pour ce que cela eft à Sa Majefté fans
mon ofire, mais je y ajoufteray un terme que le
maudit fiecle fait permettre fans raifon. C eft que
■ je voudrois mourir fon ferviteur partifan, ainfi que
j'ay dit à Monfieur de Vignoles & qu'il m'a promis
APPENDICE.
de vuusdire. Voila 11 première parric de marcquelle.
dcmindanc à me dunner moy mefme, fans l'ayde de
ceux qui traffiqucm de moy. Mais fi je ne puis
obtenir ce bonheur, je me condamne à l'oUradimc,
pourveu qu'avecq honneur & à ufcr mes jours,
relégué entre les plus fidèles ïoifms & ferviteurs
de la Couronne, avccq lettre de faveur & un efcu
de pantion, alîn d'eftre plus obligé & biencoll hay
& puni de ceux entre Icfquels j'abiteray, s'il m'ef-
chape parole ni effeft qui paffe le devoir envers
mon Prince. Si on me prant au mot cete propo-
fition, je demande la pcrmifTion pour me dcffaire de
'aparricnt dans qucltjties moys, félon qu'il
elir
: Moi
■ de Rohai
m'a mandé que vous aprouviés démettre raaraaifon
encre les mains du Roy, je vous fuplie de voir la
lettre de Monfieur de Vifçnolcs, pardonner la lon-
gueur de la mienne qui eft chofe bien ellougnee de
ma coullume & à laquele m'inAruit la neeelTiié,
eneor ozeray je vous demander refponce, laquele
je baiferay en la recepvant, principalement (i elle
m'aporte moyen de demourer tout entier util à mon
Roy & à vous Monfieur, voftre iris humble & très
fidèle ferviteiir,
AUBICK'É.
APPENDICE. 693
V
A M. DE PONTCHARTRAIN'
ConretUer & Secrétaire d'Efiat.
Du Donjon, le !$• Septembre 1618.
Monfieur, vous aurez rcceu il y a 10 jours par la
voye de Monfieur de VignoUes une lettre en laquelle
plus au long que ma couftume, j^ay traitté ce que je
pourrois refpondre maintenant à celle dont il a pieu
au Roy me favorizer par voz mains. Je n'ay pas
eftimé pouvoir recognoiftre un tel honneur plus à
propos qu'entre elle mefmes, n'ayant poind avec Sa
Majefté les favorables privautez que j'ay eues avec
Henry le Grand, lequel trioit d'entre les mains de
Monfieur de Villeroy, &parmy plufieurs defpefches,
mes petits billetz de trois lignes, pour fans mérite
les eftimer. Je vous fupplic donc, Monfieur, en fup-
pleant à ma crainte & à monrefpe£l, affurer de moy
Si pour moy ce que Sa Majefté me demande, puif-
qu'il luy plaift exiger le fien, & veut la promeffe de
ce que je doy. Il me feroit dur de jurer de nouveau
une fidellité qui ne fut jamais entrerompuë, & que
j'ay fignec de fang, de fucurs & de fervices par delà
mon pouvoir, mais telles rccognoiffances fe ft)nt
avec raifon par les mutations qu'on trouve aux
chofes &non aux perfonnes, & quand le deffaut qui
n'offenfe poinft noz amcs fe defcharge fur les acci-
dentz. Il y a trois ans que je travaille à rendre mes
vœux, mais n'ayant que la parolle des abfens qui eft
l'ufage des lettres, j'efprouve leur foibleflc & Tinfi-
delité de plufieurs mains : & quand à l'affaire qui
vous a efté propozé par M. de Soubzbize avec fes
I
694 APPBWDICK.
«Itppendances, voicy la féconde par laquelle je voiiî
affureray que fi je ne puis obtenir enciere confiance
neceïïairc à la boaae grâce de mon Roy, & que
parcanE îl ne luy pliife pas fe fcrvir de moy tout
entier, il n'y a partie qui ne fe trayne jufques aux
piedz de l'autel pour facridicr le tout à qui je doy
tout. Il refte, Monfieur, que vous fâchiez comment
la liefmolilion de ce lieu vaut bien une pezante del-
liberation, après l'avoir faifle recognoiftre par un
ingénieux fidelle & fufErani, car ce que 10,000 pjf-
loUes de defpence y ont apporté d'artifice pour eflrc
mis bas pour 10,000 efcuz, mais 50 fois autant n'en
peuvent dcilruire la nature, j'en ouvriray les moyens
à qui un m'ordonnera, s'iî faut campUirc aux paf-
fions de mes voifins. Si je fuis long, jugez combien
je retiens i dire Si en cela honnorez de voftre par-
don, Monfieur, voflre humble & crés-Sdelle ferrî-'
teur.
AvaiQut.
A M. DB SAINT-PtOUR
(Septembre lAiB.)
Monfieur, j'ay tenu les mémoires que vouz m'avez
demandez tous prellz pour voflre lacquais avec une
lettre à Monfieur de Pontchartrain, refponfive i
celle du Roy, en laquelle après avoir diH les mûni
par qui j'ay receu & par Icfquelles je refpondz,
j'adjouflemot pour moi ce qui s'en fuit : ■ Je vous
fupplie donc, Monfieur, en fuppleant k ma cralnAe
APPÏNDICX. 695
& à mon refped, aflurer de moy & pour moy, ce que
Sa Majeflé me demande, puifqu'il luy plaiil exiger
le ficn & veut la promeffe de ce que je doy. Il me
feroit dur de jurer de nouveau une fidellité, qui ne
fut jamais entrerompuë, & que j'ay fignee de fang,
de fueurs & de fervices par delà mon pouvoir, mais
telles recognoifTances fe font avec raifon par les muta-
tions qu'on trouve aux chofes & non aux perfonnes,
& quand le deffaut qui n'offenfe poind noz âmes fe
defcharge fur les accidentz. Il y a trois ans que je
travaille à rendre mes vœux, mais n'ayant que la
parolle des abfens qui eft Tufage des lettres, j'ef-
prouve leur foibleffe & Tinfidellité de plufieurs
mains. >
Voila tout ce qu'U y a pour cet affaire, pour
lequel il n'y a rie;j dans les bornes du fervice de
Dieu que je ne face avec gayeté de cœur & paflion,
& fy vous pouvez exécuter ce que vous m'avez pro-
mis par paroUes & par lettres, outre ce que je le
recognoytray en effed, ce me fera une véritable
occafion de demeurer, Monfieur, voftre bien humble
ferviteur.
AUBIGNÉ.
VII
AU ROY
Du Dognon, ce 6 Novembre 1618.
Sire, defpuis Tenvoy duquel la Province de Poi-
tou m'honora vers Voftre Majefté, plufieurs acci-
dentz, & fur tous mon aage m* ayant defnié le bon-
I
beur de voir U face àe6txh\e Ae mon Roy, )'iy
«erdié (ptf l'cntrcinize de met amU) tous mo>'eai
i'zchever le rcfle de mes jours avecq ceft avan-
tage. (]u' ayant eu pour feul roaiflre & à bonnes
tiurquei le Grand Henry, je ne fuflê neceiTité de
fervir foubi Vollre Majeïlé avecque elle mefme, mais
uant cfprouvd combien Joubieules & peu titilles
font Ict Icttrct (foiblcst paroUet des abfens) fur les dcui
qu'il a ptcu à Vollre Majelté m'cfcrire d'affaires
particuliers, qutry que ma peticefTe eut à fe con-
tenter de ï'adrcflcr en chofe» ordinaires aus Officieri
de TEftat, j'ay par l'avis de Monficur de Moncolon
pris la hardieire de confier à H. de Vilette, lèrvî-
teur très fidclc de Voftrc AUjelU-. & m. in proche,
ce qui me louche & plm le fcrvire de \"nftre
Majefté, .comme auIH afin qu'emploiant la partie
que Dieu m'a lailTee à la gloire du plus grand Roy
qui ayt ceint efpce defpuis huift cens ans, mes
envieus ne puifflent m'oller l'accès à l'oint de Dieu.
Je prie jour & nuîft pour voftre perfonne & Eftat,
comme doibi. Sire, ie très humble, très fidèle & très
obeifTanc ferviteur & fubjefl de Vollre Majefté.
AOBIGNÉ.
Vin
[sans SUSCRIPTION.]
Monfieur, s'il y a quelques termes obfcurs en ma
lettre pour vous fupplier de donner cela aux cir-
confpeftions que demande un traifté avec fon Roy,
celte révérence réduit mon (lille entre de« barrières
APPENDICE.
(^97
eilroices ; c'eft ce qui m'a fait appeler circonftances
les claufes qui avec un efgal feroienc conditions. 'Je
ne fuis pas fi mal né que je n'aye parfaire créance à
un Roy & mefmes en celuy qui dés fon aage cendre
a donné des marques notables d'avoir fa parole en
recommandation, mais la foy d'un fi grand Prince
s'employe en chofes dignes de fon eflevation. Nous
ne fommes arredés que fur un fait de finance
& encore fur un préalable. Je vous prye, Monfieur,
ne trouver point mauvais que la feureté panche du
cofté du foible, & d'ailleurs mes afiaires ne peuvent
fupponer mon deflogement qu'en defmeublant &
après avoir figné le contrad, je ne toufche une
fomme moindre, Dieu mercy, que mon bien, que
ma foy & la foy de mes amys; fi c'eft chofe que
vous reprouviez, je lairray ces affaires fans plus
vous en importuner. J'acheveray mon propos ainfy,
que fi voftrc prudence ordonne Tachevement des
chofes commencées, je parferay avec candeur ce qui
fera de ma promefle, fi je demeure en Teftat prefent ;
tant plus auray je d'occafions & de moyens de
rendre au Roy très fidèles fervices & à vous,
Monfieur, les preuves certaines que je fuis voftre
humble & plus fidèle ferviteur.
AUBIGNÉ.
MÉMOIRE DES PENTIONS
DU SIHUR d'aUBIGNY.
[1618.J
Mes pentions ont efté de 4,000 livres fur Tordi-
6çi AfPEtfDICK.
nairc & de 3,000 fur I« pecic eftai. Je ne puis
■ccfibuer la perte de ces i,<X)0 cfciu qu'à la haine
de Melfieiirs de Bouillon & de ScuUy, c'eft pour-
quoy telle chofe eft purcrociu de la bonne grâce
du Roy. Quand aux autres 4,000 livres, il y a
44 ans que j'en ay eu le commencement, le refte
ordonné à diverfes fois; (om cela me fut dilconiinué
en 1615. Or n'oferois je en demander le payement
jufques à la paix de Loudun. eneor que les armes
que nous portions ayenc elle juftiffiees par ce qui
«'eft paffS depuis. Par ainlî ayant tenu ferme pour
le Roy, fans me laifler emporter aux mouvemencz
de folicitations qui fe fireni à la prife du Pont de
Ce, i'eftime cllre bien Icani à la home du Roy de
me donner comme de nouveau cy après telle pention
qu'il luy plaira.
Et pource que par deux diverfes voyes Sa Majellé
m'a faiA promettre le reftabliffement 8c, arreraiges
des penfions à moy oftees, il feroit jufte de me les
reltablir des 3 cartiers de 16, de 17 tout entier, de
ce qui eft de l'année courante.
El quand au mauvais traiitemeai que nous avons
receu par l'extraordinaire des guerres & pour l'en-
tretien de nos garnizons, lefquelles il m'a fallu
tenir par delà mon pouvoir & mon dezir pour la
pezante haine de M. d'Efpernon, il fufiira un
eommandemcni & lettre défaveur de Monfieur Janin
pour me faire rendre juftice en cette partie.
TABLE DES MATIÈRES
COKTBKUBS DANS CB VOLCME.
TRAITTÈ SUR LES GUERRES CIVILES.
Ch.phrîj Pig
^^^^^BBJI
700 TAaLI Dit MATil&ES. |
LKCAODCEe 00 L'àUGE DE r»IX.
■ ■■
MCDITATIONI fUK LES FtEACMES.
rfe»ooir «.
Me'liUluiD far le Pfeaiime 8* r)7
Oaafion i arguaunl de 11 HedJMtioa faide for le
Pfeiome 7j m
Méditation far te Pfeaaaie t) 15)
Ottafien 4 argumtitt de U Hediutioa faide for le
preiame ]i 174
Meditition Tar le Pfeinrne tr 17a
Oeeafian 4 arpimtat de U Hediiition biâe far le
Ffeiame SB 190
Hedilation far le Pfeaame S8 191
Oecafion 4 arguininl de la Méditation faiâe far le
Pfeaame tù SO4
Méditation for le Pfeaame 16 loj
L'HEacDii CHiOTiia »a
CONFESSION CATHOLIQUE DU SIEUR
DE SANCY.
l.i*rt premier.
Cbipllrci
A Moniteur le Reverendiffime Evefque
dEvreai. . . ajî
I De l'aothorité de l'Eglife t de fon chef «j^
TABLB DBS MATIBRBS. 701
Chapitres Pages
II. Des traditions 244
III. De l'interceffion des Sainds fr Sainâes .... 253
IV. Du Purgatoire 2$6
V. De la J unification des œuvres fr œurres de
fupererogation a6i
VI. Des Miracles fr Vojages 270
VII. Des Reliques fr Dévotions du feu Roj .... 278
VIII. Des vœux 288
IX. De diverfes manières de pefcher les hommes. 298
X. De la Tranfnbftantiation joa
Livre fécond,
I. Dialogue de Mathurine t du jeune du Perron. )07
II. De la reunion des religions J19
III. Des caufes qui me pouflerent à ma féconde
reformation, qui fut la troifiefme converfion. 326
IV. Apologétique pour ma longue demeure entre
les hérétiques j)o
V. Des miferes des Huguenots 335
VI. Examen de quelques livres de ce temps. ... 340
VII. De l'impudence des Huguenots 348
VIII. Des Martyrs à la Romaine 3$5
IX. Corollaire 366
LES AVANTURES DU BARON DE FiENESTE.
L'Imprimeur au leâeur 377
iAvre premier.
Préface $79
Argument 381
I. Rencontre d'Enaj t de Fsnefte qui couche
d'entrée de dix ou douze querelles 383
II. Moyens de pareftre, detfenfe des bottes, des
rofes, pennaches, t perruques 387
I
yOi TABLE DBS MATlbAfiS.
[II, Arriïee de F«iielle s ]& Cour isj
IV. Rencontre àa roufTeaa, l'iccidenl de> fagoTs,
b l'ambition de Ftenede ]P7
V. Dircouri fur U DUifon d'En>j, « de la chiSe . ^aa
VI. Des Vadepied ^oj
VU. Des quatre gucrrei de FenelLc 40(
VIII. Amours de Fciieae, querelle du CarrcilSer. . . 407
IX. Des braves, des r'affinei fi dueU «09
X. Enlree de lible, altaque de lleligiiiii 41}
Du Baron de Fajolle, b du Dognon ^ij
XII. Enirepnres de Dd Lignaut t<7
. Xltl. De U Cour 4S0
LivTt fécond.
t. Des grâces latines II de leur conûrnâioa. . . ««}
II. Haiiliere. L'Eglife inviCble, des reliques b
bonne intention 417
III. La gagenrede Caniû, la qaelUon do bdplefme
agitée à Rome 4)o
IV. Le baron Harelais, le Morne c autres jeux . 4]]
V. De Marthe la démoniaque, b autres miracles, «j^
VI. Miracles de la Rochelle, de Sainâe Leurine,
, du fainâ homme de Billoiiet, b de la Mer
Rouge 4)p
VII. Divers jeuK , . 44a
VIII. Difpute da Ljmbe 444
IX. Théologie de Clochard b de Mathe 447
X. Amours du Baron t enchaatemeiu 449
XI. Antres amours 4Sj
XII. Hilloire de Cajer 4]f
Xltl. Du Marercba) de Fervacques II des clercs du
Palais 4lB
XIV. Conte de Matthé, des quatre Curez 4^1
XV, Théologie de Surgeres, querelle dn Baron . . 464
TABLB DES MATIERBS. 703
Chapitres Pages
XVI. Combat de Corbineau 4^6
XVII. Enchantemens à la Coor fur les amours du
Baron 4^
XVIII. Avanture fur Brilbaut fr fur le mot : Où eft
l'honneur? 47j
XIX. Sur l'Eftre & Pareftre, le coucher du Baron. . 477
Livre troifiefnte,
I. La vie de Fsnefte à Paris 481
II. Vie de la Dame de la Cofte ft des Bohémiens. 484
III. Du Théologal de Maillezais 486
IV. De l'Advocat Chefne-verd, fr de la vente du
Cimetière 490
V. De la Roche-Boifleau k des Sergents 493
VI. Miracle du loup, ft de Tnitre, du piftolet
avallé 495
VII. La proceffion de Beaumier 497
VIII. Le quadran des Oufches; du cours du Soleil. 500
IX. Songe du Conneftable, AdiouHas d'E/h'ade. . $oa
X. Des Refolutions 504
XI. Querelle avec le Sçabantas, duel de Valleri . 506
XII. Du Miniftre de Glenaj 509
XIII. Hiftoire de Pautrot, ft de la Dame de Noaillé. 511
XIV. De Bourron, aenigme de Filafle 515
XV. Explication de l'énigme 519
XVI. De Sourdy fr fa femme, du Prince joiieur, de
Chenevieres, du Preftre de Bougouin, du
Mojne de Maillezais 596
XVII. Du Comte de Lormc ... 529
XVIII. Quelque fuitte de TOrme $j)
XIX. Du Comte de Manie $j6
XX. De Cojons de mille livres, des efpions • . . 540
XXI. Quelques quatrains ft commencement de l'his-
toire de Calopfe $44
XXII. Commencement des opinions du Confeil k la
refolution $47
SUT. HttokMdsBidBt *^lltolMki. -;.... si«
L C<MWBUliMr<>ntr fthSinrdelanijea
9iL'a«TWi^(ap«.«i'ftBuifaat Ac, Ac' . . ji«
III. D«.{écoad.4aIUraàkTalMliM ...... j»
IT. ExemcB de ~F»nete, b qa«l4|iie diofe dn
vojage d'Itïlie 570
V. Suite des gloirei jt)
VI. De la guerre dn Prince: familimté du Roi
ft de F^nelte; Chilu>, tillrei ; Regianle
Jefa; l'antiquité de Langin ........ 178
VU. Nobtcift de Fcnelle, b en Tuiite dircoun de
Renardière jS)
VIII. InretKïon du curé d'Efchitais: différence des
Sermons {88
IX. Sermon du Père Ange jg*
X. Soitte des inrenlioni percnifes aai Pref-
chenn tpS
XI. Aâiont eUrai^e» de gens d'EgUfe tfot
XII. De« Noanains 609
XIII. Groiefque de la Terne «1}
XIV. Titres de l'ancienneté de FKoelle en Grec:
Hiniftre ViSui, Diable qui n'appelle point
à ta chambre, te caillou blanc, li l'oje
blanche diS
XV. La bataille de Sainâ-Pierre Sa*
XVI. Les triomphes «li
XVII. THomphe de l'Impiété tfjt
XVIII. Triomphe de l'Ignorance. ■ '18
TABLE DBS MATIERES. 705
dwpitres P*ges
XIX. Triomphe de la Poltronnerie d^a
XX. De la Gueuferie 645
LE DIVORCE SATTRIQUE
Le DÎYorce fatyriqne on les Amoars de la Rejne
Marguerite tfS3
Appendice.
LETTRES DIVERSES.
I. A la Reyne. Maillexaiz, ce 19* mars [itfij]. • • . 687
II. A M. de Pontchartrain, Confeiller t. Secrétaire
d'Eftat. De Maillezaiz, ce 17 juillet [1614]. . 686
III. Au Roj. Février 1617 (S^
IV. A M. de Pontchartrain, Confeiler t. Secrétaire
d'Eftat. Maillezaj, ce aj aooft itfiB 690
V. A M de Pontchartrain, Confeiller t. Secrétaire
d'Eilat. Du Donjon, le 1$* feptembre 1618. . 693
VI. A M. de Saint-Flour [feptembre itfi8] ^ . . . 694
VII. Au Roj. Du Dognon, ce 6 novembre 1618. . . 695
VIII. [Sans fufcription] • 696
Mémoire àts pentions du Sieur d'Anbignj [itfi8] 697
IL
45
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KB PKBMIBR NOVEMBRE MIL HUIT CBIIT SOIXAHTB-DIX-SBPT
PAR A. QUANTIN
ANCimMB MAISON J. ClATI
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